INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
À titre liminaire, votre rapporteur tient à rendre hommage à son prédécesseur, notre collègue Jacqueline Gourault, qui rapportait auparavant les crédits du programme 148.
En ce trentième anniversaire du statut des agents de l'État, la fonction publique poursuit sa mutation. Entre « livres blancs » et avancées législatives, elle évolue par l'effet de la réorganisation des administrations publiques d'abord dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) suivie, aujourd'hui, de la modernisation de l'action publique (MAP) et par le poids de la contrainte budgétaire. Parallèlement, la réforme territoriale en cours pèsera également sur les administrations.
Le dialogue social accompagne ces évolutions. Plusieurs chantiers ont été lancés par la ministre de la décentralisation et de la fonction publique. En particulier, deux négociations, ouvertes à l'automne 2014, -l'une sur l'avenir de la fonction publique, l'autre sur la qualité de vie au travail- s'inscrivent dans ce contexte de « chamboulements » et de remises en cause.
La première, qui se déroulera jusqu'au mois de mars 2015, « doit faire franchir une nouvelle étape au statut de la fonction publique, avec une profonde rénovation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations dans les trois fonctions publique et une réforme de la gestion des ressources humaines ». 3 ( * ) Le Gouvernement souhaite offrir un même cadre aux métiers communs entre l'État et les collectivités locales afin de « créer des parcours alternés (...) et de mutualiser les formations ».
Un autre chantier, plus conjoncturel, s'ouvre : celui de l'accompagnement des réorganisations territoriales. Il devrait permettre d'écarter des obstacles juridiques ou financiers aux redéploiements et à la mobilité. Des dispositifs personnalisés d'accompagnement des agents concernés tant de l'État que des collectivités territoriales seront mis en place. Ces projets devraient répondre aux inquiétudes des personnels qui doivent être associés aux évolutions en cours puisqu'ils seront amenés à mettre en oeuvre et à gérer les conséquences de la réforme dont le succès dépendra aussi de leur capacité à la porter.
L'accompagnement juridique et financier, cependant, n'apparaît pas suffisant à votre rapporteur. Il importe également que tant les enjeux de la réforme que les choix finalement opérés soient expliqués aux personnels. L'aboutissement de l'acte III de la décentralisation en dépend, la vitalité et l'adaptabilité de la fonction publique également.
L'année 2014 s'achèvera par un rendez-vous important : la tenue des élections professionnelles, le même jour, pour la première fois, dans les trois versants de la fonction publique - État, territoriale et hospitalière - ainsi que l'a organisé le législateur en 2010 4 ( * ) . Cette journée électorale se déroulera le 4 décembre 2014.
Dans ce paysage en mouvement perpétuel, les administrations et leurs agents devront démontrer une fois de plus leur adaptabilité aux évolutions de la République. Le programme 148, malgré la modestie de ses crédits, permet d'accompagner ces évolutions et de les faciliter.
I. LE PLAFONNEMENT DES EFFECTIFS ENTRE STABILISATION ET RESPECT DES PRIORITÉS GOUVERNEMENTALES
Le niveau des emplois de l'État demeure soumis en 2015 à l'engagement de stabilité des effectifs. Cependant, le projet de loi de finances poursuit la mise en oeuvre du plan de création de postes dans les secteurs prioritaires identifiés par le Président de la République, ce qui appelle, en contrepartie, des efforts correspondants dans les autres ministères.
A. L'ÉVOLUTION DE L'EMPLOI MINISTÉRIEL PAR LA MODERNISATION DE L'ACTION PUBLIQUE
Les 10 601 ETP prévus par le projet de loi de finances pour 2015 sont compensés par 11 879 ETP supprimés dans les secteurs non prioritaires, soit un solde net de - 1 278 ETP.
Les programmations budgétaires sur la période 2015-2017 reposent « sur une évolution de la masse salariale limitée à 0,6 % en 2015, et 0,3 % par an en moyenne » sur le triennat. Compte tenu des prévisions de l'inflation, le Gouvernement prévoit une économie de près de 5 milliards d'euros entre 2015 et 2017 « par rapport à l'évolution spontanée des dépenses » 5 ( * ) .
1. Une réduction globale supplémentaire de l'emploi ministériel
Le plafond des autorisations d'emplois de l'État (budgets annexes compris 6 ( * ) ) est fixé pour 2015 à 1 903 238 ETPT, soit une diminution de 3 186 ETPT par rapport à 2014.
Source : projet de loi de finances pour 2015.
2. La concrétisation annuelle des priorités gouvernementales
Le schéma d'emplois poursuit la mise en oeuvre de l'engagement présidentiel de créer, d'une part, 60 000 emplois dans l'enseignement et, d'autre part, 5 000 emplois dans les deux secteurs de la sécurité et de la justice sur la durée du quinquennat 2012-2017 :
- en 2015, l'enseignement bénéficiera de 10 561 créations de postes (9 421 dans l'éducation nationale et 140 dans l'enseignement agricole) ; s'y ajoutent 1 000 postes nouveaux dans les universités, lesquels sont décomptés au titre des opérateurs ( cf. infra ) ;
- la police et la gendarmerie sont dotées de 405 nouveaux emplois comme en 2014 ;
- 635 emplois sont créés pour la justice, dont 35 pour les juridictions administratives, un renfort identique à celui de l'année précédente.
L'affectation de ces nouveaux emplois traduit les priorités du Gouvernement :
- pour l'éducation nationale, l'enseignement scolaire devrait bénéficier de 9 561 postes destinés à « couvrir les besoins liés à l'augmentation des effectifs d'élèves, (de) poursuivre l'amélioration de la formation initiale et continue des enseignants et (de) mettre en oeuvre la réforme de l'éducation prioritaire » 7 ( * ) . À l'université, les nouveaux emplois doivent permettre d'améliorer l'encadrement et l'accompagnement des étudiants ainsi que d'engager des innovations pédagogiques en licence ;
- pour la sécurité, comme l'année précédente, il s'agit de renforcer les effectifs de police et de gendarmerie dans les zones de délinquance les plus sensibles, particulièrement les ZSP (zones de sécurité prioritaires) mais aussi de pourvoir à la création en 2013 de la direction générale de la sécurité intérieure ;
- pour la justice, 300 emplois sont destinés aux services pénitentiaires d'insertion et de probation.
3. Des efforts supplémentaires en conséquence dans les autres départements ministériels
En contrepartie des créations d'emplois dans les domaines prioritaires, 11 879 postes sont supprimés dans les autres secteurs, soit un taux d'effort moyen de 2 %. Les plus touchés sont le ministère de l'égalité des territoires et du logement, dans une moindre mesure la défense, puis les affaires sociales et la santé.
Parallèlement, l'évolution du nombre des départs en retraite, régressive en 2012 - le nombre de pensions nouvelles avait alors baissé de 16 176, soit - 27,38 % par rapport à 2012 -, a crû en 2013 de 7,13 % par rapport à l'année précédente (45 966). L'âge moyen de départ en retraite des fonctionnaires tend à augmenter par l'effet, notamment, de la réforme des retraites : il s'établit en 2013 à 60 ans et 7 mois dans la fonction publique d'État, soit deux mois de plus.
Depuis plusieurs années, votre commission et son rapporteur appellent les systèmes d'information de l'État à ventiler l'évolution des emplois entre administrations centrales et services déconcentrés. Cette information est essentielle pour apprécier la pertinence des décisions sur le fonctionnement quotidien des administrations de l'État. D'année en année, les suppressions d'emplois affectent notablement la capacité fonctionnelle et stratégique des directions territoriales. Le tableau ci-dessous transmis à votre rapporteur constitue une réponse éclairante.
Ventilation des plafonds d'emplois ministériels (2015)
* 3 Cf. ministère de la décentralisation et de la fonction publique.
* 4 Cf. article 34 de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique.
* 5 Cf. exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2015 (n° 2234 AN, XIV ème législature).
* 6 Cf. 11 609 ETPT pour les deux budgets : « contrôle et exploitations aériens » (10 827) et « publications officielles et information administrative » (782).
* 7 Cf. exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2015 (n° 2234 AN, XIV ème législature).