B. LA NÉCESSAIRE VIGILANCE CONCERNANT LA PRISE EN CHARGE DES OPEX PAR LA LPM AU DÉTRIMENT DES ÉQUIPEMENTS

Si les rapporteurs se réjouissent du maintien de la marche de 3,3 Mds€ en 2025, ils s'interrogent sur le risque que cette hausse des moyens soit in fine absorbée par le coût croissant de la prise en charge des OPEX qui n'est traditionnellement pas complètement budgété et qui repose donc pour partie sur des crédits interministériels dégagés par des annulations de crédits sur les budgets de tous les ministères, y compris celui des Armées. « S'agissant de la fin de gestion 2024, l'arbitrage rendu porte les annulations de crédits à 532 millions d'euros, contre 505 millions l'an passé » a indiqué le DGA Emmanuel Chiva devant la commission reconnaissant que ces annulations n'étaient pas satisfaisantes mais précisant que « ces gels n'entraineront que des décalages limités à quelques mois ».

Lors de son audition par la commission, le Ministre des Armées, Sébastien Lecornu a déclaré qu'il avait demandé un rapport sur la classification des OPEX ainsi que sur les modalités de leur prise en charge en laissant entendre que les missions de réassurance dans le cadre de l'OTAN n'avaient pas nécessairement vocation à être financées par la solidarité interministérielle (voir encadré).

Vers un poids croissant de la prise en charge des OPEX dans la LPM ?

Auditionné devant la CAEDFA le 15/10/24, le Ministre des Armées a ouvert le débat sur une évolution de la prise en charge des OPEX :

« Les opérations extérieures sont financées par les provisions que vous avez votées, puis, si ces provisions sont dépassées, soit par un financement interministériel soit par la définition d'un nouveau plafond en cours de gestion. Cette dernière possibilité est peut-être d'ailleurs préférable à la première, car un financement interministériel revient à raboter les budgets d'autres ministères. Je ne suis pas sûr que diminuer la dotation globale de fonctionnement (DGF) des communes pour financer des opérations militaires soit une bonne solution... (...)

Pour le dire autrement, nous redécouvrons les missions « otaniennes ». L'opération Chammal est évidemment une Opex de combat, par laquelle nous luttons contre les terroristes de Daesh au Levant, sur laquelle le Parlement s'est prononcé à la suite de la modification de l'article 35 de la Constitution portée par la réforme constitutionnelle du président Sarkozy. Elle n'est pas comparable avec les missions de réassurance, telles que celle que nous menons en Roumanie, dans lesquelles il n'y a pas de combat. Et pourtant, être présent en Roumanie n'est pas la même chose qu'être présent sur le territoire national. (...)

Les missions de réassurance en Roumanie doivent-elles faire l'objet d'un écrêtement du budget de la santé, de l'éducation nationale ou de la DGF des communes ? Je pense que la question mérite d'être posée, au regard du principe de sincérité budgétaire.

J'ai donc demandé à l'état-major des armées, au contrôle général des armées, au secrétaire général pour l'administration de rédiger un rapport sur le sujet. Je le transmettrai au Parlement. »

Le coût des engagements extérieurs étant croissant, il est à craindre que leur financement sur le budget du ministère des Armées ait pour conséquence de rendre impossible le respect de la LPM notamment en ce qui concerne le financement de certains programmes d'intérêt majeur. Par ailleurs, l'engagement des Armées sur le territoire national étant également en augmentation (Nouvelle-Calédonie, JOP 2024...) il n'apparaît pas possible de vouloir faire financer tous les engagements non combattants par les Armées. Les rapporteurs appellent donc de leur voeu le maintien du principe de prise en charge des OPEX pour un montant forfaitaire dans le cadre de la mission « défense » afin de ne pas porter atteinte à l'application de la LPM. La volonté du législateur était parfaitement claire sur ce point lors du vote de la LPM en juillet 2023.

Recommandation n°3 : préserver l'application de la LPM en limitant l'imputation du coût des OPEX sur le Programme 146 et en assurant la transparence du coût et de la prise en charge des OPEX « non combattantes » et des opérations menées sur le territoire national (Nouvelle-Calédonie, Sentinelle, JOP de Paris 2024).

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