Article 128 - (art. L. 1312-1, L. 1336-10, L. 1534-1, L. 1534-7, L. 1534-2 à L. 1534-5, L. 1534-8 à L. 1534-15, L. 2431-2 à L. 2431-8, L. 3355-6, L. 3355-8 et L. 4223-5 du code de la santé publique) - Modification de dispositions pénales du code de la santé publique
Objet : Cet article a pour objet d'apporter des modifications de forme ou de fond à diverses dispositions pénales du code de la santé publique.
I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Les 1° et 2° de cet article portent sur des mesures de coordination avec les modifications du code de la santé publique résultant de l'article 1 er de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1 er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux de santé et aux contentieux en matière de transfusion sanguine 41 ( * ) .
Cette ordonnance a créé un chapitre VII nouveau ( « Dispositions pénales ») dans le titre III ( Prévention des risques sanitaires liés à l'environnement et au travail ) du livre III ( Protection de la santé et environnement ) de la première partie ( Protection générale de la santé publique ) du code de la santé publique.
Ces dispositions pénales figuraient antérieurement dans le chapitre VI de ce titre, consacré par l'article 2 de l'ordonnance aux dispositions relatives à l'agence française de sécurité sanitaire, de l'environnement et du travail 42 ( * ) (Afsset).
- le 1° procède à une coordination omise par l'ordonnance n° 2005-1087 précitée, en corrigeant, à l'article L. 1312-1 du code de la santé publique (définition des personnels compétents pour constater certaines infractions), une référence obsolète à l'article L. 1336-1-1 du code, devenu l'article L. 1337-1-1 ;
- le 2° propose, dans le même esprit, de « renuméroter » l'ancien article L. 1336-10, qui deviendrait un nouvel article L. 1337-10 inséré dans les dispositions pénales du chapitre VII.
Cependant, comme l'a souligné l'avis du Conseil d'Etat, la disposition proposée en ce sens est sans objet, car l'article 1 er de l'ordonnance n° 2005-1087 a abrogé l'article L. 1336-10 .
Celui-ci ne figurant plus dans le code, il est en effet impossible de le « renuméroter ».
En tout état de cause, il serait assez vain de rétablir dans le code de la santé publique la disposition pénale prévue par l'ancien article L. 1336-10. Elle sanctionnait en effet le non-respect d'une mesure d'interdiction prise en application de l'article L. 1335-2-2 du même code, article abrogé par le 1° du III de l'article 96 de la proposition de loi (cf. supra le commentaire de cet article).
Il convient donc de supprimer le 2° de cet article.
Les 3° à 5° de l'article s'efforcent de « toiletter » les dispositions pénales du code de la santé publique applicables aux Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).
* Les 3° et 4° proposent une nouvelle rédaction des articles L. 1534-1 et L. 1534-7.
L'article L. 1534-1 est relatif à l'application dans les TAAF des dispositions pénales contenues dans le livre I ( Protection des personnes en matière de santé ) de la première partie ( Protection générale de la santé ) du code de la santé publique.
L' article L. 1534-7 prévoit l'application dans les TAAF d'une partie des dispositions pénales du titre VII du livre II de la première partie du code de la santé publique (« Don et utilisation des éléments et produits du corps humain »), celles contenues dans les chapitres II à IV de ce titre, l'application des dispositions du chapitre I ( infraction aux dispositions relatives au sang humain ) étant quant à elle prévue à l'article L. 1534-6.
Pour une raison inexpliquée, la rédaction des dispositions relatives à l'application dans les TAAF des dispositions pénales du nouveau code de la santé publique, (qui reproduisent, selon la technique contestable du « code suiveur », un certain nombre d'articles du code pénal), s'est fondée sur une disposition du code pénal qui ne leur était pas applicable, l'article 711-1, et non sur celle qui leur était spécifique, l'article 711-2.
L'article 711-1 prévoit l'application dans certaines collectivités ou territoires ultra-marins des livres I er à V du code pénal « sous réserve des adaptations » prévues au titre VII du même code, qui concernent en particulier les délits définis par les lois bioéthiques, tandis que l'article 711-2 prévoit leur application dans les TAAF sans adaptation.
Cette erreur, qui figurait dans la nouvelle codification par ordonnance, en 2000, du code de la santé publique 43 ( * ) , n'a jamais été rectifiée.
Elle a conduit, comme le souligne le rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale, « à une reproduction injustifiée dans le code de la santé publique de dispositions d'adaptation du code pénal aux Terres australes et antarctiques françaises ».
Le même rapport en conclut qu'il convient « de remplacer cette référence erronée par celle de l'article 711-2 du code pénal » .
On peut ne pas partager cette conclusion : il n'est en effet nullement nécessaire de faire référence à l'article 711-2 du code pénal chaque fois qu'il s'agit d'appliquer aux TAAF des dispositions de ce code.
D'autant moins que les articles L. 1534-1 et L. 1534-7 ne font pas uniquement référence à des dispositions du code de la santé publique reproduisant des articles du code pénal, mais aussi à des dispositions pénales propres au droit de la santé publique 44 ( * ) .
En revanche, il faut très certainement supprimer les « références erronées » aux articles d'adaptation mentionnés à ces articles (L. 1533-2 à L. 1533-6 pour l'article L. 1534-1 et L. 1533-8 à L. 1533-16 pour l'article L. 21534-7), références d'autant plus erronées, d'ailleurs, que ces articles n'existent plus (ils ont été renumérotés en 2001 par l'article 11 de l'ordonnance relative à la transposition des directives communautaires dans le domaine de la protection contre les rayonnements ionisants 45 ( * ) et sont devenus les articles L. 1534-2 à L. 1534-6 et L. 1534-8 à L. 1534-16).
Enfin, il faut effectivement remplacer, au troisième alinéa (2°) de l'article L. 1534-1, la référence au « chapitre II » par une référence au « chapitre III ». Mais cette modification ne résulte pas des dispositions de la directive 2001-270 précitée, comme l'indique le rapport de la commission des lois de l'Assemblée nationale : elle est la conséquence de l'insertion, dans le titre III du livre premier de la première partie du code de la santé publique, par la loi du 9 août 2004 46 ( * ) , d'un nouveau chapitre consacré à la profession de conseiller en génétique.
Le 5° de l'article propose d'abroger des articles « suiveurs » d'articles d'adaptation du code pénal (dont ceux auxquels se réfèrent les articles L. 1534-1 et L. 1534-7).
Ces articles d'adaptation, qui n'avaient en fait aucune raison de s'appliquer aux TAAF, ont été abrogés par l'ordonnance n° 2008-1339 du 10 décembre 2008 relative à l'extension et à l'adaptation en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis et Futuna de dispositions portant sur la protection des droits des personnes en matière de santé.
S'il est certes souhaitable de rectifier autant que possible la rédaction des dispositions du code de la santé publique relatives aux dispositions pénales applicables aux TAAF, il serait sans doute illusoire de penser que ces ajustements formels suffisent : il faudrait en effet vérifier « au fond » le contenu des chapitres correspondants, dont il est douteux qu'il reflète exactement le droit applicable, la même question pouvant d'ailleurs se poser pour tous les chapitres relatifs à l'application du code à l'Outre mer.
Le 6° de l'article a pour objet de modifier le deuxième alinéa de l'article L. 3355-6 du code de la santé publique. Cet alinéa dispose que lorsqu'un débitant de boisson est condamné à une peine complémentaire d'interdiction d'exercice de sa profession, à titre temporaire ou définitif, le tribunal fixe la durée pendant laquelle il est tenu de continuer à verser à ses employés les « salaires, indemnités et rémunérations de toute nature » qu'ils percevaient.
Il est proposé d'étendre cette mesure protectrice des droits des employés au cas où l'établissement cesse son activité du fait d'une fermeture judiciaire.
Le 7° tend, en modifiant l'article L. 3355-8 du code de la santé publique, à favoriser la prise en compte des intérêts des créanciers d'un établissement ou du propriétaire non exploitant d'un débit de boisson.
Dans sa rédaction actuelle, cet article dispose que, lorsque le propriétaire exploitant d'un débit de boisson est condamné à une peine complémentaire d'interdiction d'exercice de la profession de débitant de boisson d'une durée supérieure à deux ans, le juge ordonne la vente aux enchères du fonds.
Lorsque l'exploitant interdit d'exercice professionnel n'est pas le propriétaire du fonds, celui-ci est autorisé à en reprendre l'exploitation nonobstant toute convention contraire, et quelle que soit la durée de l'interdiction.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale propose d'étendre ces dispositions au cas où a été prononcée la fermeture définitive de l'établissement :
- si l'établissement définitivement fermé était exploité par son propriétaire, le fonds serait vendu aux enchères publiques (modification du premier alinéa de l'article L. 3355-8) ;
- si l'établissement était exploité par un gérant, le propriétaire pourrait en reprendre l'exploitation, que la fermeture prononcée soit définitive ou temporaire (modification du troisième alinéa du même article).
Ce dispositif peut soulever quelques interrogations.
Il semble en effet singulier de prévoir qu'un tribunal doive simultanément prononcer la fermeture définitive d'un établissement et ordonner la vente aux enchères du fonds ou, plus singulièrement encore, autoriser la reprise de son exploitation, et ces décisions contradictoires seraient inapplicables.
D'autant plus que l'article L. 3333-1, alinéa 4, du code de la santé publique dispose que : « Lorsqu'une décision de justice a prononcé la fermeture définitive d'un débit de boissons, la licence de l'établissement est annulée. ».
Le fonds d'un débit de boissons sans licence et définitivement fermé serait, en pratique, invendable.
La reprise de son exploitation, par son propriétaire ou toute autre personne, serait constitutive du délit d'ouverture illicite de débit de boissons.
On notera que le dispositif proposé ne concerne que les fermetures prononcées à titre de peine complémentaire en application de l'article L. 3355-4 et non la fermeture définitive prononcée « automatiquement », en application, par exemple, de l'article L. 3352-10, en cas de récidive de l'infraction définie à l'article L. 3352-8 (exercice de la profession de débitant de boissons par un mineur non émancipé ou un majeur sous tutelle).
Le rapport de l'Assemblée nationale considère comme « logique » que le dispositif de l'article L. 3355-8 puisse s'appliquer en cas de fermeture définitive de l'établissement comme en cas d'interdiction professionnelle de l'exploitant : on peut juger difficile de suivre cette logique.
Au demeurant, le texte adopté par l'Assemblée nationale ne respecte pas sa propre logique : le premier alinéa du dispositif proposé ne prévoit la vente du fonds qu'en cas de fermeture définitive de l'établissement 47 ( * ) , tandis que le second autoriserait le propriétaire non exploitant d'un débit de boissons ayant fait l'objet d'une mesure de fermeture à reprendre l'exploitation « quelle que soit la durée de la fermeture » , ce qui ne change d'ailleurs rien au fait que l'exploitation d'un établissement fermé est illicite.
Votre commission estime donc préférable de ne pas retenir le dispositif proposé par le 7° de cet article.
Enfin, le 8° de cet article a pour objet de réunir dans un seul article les incriminations relatives à l'usurpation du titre de pharmacien.
Selon le droit en vigueur, l'usurpation du titre de pharmacien fait l'objet de deux articles du code de la santé publique :
- l'article L. 4223-2 réprime l'usage sans droit de la qualité de pharmacien ou « d'un diplôme, certificat ou autre titre légalement requis pour l'exercice de cette profession » ;
- l'article L. 4223-5 , inséré dans le code de la santé publique par la loi relative aux droits des maladies et à la qualité du système de santé 48 ( * ) , réprime le fait de se prévaloir de la qualité de pharmacien sans remplir les conditions exigées par l'article L. 4221-1 pour exercer cette profession 49 ( * ) (conditions de diplôme, mais aussi de nationalité et inscription à l'ordre des pharmaciens).
Le texte adopté par l'Assemblée nationale propose, en suivant l'avis du Conseil d'Etat, une nouvelle rédaction du premier alinéa de l'article L. 4223-2 qui réprimerait ainsi à la fois l'usurpation de la qualité de pharmacien, en renvoyant à l'article L. 4221-1 et donc à la triple condition de diplôme, de nationalité et d'inscription à l'ordre, et l'usurpation de tout diplôme, certificat ou titre requis pour exercer la profession de pharmacien.
Ces délits seront punis des peines principales applicables au délit d'usurpation de titre défini à l'article 433-17 du code pénal (un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende), les peines complémentaires et les sanctions applicables aux personnes morales étant prévues aux deuxième et troisième alinéas du texte en vigueur.
On observe en revanche que le texte adopté par l'Assemblée nationale omet d'abroger l'article L. 4223-5 que la modification apportée à l'article L. 4223-2 rend redondant.
II - La position de votre commission
En fonction de ces observations, votre commission a adopté six amendements à cet article :
un amendement supprimant le 2° ;
deux amendements rédactionnels au 3° ;
un amendement rédactionnel et de cohérence au 4° ;
un amendement de suppression du 7° ;
un amendement complétant l'article par un alinéa tendant à l'abrogation de l'article L. 4223-5 du code de la santé publique.
Elle demande à la commission saisie au fond d'adopter cet article ainsi modifié.
* 41 Cette ordonnance a été prise en application de l'article 73 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit et ratifiée « en bloc » par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures.
* 42 Le chapitre VI a été abrogé par l'ordonnance n° 2010-18 du 7 juin 2010 de coordination avec la loi dite « HPST », qui a prévu la création d'une nouvelle agence, l'agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, substituée à l'Afsset et à l'agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa).
* 43 Ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de la santé publique.
* 44 Ainsi, pour ce qui est de l'article L. 1534-1, les dispositions pénales (chapitre III) du titre III relatif à l'examen des caractéristiques génétiques, à l'identification génétique et à la recherche génétique contiennent des dispositions qui ne sont pas inscrites dans le code pénal (article L. 1135-8 à L. 1133-10). C'est également le cas des articles L. 1115-1 et L. 1115-2, qui répriment les délits de prestations d'hébergement de données de santé à caractère personnel sans être titulaire de l'agrément nécessaire, et de traitement de ces données en violation des conditions de l'agrément.
* 45 Ordonnance n° 2001-270 du 28 mars 2001.
* 46 Loi n° 2004-806 relative à la politique de santé publique (article 111-II).
* 47 Le Conseil d'Etat ayant observé à juste titre que la vente d'un établissement fermé temporairement aurait pour effet de rendre sa fermeture définitive.
* 48 Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 (article 64).
* 49 Cette nouvelle disposition tendait à revenir sur une jurisprudence de la Cour d'appel de Paris qui avait jugé que le terme de « pharmacien » pourrait renvoyer simplement à la formation d'un diplôme en pharmacie, ce qui permettait aux entreprises ou commerces de parapharmacies employant des diplômés non inscrits à l'ordre, d'entretenir un doute auprès des consommateurs.