2. Les amendements de votre commission des finances : une élimination complète du biais fiscal

Votre commission des finances se félicite des progrès très substantiels réalisés par le présent projet de loi en ce qui concerne la neutralité fiscale des PPP. Certains ajustements doivent désormais être prolongés par des mesures règlementaires : une modification du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 relatif au salaire du conservateur des hypothèques s'impose, afin que la publication obligatoire des titres d'occupation du domaine public pour les différents PPP s'accompagne, comme dans le cas de l'Etat, du paiement d'un salaire fixe de 15 euros, plutôt que d'un salaire de 0,1 % portant sur la valeur des droits faisant l'objet de la publication.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis n'ignore pas la « doctrine constante » de la commission des finances s'agissant des dispositions relatives aux exonérations d'impositions locales, qui prévoit de les réserver aux seules exonérations de fiscalité locale non compensées et décidées par les collectivités territoriales . Le principe rappelé dans un rapport d'information 30 ( * ) de notre collègue, le président Jean Arthuis, est le suivant : « préserver les assiettes locales en confiant la gestion et le coût de toute nouvelle mesure d'exonération, de dégrèvement ou d'abattement aux collectivités territoriales percevant les impôts correspondants ».

Toutefois, certaines exonérations de taxes d'urbanisme s'appliquent déjà aux immeubles appartenant aux personnes publiques. Or, les PPP consistent en un portage juridique d'immeubles destinés à appartenir aux collectivités publiques. On peut donc considérer que les exonérations de taxes d'urbanisme, qui pourraient s'appliquer aux PPP, constituent le prolongement de l'exonération de principe des propriétés publiques, et qu'elles ne constituent qu'une précision dans la définition de l'assiette de la taxe.

a) Le sort d'un certain nombre de taxes d'urbanisme devrait être réglé par voie règlementaire

Le présent projet de loi n'a pas réglé un certain nombre de distorsions s'appliquant encore aux taxes d'urbanisme, comme la taxe locale d'équipement.

Votre rapporteur pour avis n'a pas cru toutefois souhaitable de proposer des amendements, en qui concerne cette taxe et les taxes assimilées, car les dispositions nécessaires paraissent relever du pouvoir règlementaire. Il souhaite cependant que, s'agissant d'une définition de l'assiette d'une taxe, les orientations dessinées par le Parlement soient respectées.

Le 1° du I de l'article 1585 C du code général des impôts prévoit que sont exclues du champ de la taxe locale d'équipement les constructions qui sont destinées à être affectées à un service public ou d'utilité publique, et dont la liste est fixée par un décret en Conseil d'Etat codifié à l'article 317 bis de l'annexe II du code général des impôts . Cet article prévoit une exonération de taxe locale d'équipement pour les constructions édifiées par l'Etat, les collectivités locales et leurs groupements exonérées de taxe foncière sur les propriétés non bâties , en raison de leur affectation à un service public ou d'utilité générale, et non productifs de revenus.

Pour votre rapporteur pour avis, une modification de l'article 317 bis de l'annexe II du code général des impôts est indispensable, et doit concerner l'ensemble des formules juridiques de PPP . Elle devrait être rédigée ainsi, et viser, sur le modèle de l'article 26 du présent projet de loi : « les constructions édifiées par ou pour le compte de l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements, lorsqu'ils sont affectés à un service public ou d'utilité générale et qu'ils ne sont pas productifs de revenus. La condition relative à l'absence de production de revenus doit être appréciée au regard de la personne publique au domaine de laquelle l'immeuble doit être incorporé ».

Une telle rédaction d'ordre règlementaire entraînerait automatiquement une exonération des taxes assimilées à la taxe locale d'équipement : la taxe départementale des espaces naturels sensibles, prévue à l'article L. 142-2 du code de l'urbanisme, la taxe sur les dépenses des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (TDCAUE), prévue à l'article 1599 B du code général des impôts et la taxe complémentaire à la taxe locale d'équipement, prévue à l'article 1599 octies du code général des impôts.

En revanche, votre rapporteur pour avis souhaite proposer deux amendements portant articles additionnels après l'article 28 , visant à aligner le régime des PPP sur celui des équipements publics en ce qui concerne la taxe d'enlèvement des ordures ménagères et la redevance d'archéologie préventive.

L'article 1521 du code général des impôts exonère de taxe d'enlèvement des ordures ménagères les locaux sans caractère industriel ou commercial loués par l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, scientifiques, d'enseignement et d'assistance et affectés à un service public. Pourraient être aussi visés les locaux sans caractère industriel ou commercial mis à disposition des collectivités publiques dans le cadre des opérations visées à l'article 1048 ter précité du code général des impôts, qui recense l'ensemble des modalités juridiques des PPP.

De même, l'article L. 524-7 du code du patrimoine prévoit l'application d'un tarif favorable pour le calcul de la redevance d'archéologie préventive pour les constructions destinées à un service public ou d'utilité publique. L'amendement de votre commission des finances vise à appliquer le même tarif pour les équipements réalisés dans le cadre des opérations visées à l'article 1048 ter du code général des impôts.

b) Une clarification encore souhaitable de certaines dispositions fiscales

Votre commission des finances vous propose quatre amendements de clarification relatifs au statut fiscal des PPP.

Le premier propose une nouvelle rédaction de l'article 28 du présent projet de loi, afin de la rendre plus lisible, et de la compléter en visant, d'une part, le retrait des baux emphytéotiques administratifs ou des baux emphytéotiques hospitaliers et, d'autre part, les cessions d'autorisations d'occupation temporaire, de baux emphytéotiques ou de contrats de partenariat. A défaut, ces actes seraient soumis à la taxe de publicité foncière à taux proportionnel.

Le deuxième amendement portant article additionnel après l'article 28 prévoit une précision technique s'agissant de la fiscalité des cessions de créance liées aux contrats de partenariat, aux baux emphytéotiques ou aux autorisations d'occupation temporaire du domaine public, en exonérant ces cessions de la taxe de publicité foncière.

De même, le troisième amendement portant article additionnel après l'article 28 vise à obtenir du gouvernement une clarification fiscale s'agissant de l'assujettissement du produit de la cession de créances tirée d'un contrat de partenariat, d'un bail emphytéotique ou d'une autorisation d'occupation temporaire à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année au cours de laquelle la cession est intervenue . Comme en matière comptable, ce produit pourrait être traité comme une avance reçue du cessionnaire, et remboursable par affectation des loyers futurs.

Enfin, le quatrième amendement portant article additionnel après l'article 28 vise à exonérer de contribution annuelle sur les revenus locatifs la mise à disposition de locaux dans le cadre de partenariats public-privé. Dans le droit existant, cette mise à disposition est susceptible, lorsque l'opération n'est pas assujettie à la TVA, de donner lieu au paiement de la contribution.

c) La neutralisation de la TVA pour les collectivités territoriales est une nécessité

A l'initiative de votre commission des finances, et de notre collègue Jean-Pierre Fourcade, le cas de l'éligibilité des frais financiers des contrats de partenariat au FCTVA a été évoqué lors de l'examen d'un amendement au projet de loi de finances pour 2007 . En effet, une collectivité pouvait être financièrement pénalisée en recourant à un contrat de partenariat plutôt qu'à un marché public, les frais financiers correspondant à l'emprunt étant soumis à la TVA dans le premier cas, et non dans le second. Une collectivité qui, par exemple dans le cadre d'un marché public, souscrit directement un emprunt auprès d'un établissement financier, ne supporte pas de TVA sur les frais financiers. L'article 261 C du code général des impôts prévoit que « sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée (...) l'octroi et la négociation de crédits, la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés, (...) ».

Le gouvernement s'est engagé, lors de l'examen de cet amendement à rendre ces dépenses éligibles au FCTVA par circulaire, ce qu'il n'a pas fait, considérant, d'une part, que ces dépenses constituaient des dépenses de fonctionnement et, d'autre part, que la mesure aurait pour effet d'atténuer la rigueur de la règle d'or. Le problème du biais entre investissement « classique » et PPP reste donc posé en ce qui concerne les frais d'emprunt.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis propose un amendement portant article additionnel après l'article 28 visant à l'alignement du régime des baux emphytéotiques administratifs (BEA) sur celui des contrats de partenariat 31 ( * ) en matière d'éligibilité au FCTVA. L'éligibilité au fonds de compensation pour la TVA serait subordonnée à la décision de la personne publique d'intégrer le bien dans son patrimoine conformément aux clauses du contrat. A la fin anticipée ou non du contrat, si l'équipement n'appartenait pas au patrimoine de la personne publique, celle-ci reverserait à l'Etat la totalité des attributions reçues. En outre, ne seraient concernés que les baux emphytéotiques administratifs ayant fait l'objet d'une démarche d'évaluation préalable sur la base de celle prévue s'agissant des contrats de partenariat.

Il convient de préciser que les baux emphytéotiques administratifs (BEA) constituent une modalité de partenariat public-privé particulièrement adaptée aux investissements, de taille limitée, des petites collectivités territoriales. La complexité des contrats de partenariat ne parait pas en effet adaptée à ces petites collectivités.

La direction du budget, auditionnée par votre rapporteur pour avis, a souligné qu'une telle mesure aurait pour effet de dégrader la norme de dépense, puisque le FCTVA, traité comme un prélèvement sur recettes, figure désormais dans la norme élargie de progression de la dépense. Cet argument doit toutefois être relativisé, car l'amendement proposé par votre rapporteur pour avis aurait un effet de substitution entre les différents modes de réalisation de l'investissement public, sans accroissement de la dépense globale du FCTVA.

Par ailleurs, la mesure aurait pour effet de rendre la règle d'or moins contraignante qu'aujourd'hui, en transférant des dépenses de la section de fonctionnement vers la section d'investissement. Pourtant, dans une perspective économique, on voit mal comment un investissement pourrait être discriminé comptablement sur la base de son seul montage juridique.

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Sous le bénéfice de l'adoption de six articles additionnels après l'article 28 visant à étendre le principe de neutralité fiscale proposé par le présent projet de loi, votre commission des finances émet un avis favorable à l'adoption des articles 26 et 27 sans modification, et à celle de l'article 28 ainsi modifié .

* 30 Rapport d'information n° 289 (2002-2003) sur les perspectives d'évolution de la fiscalité locale.

* 31 La partie correspondant à l'investissement est éligible au FCTVA en application de l'article 18 de l'ordonnance du 17 juin 2004 précitée.

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