B. UNE DIPLOMATIE CULTURELLE EN CRISE
1. La carte du réseau culturel a été transformée
Le réseau des établissements culturels français à l'étranger a beaucoup évolué au cours de ces dernières années .
La carte du réseau a été rationalisée pour éviter les « doublons » et permettre une pleine complémentarité géographique entre les instituts et centres culturels, d'une part, et les Alliances françaises d'autre part.
Traditionnellement, les centres et instituts culturels sont plutôt présents en Europe, en Afrique et au Levant, alors que les Alliances françaises se sont surtout implantées en Amérique du Nord, en Amérique latine, en Asie et en Russie.
Contrairement à une idée répandue, il n'existe plus aujourd'hui de « doublons » entre les deux structures, Mexico faisant figure d'exception, situation qui s'explique, il est vrai, par la dimension de cette ville.
Mais on a surtout assisté à un vaste redéploiement du réseau avec la fermeture de nombreux établissements en Europe occidentale pour permettre l'ouverture de nouveaux établissements dans les zones prioritaires, telles que l'Europe orientale, les pays émergents d'Asie et le pourtour de la Méditerranée. Ainsi, le nombre de nos implantations en Europe occidentale est passé de 52 à 33 entre 1999 et 2005, soit une réduction d'un tiers environ. Plus de la moitié des centres culturels situés en Allemagne ont été fermés.
Par ailleurs, la restructuration du réseau devrait se poursuivre en 2010 avec la transformation de certains centres ou instituts culturels en antennes (en Allemagne notamment), voire la fermeture de plusieurs d'entre eux en Europe (comme Vienne ou Stockholm, Turin), en Afrique (comme Saint-Louis au Sénégal) ou en Amérique du Sud (Santiago).
Ainsi, sous couvert de rationalisation, on peut se demander si le véritable objectif de cette réforme n'est pas de poursuivre le mouvement de fermeture de centres ou d'instituts culturels.
A cet égard, votre rapporteur pour avis regrette vivement qu'aucune évaluation n'ait été faite par le ministère de la transformation ou de la fermeture des centres ou instituts culturels en Allemagne.
Inversement, le réseau des Alliances françaises connaît une forte croissance. Ainsi, quatorze Alliances françaises en Chine et une dizaine en Russie ont été créées en moins de dix ans.
Par ailleurs, quelques centres franco-allemands ont été créés, notamment au Luxembourg, à Turin et à Ramallah, et d'autres sont en projet (Moscou).
2. La forte réduction des crédits
Le coût pour l'Etat du réseau culturel français, tous établissements confondus, ne dépasserait pas 136 millions d'euros en 2008 , soit l'équivalent du budget d'un établissement public comme la Bibliothèque nationale de France.
En outre, comme on l'a vu précédemment, les crédits de l'action culturelle extérieure ont fait l'objet d'une forte baisse ces dernières années.
Passant d'un montant de 105 millions d'euros en 2008 à un montant estimé à 92 millions d'euros dans le programme 185, les crédits consacrés au rayonnement culturel et scientifique dans les pays de l'OCDE (hors AEFE), accusent une baisse de - 13 % en 2009. La baisse des crédits consacrés aux projets de coopération culturelle est également visible au sein du programme 209 consacré à la coopération en direction des pays en développement : elle serait de l'ordre de - 19 % en 2009.
Compte tenu de l'importance des coûts fixes du réseau, en particulier des dépenses de personnels ou de loyers, cette diminution a été principalement répercutée sur les crédits d'intervention. Ainsi, les dépenses de programmation culturelle des différents postes auraient été réduites de 15 % en moyenne en 2009, cette baisse pouvant atteindre parfois 20 à 30 %.
Malgré une « rallonge budgétaire » pour la coopération culturelle, cette baisse devrait se poursuivre en 2010, les crédits d'intervention passant à 88 millions d'euros (-5 %). Il est vrai que, sans cette « rallonge », la baisse aurait été encore plus prononcée, puisque, d'après la loi de programmation triennale, ces crédits devaient s'établir à 80 millions d'euros (- 11 %) en 2010 pour n'atteindre plus que 77 millions d'euros (- 10 %) en 2011.
Cette diminution des crédits consacrés à l'action culturelle extérieure est d'autant plus préoccupante qu'elle fait suite à une série de baisses dans les années antérieures. En effet, on estime que les financements du ministère des Affaires étrangères et européennes destinés au rayonnement culturel et scientifique auraient baissé de 10 % entre 2005 et 2008.
L'ampleur de cette baisse des crédits est telle qu'elle menace désormais le coeur même de notre action culturelle extérieure. C'est la raison pour laquelle la commission des Affaires étrangères et la commission des Affaires culturelles du Sénat avaient fortement et de manière unanime dénoncé cette diminution des crédits consacrés à l'action culturelle, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2009 1 ( * ) .
Comme le relèvent les rédacteurs du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France, dans l'introduction de leur rapport, « on ne peut réduire indéfiniment ces effectifs et ces moyens sans remettre en cause les ambitions européennes et internationales assignées à notre action extérieure ».
* 1 Voir à ce sujet le communiqué de presse de la commission des Affaires étrangères et de la Défense du 19 novembre et celui de la commission des Affaires culturelles du 20 novembre 2008.