2. Une organisation clarifiée

a) Une triple mission pour l'Eprus

On l'a vu, après les errements des divers fonds de financement des urgences et des crises, la loi du 5 mars 2007 a créé l'Eprus et lui a confié une triple mission :

- la gestion administrative et financière de la réserve sanitaire, dont la coordination et la doctrine de recours relève de la compétence de la DGS ;

- l'organisation d'exercices pour valider ou améliorer les plans de réponse aux risques sanitaires ;

- l'acquisition, la fabrication, l'importation, le stockage, la distribution et l'exportation de produits et services nécessaires à la protection de la population face à des menaces sanitaires graves - notamment de pandémie grippale ou d'attaque bioterroriste -, mais aussi pour répondre à des besoins de santé publique non couverts en raison d'une rupture de commercialisation.

Les stocks de précaution du ministère de la santé

Le stock national, qui appartient à l'Etat mais dont la gestion est désormais confiée à l'Eprus, s'est constitué à partir de 2001. Il représente aujourd'hui une valeur d'achat supérieure à 800 millions d'euros , un volume d'environ 100 000 palettes et comprend une cinquantaine de références, dont :

- des médicaments : antiviraux, antibiotiques (fluroquinolones, doxycyclines), iode stable et antidotes ;

- des vaccins (vaccin antivariolique, vaccin H5N1, vaccins anti-méningococciques) et des immunoglobulines antivaccines ;

- du matériel de vaccination (seringues, embouts, pipettes, collecteurs d'aiguilles, etc.) ;

- des excipients pour la transformation de l'Oseltamivir en poudre ;

- des dispositifs de protection individuelle (masques FFP2) ou collective (masques chirurgicaux).

Les options de stockage varient en fonction du type de produits : officines, pharmacies de l'armée, lieux de production, etc. Il en est de même des modalités de distribution : certains produits (les antiviraux par exemple) font l'objet de plans s'appuyant sur la chaîne de distribution du médicament ; pour d'autres, il est prévu de faire appel à la réquisition des moyens.

L'Eprus est donc un outil logistique puisque la DGS continue à prendre les décisions relatives à ces domaines.

Il a été créé sous la forme d'un établissement public administratif. Son conseil d'administration est présidé par Jean-Louis Bühl, nommé par décret du Président de la République, et est composé à parité de représentants de l'Etat et des trois principaux régimes d'assurance maladie obligatoire désignés par les directeurs généraux de leurs caisses centrales (les deux tiers des sièges reviennent à la Cnam). Le conseil d'administration s'est réuni pour la première fois le 10 septembre 2007.

L'établissement est divisé en trois services en fonction ses différentes missions : un service de gestion de la réserve sanitaire, un service chargé des achats de produits et une antenne de gestion des crises.

b) Des sources de financement multiples pour des dépenses anticipées

Les recettes de l'Eprus sont majoritairement constituées d'une contribution à la charge des régimes obligatoires d'assurance maladie, dont le montant est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale, et d'une subvention de l'Etat.

A sa création, l'Eprus a également hérité des réserves du Fopris, soit 54,3 millions d'euros. De fait, son budget primitif pour 2007 fixe les recettes prévisionnelles à 354 millions d'euros en autorisations d'engagement (241 millions d'euros en crédits de paiement), dont 179 millions d'euros de subvention de l'Etat, ex-Fopris compris, et 175 millions d'euros de contribution des régimes d'assurance maladie.

En 2007, ces crédits ont financé un plan de recrutement de dix-sept équivalents temps plein (ETP) mais la principale source de dépenses a été constituée par l'acquisition de produits et par l'activité de gestion du stock de précaution. A ce stade, 80 millions d'euros ont déjà été engagés pour l'achat de 169 millions de masques FFP2, qui devraient être renouvelés, la date de péremption du stock étant atteinte.

D'ici la fin de l'année, sont en outre prévus l'acquisition d'antiviraux pour des usages en prophylaxie, ainsi que l'achat d'immunoglobulines antibotuliniques et de six cents respirateurs mixtes de réanimation d'infrastructure hospitalière pour un total de 228 millions d'euros. Néanmoins, cet objectif a semblé quelque peu ambitieux à atteindre en quelques mois, selon le directeur de l'établissement auditionné par votre rapporteur.

Selon les préconisations de la mission de conseil et d'appui de l'Igas, dont le rapport a défini la politique de renouvellement et d'acquisition des produits de précaution 5 ( * ) , ce programme devrait être poursuivi en 2008 pour 144,2 millions d'euros.

Programme de renouvellement des stocks de précaution pour les années 2007 et 2008

2007 réalisé

2007 à réaliser

2008 prévisions

Plan peste-charbon-tularémie : renouvellement des antibiotiques

2 000 000

16 300 000

Plan variole

530 000

Vaccins Anthrax

1 000 000

Antidotes

5 000 000

7 000 000

Achat d'immunoglobulines

10 000 000

Total biotox/piratox

0

17 530 000

24 300 000

Antiviraux

92 000 000

45 000 000

Masques

108 692 266

83 000 000

38 000 000

Vaccins

Produits autres

10 000

Autres équipements

35 700 000

35 000 000

Total pandémie grippale

108 692 266

210 710 000

118 000 000

Acquisition de 3 500 doses MenBvac

29 399

Acquisition de 100 000 doses MenBvac

2 500 000

Acquisition 50 000 vaccins + réservation 1 500 000

1 900 000

Total épidémiologie

2 529 399

0

1 900 000

Total programme achats

111 221 665

228 240 000

144 200 000

Source : Direction générale de la santé

A cet effet, l'Eprus recevra 150 millions d'euros en 2008 en autorisations d'engagement, soit 75 millions d'euros de subvention de l'Etat sur l'action 2 du programme « veille et sécurité sanitaires » (55 millions d'euros en crédits de paiement) et 75 millions d'euros de l'assurance maladie.

Ces crédits serviront également, dans une moindre mesure, au fonctionnement de l'établissement, notamment :

- l'installation dans de nouveaux locaux (l'Eprus est actuellement hébergé, moyennant un loyer, par le ministère de la santé) pour un budget de 4 millions d'euros ;

- le recrutement de quinze ETP supplémentaires, pour établir les effectifs de l'Eprus à trente-cinq ETP à la fin de l'année 2008 (2,5 millions d'euros) ;

- les dépenses liées à la logistique et au stockage des produits (8,2 millions d'euros) ;

- la mise en place de la réserve sanitaire pour un montant de 5 millions d'euros.

La réserve sanitaire

La réserve sanitaire comprendra 10 000 professionnels de santé en activité ou retraités depuis moins de trois ans, ainsi que des personnes poursuivant des études médicales et paramédicales sous conditions de niveau de formation. Dans tous les cas, il s'agira de volontaires , comme c'est le cas pour les réserves militaire ou de sécurité civile.

L'objectif essentiel est de pouvoir mobiliser immédiatement des professionnels de santé, en réponse à une situation sanitaire dépassant les moyens ordinaires du système de soins.

Elle pourra être affectée en structure hospitalière, publique ou privée, ou en renfort au sein d'un cabinet libéral. Une partie de la réserve sanitaire pourra également être envoyée à l'étranger en cas de catastrophe sanitaire. A cet égard, ce nouveau dispositif modernise le système de mobilisation de personnels de santé dans l'urgence créé par les Samu de France dans les années quatre-vingt et officialisé par une circulaire de 1993 sous le nom de Samu mondial.

Pour son fonctionnement, la réserve sanitaire sera divisée en une réserve d'intervention et une réserve de renfort , dont les règles de mobilisation seront fonction de l'intensité de la crise. La réserve d'intervention sera appelée en priorité et ses membres seront soumis à des règles de formation et de perfectionnement plus contraignantes. Elle pourra seule être envoyée à l'étranger.

La réserve de renfort permettra aux volontaires de s'engager sur le fondement de contraintes de disponibilité moindres. Elle sera mobilisée en second lieu, si le système sanitaire appuyé par la réserve d'intervention ne parvient plus à faire face à ses obligations.

La création effective de la réserve sanitaire est actuellement suspendue à la parution de trois arrêtés d'application du décret du 27 août 2007 et à la décision du conseil d'administration de l'Eprus sur les modalités de rétribution des réservistes. Votre commission souhaite que ces obstacles soient rapidement levés pour que cet instrument soit rapidement mobilisable.

* 5 Rapport de Michel Gagneux pour l'Igas. Novembre 2006.

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