B. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre commission propose d'apporter plusieurs améliorations au texte présenté par le Gouvernement. Au-delà de ces mesures législatives, elle tient à souligner l'importance de la formation pour favoriser la prévention et la détection des cas de harcèlement et à attirer l'attention sur les besoins existants en matière de prise en charge des victimes.
1. Sur la définition de l'infraction
Votre commission soutient les améliorations rédactionnelles proposées par le rapporteur de la commission des Lois, Alain Anziani, concernant la définition du délit de harcèlement sexuel. Il lui paraît notamment plus opportun de définir le délit avant de préciser le quantum de la peine, comme il est de coutume en droit pénal. Votre commission est également favorable à la proposition de prévoir, pour tous les faits de harcèlement, une même peine de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, afin que le harcèlement répété ne soit pas moins sévèrement réprimé que celui constitué d'un fait unique.
Concernant les circonstances aggravantes , votre commission des affaires sociales propose d'introduire dans le code pénal la notion de vulnérabilité économique , ce qui permettrait de mieux tenir compte de la situation concrète des victimes ; la précarité sociale de nombreuses femmes - 80 % des emplois à temps partiel et 60 % des emplois en CDD sont occupés par des femmes - les rend plus fragiles face à leur harceleur ; abuser de leur situation de faiblesse est un comportement particulièrement choquant et méprisable, qui mérite d'être plus lourdement sanctionné.
2. Sur le harcèlement dans l'entreprise
Votre commission propose d'abord deux mesures législatives ponctuelles :
- la première vise à préciser explicitement que les délégués du personnel peuvent saisir immédiatement l'employeur lorsqu'ils constatent une atteinte aux droits ou à la santé des salariés résultant de faits de harcèlement ;
- la seconde tend à préciser que les services de santé au travail peuvent conseiller les employeurs, les salariés et leurs représentants sur les mesures à prendre pour prévenir les faits de harcèlement.
Votre commission souhaite également, rejoignant en cela les recommandations de la délégation aux droits des femmes, attirer l'attention du Gouvernement sur l'importance de la formation des représentants du personnel, des délégués syndicaux et des médecins du travail dans la prévention et la détection du harcèlement et dans l'accompagnement des victimes.
La lutte contre le harcèlement n'a pas toujours été au coeur des préoccupations de ces différents acteurs du monde du travail, même si une réelle prise de conscience a eu lieu depuis une vingtaine d'années. Si une bonne loi est indispensable, une vigilance accrue l'est aussi pour préserver en toutes circonstances la dignité des salariés.
Au-delà, la lutte contre les stéréotypes sexistes et la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, dès l'école, doivent être poursuivies afin de changer les mentalités et de faire disparaître les comportements discriminatoires à l'égard des femmes qui sont encore tolérés dans certains milieux professionnels ou sociaux.
3. Sur le harcèlement dans la fonction publique
Le projet de loi ne comporte pas de mesure intégrant dans la loi de 1983 sur les droits et obligations des fonctionnaires la nouvelle définition du harcèlement sexuel.
Dans un souci de lisibilité du droit, et afin de protéger dans les mêmes conditions salariés de droit privé et agents publics, votre commission propose de corriger cette lacune et de modifier, sans remettre en cause l'autonomie de la procédure disciplinaire dans l'administration, la définition du harcèlement sexuel figurant dans la loi de 1983.
4. Sur la prise en charge des victimes
Votre rapporteure pour avis a auditionné le professeur Charles Peretti, chef du service psychiatrie à l'hôpital Saint-Antoine à Paris, qui a mis en place voici quelques mois un numéro vert destiné aux victimes de harcèlement. Cette ligne d'écoute permet d'orienter les victimes vers des professionnels formés.
Les témoignages reçus montrent à quel point les victimes peuvent être profondément affectées par le harcèlement, qui provoque perte d'estime de soi et fragilité psychologique et mine leurs capacités de résistance.
Cette initiative, qui existe pour l'heure à une petite échelle, mérite d'être soutenue et pourrait inspirer la création, à l'initiative des agences régionales de santé (ARS), de cellules d'écoute afin d'offrir les mêmes conditions de prise en charge aux victimes de harcèlement sur l'ensemble du territoire national, en lien avec le 3919, le numéro vert destiné aux femmes victimes de violences ou d'agressions sexuelles.
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Considérant que le rétablissement rapide du délit de harcèlement sexuel, en des termes conformes à notre Constitution, s'impose afin d'assurer une protection effective des victimes, votre commission vous demande d'adopter ce projet de loi, complété par les amendements qu'elle vous soumet.