CHAPITRE II - LES DOSSIERS PRIORITAIRES DU MINISTÈRE
I. MAITRISER L'URBANISME COMMERCIAL
A. BILAN DE LA MISE EN PLACE DES NOUVELLES INSTANCES DANS LE DOMAINE DE L'URBANISME COMMERCIAL
Rappelons que la loi du 3 janvier 1993, dite loi Sapin, a substitué aux commissions départementales d'urbanisme commercial (CDUC), des commissions départementales d'équipement commercial (CDEC), dont la composition est différente (4 élus pour 3 représentants des professionnels et des consommateurs). Elle a, par ailleurs, supprimé la procédure d'appel auprès du ministre chargé du commerce et institué la commission nationale d'équipement commercial (CNEC).
Elle a également eu pour mérite de mettre en place les observatoires départementaux d'équipement commercial, dont les travaux doivent être pris en compte par les CDEC pour l'examen des demandes d'autorisation.
Force est cependant de constater que le bilan de cette réforme est décevant et que les élus s'accordent en général pour autoriser les projets souhaités par leurs pairs, en attendant un « renvoi d'ascenseur ».
Autre novation, a priori positive : l'étude d'impact, dorénavant exigée des demandeurs d'autorisation depuis le décret du 16 novembre 1993, et destinée à aider les membres des commissions à apprécier l'impact économique et social des projets, ainsi que leurs conséquences sur l'appareil commercial existant. Ce renforcement des conditions de dépôt des demandes a sans doute freiné quelques velléités.
Mais, au total, à l'issue de la pause décrétée par le Premier ministre, le 25 avril 1993, le rythme des autorisations est reparti sur une base accélérée et inquiétante.
C'est ainsi que les commissions départementales ont autorisé la création de 1.400.000 m 2 de surfaces commerciales en 1994.
Le bilan définitif des autorisations, après recours auprès de la Commission nationale et compte tenu des surfaces transférées, s'établit donc à 969.834 m 2 , celui des refus à 1.214.589 m 2 .
L'analyse des autorisations par nature d'établissement après recours confirme la baisse de la part des hypermarchés et des galeries marchandes observée depuis quelques années, au bénéfice des magasins spécialisés, en particulier des magasins de bricolage-jardinage.
Le taux de surfaces globalement autorisées par rapport aux surfaces demandées connaît en 1994 une certaine augmentation, le taux ainsi constaté étant comparable à celui de 1990 : 48 % contre 42 % en 1993.
Au cours du premier semestre 1995, les CDEC ont autorisé la création de 600.000 m 2 .
Le bilan des trente dernières années montre que, en dépit d'une politique qui s'est voulue malthusienne, la grande distribution a affirmé sa prééminence en France.
B. L'ÉTAT DES LIEUX : LA PRÉÉMINENCE DE LA GRANDE DISTRIBUTION
Le développement de la grande distribution depuis les années 60, fait de la France un des pays où celle-ci est la plus concentrée, ceci quel que soit le critère retenu, comme le montre le rapport Villain 1 ( * ) sur les relations entre l'industrie et la grande distribution.
• En termes de chiffre
d'affaires
Les grandes enseignes françaises représentent une puissance d'achat considérable. Ainsi, une étude 2 ( * ) sur les chiffres d'affaires réalisés par les sociétés de distribution européennes montre que cinq sociétés françaises figurent parmi les quinze premières (aux 4e, 5e, 6e, 8e et 10e rang).
•
En termes de parts de
marché
Les dix premières entreprises françaises de distribution occupent 73 % des parts de marché dans le secteur des biens de consommation à rotation rapide. Et elles occupent une place croissante sur le marché des produits non-alimentaires (jouet, gros électroménager, arts de la table, habillement).
•
En termes de concentration
géographique
La France est un des pays européens où la densité en magasins par habitant est la moins forte : 97 pour 10.000 habitants. Dans un pays où la densité de la population au kilomètre carré est assez faible, ceci a pour corollaire une forte concentration géographique de la distribution.
Ainsi, en 1991, la France occupait la première place en nombre d'hypermarchés et de supermarchés par rapport à la population.
•
En termes de chiffre d'affaires
réalisé par les hypermarchés
Mais ce n'est pas par sa puissance financière ou par sa puissance d'achat que la France se distingue de ses partenaires européens. Ce qui fait la spécificité française, c'est la place primordiale prise par l'hypermarché polyvalent.
Après le Royaume-Uni, la France apparaît, en effet, comme détenant un record de la part de marchés la plus élevée réalisée par le plus petit nombre de magasins. Ainsi, 20 % des magasins les plus importants réalisent 49 % du chiffre d'affaires total du commerce de détail ; 10 % d'entre eux accaparent 80 % du marché.
C. VERS UNE NOUVELLE RÉFORME EN MATIÈRE D'URBANISME COMMERCIAL
1. La création de l'Observatoire national d'équipement commercial
Mis en place en octobre dernier, l'Observatoire national d'équipement commercial (ONEC) aura pour principales missions de :
- définir les études d'impact avant toute décision (en évaluant les créations mais aussi les destructions d'emplois) ;
- aider à la conception des schémas départementaux d'urbanisme commercial auprès des observatoires départementaux ;
- proposer une synthèse des travaux départementaux, de manière à donner une définition de l'évolution constatée et de l'évolution souhaitée des infrastructures commerciales du pays ;
- proposer, dans un rapport annuel, toute réforme qu'il juge utile à la lumière du constat de l'évolution de l'appareil commercial qu'il aura dressé ;
- établir un bilan annuel, cadre de référence pour l'action de tous les responsables de l'évolution de l'urbanisme commercial.
Institution indépendante et consultative, l'ONEC pourra donc éclairer à la fois le Gouvernement et les commissions nationale et départementales -qui garderont bien entendu la souveraineté sur leurs décisions- et être une force de proposition pour le Gouvernement, notamment pour ce qui concerne les études d'impact.
2. Le programme d'intérêt national pour la maîtrise des surfaces commerciales
• Le Gouvernement souhaite que
désormais la politique commerciale ne soit plus simplement
examinée sous l'angle de la politique des prix, mais qu'elle prenne en
compte les priorités essentielles de l'action publique : la
création nette d'emploi
(créations-destructions), le
rééquilibrage des conditions de la concurrence,
l'amélioration de la
balance commerciale,
la
répartition équilibrée des activités
et la préservation de la qualité de
l'environnement.
Dans cette perspective, le ministre avait récemment considéré que deux options étaient ouvertes : l'une qui consisterait à établir une charte d'orientation qui guiderait les décideurs de l'urbanisme commercial (CDEC et CNEC) en exposant ce que le Gouvernement attend de la distribution. L'autre option, plus exigeante, serait de se doter d'un nouveau dispositif législatif qui réformerait la loi Royer, avec par exemple la baisse des seuils et l'élargissement des études d'impact.
C'est la première option qui semble se dessiner aujourd'hui, pour faire face au problème de la relative saturation du territoire national en grandes surfaces commerciales.
Elle consisterait à conclure un « accord » avec les professionnels pour geler les créations de grandes surfaces pendant trois ans, la discussion restant ouverte pour l'extension ou de la modernisation des grandes surfaces existantes.
Il faut savoir qu'en 1994, seules 4 autorisations d'implantations ont été accordées, l'essentiel des décisions portant sur les extensions de magasins existants.
Votre commission estime qu'un tel accord serait équilibré. Il donnerait le temps de tirer les conclusions des travaux des observatoires (national et départementaux), sans paralyser tout à fait un secteur qui a naturellement besoin d'un certain dynamisme.
• Par ailleurs, le
Gouvernement vient
d'annoncer,
dans le cadre du plan en faveur des PME,
l'abaissement à 300 m
2
du seuil au-delà duquel
une implantation doit être autorisée, ainsi que l'obligation de
soumettre à enquête publique préalable les nouvelles
implantations commerciales de plus de 6.000 m
2
. Votre commission
s'en félicite.
• Votre rapporteur pour avis juge
également souhaitable une modification de la composition des commissions
départementales d'équipement commercial,
aujourd'hui
dominée par les élus, au détriment des professionnels.
Cette composition est, en effet, partiellement responsable des dysfonctionnements constatés.
•
Il souhaite que les CDEC s'appuyent
davantage sur les travaux des observatoires départementaux et
consultent,
par ailleurs,
les commissions des
départements limitrophes
sur les projets en limite de
département.
•
Votre commission souhaite, par ailleurs,
que soit révisé le dispositif de péréquation de la
taxe professionnelle.
Rappelons que la loi n° 90-1260 du 31 décembre 1990 d'actualisation de dispositions relatives à l'exercice des professions commerciales et artisanales, a créé des fonds départementaux d'adaptation de commerce rural ayant pour vocation de corriger des déséquilibres causés par les implantations de grandes surfaces en milieu rural. Ceux-ci devaient constituer un dispositif d'appoint au F1SAC. Cette loi a ainsi instauré une répartition intercommunale de la taxe professionnelle perçue sur les grandes surfaces autorisées à se créer ou à s'agrandir, à raison de 20 % pour la commune d'implantation, 68 % pour les communes avoisinantes (y compris la commune d'implantation), au prorata de la population, et 12 % pour l'adaptation du commerce en milieu rural. Cette dernière fraction de la taxe professionnelle est collectée dans un fonds régional, puis répartie entre des fonds départementaux d'adaptation du commerce rural, en raison inverse du potentiel fiscal par kilomètre carré. Mais les modalités de calcul de la taxe professionnelle sont telles que les sommes recueillies par le biais de ce dispositif sont trop modestes pour permettre des interventions. |
Tirant les conséquences de l'inefficacité totale de ce dispositif, votre commission propose que la péréquation soit beaucoup plus importante, au bénéfice des communes de la zone de marchandise des grandes surfaces concernées.
Seule une péréquation très forte de la taxe professionnelle permettra, en effet, de lutter contre les dysfonctionnements de la loi Royer.
II. VERS UNE RÉFORME DU DROIT DE LA CONCURRENCE
A. LE PROBLÈME DES RELATIONS ENTRE DISTRIBUTEURS ET PRODUCTEURS
Dans le contexte décrit précédemment, des pratiques commerciales abusives se sont développées, qui sont aujourd'hui largement dénoncées. C'est ainsi que les producteurs se plaignent du « diktat » imposé par la grande distribution lors des négociations commerciales.
Les acheteurs utilisent de nombreuses tactiques de pression et de déstabilisation pour obtenir de meilleurs prix d'achat que leurs concurrents : convocations, attitude cassante, retards systématiques dans les rendez-vous, etc..
Si de tels comportements commencent à être également observés -quoique à un niveau moindre- dans d'autres pays européens, en Allemagne notamment, un autre grief s'adresse spécifiquement à la grande distribution française : il s agit de l'accusation de non-respect par la grande distribution de la parole donnée ou du contrat conclu.
Il se décline sous différentes formes :
- la remise en cause permanente des accords annuels, dans le but d'obtenir de nouveaux avantages (en matière de prix, de promotions, de coopération commerciale, de prise en charge de coûts de distribution, de système de paiement, etc..) ;
- la non réalisation de certains engagements pris (têtes de gondoles payées par le fournisseur mais non mises en place ou abrégées par le distributeur, promotions non effectuées...) ;
- le non respect des conditions de paiement agréées, soit sans motif, soit pour des motifs futiles : pour une erreur sur une ligne, toute la facture reste impayée : ou bien la moindre contestation sur une livraison, retard, erreur partielle sur la marchandise, sert de prétexte à ne pas payer l'ensemble de la facture ;
- le décalage entre un accord enregistré au niveau de la centrale d'achat d'une grande enseigne et sa non application au niveau du supermarché ou de l'hypermarché.
D'une façon générale, les distributeurs français sont accusés de saisir toutes ces opportunités pour transférer aux producteurs une partie des coûts de distribution.
Comme le souligne le rapport Villain précité, sur les relations entre l'industrie et la grande distribution : « Les contrats dits de coopération commerciale ne sont que des prétextes pour soutirer, sous forme financière, des avantages complémentaires. Ce sont, tout au plus, des contrats d'adhésion auxquels le producteur doit souscrire s'il veut éviter le déréférencement ».
Car le déréférencement est la menace suprême brandie par le distributeur, l'épée de Damoclès suspendue en permanence sur la tête du fournisseur.
Très rare en Grande-Bretagne, fréquent en Allemagne mais seulement sur les petites marques, le chantage au déréférencement est, en France, permanent même sur les grandes marques.
Le conflit entre producteurs et distributeurs tient aussi largement au non respect, par ces derniers, des prix conseillés par les premiers, qui craignent que les surenchères en matière de prix et de promotions ne finissent par dégrader l'image de marque de leur produit.
Enfin, ce climat est entretenu par les tentatives permanentes de la distribution de contourner la réglementation en vigueur, en matière de facturation ou de revente à perte notamment.
C'est ainsi que l'on comptait 800 marques vendues à perte en France en 1994, contre 100 marques en 1985, pratique qui n'est que ponctuelle chez nos voisins du Nord de l'Europe.
Les raisons de cette spécificité française sont multiples. Elles tiennent à des considérations d'ordre historique, géographique, mais aussi commercial. En effet, les entreprises de grande distribution se sont imposées face aux formes traditionnelles de commerce et ont inversé le rapport de force avec les producteurs en faisant jouer quasi-exclusivement la concurrence sur les prix. Ils ont mené une stratégie de conquête du marché plus que de profit unitaire. Cette politique de prix bas s'accompagne des taux de marge brute parmi les plus bas parmi les grands pays européens 1 ( * ) (15,24 % en France, contre 30 % en Allemagne ou 26,3 % au Royaume Uni) et d'un résultat d'exploitation faible (1.155 F au m 2 ).
Avantageuse pour le consommateur, cette politique est pénalisante pour le fournisseur, puisque le distributeur dégage l'essentiel de sa rémunération en faisant pression sur l'amont de la filière : par le biais des délais de paiement (beaucoup plus longs en France, on le sait, que chez ses partenaires commerciaux) ou de la coopération commerciale.
On peut dire qu'aujourd'hui les producteurs, les PME notamment, sont « étranglés » sous l'effet de cette politique de prix, de marge et de profit de la grande distribution.
En outre, la réglementation en vigueur est parfois considérée comme responsable d'une certaine exacerbation de ces relations conflictuelles,
B. UNE NÉCESSAIRE RÉFORME DE L'ORDONNANCE DU 1ER DÉCEMBRE 1986
Au vu de cette domination croissante de la grande distribution, les dispositions législatives encadrant les rapports entre producteurs et distributeurs apparaissent quelque peu inadaptées aux nouvelles réalités économiques.
La plupart de ces dispositions sont en effet jugées, par nombre d'observateurs avertis, comme limitant sensiblement la liberté commerciale des industriels.
Ces dispositions figurent, pour l'essentiel, au titre IV de l'ordonnance du 1er décembre 1986.
Rappelons qu'elles concernent l'obligation de facturation détaillée, l'interdiction de revente à perte, l'obligation de présentation de barèmes de prix, la définition des conditions de règlement, l'obligation d'établir un contrat écrit pour les opérations dites de coopération commerciale, l'interdiction d'imposer des prix minima, le respect de certains délais de paiement, l'interdiction du refus de vente et le problème de l'exploitation abusive d'un état de dépendance économique.
À cet égard, les producteurs dénoncent notamment :
- la complexité des règles de facturation qui imposent de lourdes contraintes et génèrent une insécurité juridique ;
- l'ineffectivité du droit en raison de l'incapacité du producteur à faire valoir devant le juge son bon droit, compte tenu du risque tout à fait dissuasif de rupture des relations commerciales avec son co-contractant qu'entraînerait une action de sa part ;
- la place de l'administration dans la gestion des rapports contractuels privés ;
- le déséquilibre du droit en vigueur qui défavorise le producteur et avantage le distributeur, puisque c'est sur le premier que pèse la charge de la preuve. C'est, en effet, au producteur de prouver que le refus de vente qu'il a opposé est licite.
En outre, le rapport Villain précité met plus particulièrement en évidence :
- le caractère pointilliste du droit français applicable aux relations entre producteurs et distributeurs.
- sa spécificité prononcée en regard des règles instituées en ce domaine dans les principaux pays,
- et son inadaptation aux réalités économiques actuelles.
Dans ce contexte, le Gouvernement envisage de réformer le titre IV de l'ordonnance de 1986 et souhaite ainsi rétablir, renforcer et garantir la loyauté des transactions commerciales.
Votre commission ne peut que l'y encourager.
Pour ce faire, le Gouvernement a engagé, sur la base des propositions du rapport Villain, une vaste consultation afin de dégager les éléments d'un consensus dans les milieux économiques concernés. II vient d'annoncer son souhait, notamment, de mettre fin au déréférencement abusif, de réviser les règles de la revente à perte et de sanctionner les prix de vente anormalement bas.
C. LE PROBLÈME DES DÉLAIS DE PAIEMENT
Par ailleurs, votre commission a toujours manifesté un intérêt particulier au problème des délais de paiement.
• À cet égard, rappelons que la loi du
31 décembre 1992 sur les
délais de paiement entre
entreprises
a permis d'enregistrer une baisse significative des
délais des industries agro-alimentaires (de 3 jours en 1993).
Globalement, on peut cependant regretter que le poids du crédit interentreprises tende à se concentrer davantage sur les PME-PMI ces dernières années.
On peut, en revanche, se féliciter de la mobilisation plutôt rapide et importante des professionnels dans la mise en oeuvre des dispositions de la loi.
En dépit d'une conjoncture économique qui était, en 1993, peu favorable à la conclusion d'engagements difficiles, 21 fédérations professionnelles ont conclu des accords formalisés, contre 12 fédérations un an auparavant.
• S'agissant des
délais de paiement
publics,
rappelons que le décret n° 94-787 du 7 septembre
1994 a imposé une réduction des délais de mandatement pour
tous les achats de fournitures, travaux et services émanant de
l'État et des établissements publics de l'État, ces
délais ayant été réduits à35 jours.
Dans son rapport sur les conditions d'application de la loi du 31 décembre 1992, le Gouvernement a indiqué que le « passage à un délai maximum de mandatement de 30 jours pourrait être ultérieurement envisagé, au vu des effets liés à la mise en oeuvre des mesures précédemment exposées et après une période d'observation, les progrès réalisés seront évalués afin d'envisager une éventuelle extension aux collectivités locales des mesures applicables à l'État ».
À cet égard, votre commission souhaite que des mesures concernant la réduction des délais de paiement des collectivités locales soient rapidement adoptées. Le plan en faveur des PME qui vient d'être annoncé par le Gouvernement va dans le bon sens en proposant que, pour les réglements de collectivités locales, « le comptable public procède au versement d'office à l'entreprise contractante sans que celle-ci n'ait à en faire la demande, avec les intérêts de retard au taux de base bancaire ».
• Enfin,
sur un sujet connexe mais qui
conditionne également l'exercice d'une concurrence saine et loyale,
votre rapporteur s'inquiète des conditions dans lesquelles la
publicité comparative sera introduite en droit
communautaire.
La loi française a fait ses preuves dans ce domaine et il ne faudrait pas que la directive communautaire, en cours d'élaboration, soit moins contraignante ou interdise aux États membres de maintenir des dispositions nationales plus restrictives que ses propres dispositions
III. UN PLAN EN FAVEUR DE L'ARTISANAT
A. LES MESURES RÉCENTES EN FAVEUR DE L'ARTISANAT
1. Les mesures du plan d'urgence gouvernemental de juin 1995
Parmi les nombreuses mesures décidées dans le cadre du plan d'urgence gouvernemental du mois de juin, trois concernent très spécifiquement les entreprises artisanales :
- l'élargissement du champ d'intervention des prêts CODEVI au commerce de détail et aux services aux particuliers (par exemple garagistes, plombiers, fleuristes...) ;
- l'abondement des crédits attribués à la SOFARIS pour la garantie des prêts aux petites et moyennes entreprises, notamment artisanales : 250 millions de francs supplémentaires généreront 8 milliards de francs de crédits en faveur des entreprises ;
- le relèvement de 50.000 à 75.000 francs, pour un couple, du plafond d'épargne investie dans une entreprise ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu.
2. Des dispositions en faveur des boulangers artisans
En outre, des mesures ont été annoncées en septembre dernier en vue d'améliorer les conditions de travail des boulangers artisans et de valoriser leurs produits.
3. Une nouvelle politique en faveur des métiers d'art
Enfin, à la même date, le ministre des PME, du commerce et de l'artisanat a proposé une nouvelle politique en faveur des métiers d'art, centrée autour de cinq axes :
- la création d'une fondation ou d'un conservatoire national des métiers d'art, qui associera fonds publics et fonds privés et établira des programmes de parrainage pour chaque métier ;
- la création d'un fonds d'encouragement aux métiers d'art, avec un doublement des crédits d'intervention de l'État. Ce fonds sera chargé de gérer un programme de bourses pour la création d'emploi, mettra en oeuvre un plan de soutien aux patrimoines en voie de disparition et ouvrira l'entreprise aux recherches sur les nouvelles techniques ;
- la préparation d'un programme pluriannuel d'orientation : une étude sur l'avenir de la profession sera lancée, qui débouchera sur un inventaire national des métiers d'art ;
- un programme de développement régional triennal ;
- des mesures immédiates concernant le crédit d'impôt recherche, l'information des artisans en matière de propriété intellectuelle et un assouplissement des conditions d'obtention du titre de maître artisan en faveur des métiers d'art.
B. LE VOLET ARTISANAT DU PLAN PME
Le 12 octobre dernier, le Gouvernement a, par ailleurs, annoncé le volet artisanat d'un plan plus global en faveur des PME et de l'artisanat qui, lui, sera rendu public à la fin du mois de novembre 1995.
Ce plan de soutien au secteur artisanal a pour objectif de créer 30.000 emplois en trois ans.
Ambitieux, ce plan s'articule autour de quatre axes. Il s'agit de :
- Renforcer l'identité artisanale :
Il s'agit, notamment, d'étendre l'obligation de qualification professionnelle préalable pour l'exercice des métiers mettant en jeu la santé et la sécurité des consommateurs. Dans le même esprit, le « droit de suite », c'est-à-dire la possibilité pour les entreprises artisanales employant plus de dix salariés de demeurer inscrites au Répertoire des métiers, devrait faire rapidement l'objet d'un décret. Cette mesure réglementaire, sans incidences budgétaires, était demandée depuis de longues années par les professionnels.
- Améliorer et faciliter le financement des entreprises artisanales :
Ce volet concerne la relance des créations d'entreprises artisanales et leur modernisation par une nouvelle offre de crédits à taux préférentiels, provenant des ressources CODEVI à hauteur de 3 milliards de francs, en complément des actuels prêts bonifiés, qui seraient revus dans un sens nettement plus proche des conditions proposées aux agriculteurs, mais avec une enveloppe plus faible. Par ailleurs, le plafond de chiffres d'affaires du régime simplifié d'imposition serait relevé de 3,8 millions de francs à 5 millions de francs pour la vente de marchandises, et de 1,1 million de francs à 2 millions de francs pour les prestations de services.
- Développer l'emploi :
En troisième lieu, il est proposé de créer un « chèque premier employé », pour supprimer la lourdeur du travail administratif qu'entraîne une première embauche, qui s'avère dissuasive pour un artisan travaillant seul et devant donc se concentrer sur son métier. Il faut rappeler que 400.000 artisans n'ont aujourd'hui aucun salarié. Ainsi, serait exploitée la réussite du chèque service destiné aux particuliers employant du personnel à la maison.
- Améliorer le statut du conjoint :
Il s'agit d'améliorer le statut du conjoint de l'artisan en matière de prestations maternité et de régime fiscal pour la protection sociale complémentaire, prévue par la loi « Madelin » sur l'entreprise individuelle pour les seuls chefs d'entreprises.
Votre commission se félicite de la priorité ainsi donnée à un secteur redevenu créateur d'emplois en 1994 et qui a été à l'origine de 30 % des créations d'entreprises l'année dernière.
IV. LE PLAN DE SOUTIEN AUX PME
Outre les récentes mesures concernant la réduction des charges sur les bas salaires et le travail peu qualifié (contrat initiative-emploi, aide au premier emploi des jeunes...), les PME bénéficieront de mesures concernant, d'une part, leur croissance et leur transmission, et d'autre part, l'amélioration de leurs relations avec les services publics.
A. LES MESURES FAVORISANT LA CROISSANCE ET LA TRANSMISSION DES ENTREPRISES
Outre les dispositions précitées qui permettront d'améliorer l'accès des PME aux ressources de financement (SOFARIS...), les PME devraient bénéficier de mesures de nature à encourager leur innovation, d'une part, leurs exportations, d'autre part.
Par ailleurs, on citera l'article 6 du projet de loi de finances pour 1996 qui tend à alléger les droits de succession sur les transmissions d'entreprises en particulier des PME.
Cet article institue un abattement de 50 % sur la valeur des biens professionnels transmis entre vifs, c'est-à-dire sur les donations consenties par actes authentiques passés après le 1er janvier 1996. Cette disposition a été élargie par l'Assemblée nationale aux transmissions par décès. L'octroi de cet abattement, plafonné à 100 millions de francs, est soumis à différentes conditions tenant notamment à l'âge du donateur, qui doit être inférieur à 65 ans, et à la conservation du bien par les donataires pendant au moins 5 ans.
Sur la proposition de l'Assemblée nationale, le Parlement vient d'étendre ce dispositif aux transmissions par décès (successions) des actifs professionnels, lorsque le chef d'entreprise décède avant 60 ans, à la suite d'un accident. Le Sénat l'a, par ailleurs, assoupli, en décidant que le régime serait applicable dès lors qu'il y aurait transfert de 50 % des droits de vote. Ce transfert à un nu-propriétaire, qui laissera au chef d'entreprise usufruitier le seul droit au dividende, sa source de revenus, sera donc possible. Le Sénat a également prolongé jusqu'au 31 décembre 1997 la période transitoire pendant laquelle un donataire âgé de plus de 65 ans peut transmettre son entreprise en bénéficiant de l'abattement fiscal.
Votre commission se félicite d'une telle disposition, très attendue et qui devrait être de nature à diminuer le nombre d'emplois perdus lors des successions. Il faut rappeler que les difficultés en matière de transmissions d'entreprises sont à l'origine de 10 % des défaillances.
Enfin, le Gouvernement ne pourra pas faire l'économie d'une réforme de la taxe professionnelle, tant décriée.
B. LA SIMPLIFICATION DES FORMALITÉS ADMINISTRATIVES
En premier lieu, trois mesures seront mises en oeuvre au 1er janvier 1996 : il s'agit de la déclaration sociale unique, de la déclaration d'embauche unique et du contrat d'apprentissage unique.
En outre, le ministère des PME, du commerce et de l'artisanat envisage de mettre à l'étude de nouveaux dossiers de simplification administrative.
Certains d'entre eux se situent dans le prolongement de l'action engagée par les pouvoirs publics, en 1993 et 1994. Ainsi, le rapport d'application de la loi du 11 février 1994 sur l'initiative et l'entreprise individuelle a ouvert de nouvelles voies qui seront approfondies dans les mois à venir. Elles concernent la simplification du bulletin de paie, de la déclaration annuelle des données sociales (DADS), le paiement unique des cotisations sociales pour les très petites entreprises, la suppression du livre de paie et l'authentification des livres comptables.
D'autres axes sont à l'étude dans le cadre de la préparation du « Plan PME et Artisanat ». À cet égard, la réflexion porte sur :
- de nouveaux droits aux entreprises, qui permettront de reporter sur les administrations la charge de leur propre complexité ;
- la mobilisation des données publiques et développement d'une industrie privée de l'information ;
- l'allégement du nombre d'enquêtes statistiques obligatoires ;
- le renforcement des transmissions par voie électronique entre entreprises et administrations ;
- une « charte des services publics » pour obliger les administrations à parler en terme de services ;
- la simplification des demandes d'aides (rappelons que 2.200 aides sont aujourd'hui proposées aux entreprises) ;
- l'analyse des effets de seuil ;
- l'amélioration de l'accès des PME aux marchés publics. Votre commission y attache une importance particulière. Le problème de la sous-traitance doit être traité et il est nécessaire que non seulement l'artisanat du bâtiment, mais également les petites entreprises industrielles, puissent avoir accès aux marchés publics. La réforme des marchés publics annoncée dans le « plan PME pour la France » devrait répondre à ce souci ;
- la mise en place d'un « dictionnaire des formalités » ;
- le renforcement des études d'impact sur l'évaluation du coût des formalités.
La tâche sera certainement ardue, mais elle s'avère indispensable. En effet, la « paperasserie administrative » pèse aujourd'hui trop lourdement sur les entreprises et elle devient un frein à l'emploi.
* 1 Rapport présenté au ministre de l'économie par M. Claude Villain, inspecteur général des finances, en janvier 1995.
* 2 Étude réalisée par Management Horizons Division of Price Waterhouse
* 1 Source Nielsen