III. DONNER UNE ASSISE JURIDIQUE AUX TRAVAUX D'URGENCE INITIÉS PAR LES MAIRES ET LES ACHETEURS PUBLICS

A. UN RÉGIME DÉROGATOIRE SPÉCIFIQUE AUX TRAVAUX DE RÉFECTION ET DE RECONSTRUCTION DES BÂTIMENTS PUBLICS ENDOMMAGÉS LORS DES VIOLENCES URBAINES

Face au risque juridique que constituerait l'initiation de travaux d'urgence sur le fondement des seules dérogations déjà permises par le droit de la commande publique, l'article 2 tend à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance, dans un délai de deux mois, afin d'instaurer un régime dérogatoire à certaines règles de la commande publique, applicable aux seuls bâtiments endommagés lors des violences urbaines survenues entre le 27 juin et le 5 juillet 2023. Il s'agit ainsi de garantir aux acheteurs soumis au code de la commande publique une assise juridique sûre et de les inciter à lancer promptement les travaux nécessaires.

Ces dérogations consisteraient à permettre aux acheteurs publics :

Ø De passer des marchés publics sans publicité mais avec mise en concurrence pour des travaux dont le montant serait inférieur à un seuil défini dans l'ordonnance. Selon les informations transmises au rapporteur par la direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, il s'agirait d'un seuil d'un million d'euros, soit un fort rehaussement par rapport au seuil précité de droit commun de 100 000 € ;

Ø De ne pas allotir les marchés ;

Ø Et, enfin, de conclure plus facilement des marchés globaux.

Le gain de temps estimé par la DAJ de la dérogation au principe de publicité s'élève, pour l'acheteur public, à quatre semaines. En permettant de ne passer qu'un seul marché, la conclusion d'un marché global entraînerait un gain approximatif de quatre mois.

B. DES DÉROGATIONS JUSTIFIÉES NÉCESSITANT UNE PUBLICATION RAPIDE DE L'ORDONNANCE

Partageant pleinement l'objectif de célérité des travaux de réfection et de reconstruction des bâtiments publics endommagés lors des violences urbaines, la commission a approuvé les dérogations au code de la commande publique proposées par le Gouvernement, les jugeant justifiées et proportionnées.

Dans une optique constructive, elle a adopté l'amendement COM-5 présenté par son rapporteur, apportant des modifications de nature rédactionnelle à l'article 2 et précisant l'étendue du périmètre de ces dérogations, en mentionnant les « acheteurs soumis au code de la commande publique » afin d'inclure explicitement les bailleurs sociaux.

La commission a cependant émis deux réserves.

En premier lieu, la commission regrette que le Gouvernement ne soit pas allé au bout de la démarche d'urgence, qui aurait consisté à inscrire dans le projet de loi le dispositif dérogatoire plutôt que de recourir à une ordonnance. Elle souligne notamment le décalage entre, d'une part, le gain de quatre semaines attendu des dérogations au principe de publicité et, d'autre part, le délai de deux mois demandé par le Gouvernement pour publier l'ordonnance. C'est pourquoi la commission invite le Gouvernement à ne pas faire usage de l'entièreté de ce délai et à soumettre cette ordonnance à l'examen du dernier conseil des ministres précédant la pause estivale afin que les procédures de passation puissent être engagées rapidement par les acheteurs publics.

Enfin, la commission s'interroge sur la pertinence du seuil d'un million d'euros, évoqué par le Gouvernement, en dessous duquel les acheteurs publics pourront déroger au principe de publicité. Elle note à ce titre qu'il existe une marge de manoeuvre significative puisque la réglementation européenne autorise des dérogations jusqu'à un seuil de 5,3 millions d'euros. Estimant qu'un seuil d'un million d'euros est insuffisant pour inclure des opérations de reconstruction, la commission a adopté l'amendement COM-6 de son rapporteur, modifiant l'intitulé du projet de loi afin que celui-ci mentionne les travaux de « réfection » des bâtiments endommagés, illustrant sa portée réelle. Elle invite le Gouvernement à réévaluer ce seuil, en prenant en considération les besoins réels exprimés par les collectivités publiques afin que ce régime exceptionnel soit plus aisément mobilisable par les acheteurs publics.

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Réunie le 17 juillet 2023, la commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 2 du projet de loi, ainsi modifié.