II. UN PROJET DE LOI DISPARATE QUI AMÉLIORE NÉANMOINS LA COMPRÉHENSION DE CERTAINES RÈGLEMENTATIONS ET FAVORISE LA COHÉRENCE JURIDIQUE DE DISPOSITIONS AGRICOLES
Ce projet de loi est porteur de plusieurs évolutions bienvenues, qui favorisent notamment la clarification des normes environnementales et améliorent la lisibilité de règlementations particulièrement complexes à apprécier, à l'instar de celles relatives à la haie.
A. UN RÉGIME JURIDIQUE APPLICABLE AUX HAIES UNIFIÉ ET PLUS LISIBLE
Source : commission de l'aménagement du territoire et du développement durable
Malgré les multiples services écosystémiques fournis par les haies et leurs nombreuses fonctionnalités écologiques, 70 % de ces « tours de Babel écologiques » ont disparu depuis 1950. Selon le rapport « La haie, levier de la planification écologique » du CGAAER2(*) publié en mars 2023, le rythme de diminution du linéaire aurait même doublé entre 2017 et 2021 pour atteindre 23 571 km/an, contre 10 400 km/an entre 2006 et 2014.
La réglementation encadrant la destruction des haies est foisonnante et dispersée dans plusieurs codes. La superposition des normes accroît la complexité et le manque de lisibilité des règles auxquelles sont soumis les gestionnaires et les agriculteurs peut paradoxalement contrarier l'objectif partagé de protection des haies.
Aussi le Gouvernement a-t-il présenté en septembre 2023 un « Pacte en faveur de la haie » visant un gain net du linéaire de haies de 50 000 km d'ici 2030, avec des appels à projets et une dotation budgétaire dédiée. Une des 25 mesures consiste à harmoniser et clarifier les législations agricole, urbanistique et environnementale relatives à la promotion, la protection, la gestion et l'arrachage des haies, afin de gagner en lisibilité et en cohérence.
Considérant que ce chantier tardait à être mis en oeuvre alors que le besoin de simplification se fait de plus en plus pressant, la commission a adopté un amendement COM-640 de réécriture de l'article 14, proposée par le rapporteur, autour de 6 axes :
- définir dans la loi la « haie » par ses éléments constitutifs, en instaurant également un objectif de gestion durable pour son entretien ;
- réaliser d'ici deux ans un inventaire départemental des protections applicables aux haies pour une lisibilité accrue des dispositions législatives et règlementaires ;
- ouvrir un guichet unique au sein des services déconcentrés de l'État pour faciliter les démarches des demandeurs, centraliser les formalités préalables à la destruction d'une haie et internaliser la complexité administrative ;
- instaurer un régime de déclaration unique préalable en amont d'un projet de destruction de haie, à l'exception des haies implantées sur une place, autour d'un jardin et d'un bâtiment à usage industriel ou artisanal. Ce régime peut être assorti de la transmission d'éléments complémentaires, demandés par l'administration, en vue de l'obtention d'une autorisation unique en lieu et place des nombreux régimes actuels ;
- préciser les modalités de compensation prévues par la loi en cas de destruction de haie en pondérant les obligations de replantation par un coefficient départementalisé tenant compte de l'évolution passée du linéaire et de l'état des haies apprécié par les données de l'inventaire, pour ne pas pénaliser les territoires ayant beaucoup replanté ;
- substituer un régime d'amendes contraventionnelles en cas de non-respect de ces prescriptions.
La commission s'est voulue pragmatique en prévoyant des procédures particulières dans le cas où il s'agit d'assurer la sécurité des personnes et des biens, ainsi que l'intégrité des réseaux et des infrastructures de transport, d'exécuter une obligation légale ou réglementaire (par exemple le débroussaillement) ou en cas d'urgence.
L'identification des haies au sein de l'inventaire, de façon pragmatique et territorialisée, au terme d'une concertation avec les élus locaux et les acteurs agricoles, constitue une utile mesure de différenciation. La haie est en effet bien souvent le produit de l'histoire, ce qui explique que sa perception varie d'un territoire à l'autre.
Dans cette logique d'adaptation aux réalités locales, la commission a enfin prévu que la période des interdictions de travaux sur les haies puisse être adaptée aux spécificités climatiques et pédologiques de chaque département : le préfet aura ainsi la charge de fixer la période de nidification des espèces à enjeux, après avis des élus locaux et des organisations agricoles, pour une prise en compte des enjeux de biodiversité au plus près des réalités écologiques constatées sur le terrain.
* 2 Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux.