2. Une prise de conscience de l'importance de l'économie de la culture en Europe
La Commission européenne a commandé la réalisation d'une étude sur l'économie de la culture en Europe . Il s'agit de la première étude sur ce thème au niveau européen, ce qui illustre une prise de conscience récente sur l'importance du secteur, dont votre rapporteur se réjouit.
Cette étude souligne à la fois la contribution directe (en termes de PIB, de croissance et d'emploi) et la contribution indirecte (compte tenu des liens avec la créativité et l'innovation, avec le secteur des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) et du développement et de l'attractivité des régions), du secteur de la culture et de la création, à l'Agenda de Lisbonne sur le développement d'une économie de la connaissance.
Quelques chiffres méritent d'être relevés :
- le chiffre d'affaires du secteur culturel et de la création était de 654 milliards d'euros en 2003 ; par comparaison, précisons que celui de l'industrie s'élevait à 271 milliards d'euros en 2001 et celui généré par le secteur des Nouvelles technologies de l'information et de la communication, à 541 milliards d'euros en 2003 (pour l'Union européenne à 15) ;
- le secteur a contribué au produit national brut (PNB) communautaire à hauteur de 2,6 % en 2003 ; par comparaison, la contribution de l'industrie chimique, du caoutchouc et du plastique était de 2,3 % ;
- sa valeur ajoutée a crû de 19,7 % de 1999 à 2003 ; elle a donc été de 12,3 % plus élevée que la croissance du reste de l'économie ;
- en 2004, 5,8 millions de personnes au moins étaient employées dans le secteur, soit 3,1 % des emplois totaux en Europe.
Alors que l'emploi total a décru dans l'Union européenne à 25, entre 2002-2004, il a augmenté dans le secteur culturel (+1,85 %). A cet égard, il est intéressant de préciser que :
• 46,8 % des personnes travaillant dans le
secteur ont au moins un diplôme universitaire (contre 25,7 % dans
l'emploi total) ;
• la part des travailleurs indépendants est
plus du double que dans l'emploi total (28,8 %, contre
14,1 %) ;
• le secteur enregistre un taux de 17 % de
travailleurs temporaires (13,3 % dans l'emploi total) ;
• la part de travailleurs à temps partiel est
plus élevée (un travailleur sur quatre, contre 17,6 % dans
l'emploi total).
L'étude montre donc comment la culture tire le développement économique et social, ainsi que l'innovation et la cohésion sociale en Europe. Les secteurs culturels et de la création, ainsi que leurs emplois, s'accroissent plus rapidement que dans le reste de l'économie. Le secteur pourvoit de nombreux emplois, divers et requérant souvent un haut niveau de qualification. Enfin, il tire aussi la croissance d'autres secteurs de l'économie européenne, et en particulier le secteur des NTIC.
L'interdépendance est, en effet, forte entre le secteur culturel et de la création et celui des NTIC et le développement des nouvelles technologies dépend en grande partie de l'existence d'un contenu attractif :
- les ventes de DVD, équipements d'enregistrement, baladeurs MP3, « home cinema », décodeurs et écrans plats de télévision, dépendent de la disponibilité de contenus attractifs (jeux, films, musique) ;
- le développement de la téléphonie mobile et de ses réseaux est fondé sur la disponibilité de services attractifs à forte valeur ajoutée en contenu créatif.
Le monde de la musique a vécu une véritable révolution qui n'a pas été sans difficulté pour l'industrie. Les jeux vidéo sont aussi largement dépendants des transformations technologiques actuelles. Les industries du film et de la vidéo, comme celle de l'édition, expérimentent des développements semblables à ceux que l'industrie de la musique a dû traverser. Et même des secteurs traditionnels comme le patrimoine, les arts visuels et les arts du spectacle ne peuvent faire l'économie d'adaptations substantielles de leurs modèles économiques aux défis posés par les nouvelles technologies.
Le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, en cours d'examen par le Parlement, illustre également cette situation. A cet égard, votre rapporteur se félicite des apports de votre commission des affaires culturelles tendant à soumettre l'octroi d'une chaîne supplémentaire sur le réseau de diffusion aux opérateurs « historiques » à des obligations spécifiques en matière de production cinématographique et audiovisuelle d'expression originale française et européenne.
Par ailleurs, il est important de souligner l'importante contribution du secteur à la promotion de l'intégration des pays européens et de leurs cultures, dans toute leur diversité.
Votre rapporteur exprime le voeu que cette prise de conscience du rôle de la culture et de la création se traduise dans les politiques engagées ou encouragées par la Commission européenne.
Il estime, en outre, qu'elle doit aussi s'accompagner de la reconnaissance des spécificités des industries culturelles, qui justifient des politiques adaptées. A cet égard, la convention de l'UNESCO sur la diversité culturelle constitue une avancée significative.