C. DES OUTILS FISCAUX INDISPENSABLES
1. Une fiscalité indirecte limitée
La fiscalité indirecte au bénéfice du cinéma est limitée à la seule exploitation, qui bénéficie, depuis le 1 er janvier 2014, d'un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à 5,5 % , contre 10 % avant cette date, applicable au prix des billets d'entrée . En entraînant une diminution d'environ douze centimes sur le prix de chaque billet, la mesure affiche un coût budgétaire de 55 à 60 millions d'euros par an, selon les estimations du ministère de l'économie et des finances.
Par ailleurs, plus indirectement, la filière cinématographique bénéficie du taux préférentiel de TVA de 10 % applicable aux abonnements vendus par Canal + , par ailleurs financeur essentiel de la production. Ce taux s'établissait toutefois à un niveau plus favorable de 7 % avant le 1 er janvier 2014, date à laquelle il a été supprimé pour l'ensemble des biens et services auquel il s'appliquait.
2. Des crédits d'impôt régulièrement renforcés
Les industries cinématographiques et audiovisuelles bénéficient, sur leurs dépenses de production, de crédits d'impôt dont le champ et les modalités d'application font régulièrement l'objet d'adaptations en vue d'en renforcer l'efficacité au regard de la concurrence étrangère et d'en améliorer la cohérence avec les besoins exprimés par la filière , pour inciter à la relocalisation des tournages. Dans ce cadre, les crédits d'impôt cinéma et international concernent directement le secteur cinématographique.
Prévision de dépenses fiscales pour 2017
dont l'objet principal contribue
au soutien aux industries
cinématographiques et audiovisuelles
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Source : CNC - Rapport et perspectives 2015 - 2017 - Document stratégique de performance
1. Les montants indiqués sont des estimations.
a) Le crédit d'impôt cinéma
Mis en place le 1 er janvier 2004, le crédit d'impôt cinéma est applicable aux films qui remplissent les conditions d'accès au soutien financier automatique à la production, assorties de critères complémentaires propres au dispositif.
Depuis sa création, près de 70 % des films de fiction d'initiative française ont bénéficié du dispositif , avec de fortes variations selon les années en fonction des catégories de productions. En 2015, 143 films agréés d'initiative française ont fait l'objet d'une demande d'agrément provisoire de crédit d'impôt, contre 128 en 2014, pour un total de dépenses éligibles de 328 millions d'euros, soit une dépense fiscale estimée à 74,9 millions d'euros. Les perspectives pour 2017 s'établissent, selon le document stratégique de performance du CNC, à 123,5 millions d'euros de dépense fiscale , en forte progression du fait de l'augmentation, heureuse, du nombre de films tournés sur le territoire national, notamment de productions à devis élevé.
Face à la vive concurrence de pays européens ou nord-américains pour attirer des tournages grâce à des dispositifs fiscaux attractifs, la France a renforcé significativement son dispositif de crédit d'impôt .
Au 1 er janvier 2013, son plafond est ainsi passé d'un à quatre millions d'euros et ont été rendues éligibles les dépenses afférentes aux acteurs de complément, ainsi qu'aux frais d'hôtellerie et de restauration. Puis, en décembre de la même année, son taux a été relevé de 20 à 30 % pour les films les plus fragiles, dont le devis est inférieur à 4 millions d'euros. Ce second aménagement a été autorisé par la Commission européenne le 18 décembre 2014. L'incertitude sur l'entrée en vigueur effective de la mesure a limité son effet en 2014, notamment lors du premier semestre. Pour autant, pour la première année d'application, 30,1 millions d'euros d'investissements supplémentaires ont été réalisés dans la production de films au budget inférieur à 4 millions d'euros.
En décembre 2014, pour une application effective au 1 er janvier 2016, le taux de 30 % a été étendu à l'ensemble des films dont le devis s'établit entre 4 et 7 millions d'euros, dits « du milieu », et augmenté à 25 % pour les oeuvres d'animation, afin de contribuer au développement un secteur innovant où la France a su construire un pôle d'excellence.
Enfin, en décembre 2016, avec le soutien actif de votre rapporteur pour avis, un nouvel aménagement du dispositif a permis de supprimer la condition liée à la réalisation des oeuvres cinématographiques en langue française. Cette mesure a notamment permis de faire bénéficier du crédit d'impôt au taux de 20 % des oeuvres d'initiative française à forte dimension culturelle dans lesquelles l'utilisation d'une langue étrangère est justifiée par le scénario. Les oeuvres ambitieuses d'animation ou à forts effets visuels tournées vers le marché international bénéficient désormais, quant à elles, d'un taux majoré à 30 % afin de localiser ces productions sur le territoire national. Par ailleurs, afin de valoriser l'emploi de la langue française, le taux a également été porté à 30 % pour les oeuvres tournées en langue française, y compris celles dont le devis est supérieur à 7 millions d'euros. Enfin, le plafond de l'ensemble des crédits d'impôt pour une même oeuvre cinématographique a été porté à 30 millions d'euros contre 4 millions d'euros précédemment, sur le modèle du crédit d'impôt international.
Les mesures adoptées en 2014 et 2016, entrées en vigueur le 1 er janvier 2016, ont des effets encore difficiles à mesurer mais d'ores et déjà perceptibles sur la production du premier semestre 2016 . Ainsi, les dépenses réalisées en France ont augmenté de 53 % , passant de 274 à 418 millions d'euros.
Surtout, l'effet relocalisant de la réforme est déjà visible et à un niveau qui se situe au-delà des espérances les plus optimistes , ainsi que s'en réjouissait Frédérique Bredin, présidente du CNC, lors de son audition par votre rapporteur pour avis. Plusieurs films aux budgets élevés, inéligibles jusqu'alors au dispositif, ont été relocalisés en France : Valerian de Luc Besson (197 millions d'euros de budget, dont le tournage était initialement prévu en Hongrie), Folles de Django d'Etienne Comar (9 millions d'euros de budget et dont le tournage était envisagé en République Tchèque), Au revoir là-haut d'Albert Dupontel et Marie-Francine de Valérie Lemercier (dont le budget s'établissait respectivement à 20 millions et à 10 millions d'euros et dont les tournages étaient prévus en Belgique).
b) Le crédit d'impôt international
Autorisé en juillet 2009 par la Commission européenne, le crédit d'impôt international, d'envergure plus modeste que le crédit d'impôt cinéma, vise à favoriser la production d'oeuvres étrangères en France.
Depuis sa mise en place, 125 oeuvres cinématographiques et audiovisuelles ont obtenu l'agrément provisoire de crédit d'impôt, dont 22 en 2015 contre seulement 13 en 2014. Les productions ainsi aidées doivent réunir plusieurs critères indiquant leur lien avec la culture, le patrimoine et le territoire français.
La dépense fiscale pour 2016, calculée à partir des dépenses éligibles des projets agréés en 2015 et les années précédentes, est estimée à 10,7 millions d'euros, pour 140 d'investissements en France représentant 600 jours de tournage et 230 mois de fabrication d'animation. Pour 2017, ce montant devrait avoisiner 53,6 millions d'euros, en application des récentes réformes, qui ont entraîné une importante augmentation du nombre de projets bénéficiaires.
Deux modifications sont, en effet, intervenues afin d'assurer la compétitivité du crédit d'impôt international face aux dispositifs fiscaux étrangers. Ainsi, au 1 er janvier 2015, son plancher de dépenses éligibles, c'est- à-dire réalisées en France, a été abaissé à 50 % du budget de production lorsqu'il est inférieur à 2 millions d'euros, alors qu'elles devaient auparavant a minima atteindre un montant d'un million d'euros. Puis, au 1 er janvier 2016, le plafond a été porté de 20 à 30 millions d'euros et le taux de 20 % à 30 %.
Ces réformes ont largement atteint leur objectif de localisation en France de productions étrangères, comme l'atteste l'augmentation significative du nombre de projets bénéficiaires entre 2014 et 2015. En outre, les chiffres de la production du premier semestre 2016 témoignent déjà de l'impact positif du rehaussement du taux et du plafond. Le nombre d'oeuvres nouvellement agréées au crédit d'impôt international s'élève déjà à 19 pour le seul premier semestre, pour un montant de dépenses en France qui atteint 82,5 millions d'euros.
Au regard de ces résultats encourageants, votre rapporteur pour avis se félicite de la validation, par la Commission européenne, de la prolongation du dispositif , qui expirait à la fin de l'année 2016, jusqu'en 2022, par sa décision du 18 mars 2016. La sécurisation juridique , sur la durée, du crédit d'impôt international, représente, en effet, un élément indispensable de l'attrait du dispositif pour les investisseurs étrangers.