EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. L'OUVERTURE DU MARCHÉ EUROPÉEN DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
Le secteur des télécommunications est d'une importance cruciale pour l'économie européenne , puisqu'il représente près d'un tiers du marché mondial et continue de croître de façon substantielle chaque année, sous l'influence des « nouveaux usages » (web 2.0, téléphonie 3G +, VoIP...) touchant des catégories de consommateurs de plus en plus larges.
Le dynamisme de ce secteur est dû en grande partie à sa libéralisation , contrebalancée par une stricte régulation, à l'oeuvre depuis la fin des années 80. Jusqu'alors abandonné aux monopoles étatiques, il va en effet faire l'objet d'une dérèglementation en deux étapes :
- l'ouverture du marché des équipements, avec une directive de 1988 4 ( * ) ;
- l'ouverture du marché des services, à travers deux directives de 1990 5 ( * ) , la directive « service » et la directive relative à la fourniture d'un réseau ouvert, dite « ONP cadre ».
C'est finalement le 1 er janvier 1998 que le marché des télécommunications européen a été totalement ouvert à la concurrence .
Puis le législateur européen a adapté le cadre règlementaire en 2002 à travers l'adoption de cinq directives, souvent rassemblées sous l'appellation de « paquet télécoms » :
- la directive « cadre » 6 ( * ) ;
- la directive « autorisation » 7 ( * ) ;
- la directive « interconnexion » 8 ( * ) ;
- la directive « service universel » ; 9 ( * )
- la directive « vie privée et communications électroniques » 10 ( * ) .
Ce nouveau cadre normatif est venu confirmer l'objectif d'une concurrence effective sur l'ensemble du marché des communications électroniques, élaborer un cadre règlementaire harmonisé pour tous les réseaux de communications de ce type, renforcer la régulation sectorielle du secteur et le rôle des autorités nationales, et simplifier les conditions d'entrée sur ce marché.
II. LA NÉCESSAIRE RÉVISION DU « PAQUET TELECOMS »
Depuis son adoption, le marché des télécommunications a été marqué par la concentration des opérateurs , souvent les anciens monopoles, à même d'exercer sur le secteur une « puissance significative », ou bien encore par des ententes entre ses principaux acteurs, empêchant d'atteindre une parfaite concurrence.
Aussi le législateur européen a-t-il engagé, en 2006, un processus de révision du « paquet télécoms » . La Commission européenne a publié ses propositions de nouveaux textes règlementaires le 13 novembre 2007. A l'issue de deux années de procédure entre le Parlement et le Conseil, le nouveau cadre a été adopté le 25 novembre 2009 et résulte de trois textes :
- la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant la directive 2002/22/CE concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, la directive 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et le règlement (CE) n° 2006/2004 relatif à la coopération entre les autorités nationales chargées de veiller à l'application de la législation en matière de protection des consommateurs ;
- la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant les directives 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, 2002/19/CE relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion, et 2002/20/CE relative à l'autorisation des réseaux et services de communications électroniques ;
- le règlement (CE) n° 1211/2009 instituant l'ORECE.
Cette révision du cadre législatif existant ne modifie pas ses principes généraux, mais procède plutôt à des aménagements sur plusieurs points essentiels :
- l'ORECE est créé et des mécanismes de coopération et de contrôle entre régulateurs nationaux sont instaurés ;
- la gestion du spectre radioélectrique est assouplie ;
- la protection des consommateurs est renforcée.
Si le cadre juridique national a été largement façonné par ces évolutions communautaires, le législateur français a parfois devancé le législateur européen, avec l'adoption de dispositions dans différents textes récents :
- la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, dite « LCEN » ;
- la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite « loi Chatel » 11 ( * ) ;
- la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, dite « LME » 12 ( * ) ;
- la loi du 17 décembre 2009 de lutte contre la fracture numérique 13 ( * ) .
Il n'en reste pas moins que ces évolutions sont insuffisantes au regard des évolutions récentes du « paquet télécoms », qui appellent des modifications plus profondes des dispositions de nos textes et codes consacrés au secteur.
* 4 Directive 88/301/CEE de la Commission du 16 mai 1988 relative à la concurrence dans les marchés de terminaux de télécommunication.
* 5 Directive 90/387/CEE du Conseil du 28 juin 1990 relative à l'établissement du marché intérieur des services de télécommunication par la mise en oeuvre de la fourniture d'un réseau ouvert de télécommunication, et directive 90/388/CEE de la Commission, du 28 juin 1990 également, relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunication.
* 6 Directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et les services de communications électroniques.
* 7 Directive 2002/20/CE relative à l'autorisation des réseaux et de services de communications électroniques.
* 8 Directive 2002/19/CE relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion.
* 9 Directive 2002/22/CE relative au service universel et les droits d'utilisateurs au regard des réseaux et services de communication électroniques.
* 10 Directive 2002/58/CE relative au traitement des données à caractère personnel et à la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques.
* 11 Loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs.
* 12 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.
* 13 Loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique.