V. L'AFP DANS LE FRACAS DU MONDE

A. UNE SITUATION ÉCONOMIQUE NETTEMENT AMÉLIORÉE

La France dispose avec l'Agence France-Presse (AFP) d'une des trois plus grandes agences de presse au monde avec Reuters et AP.

Reconnue pour sa présence à l'international, avec 2 600 collaborateurs répartis dans 150 pays et 260 villes, l'AFP a su, ces dernières années, avec le soutien de l'État, conforter son modèle économique, dans une conjoncture pourtant peu favorable.

La dotation de l'État à l'AFP évolue en 2025 conformément aux engagements du COM 2024-2028, pour s'établir à 143 millions d'euros, en hausse de 0,9 %.

Elle se répartit entre :

- une enveloppe destinée à compenser les missions d'intérêt général (MIG) pour 120 millions d'euros ;

- les abonnements souscrits pour le compte des services de l'État (23 millions d'euros).

Résultat net de l'AFP entre 2018 et 2025

(en milliers d'euros, prévisions pour 2024 et 2025)

 

L'Agence a mené ces dernières années une politique d'accroissement de ses ressources et de maitrise de ses coûts qui porte ses fruits, avec un résultat net excédentaire depuis 2020. La baisse observée en 2024 s'explique par les charges liées à une actualité exceptionnelle marquée par des conflits militaires, des élections sur plusieurs continents et les Jeux Olympiques et Paralympiques.

L'Agence a réalisé 16 millions d'économies sur son précédent COM 2019-2023, et s'est engagée à un effort supplémentaire de 9 millions d'euros d'ici 2028.

L'endettement de l'AFP, qui était de 50 millions d'euros en 2018, devrait ainsi être nul en 2028, ce qui représentera une économie annuelle de 4 millions d'euros d'intérêts.

L'Agence a donc su composer dans un environnement économique difficile pour tous marqué par une forte inflation, mais plus spécifiquement pour un secteur des médias en pleine recomposition de son modèle.

Le rapporteur pour avis souligne la résistance et les efforts d'adaptation considérables de l'AFP ces dernières années.

B. LES DÉFIS DE L'AFP

En dépit de ses excellents résultats, l'AFP sera confrontée dans les années à venir à de nombreux défis.

1. Composer avec un marché difficile

Le rapporteur pour avis et les nombreux travaux du Sénat témoignent année après année des difficultés rencontrées par l'ensemble des médias, de la presse écrite aux télévisions, doublement fragilisées par la numérisation et l'émergence de nouveaux concurrents de plus en plus polarisés. L'AFP n'échappe pas à ce contexte morose.

Ainsi, les prévisions de croissance du chiffre d'affaires pour les années à venir ne s'établissent qu'à 1 %, contre 2,5 % précédemment. De nombreux éditeurs hésitent dorénavant à renouveler leurs abonnements AFP, ou bien, pour les plus grands, n'en conservent plus qu'un seul.

Agence de renommée mondiale qui réalise plus de 60 % de son chiffre d'affaires à l'international, l'AFP doit donc tenir l'équilibre délicat d'une maitrise de ses coûts, tout en s'imposant comme la source la plus fiable possible pour les médias ou les personnes qui recherchent des faits avérés et vérifiés.

Dans ce contexte, l'Agence bénéficie de l'image flatteuse de son réseau de journalistes implanté dans des endroits où elle fait partie des rares organes à pouvoir encore travailler, comme l'Afghanistan, et du soutien constant de l'État, conforté encore cette année par le respect du COM.

2. Des droits voisins à conforter

Le titre même de la loi du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse devrait suffire à éteindre toute forme de doute sur l'éligibilité de l'AFP à cette rémunération.

Si besoin en était, les avis de l'Autorité de la concurrence et le jugement de la Cour d'appel de Paris du 8 octobre 2020 ont été parfaitement explicites sur ce point. L'AFP, qui bénéficie d'une position particulière dans l'écosystème français des agences de presse, a pu négocier des accords avec Google et Meta qui courent encore pour deux ans, mais n'est pas plus parvenue que les éditeurs à trouver un terrain d'entente avec le groupe Microsoft.

Il n'en demeure pas moins que la question de la rémunération des agences de presse demeure une source de contentieux et d'incompréhensions, comme ont pu en témoigner les débats sur l'article 7 de la proposition de loi visant à renforcer l'indépendance des médias et mieux protéger les journalistes, déposée par Sylvie Robert et discutée au Sénat le 17 octobre 20245(*).

Le rapporteur pour avis est à l'origine de l'amendement de suppression du paragraphe qui proposait une nouvelle rédaction pour l'article L. 218-1 du code de la propriété intellectuelle, en apparence plus favorable à la reconnaissance des agences de presse. Comme il l'a indiqué en séance, il tient cependant à préciser que son amendement, qui a été adopté par le Sénat, ne remettait en aucun cas en cause le principe même de ces droits voisins pour les agences, mais a été présenté uniquement pour des raisons de conformité juridique à l'article 2 de la directive européenne du 17 avril 2019 qui fonde les droits voisins.

Le rapporteur pour avis estime qu'il est maintenant nécessaire d'établir un bilan de ces droits voisins au niveau national et européen afin, le cas échéant, de faire évoluer le cadre juridique et de conforter encore plus les agences de presse.

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La commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a émis, lors de sa réunion plénière du 27 novembre 2024, un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 180 « Presse et médias » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2025.


* 5 https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl23-741.html

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