N°
342
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 10 juin 2003
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, pour la confiance dans l' économie numérique ,
Par M.
Louis de BROISSIA,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Jacques Legendre, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; M. François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernand Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Serge Lepeltier, Mme Brigitte Luypaert, MM. Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Dominique Mortemousque, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jacques Pelletier, Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, André Vallet, Jean-Marie Vanlerenberghe, Marcel Vidal, Henri Weber.
Voir les
numéros :
Assemblée nationale
(
12
ème
législ.)
:
528, 608
,
612
et T.A.
89
Sénat
:
195
,
345
et
351
(2002-2003)
Audiovisuel et communication. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi correspond à la volonté du
Gouvernement
1(
*
)
de
« donner un nouvel élan au chantier de la
société de l'information ».
Ce chantier n'est pas nouveau. En effet, le précédent
Gouvernement avait déjà tenté de le mener à bien
mais, faute d'ambitions dans un domaine pourtant essentiel pour l'avenir
économique de notre pays, s'était arrêté au milieu
du gué, provoquant l'incompréhension des professionnels de
l'Internet et suscitant de sérieuses interrogations chez les
consommateurs en ligne, chaque jour plus nombreux.
Tirant les leçons de cette malheureuse expérience,
l'équipe actuelle a décidé de sortir de la logique des
« grands plans », qui créent plus d'attentes qu'ils
ne règlent de problèmes, et de « grandes
lois » qui mettent tellement de temps à être
votées qu'elles sont déjà en décalage avec les
technologies et les pratiques quand elles entrent en vigueur.
Premier d'une série de trois projets de loi destinés à
« préciser les règles du jeu dans la
société de l'information », ce texte, fruit d'une
approche pragmatique et réaliste, permet de répondre efficacement
aux principales interrogations des différents acteurs du secteur.
Ses trente-huit articles s'articulent autour de quatre objectifs
principaux :
- redéfinir le cadre juridique dans lequel s'inscrit la
liberté de communiquer
via
les réseaux
numériques ;
- transposer certaines dispositions de la directive 2000/31/CE du
Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000
relative à
certains aspects juridiques de la société de l'information, et
notamment du commerce électronique dans le marché
intérieur
;
- garantir la sécurité dans l'économie
numérique ;
- préciser les modalités de gestion des systèmes
satellitaires.
Compte tenu de ses compétences réglementaires et en accord avec
la commission des Affaires économiques et du Plan saisie au fond, votre
commission a choisi de ne traiter que quelques-uns seulement des thèmes
abordés par le présent projet de loi, à savoir :
- la définition de la communication publique en ligne
(article 1
er
du projet de loi) ;
- la détermination du régime applicable en matière de
responsabilité des hébergeurs (article 2) ;
- la protection de la propriété intellectuelle sur les
services de communication en ligne (article 3).
*
* *
-
-
I. LA FRANCE ET INTERNET : UN RETARD BIENTÔT COMBLÉ ?
• Seulement 42,1 % des ménages équipés en ordinateurs
Les statistiques de l'OCDE montrent que le pays du Minitel a toujours été quelque peu réticent à l'égard du développement du micro-ordinateur. Ainsi, en 1999, alors que plus de 40 % des ménages allemands, finlandais, américains, autrichiens, que plus de 50 % des foyers canadiens, suédois, danois et que 65 % des hollandais possédaient un micro-ordinateur à domicile, seulement 23 % des ménages français avaient cette chance.
Depuis
lors, la France n'a comblé qu'une partie de son retard. Avec 42,1 %
des ménages équipés au premier trimestre 2003 et
malgré une progression de ce taux de 10 % en deux ans, notre pays
fait toujours figure d'exception parmi les pays développés et se
retrouve aujourd'hui encore, en compagnie de l'Italie et de l'Espagne, loin du
peloton de tête composé du Danemark, des Pays-Bas, de la
Suède (avec un taux d'équipement des ménages en
ordinateurs supérieur à 60 %) et des trois pays anglo-saxons
(Canada, Australie et Etats-Unis à l'exception du Royaume-Uni), qui
enregistrent un taux d'équipement supérieur à 50 %.
• 26,8 % des foyers connectés à Internet
La faiblesse relative du nombre de ménages équipés en ordinateur pèse sur les chiffres mesurant le nombre de foyers ayant accès à Internet. Au premier trimestre 2003, seulement 26,8 % des Français avaient, selon l'INSEE, accès à Internet alors que cette proportion atteint plus de 40 % au Royaume-Uni et plus de 60 % aux Etats-Unis.
NOMBRE
DE FOYERS AYANT ACCÈS A INTERNET EN FRANCE
(1
er
trimestre 2003)
|
1 er tri 2003 |
4 e tri 2002 |
3 e tri 2002 |
2 e tri 2002 |
1 er tri 2002 |
Nombre de foyers ayant accès à Internet |
6 661
000
|
6 219
000
|
5 981
000
|
5 410
000
|
5 384
000
|
Source : Les Baromètres Multimédia/Médiamétrie/Avril 2003
En
dépit du retard accumulé en matière d'équipement
informatique, deux points positifs laissant présager un avenir meilleur
pour le multimédia en France doivent être soulignés.
Le premier est lié à la progression régulière du
nombre d'internautes dans notre pays : comme le montre le tableau
ci-dessous, la barre symbolique des 40 % de Français
âgés de 11 ans et plus s'étant connectés à
internet a été franchie en mars 2003. Sur un an, cela
représente une augmentation de 3,8 millions du nombre d'internautes.
FRANÇAIS ÂGÉS DE 11 ANS ET PLUS
S'ÉTANT CONNECTÉS A INTERNET AU COURS DU DERNIER MOIS
|
Avril 2003 |
Mars 2003 |
Octobre 2002 |
Avril 2002 |
Nombre d'internautes déclarant s'être connectés à Internet au cours du dernier mois 2( * ) |
20 429
000
|
20 258
000
|
17 244
000
|
16 591
000
|
Source : Les Baromètres Multimédia/Médiamétrie/Avril 2003
Le
second est lié au rapide développement du haut débit sur
notre territoire. Sur le dernier trimestre 2002, l'Association des fournisseurs
d'accès (AFA) a ainsi recensé plus de 1,7 million de foyers
abonnés au câble et à l'ADSL.
Avec une progression des abonnements à l'ADSL d'environ 250 % sur
l'année 2002 (source France Télécom), la France,
proportionnellement à sa population, connaît ainsi une croissance
parmi les plus importantes au monde sur ce marché. Le câble
contribue lui aussi positivement à cette dynamique puisqu'il enregistre,
sur la même période, une croissance supérieure à
50 % du nombre de ses abonnés à Internet.
Cette progression continue du nombre d'internautes laisse entrevoir,
après des années difficiles, d'heureuses perspectives de
croissance pour les sites de
e-commerce
.
• Un défi spécifique : encourager le commerce électronique
Alors
que les grands instituts d'analyse prédisaient un décollage
rapide du
e-commerce
, il aura fallu plus de huit années
(1995-2002) pour que les premières entreprises rentables apparaissent.
Un nombre non négligeable d'entre elles est d'ailleurs issu du monde
traditionnel de la grande distribution.
L'année 2002 marque très certainement un tournant dans
l'évolution du
e-commerce
en France. Le montant des transactions
sur Internet représente aujourd'hui 2 350 millions d'euros par an.
Comme l'a rappelé Mme Nicole Fontaine, ministre
déléguée à l'industrie, lors de son audition par la
commission, le chiffre d'affaires réalisé par le commerce
électronique a dépassé pour la première fois celui
réalisé par Minitel en 2000 et lui a même
été, en 2002, plus de cinq fois supérieur.
INVERSION RADICALE DE LA TENDANCE
MINITEL/INTERNET
|
2002 |
2001 |
2000 |
Chiffre d'affaires du commerce sur Internet |
2 591 M€ |
1 585 M€ |
716 M€ |
Chiffre d'affaire du commerce sur Minitel |
595 M€ |
701 M€ |
823 M€ |
Source : Jupiter MMXI
Les
secteurs d'activité les plus variés sont concernés par le
développement de la vente en ligne. Ainsi, 6 % du chiffre
d'affaires de la SNCF, 10 % des commandes de vente par correspondance,
15 % des réservations de voyages sont désormais
effectuées, dans notre pays, par le biais d'Internet.
Toutefois, comme le souligne le tableau ci dessous, la France, en
matière de commerce électronique, a pris un certain retard.
Supérieur à l'Italie, le marché du
e-commerce
hexagonal reste largement en retrait du marché allemand et,
a
fortiori,
britannique.
LE
COMMERCE ÉLECTRONIQUE EN 2001
DANS LES PRINCIPAUX PAYS
D'EUROPE
|
France |
Allemagne |
Italie |
Royaume-Uni |
Marché du e-commerce en 2001
|
1,45 |
4,86 |
0,4 |
6,35 |
Source : JdNet (janvier 2003) & e-Marketer
-
-
II. UNE NÉCESSAIRE RÉFORME DU CADRE JURIDIQUE EXISTANT