Confiance dans l'économie numérique
BROISSIA (Louis de)
AVIS 342 (2002-2003) - commission des affaires culturelles
Rapport au format Acrobat ( 173 Ko )Table des matières
- A. DES ESPOIRS DÉÇUS
- B. DES CHANTIERS INACHEVÉS
- C. UN PROJET DE LOI ATTENDU
- A. LA POSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
-
B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
-
Article 1er
(art. 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la liberté de communication)
Définition de la communication publique en ligne -
Article additionnel après l'article
1er
Substitution du terme de radio à celui de radiodiffusion sonore -
Article 2
(art. 43-4 et 43-7 à 43-14-1 de la loi n° 86-1067
du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication)
Obligations et responsabilités des prestataires intermédiaires -
Article 3
(art. L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle)
Protection de la propriété intellectuelle -
Article 5 bis
(art. 42-1 et 42-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la liberté de communication)
Pouvoir de sanction pécuniaire du CSA
à l'égard des opérateurs privés de radio et de télévision -
Article 5 ter
(art. 42-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la liberté de communication)
Pouvoir du CSA d'ordonner la diffusion d'un communiqué à l'antenne -
Article 5 quater
(art. 48-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)
Pouvoir de sanction pécuniaire du CSA
à l'égard des sociétés nationales de programmes -
Article additionnel après l'article 5
quater
Protection de l'enfance et de l'adolescence
-
Article 1er
N°
342
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 10 juin 2003
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, pour la confiance dans l' économie numérique ,
Par M.
Louis de BROISSIA,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Jacques Legendre, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; M. François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernand Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Serge Lepeltier, Mme Brigitte Luypaert, MM. Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Dominique Mortemousque, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jacques Pelletier, Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, André Vallet, Jean-Marie Vanlerenberghe, Marcel Vidal, Henri Weber.
Voir les
numéros :
Assemblée nationale
(
12
ème
législ.)
:
528, 608
,
612
et T.A.
89
Sénat
:
195
,
345
et
351
(2002-2003)
Audiovisuel et communication. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi correspond à la volonté du
Gouvernement
1(
*
)
de « donner un nouvel
élan au chantier de la société de
l'information ».
Ce chantier n'est pas nouveau. En effet, le précédent
Gouvernement avait déjà tenté de le mener à bien
mais, faute d'ambitions dans un domaine pourtant essentiel pour l'avenir
économique de notre pays, s'était arrêté au milieu
du gué, provoquant l'incompréhension des professionnels de
l'Internet et suscitant de sérieuses interrogations chez les
consommateurs en ligne, chaque jour plus nombreux.
Tirant les leçons de cette malheureuse expérience,
l'équipe actuelle a décidé de sortir de la logique des
« grands plans », qui créent plus d'attentes qu'ils
ne règlent de problèmes, et de « grandes
lois » qui mettent tellement de temps à être
votées qu'elles sont déjà en décalage avec les
technologies et les pratiques quand elles entrent en vigueur.
Premier d'une série de trois projets de loi destinés à
« préciser les règles du jeu dans la
société de l'information », ce texte, fruit d'une
approche pragmatique et réaliste, permet de répondre efficacement
aux principales interrogations des différents acteurs du secteur.
Ses trente-huit articles s'articulent autour de quatre objectifs
principaux :
- redéfinir le cadre juridique dans lequel s'inscrit la
liberté de communiquer
via
les réseaux
numériques ;
- transposer certaines dispositions de la directive 2000/31/CE du
Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000
relative à
certains aspects juridiques de la société de l'information, et
notamment du commerce électronique dans le marché
intérieur
;
- garantir la sécurité dans l'économie
numérique ;
- préciser les modalités de gestion des systèmes
satellitaires.
Compte tenu de ses compétences réglementaires et en accord avec
la commission des Affaires économiques et du Plan saisie au fond, votre
commission a choisi de ne traiter que quelques-uns seulement des thèmes
abordés par le présent projet de loi, à savoir :
- la définition de la communication publique en ligne
(article 1
er
du projet de loi) ;
- la détermination du régime applicable en matière de
responsabilité des hébergeurs (article 2) ;
- la protection de la propriété intellectuelle sur les
services de communication en ligne (article 3).
*
* *
-
-
I. LA FRANCE ET INTERNET : UN RETARD BIENTÔT COMBLÉ ?
• Seulement 42,1 % des ménages équipés en ordinateurs
Les statistiques de l'OCDE montrent que le pays du Minitel a toujours été quelque peu réticent à l'égard du développement du micro-ordinateur. Ainsi, en 1999, alors que plus de 40 % des ménages allemands, finlandais, américains, autrichiens, que plus de 50 % des foyers canadiens, suédois, danois et que 65 % des hollandais possédaient un micro-ordinateur à domicile, seulement 23 % des ménages français avaient cette chance.
Depuis
lors, la France n'a comblé qu'une partie de son retard. Avec 42,1 %
des ménages équipés au premier trimestre 2003 et
malgré une progression de ce taux de 10 % en deux ans, notre pays
fait toujours figure d'exception parmi les pays développés et se
retrouve aujourd'hui encore, en compagnie de l'Italie et de l'Espagne, loin du
peloton de tête composé du Danemark, des Pays-Bas, de la
Suède (avec un taux d'équipement des ménages en
ordinateurs supérieur à 60 %) et des trois pays anglo-saxons
(Canada, Australie et Etats-Unis à l'exception du Royaume-Uni), qui
enregistrent un taux d'équipement supérieur à 50 %.
• 26,8 % des foyers connectés à Internet
La faiblesse relative du nombre de ménages équipés en ordinateur pèse sur les chiffres mesurant le nombre de foyers ayant accès à Internet. Au premier trimestre 2003, seulement 26,8 % des Français avaient, selon l'INSEE, accès à Internet alors que cette proportion atteint plus de 40 % au Royaume-Uni et plus de 60 % aux Etats-Unis.
NOMBRE
DE FOYERS AYANT ACCÈS A INTERNET EN FRANCE
(1
er
trimestre 2003)
|
1 er tri 2003 |
4 e tri 2002 |
3 e tri 2002 |
2 e tri 2002 |
1 er tri 2002 |
Nombre de foyers ayant accès à Internet |
6 661
000
|
6 219
000
|
5 981
000
|
5 410
000
|
5 384
000
|
Source : Les Baromètres Multimédia/Médiamétrie/Avril 2003
En
dépit du retard accumulé en matière d'équipement
informatique, deux points positifs laissant présager un avenir meilleur
pour le multimédia en France doivent être soulignés.
Le premier est lié à la progression régulière du
nombre d'internautes dans notre pays : comme le montre le tableau
ci-dessous, la barre symbolique des 40 % de Français
âgés de 11 ans et plus s'étant connectés à
internet a été franchie en mars 2003. Sur un an, cela
représente une augmentation de 3,8 millions du nombre d'internautes.
FRANÇAIS ÂGÉS DE 11 ANS ET PLUS
S'ÉTANT CONNECTÉS A INTERNET AU COURS DU DERNIER MOIS
|
Avril 2003 |
Mars 2003 |
Octobre 2002 |
Avril 2002 |
Nombre d'internautes déclarant s'être connectés à Internet au cours du dernier mois 2( * ) |
20 429
000
|
20 258
000
|
17 244
000
|
16 591
000
|
Source : Les Baromètres Multimédia/Médiamétrie/Avril 2003
Le
second est lié au rapide développement du haut débit sur
notre territoire. Sur le dernier trimestre 2002, l'Association des fournisseurs
d'accès (AFA) a ainsi recensé plus de 1,7 million de foyers
abonnés au câble et à l'ADSL.
Avec une progression des abonnements à l'ADSL d'environ 250 % sur
l'année 2002 (source France Télécom), la France,
proportionnellement à sa population, connaît ainsi une croissance
parmi les plus importantes au monde sur ce marché. Le câble
contribue lui aussi positivement à cette dynamique puisqu'il enregistre,
sur la même période, une croissance supérieure à
50 % du nombre de ses abonnés à Internet.
Cette progression continue du nombre d'internautes laisse entrevoir,
après des années difficiles, d'heureuses perspectives de
croissance pour les sites de
e-commerce
.
• Un défi spécifique : encourager le commerce électronique
Alors
que les grands instituts d'analyse prédisaient un décollage
rapide du
e-commerce
, il aura fallu plus de huit années
(1995-2002) pour que les premières entreprises rentables apparaissent.
Un nombre non négligeable d'entre elles est d'ailleurs issu du monde
traditionnel de la grande distribution.
L'année 2002 marque très certainement un tournant dans
l'évolution du
e-commerce
en France. Le montant des transactions
sur Internet représente aujourd'hui 2 350 millions d'euros par an.
Comme l'a rappelé Mme Nicole Fontaine, ministre
déléguée à l'industrie, lors de son audition par la
commission, le chiffre d'affaires réalisé par le commerce
électronique a dépassé pour la première fois celui
réalisé par Minitel en 2000 et lui a même
été, en 2002, plus de cinq fois supérieur.
INVERSION RADICALE DE LA TENDANCE
MINITEL/INTERNET
|
2002 |
2001 |
2000 |
Chiffre d'affaires du commerce sur Internet |
2 591 M€ |
1 585 M€ |
716 M€ |
Chiffre d'affaire du commerce sur Minitel |
595 M€ |
701 M€ |
823 M€ |
Source : Jupiter MMXI
Les
secteurs d'activité les plus variés sont concernés par le
développement de la vente en ligne. Ainsi, 6 % du chiffre
d'affaires de la SNCF, 10 % des commandes de vente par correspondance,
15 % des réservations de voyages sont désormais
effectuées, dans notre pays, par le biais d'Internet.
Toutefois, comme le souligne le tableau ci dessous, la France, en
matière de commerce électronique, a pris un certain retard.
Supérieur à l'Italie, le marché du
e-commerce
hexagonal reste largement en retrait du marché allemand et,
a
fortiori,
britannique.
LE
COMMERCE ÉLECTRONIQUE EN 2001
DANS LES PRINCIPAUX PAYS
D'EUROPE
|
France |
Allemagne |
Italie |
Royaume-Uni |
Marché du e-commerce en 2001
|
1,45 |
4,86 |
0,4 |
6,35 |
Source : JdNet (janvier 2003) & e-Marketer
-
-
II. UNE NÉCESSAIRE RÉFORME DU CADRE JURIDIQUE EXISTANT
Dans son
rapport publié en 1998 et consacré à Internet et aux
réseaux numériques
3(
*
)
, le Conseil
d'Etat, contrairement à une idée largement répandue,
rappelait que «
l'ensemble de la législation existante
s'applique aux acteurs d'Internet (...) Il n'existe pas et il n'est nul besoin
d'un droit spécifique de l'Internet et des réseaux : ceux-ci
sont des espaces dans lesquels tout type d'activité peut être
pratiquée et toutes les règles régissant un domaine
particulier ont vocation à s'appliquer.
»
S'il n'est nul besoin d'un droit spécifique de l'Internet et des
réseaux, il convient néanmoins aujourd'hui, pour répondre
efficacement aux défis lancés par un espace grand public et
marchand qui compte plusieurs centaines de millions d'utilisateurs de par le
monde, d'adapter le cadre juridique national à ses contraintes et
à ses particularités.
Le précédent Gouvernement avait déjà senti
l'urgence de la situation et s'était enquis, auprès du Conseil
d'Etat, des conséquences du développement d'Internet sur notre
législation.
Dans une lettre datée du 22 novembre 1997, le Premier ministre
Lionel Jospin avait chargé l'institution «
d'explorer
les possibilités qu'offre le droit existant
» et
«
de déterminer les modifications souhaitables de
celui-ci
».
Fruit de cette lettre de mission, le rapport du Conseil d'Etat
précité a largement influencé le programme d'action pour
« la société de l'information » lancé
par le précédent Gouvernement dont le point d'orgue devait
être constitué par le projet de loi sur la société
de l'information (LSI), texte fondateur destiné à réaliser
l'ensemble des aménagements juridiques rendus nécessaires par le
développement des nouvelles technologies.
L'espoir qu'a pu faire naître ce texte a été
déçu, ce dernier, bien que déposé sur le bureau de
l'Assemblée nationale, n'ayant jamais été inscrit à
l'ordre du jour de l'une ou l'autre des assemblées, laissant du
même coup s'instaurer un flou juridique pénalisant non seulement
pour les opérateurs évoluant dans le domaine des services en
ligne, à savoir les éditeurs de contenus, les hébergeurs
de sites et les fournisseurs d'accès, mais également pour les
consommateurs qui s'attendaient peut-être, en pleine « bulle
Internet », à l'adoption rapide de dispositions
législatives garantissant leurs intérêts.
B. DES CHANTIERS INACHEVÉS
En
dépit de cet abandon, il convient néanmoins de souligner que le
domaine des services de la société de l'information n'est pas
complètement étranger au Parlement.
En effet, la loi n° 2000-719 du
1
er
août 2000 modifiant la loi n° 86-1067
du 30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication a déjà donné lieu à d'importants
débats sur deux questions essentielles, la définition de la
communication en ligne et le régime de responsabilité des
prestataires techniques à raison des contenus mis à disposition
du public, sans pour autant parvenir à des solutions acceptables.
• Une définition en creux des services en ligne
L'intitulé du nouveau chapitre VI du titre II
de la
loi de 1986, introduisant dans la législation un régime
particulier de responsabilité des prestataires techniques, a fait
l'objet d'un vif débat entre le rapporteur de l'Assemblée
nationale et celui du Sénat, mettant en évidence la
difficulté de trouver une dénomination consensuelle aux services
en ligne. Entre « services en ligne autres que de correspondance
privée » et « services de communication
audiovisuelle en ligne », l'Assemblée nationale, en
dernière lecture, a néanmoins tranché en faveur de la
première expression. Cette définition « en
creux » ou « négative » selon les termes
du rapporteur du texte au Sénat
4(
*
)
permettait de ménager l'avenir en attendant qu'une définition
adéquate soit trouvée dans un texte ultérieur.
• La censure du régime de responsabilité des prestataires
techniques
Mais l'examen du texte qui allait devenir la loi du
1
er
août 2000 a avant tout été l'occasion
pour les parlementaires de se saisir, pour la première fois, de la
question de la responsabilité des prestataires techniques à
raison des contenus des « services de communication en ligne autre
que de correspondance privée. »
Comme l'a explicité le Conseil d'Etat dans son rapport
précité, deux types de services relèvent de
l'intermédiation technique :
- le
fournisseur d'accès
est un prestataire technique qui
met son serveur, connecté en permanence aux réseaux
électroniques, à la disposition de ses abonnés pour leur
permettre de circuler dans le réseau Internet, d'accéder aux
sites et d'échanger du courrier électronique ;
- les sites sont généralement hébergés sur le
serveur informatique d'un prestataire technique appelé
fournisseur
d'hébergement
, qui permet l'accès au site depuis les
réseaux ; un hébergeur stocke sur des disques informatiques
les données préparées par l'éditeur du site et
achemine ces pages vers l'ordinateur de tout utilisateur des réseaux qui
en fait la demande par voie électronique.
Pour un certain nombre de juristes, le développement de l'Internet et de
la communication en réseau n'aurait pas dû conduire à
remettre en cause le principe de non-responsabilité du fait des contenus
arrêté depuis de nombreuses années tant pour les
opérateurs de télécommunication (auxquels les fournisseurs
d'accès peuvent être assimilés), soumis à une
obligation de neutralité, que pour les centres serveurs
télématiques (qui remplissent des fonctions comparables à
celles des hébergeurs). Pour ces derniers, la Cour de cassation a
notamment affirmé que le responsable d'un centre serveur minitel est un
« outil entre les mains du fournisseur de service » et
qu'il apparaît impossible « d'envisager que le directeur d'un
tel centre -lequel héberge souvent des dizaines de services- assure une
responsabilité quelconque quant au contenu des messages. »
Leur responsabilité ne saurait donc être mise en cause dès
lors qu'ils s'abstiennent d'intervenir sur les contenus qu'ils stockent ou
diffusent et n'ont pas connaissance de leur éventuel caractère
illicite.
Cependant, le développement exponentiel des services en ligne a conduit
le juge à revenir sur ce principe d'irresponsabilité pour
préciser ses modalités de mise en oeuvre dans le monde de
l'Internet et son articulation avec le droit commun. Celui-ci a progressivement
nuancé sa position sur les intermédiaires techniques et construit
une définition de leur responsabilité (en particulier pour les
fournisseurs d'hébergement) en se fondant sur le droit commun
décrit par l'article 1383 du code civil. Le fait que les
prestataires d'hébergement soient de simples transmetteurs
d'informations a donc été remis en cause.
La Cour d'appel de Paris a ainsi condamné, le
10 février 1999, dans l'affaire Estelle Halliday/Valentin
Lacambre, l'hébergeur (Altern) d'un site ayant diffusé, sans
autorisation, des photos de Mme Estelle Halliday. Elle a donc retenu
la responsabilité civile de l'hébergeur à l'égard
d'un contenu dont il n'était pas l'auteur, en considérant que,
pour s'exonérer de sa responsabilité, l'hébergeur devait
veiller à la bonne moralité de ceux qu'il héberge et au
respect par ceux-ci des lois, des règlements et des droits des tiers.
L'hébergeur s'est vu, de plus en plus souvent, imposer une
« obligation générale de diligence et de
prudence ». Il lui appartient, à ce titre, de
« prendre les précautions nécessaires pour ne pas
léser les droits des tiers » et de mettre en oeuvre, à
cette fin, des moyens raisonnables d'information (en attirant l'attention des
créateurs de sites sur « le nécessaire respect des
droits des tiers »), de vigilance (en prenant « les mesures
raisonnables qu'un professionnel avisé mettrait en oeuvre pour
évincer de son serveur les sites dont le caractère illicite est
apparent ») et d'action (en procédant, le cas
échéant, au retrait des informations en cause ou à la
fermeture du site incriminé).
Le comportement de l'intermédiaire technique étant dès
lors soumis au crible de l'appréciation du juge, la
non-responsabilité des hébergeurs du fait des contenus
stockés est devenue largement conditionnelle. Les prestataires
techniques ont pu parfois avoir le sentiment de jouer un rôle de victime
de substitution, en lieu et place des véritables responsables, à
savoir les éditeurs de contenus, le plus souvent protégés
par l'anonymat.
Face à cette incertitude juridique, le législateur a donc
décidé d'intervenir, sous la forme d'amendements au projet de loi
portant modification de la loi de 1986 relative à la liberté
de communication. L'objectif des auteurs des amendements était de
clarifier les responsabilités à mettre en oeuvre au sein des
services de communication en ligne tout en restant dans le droit commun.
Après de nombreuses modifications au cours des navettes, le texte
définitif adopté le 29 juin 2000 définit,
dans un nouveau chapitre VI du titre II de la loi
du 30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication, un ensemble de dispositions applicables aux « services
de communication en ligne autres que de correspondance
privée ». Ces dispositions concernent essentiellement les
hébergeurs.
L'article 43-8 dispose ainsi que la responsabilité civile ou
pénale d'un hébergeur ne peut être engagée que dans
deux conditions :
- si, lorsqu'il a été saisi par une autorité
judiciaire, il n'a pas agi « promptement pour empêcher
l'accès à ce contenu » (deuxième
alinéa) ;
- si, lorsqu'il a été saisi par un tiers s'estimant
lésé par un contenu hébergé ou estimant que ce
contenu est illicite, il n'a pas procédé aux
« diligences appropriées » (troisième
alinéa).
Un nouvel article 43-9 organise par ailleurs les conditions de conservation et
de communication des données de connexion par les fournisseurs
d'accès et les hébergeurs, dont les conditions d'application
doivent être fixées par décret en Conseil d'Etat
après avis de la CNIL et un article 43-10 organise une obligation
d'identification pour les éditeurs de contenus en ligne.
Cette construction juridique, longuement pesée et destinée
à clarifier les responsabilités des intermédiaires
techniques, a cependant été aussitôt très largement
amputée par une décision du Conseil constitutionnel
5(
*
)
. Celui-ci a en effet déclaré non
conforme à la Constitution le troisième alinéa de
l'article 43-8, considérant que les conditions de cette saisine par
un tiers n'étaient pas assez précises et que l'article ne
déterminait pas de façon suffisamment claire « les
caractéristiques du comportement fautif de nature à engager, le
cas échéant, la responsabilité des
intéressés ».
Après cette censure, le régime de mise en cause de la
responsabilité civile ou pénale des hébergeurs s'est donc
retrouvé limité à la seule saisine du juge. La loi se
contente donc de dire que ces opérateurs doivent déférer
aux injonctions de la justice et ne sont tenus à aucun autre type de
vigilance.
C. UN PROJET DE LOI ATTENDU
A ces
lacunes législatives, liées à l'indécision du
Parlement et à la censure du juge constitutionnel, est venu s'ajouter un
autre élément rendant nécessaire la présentation,
devant le Parlement, du présent projet de loi consacré à
l'encadrement juridique des nouvelles technologies en général et
à celui du commerce électronique en particulier.
En effet, l'adoption définitive de la loi du
1
er
août 2000 a coïncidé avec la
publication, le 8 juin 2000, de la directive 2000/31/CE
relative
à certains aspects juridiques des services de la société
de l'information, et notamment du commerce électronique
, dans le
marché intérieur, dont la limite de transposition était
officiellement fixée au 17 janvier 2002.
Il y avait donc urgence à agir, tant pour mettre en place, après
des années de tâtonnements, un cadre favorable au
développement du commerce électronique que pour transposer
efficacement la directive du 8 juin 2000.
• La communication publique en ligne, un sous-ensemble de la
communication audiovisuelle
Rompant avec l'attentisme des précédents textes, le projet de loi
définit explicitement la communication publique en ligne comme
« toute communication audiovisuelle transmise sur demande
individuelle formulée par un procédé de
télécommunication ».
Ce faisant, la communication publique en ligne devient un sous-ensemble de la
communication audiovisuelle, se distinguant de cette dernière par le
simple fait d'être transmise sur demande individuelle.
Un tel rattachement entraîne nécessairement un organe de
régulation commun, à savoir le CSA, désormais
explicitement chargé de « surveiller » les millions
de pages personnelles accessibles par l'intermédiaire d'Internet et de
réguler l'ensemble du secteur de la communication publique en ligne.
Si le rattachement de la communication publique en ligne à la
communication audiovisuelle peut se justifier au regard des nombreux points
communs qui caractérisent ces deux types de communication, les
conséquences qu'il emporte en termes de régulation sont
difficilement acceptables. En effet, le CSA ne semble pas être
l'autorité la mieux adaptée à la surveillance de sites aux
contenus composés de données essentiellement
alphanumériques.
• La mise en place d'une responsabilité limitée des
prestataires techniques
L'article 2 du projet de loi redéfinit les obligations des
prestataires intermédiaires des services de communication en ligne.
Il revient essentiellement sur l'encadrement de la responsabilité des
hébergeurs qui assurent « le stockage direct et
permanent » des contenus diffusés par les services de
communication publique en ligne.
En effet, les dispositions relatives à ce sujet, telles qu'elles avaient
été adoptées par le Parlement lors de la discussion de la
loi du 1
er
août 2000, ont été
partiellement censurées par le Conseil constitutionnel. Les dispositions
ayant échappé à l'annulation qui ont été
promulguées ne rendent que très partiellement compte de
l'équilibre souhaité par le législateur. Par ailleurs, en
leur état actuel, elles apparaissent en retrait par rapport à la
directive 2000/31/CE.
Les modifications proposées visent à limiter la mise en cause de
la responsabilité civile des hébergeurs au seul cas dans lequel,
ayant la connaissance effective d'une activité ou d'une information
illicite, ou la connaissance de faits ou de circonstances selon lesquelles
l'information ou l'activité illicite est apparente, ils s'abstiennent
d'agir promptement pour retirer les données en cause ou rendre
l'accès à celles-ci impossible. En matière de
responsabilité pénale, les hébergeurs ne pourront voir
leur responsabilité engagée que si, en connaissance de cause, ils
n'ont pas agi promptement pour faire cesser la diffusion d'une information ou
d'une activité dont ils ne pouvaient ignorer le caractère
illicite.
• Protéger la propriété intellectuelle sur les réseaux numériques
Dans son
rapport publié en 1998, le Conseil d'Etat avait indiqué
qu'en tout état de cause «
une solution qui paraît
devoir être écartée d'emblée, c'est l'idée de
créer un régime spécifique pour les oeuvres dites
« multimédia », en s'inspirant de ce qui a
été fait pour les oeuvres audiovisuelles, les logiciels et les
bases de données. En effet, cet
« émiettement » progressif du droit d'auteur
altère profondément la lisibilité du code de la
propriété intellectuelle et la clarté de ses principes, du
fait de l'empilement de régimes dérogatoires. Surtout, ces
dispositions propres à des types d'oeuvres très particuliers,
correspondant à l'état de l'art et de la technologie à un
moment donné, sont difficiles à adapter par la jurisprudence
à l'évolution extrêmement rapide des technologies de
l'information
».
Le projet de loi s'inscrit dans cette veine en matière de protection de
la propriété intellectuelle sur Internet.
Alors que l'environnement numérique se prête
particulièrement au risque de piratage, la copie numérique d'une
oeuvre étant strictement identique à l'original, le Gouvernement
a décidé de lutter contre ce véritable fléau, non
pas en créant un régime dérogatoire pour les services de
communication en ligne, mais en adaptant à ces derniers la
législation en vigueur, en l'occurrence l'article L. 332-1 du code
de la propriété intellectuelle.
L'article 3 du projet de loi, conformément aux dispositions de
l'article 8 de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001
relative à l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et
des droits voisins, dans la société de l'information
,
étend par conséquent les pouvoirs du président du Tribunal
de Grande Instance, statuant par ordonnance sur requête, selon la
procédure de saisie-contrefaçon prévue à l'article
L. 332-1 du CPI, au contenu d'un service de communication publique en
ligne portant atteinte au droit d'auteur ou aux droits voisins.
-
-
III. COMBLER LES LACUNES DU PROJET DE LOI
L'Assemblée nationale, qui a examiné le projet
de loi
les 25 et 26 février derniers, en a approuvé l'orientation.
Les modifications entrant dans le champ de compétence de votre
commission, qu'elle y a introduites, répondent à trois
préoccupations.
• Préciser le régime de responsabilité des
prestataires techniques.
L'Assemblée nationale a d'abord souhaité, avec l'accord du
Gouvernement, prémunir les hébergeurs de sites contre toute
tentative de pression ou d'intimidation en vue d'obtenir de leur part le
retrait de certaines données ou d'en rendre l'accès impossible.
Ainsi, les personnes qui auraient abusivement qualifié un contenu
d'illicite afin d'en obtenir le retrait, peuvent-elles désormais voir,
fort opportunément, leur responsabilité pénale
engagée pour entrave à la liberté d'expression.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a institué une
procédure de notification facultative qui permettrait à
l'hébergeur d'avoir une connaissance précise des raisons et des
auteurs d'une plainte contre le contenu d'un site.
Sans préjudice des dispositions des articles 43-8 et 43-9 du projet de
loi qui précisent que la responsabilité des hébergeurs ne
peut être engagée qu'à partir du moment où la
connaissance des faits litigieux est effective, le plaignant pourra donc
notifier à l'hébergeur un certain nombre d'éléments
d'identification.
L'Assemblée nationale a enfin souhaité imposer aux
hébergeurs, en dépit des dispositions de l'article 15 de la
directive, une obligation de surveillance sur les contenus mis à la
disposition du public, afin d'empêcher la diffusion d'informations
faisant l'apologie des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité,
incitant à la haine raciale ou ayant un caractère
pédophile.
• Instaurer un droit de réponse sur Internet
Est désormais ouvert un droit de réponse à toute personne
nommée ou désignée dans un service de communication
publique en ligne utilisant un mode écrit de diffusion de la
pensée, mis à disposition du public en général ou
des catégories de public.
L'exercice du droit de réponse n'est donc pas ouvert à l'encontre
de tous les services proposés sur Internet. En effet, aux termes de
l'article 43-14-1 du projet de loi, seuls les services de communication
publique en ligne « utilisant un mode écrit de la
pensée mis à la disposition du public en général ou
de catégories de publics » sont obligés de s'y plier.
Cette expression, issue de l'article premier de la loi n° 86-897 du
1
er
août 1986 portant réforme du régime
juridique de la presse limite en fait l'exercice du droit de réponse aux
sites de presse en ligne.
Si l'article réduit le champ de sites concernés par l'exercice du
droit de réponse, en contrepartie, il n'impose aucune restriction quant
à la nature des imputations justifiant l'utilisation de ce droit, se
rapprochant ainsi de la philosophie de l'article 13 de la loi de 1881, qui
reconnaît un droit de réponse à toute personne mise en
cause, fut-ce en termes élogieux, et écartant de ce fait les
restrictions imposées par l'article 6 de la loi du 29 juillet 1982, qui
n'ouvre quant à lui ce droit qu'en cas d'imputation portant atteinte
à l'honneur ou à la réputation de la personne
considérée.
Le délai de demande d'exercice du droit de réponse est
fixé à trois mois à compter de la date à laquelle
cesse la mise à disposition du public du message incriminé.
En cas de refus ou de silence gardé par le destinataire de la demande de
droit de réponse dans les huit jours de la réception de celle-ci,
le demandeur peut recourir au juge pour faire respecter son droit : saisi en
référé, le président du Tribunal de Grande
Instance, peut ordonner, au besoin sous astreinte, la mise à disposition
du public de la réponse.
• Adapter et préciser les pouvoirs de sanction dont dispose le
CSA à l'égard des éditeurs et des distributeurs de
services.
Les articles 5 bis et 5 quater introduits par l'Assemblée nationale
autorisent le CSA, après les avoir mis en demeure de respecter les
obligations qui leurs sont imposées par les textes législatifs et
réglementaires, à prononcer des sanctions pécuniaires
à l'encontre des éditeurs et des distributeurs de services de
radio ou de télévision et des sociétés nationales
de programmes énumérées à l'article 44 de la
loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 dont le manquement
constaté est constitutif d'une infraction pénale.
Ces deux articles répondent efficacement à la requête
qu'avait présentée le président de l'autorité de
régulation devant votre commission au mois de janvier.
L'article 5 ter, quant à lui, a également trait aux pouvoirs de
sanction du CSA.
En premier lieu, il élargit à l'ensemble des éditeurs de
services de radio et de télévision privés le pouvoir dont
dispose le CSA d'ordonner l'insertion, à l'antenne, d'un
communiqué dont il fixe les termes et les conditions de diffusion. Les
éditeurs des chaînes thématiques du câble et du
satellite, et non plus seulement les titulaires d'autorisation d'utiliser les
fréquences hertziennes, seront donc désormais soumis au pouvoir
de sanction défini par l'article 42-4.
En second lieu, une procédure simplifiée, rompant avec le
formalisme de la procédure prévue à l'article 42-7, est
définie pour la mise en oeuvre de ce pouvoir de sanction. Ainsi, avant
d'ordonner l'insertion d'un communiqué à l'antenne, le CSA,
conformément au principe du droit de la défense, sera tenu de
demander à l'éditeur concerné de présenter ses
observations dans un délai de deux jours francs à compter de la
réception de la demande.
Une fois ce délai arrivé à échéance, le CSA
prononce sa décision.
En cas de refus de se conformer à la demande du CSA d'insérer un
communiqué à l'antenne, l'éditeur est passible d'une
sanction pécuniaire dont le montant, en vertu de l'article 42-2 de la
loi du 30 septembre 1986, est fonction de la gravité des
manquements commis, sans pouvoir excéder 3 % de son chiffre
d'affaires (5 % en cas de récidive).
B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Si ce
projet de loi va dans le sens d'un développement de l'Internet en
France, si les dispositions introduites par l'Assemblée nationale, du
moins en ce qui concerne les pouvoirs du CSA, semblent nécessaires,
votre commission propose néanmoins de modifier le texte sur trois points.
• Limiter les pouvoirs du CSA à la régulation des
services de radio et de télévision sur tous les supports et en
aménager les conditions techniques.
En faisant de la communication publique en ligne un sous-ensemble de la
communication audiovisuelle, le projet de loi fait explicitement du CSA
l'instance de régulation de l'ensemble des services disponibles sur
Internet.
Or, toutes les personnes auditionnées par votre rapporteur dans le cadre
de la préparation de ce rapport, et par-delà les profonds
antagonismes qu'elles peuvent avoir dans d'autres domaines, sont au moins
d'accord sur un point : confier la régulation d'Internet au CSA est
irréaliste. MM. Dominique Baudis et Francis Beck,
auditionnés par la commission, n'ont pas dit autre chose : le CSA
n'a ni les moyens ni l'envie de contrôler le contenu des dizaines de
millions de pages personnelles mises en ligne sur le réseau et souhaite
voir sa compétence limitée à la régulation des
services de radio et de télévision disponibles sur tous les
supports, y compris Internet.
C'est pourquoi votre commission souhaite cantonner les pouvoirs du CSA aux
services de télévision et de radio, qu'elle propose par ailleurs
de définir, sur tous les supports sur lesquels ceux-ci sont
diffusés, lui évitant ainsi de se disperser en essayant vainement
de contrôler le contenu des « pages jaunes ».
Par ailleurs, concernant toujours les pouvoirs du CSA, ce projet de loi est
l'occasion de rectifier un certain nombre de lacunes de la loi
du 30 septembre 1986 et de celle du 1
er
août
2000.
Tel est le cas des sanctions dont dispose l'autorité de
régulation à l'égard des éditeurs et des
distributeurs de services ne respectant pas leurs obligations
législatives, réglementaires ou conventionnelles. En effet, si la
loi du 1
er
août 2000 a bien modifié le premier
alinéa de cet article pour préciser que ces sanctions
s'appliquent à l'ensemble des éditeurs de chaînes et des
distributeurs de services, elle a oublié de corriger l'intitulé
même des sanctions qui font toujours référence aux seuls
services autorisés, c'est-à-dire les chaînes hertziennes.
Concrètement, à l'heure actuelle, les chaînes et les
distributeurs de services du câble et du satellite, qui sont des services
conventionnés ou déclaratifs, et non des services
autorisés, échappent donc en grande partie au pouvoir de
régulation du CSA.
Par ailleurs, notre législation utilise encore, pour qualifier les
services de radio, le terme de radiodiffusion sonore. Ce terme est ambigu et
contraire au principe de neutralité technologique. En effet, il se
réfère non seulement aux services diffusés mais
également à un mode de diffusion particulier, celui des ondes
hertziennes, alors même que la diffusion des radios sur d'autres
supports, Internet notamment, se développe.
En plein accord avec le CSA, votre commission souhaite profiter de l'occasion
qui lui est offerte pour rectifier ces deux erreurs quasi-matérielles,
en modifiant l'intitulé des sanctions pouvant être
prononcées par le CSA pour y inclure définitivement l'ensemble
des services et en remplaçant le terme radiodiffusion sonore par celui
de radio.
Enfin, elle vous proposera de faire figurer parmi les principes essentiels
justifiant la mise en place de limites à l'exercice de la liberté
de communication, celui de la protection de l'enfance et de l'adolescence.
Alors que la violence et, de plus en plus souvent, la pornographie, envahissent
les écrans de télévision à des heures que l'on peut
difficilement qualifier de tardives, il convient de donner au CSA le pouvoir de
mettre en demeure, sous peine de sanction, les services de radio et de
télévision qui ne respecteraient pas l'obligation non seulement
éthique mais aussi juridique de rendre inaccessibles au jeune public des
programmes réservés à un public averti.
• Améliorer le régime de responsabilité des
intermédiaires techniques
Les propositions de votre commission dans ce domaine visent principalement :
- à supprimer l'obligation faite aux hébergeurs de sites de
chercher à prévenir la diffusion de données illicites. En
effet, si ce principe semble difficilement contestable moralement, il est
juridiquement contraire à l'article 15 de la directive que ce texte
est chargé de transposer ;
- à élargir, conformément à l'esprit de la
directive, la définition des services d'hébergement, afin d'y
faire entrer notamment les forums de discussion ;
- à réduire aux seuls faits dont le caractère
illicite est évident et non pas apparent, la marge d'appréciation
permettant d'engager la responsabilité des hébergeurs de sites ;
- et enfin, à supprimer la procédure de notification
facultative des faits litigieux, qui créée beaucoup plus de
problèmes qu'elle n'en résout.
• Elargir le droit de réponse à toutes les personnes
mentionnées sur un service de presse en ligne.
Les dispositions votées par l'Assemblée nationale
obéissent à une logique fort compréhensible et sont
à ce titre satisfaisantes dans leur principe ; cependant, elles
risquent de l'être beaucoup moins dans leur mise en oeuvre. En effet, il
semble difficile de justifier pourquoi les personnes morales ou physiques
mentionnées sur une page personnelle par exemple se verraient
privées de droit de réponse.
Le dispositif proposé par votre commission tend par conséquent
à élargir le droit de réponse sur Internet à
l'ensemble des services qui y sont diffusés et à préciser,
afin d'éviter toute ambiguïté, le destinataire du droit de
réponse, qui se trouve être, comme pour la presse et les services
de communication audiovisuelle, le directeur de la publication.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
(art. 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre
1986
relative à la liberté de
communication)
Définition de la communication publique en
ligne
I.
Texte du projet de loi
Cet article tend à insérer, à l'article 2 de la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la
liberté de communication, une définition de la communication
publique en ligne.
• La communication publique en ligne
Avant
d'aborder les problèmes relatifs à la définition de la
communication publique en ligne proposée par l'article premier du projet
de loi, il convient de s'arrêter sur l'appellation même de
communication publique en ligne.
Car le choix d'une expression permettant de caractériser les nouveaux
services proposés sur les différents réseaux
électroniques ne va pas sans difficulté : cette question
avait d'ailleurs déjà fait l'objet d'un vif débat entre
les rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat au cours de
la discussion du projet de loi qui allait devenir la loi n° 2000-719
du 1
er
août 2000 portant modification de la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986.
Ainsi, alors que M. Jean-Paul Hugot, rapporteur du texte au Sénat,
souhaitait qualifier ces services de « services de communication
audiovisuelle fournis sur un réseau électronique »,
M. Didier Mathus, rapporteur du texte à l'Assemblée
nationale, considérant qu'une définition par le support
contrevenait à l'esprit de la législation européenne,
s'était quant à lui prononcé en faveur de l'expression
« services de communication en ligne autres que de correspondance
privée », finalement utilisée comme intitulé du
nouveau chapitre VI inséré dans le titre II de la loi
du 30 septembre 1986.
Les articles 1
er
et 2 du projet de loi font, quant, à eux
référence à la « communication publique en
ligne », l'expression « en ligne », tout en
respectant le principe de neutralité technologique, permettant de faire
référence, comme l'a relevé l'ART, à l'ensemble des
communications utilisant les réseaux électroniques, à
savoir les services Internet mais aussi les services télématiques
ou les audiotels.
Il est à noter que cette terminologie est différente de celle
utilisée par la directive : celle-ci ne connaît ni services
en ligne, ni communication en ligne, mais fait simplement
référence aux « services de la société de
l'information ».
Une telle différence tient simplement à l'importance de la
distinction entre communication audiovisuelle et correspondance privée
en droit français, distinction niée par l'appellation
« services de la société de l'information ».
En effet, en droit français, la distinction entre communication publique
et correspondance privée est fondamentale.
Si, contrairement à la communication audiovisuelle
6(
*
)
, la notion de correspondance privée n'a jamais
fait l'objet d'aucune définition législative, une circulaire du
17 février 1988
7(
*
)
a cependant
précisé ces notions :
«
La communication audiovisuelle se définit par opposition
à la correspondance privée. Il y a correspondance privée
lorsque le message est exclusivement destiné à une (ou plusieurs)
personnes, physique ou morale, déterminée et
individualisée. A l'inverse, il y a communication audiovisuelle lorsque
le message est destiné indifféremment au public en
général ou à des catégories de public,
c'est-à-dire un ensemble d'individus indifférenciés, sans
que son contenu soit fonction de considérations fondées sur la
personne
. »
Or, la plupart des « services de la société de
l'information » ne peuvent s'insérer complètement dans
l'une ou l'autre des catégories utilisées par notre
législation.
En effet, comme le souligne le rapport du Conseil d'Etat, «
la
plupart [d'entre eux] présentent une nature mixte : ils ont pour
partie le caractère d'une communication en public et pour partie le
caractère d'une correspondance privée
».
En dépit de ces différences, il convient de noter que la
définition de la communication en ligne proposée par le
présent projet de loi est cohérente avec celle utilisée au
considérant 17 de la directive
8(
*
)
.
On y retrouve notamment la notion de services fournis sur demande individuelle
et l'utilisation d'un procédé de télécommunication.
• Un sous-ensemble de la communication publique en ligne
Dans son
rapport sur le projet de loi portant modification de la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986, M. Didier Mathus
estimait que «
la définition de la
« communication en réseau » reste à trouver
dans une future loi qui lui serait spéciale
».
En effet, en dépit des débats approfondis entre les deux
assemblées, aucune définition de la communication publique en
ligne n'avait pu être établie dans la loi du 1
er
août 2000.
En définissant, à l'article 1
er
, la communication
publique en ligne comme «
toute communication audiovisuelle
transmise sur demande individuelle formulée par un procédé
de télécommunication
», le projet de loi rompt avec
les tergiversations antérieures et fait de la communication en ligne un
sous-ensemble de la communication audiovisuelle. Ce choix repose sur
l'importance des caractéristiques communes de ces deux types de
communication. En effet, communication audiovisuelle et communication publique
en ligne consistent toutes deux en :
- la mise à la disposition du public ou de catégories de
public ;
- par un procédé de télécommunication ;
- de signes, de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages
de toute nature ;
- qui n'ont pas le caractère d'une correspondance privée.
Néanmoins, un traitement individualisé de la communication
publique en ligne au sein de la communication audiovisuelle se justifie par le
fait qu'elle est transmise sur demande individuelle.
• Des difficultés non résolues
Le choix
de faire de la communication en ligne un sous-ensemble de la communication
audiovisuelle associé à l'ambiguïté sémantique
de l'appellation communication audiovisuelle fait néanmoins
difficulté.
Votre rapporteur estime notamment que si la définition extrêmement
large de la communication audiovisuelle -qui comprend tous les services de
communication sauf les correspondances privées- a pu s'avérer
utile pour inclure progressivement des nouveaux services de communication aux
contenus juridiques incertains, une telle définition paraît
aujourd'hui source d'ambiguïté.
Car, comme le soulignait déjà le Conseil d'Etat dans son rapport
publié en 1998, le concept de communication audiovisuelle
«
tend à mélanger la destination du message (qui
vise le public et non des personnes bien individualisées) et le service
offert (services audiovisuels de radio ou de
télévision)
». Par conséquent
«
dès lors que toute communication au public ne
relève plus nécessairement d'une logique traditionnelle de
diffusion par les services audiovisuels
», il proposait
«
d'adopter la terminologie et de rechercher l'exact pendant de la
notion de correspondance privée qui, elle, ne laisse rien sous-entendre
quant aux modalités de transmission et aux contenus de la
communication
».
Votre rapporteur regrette que le projet de loi n'ait pas examiné plus
avant la voie proposée par le Conseil d'Etat.
En substituant à l'expression de communication audiovisuelle celle de
communication au public, elle-même divisée en deux
sous-catégories -la communication audiovisuelle
stricto sensu
à savoir les services de radio et de télévision et la
communication en ligne- le projet de loi aurait certainement permis d'y voir
beaucoup plus clair dans un droit de la communication qui, au fil des ans,
devient de plus en plus complexe et de moins en moins lisible.
Cette ambiguïté terminologique et juridique a pour
conséquence un certain nombre d'incertitudes voire
d'incohérences, déjà dénoncées par l'ART, le
CSA, la Commission supérieure du service public des postes et
télécommunications et par Mme Michèle Tabarot, rapporteur
pour la commission des lois de l'Assemblée nationale, dans les avis
qu'ils ont successivement rendus sur le projet de loi.
Ainsi, comment concilier le considérant 18 de la directive, aux
termes duquel «
les services de télévision au sens
de la directive 89/552/CEE
[directive « télévision
sans frontières »]
et de radiodiffusion ne sont pas des
services de la société de l'information car ils ne sont pas
fournis sur demande individuelle ; en revanche, les services transmis de
point à point, tels que les services de vidéo à la demande
ou la fourniture de communications commerciales par courrier
électronique constituent des services de la société de
l'information.
» et le fait que les services de communication
publique en ligne, c'est-à-dire les services de la société
de l'information autres que les correspondances privées, fassent partie
intégrante de la communication audiovisuelle ?
Encore une fois, l'introduction d'une nouvelle classification fondée sur
le concept de communication au public sous-divisée en deux piliers
différents (communication audiovisuelle et communication en ligne)
aurait levé explicitement toute ambiguïté, les services de
télévision et de radio étant rangés dans la
catégorie « communication audiovisuelle » et les
services transmis de point à point dans celle de la
« communication en ligne ».
• Le CSA : régulateur explicite des services de
communication publique en ligne
Le rattachement de la communication publique en ligne à la communication
audiovisuelle implique que les mêmes conditions d'exercice leur soient
applicables.
Ainsi, et conformément aux dispositions de l'article 4 de la
directive selon lesquelles l'exercice de l'activité d'un prestataire de
services de la société de l'information doit «
ne
pas être soumis à un régime d'autorisation préalable
ou à toute autre exigence ayant un effet
équivalent
», la communication publique en ligne est libre.
Comme pour la communication audiovisuelle, ce principe général de
liberté est limité par un certain nombre d'exigences,
énumérées à l'article premier de la loi
du 30 septembre 1986. Celui-ci précise que :
«
L'exercice de cette liberté ne peut être
limité que dans la mesure requise, d'une part, par le respect de la
dignité de la personne humaine, de la liberté et de la
propriété d'autrui, du caractère pluraliste de
l'expression des courants de pensée et d'opinion et, d'autre part, par
la sauvegarde de l'ordre public, par les besoins de la défense
nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques
inhérentes aux moyens de communication, ainsi que par la
nécessité de développer une industrie nationale de
production audiovisuelle
. ».
La similitude des principes généraux se retrouve au niveau de
l'autorité de régulation : le CSA, garant de l'exercice de
la liberté de communication, veille également sur celui de la
liberté de communication publique en ligne.
Il dispose ainsi d'un pouvoir de recommandation lui permettant en
théorie d'assurer l'égalité de traitement et de veiller
à la libre concurrence entre les opérateurs du secteur.
II. Position de l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
III. Position de la commission
Devant les difficultés que ne manquerait pas de poser une
régulation effective du secteur de la communication publique en ligne
par le CSA, votre commission vous propose d'adopter
un amendement
tendant à une nouvelle rédaction de cet article.
Cette nouvelle rédaction prévoit d'abord de limiter le champ de
compétence de l'autorité de régulation aux services de
radio et de télévision, quel que soit leur support de diffusion.
Entreraient donc désormais sous la férule du CSA, et aux
côtés des traditionnels services diffusés par voie
hertzienne, par câble et par satellite, les services de radio et de
télévision disponibles sur l'ensemble des services de
communication en ligne.
En second lieu, cette nouvelle rédaction prévoit, pour la
première fois, de définir, aux côtés de la
communication publique en ligne, les services de télévision et de
radio.
Il semble en effet vain de vouloir limiter le champ de compétences du
CSA à la régulation de ces services sans tenter d'en donner une
définition précise, d'ailleurs inspirée par les
propositions de l'ART et surtout, du CSA, dans leurs avis respectifs sur le
projet de loi de transposition de la directive « communications
électroniques » qui devrait être examiné par le
Parlement dans les mois à venir.
Sous réserve de cet amendement, votre commission vous propose de
donner un avis favorable à l'adoption du présent article
.
Article additionnel après l'article 1er
Substitution du terme de
radio à celui de radiodiffusion
sonore
I.
Position de la commission
Pour désigner les services de radio, la législation
française continue d'utiliser l'expression de radiodiffusion sonore.
Or, cette expression, comme le rappelle le Conseil supérieur de
l'audiovisuel dans son avis relatif au projet de loi sur les communications
électroniques, «
est source de confusion en ce qu'elle se
réfère à un mode de diffusion
».
Afin de respecter le principe de neutralité technologique et alors
même que les modes de diffusion des services de radio se diversifient, la
traditionnelle diffusion hertzienne étant concurrencée par le
satellite ou par Internet, votre commission vous propose d'adopter
un
amendement
tendant à insérer un article additionnel visant
à substituer à l'expression radiodiffusion sonore le terme de
radio dans l'ensemble des textes législatifs et réglementaires en
vigueur.
Article 2
(art. 43-4 et 43-7 à 43-14-1 de la loi n°
86-1067
du 30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication)
Obligations et responsabilités des prestataires
intermédiaires
I.
Texte du projet de loi
Afin de tirer les conséquences de la sanction du Conseil
constitutionnel
9(
*
)
sur une partie des
dispositions adoptées dans le cadre de la loi du
1
er
août 2000 et d'assurer la transposition des articles
14 et 15 de la directive du 8 juin 2000 « commerce
électronique », cet article tend à redéfinir les
obligations des prestataires intermédiaires des services de
communication publique en ligne et notamment le dispositif de mise en jeu de la
responsabilité civile et pénale des hébergeurs de sites.
Il comporte trois paragraphes :
- le premier étend au secteur de la communication publique en ligne
la portée des dispositions de la loi du 30 septembre 1986 fixant
des modalités spécifiques d'intervention du Conseil de la
concurrence et du CSA en matière de pratiques anticoncurrentielles et de
concentrations dans le secteur de la communication audiovisuelle,
- le deuxième opère une renumérotation des articles
du titre II de la loi du 30 septembre 1986,
- le troisième propose une réécriture du
Chapitre VI du titre II de la loi du 30 septembre 1986 relatif
aux « services de communication en ligne autres que de correspondance
privée » désormais intitulé, par coordination
avec l'article premier du projet de loi : « Dispositions
relatives aux services de communication publique en ligne ».
• Paragraphe I
Ce
paragraphe étend au secteur de la communication publique en ligne la
portée des dispositions de l'article 41-4 de la loi du 30 septembre
1986 fixant les relations qu'entretiennent le Conseil de la concurrence et le
CSA en matière de concentrations et de pratiques anticoncurrentielles
dans le secteur de la communication audiovisuelle.
En effet, aux termes des dispositions de cet article, le Conseil de la
concurrence est tenu de recueillir l'avis du CSA lorsqu'il est saisi :
- de concentrations ou de projets de concentrations concernant une
entreprise de communication audiovisuelle en application de l'article
L. 430-5 du code de commerce ;
- sur les pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la
communication audiovisuelle.
Inversement, le CSA doit saisir le Conseil de la concurrence de tout fait
susceptible de constituer une pratique anticoncurrentielle dans le secteur de
la communication audiovisuelle.
Le régime spécifique prévu par cet article découle
du fait que le CSA, traditionnel régulateur des
« contenus » est investi, par l'article premier de la loi
du 30 septembre 1986, d'une mission spécifique de garantie du
pluralisme. Le législateur a donc considéré que ses avis
pouvaient donner au Conseil de la concurrence, qui fonde ses décisions
sur des raisonnements principalement juridiques et économiques, un
éclairage complémentaire.
• Paragraphe II
Il
opère une renumérotation des articles du titre II de la loi
du 30 septembre 1986 à la suite de la création
d'articles supplémentaires par le paragraphe III du présent
article ainsi que par l'article 10.
L'article 43-11 devient donc l'article 43-16.
• Paragraphe III
Il
propose une nouvelle rédaction du Chapitre VI du titre II de la loi
du 30 septembre 1986 relatif aux « services de communication en
ligne autres que de correspondance privée » désormais
intitulé « Dispositions relatives aux services de
communication publique en ligne ».
-
Article 43-7 (Obligation pour les fournisseurs d'accès de
proposer des moyens techniques de restriction de l'accès aux services de
communication publique en ligne)
Cet article tend à faire obligation aux fournisseurs d'accès
d'informer leurs clients de l'existence de logiciels de filtrage permettant une
sélection des services accessibles et de mettre à leur
disposition au moins un de ces logiciels.
Il n'opère que des modifications de forme dans la rédaction de
l'article 43-7, afin de la mettre en conformité avec la nouvelle
terminologie utilisée par le texte et supprime la précision que
les personnes visées peuvent être des personnes
« physiques ou morales ».
L'article vise « les personnes dont l'activité est d'offrir un
accès à des services de communication publique en
ligne » : il s'agit des opérateurs de
télécommunications couramment appelés
« fournisseurs d'accès », que l'article 4 du
présent projet définit comme étant « toute
personne assurant une activité de transmission de contenu sur un
réseau de télécommunication ».
Il convient de rappeler que l'actuel article 43-7, adopté dans le cadre
de la loi du 1
er
août 2000, proposait lui-même une
réécriture limitée de l'ancien article 43-1 de la loi de
1986, introduit par la loi du 26 juillet 1996 de
réglementation des télécommunications, qui disposait que
« toute personne dont l'activité est d'offrir un service de
connexion à un ou plusieurs services de communication audiovisuelle
mentionnés au 1° de l'article 43 est tenue de proposer
à ses clients un moyen technique leur permettant de restreindre
l'accès à certains services ou de les
sélectionner ».
-
Article 43-8 (Responsabilité civile des
hébergeurs)
Cet article, tout comme le suivant, vise à transposer l'article 14
de la directive du 8 juin 2000 relative au commerce électronique et
modifie pour ce faire l'actuel article 43-8 de la loi du 30 septembre 1986.
Aux termes du premier alinéa de cet article, sont
considérées comme hébergeurs « les personnes qui
assurent, même à titre gratuit, le stockage direct et permanent
pour mise à disposition du public de signaux, d'écrits, d'images,
de sons ou de messages de toute nature accessibles par des services de
communication publique en ligne ».
Cette définition diffère de celle utilisée par
l'article 14 de la directive « commerce
électronique » selon lequel la responsabilité des
hébergeurs, s'applique « à la fourniture d'un service
de la société de l'information consistant à stocker des
informations fournies par un destinataire du service ».
La mise en oeuvre de la responsabilité civile des hébergeurs
dépend de deux éléments : d'une part, la connaissance
que l'hébergeur pouvait avoir de la présence de contenus
illicites parmi ceux qu'il héberge et, d'autre part, l'action qu'il a
menée pour faire cesser l'infraction.
Deux modalités de prise de connaissance du caractère illicite des
données mises à disposition du public sont prévues :
- soit l'hébergeur a acquis, par lui-même, la connaissance
« effective » de ce caractère illicite ;
- soit « des faits et circonstances » ont fait
« apparaître » ce caractère illicite.
Dès qu'il a acquis cette connaissance, l'hébergeur doit
« agir avec promptitude pour retirer ces données ou rendre
l'accès à celles-ci impossible ».
En ce qui concerne la prise de connaissance du caractère illicite du
contenu, le terme « effectif » doit être compris
comme renvoyant à une connaissance des faits avérée et
certaine, constatable par ses propres moyens, par opposition à une
connaissance supposée, dont le juge fait parfois usage. Le
caractère illicite des contenus en cause doit donc ici être
évidente et apparaître comme manifeste même à un
non-professionnel du droit. Cette notion reste néanmoins
forcément imprécise : ce sera aux personnes s'estimant
lésées par certaines informations ou activités de prouver
que l'hébergeur avait une connaissance effective de leur
caractère illicite et qu'il n'a pas agi et au juge de préciser,
au cas par cas, la portée de cette notion.
En tout état de cause, cette exigence de connaissance effective
s'articule avec le fait que les hébergeurs, aux termes de l'article
43-11 du projet de loi transposant l'article 15 de la directive, ne sont
pas soumis à une obligation générale de surveillance des
contenus qu'ils stockent. Ils ne sont donc en aucun cas tenus de faire une
recherche a priori des contenus illégaux.
L'expression « faisant apparaître ce caractère
illicite » utilisée pour caractériser les faits et
circonstances est tout aussi problématique. En effet, la simple
apparence du caractère illicite d'un contenu, qui devra être
infirmée ou confirmée par le juge, ne laisse-t-elle pas une marge
d'appréciation trop importante à l'hébergeur pouvant le
conduire à retirer systématiquement de son serveur les
données mises en cause?
Les deux actions prescrites à l'hébergeur par le quatrième
alinéa de l'article 14 de la directive pour faire cesser le trouble
provoqué par un contenu illicite sont reprises dans le projet de loi.
L'hébergeur doit en effet :
- soit rendre l'accès aux données impossibles,
- soit les retirer définitivement de son serveur.
L'article du projet de loi, comme la directive, en lui demandant
d'apprécier le caractère licite des contenus qu'il héberge
charge l'hébergeur d'une mission délicate à exercer pour
quelqu'un qui n'est ni un professionnel du droit ni un magistrat. Il convient
néanmoins de ne pas oublier que c'est au juge qu'il reviendra de statuer
sur l'adéquation du comportement de l'hébergeur à la
situation et,
in fine
, sur le caractère licite ou illicite des
données mises en cause.
-
Article 43-9 (Responsabilité pénale des
hébergeurs)
En premier lieu, cet article dispose que les hébergeurs ne peuvent voir
leur responsabilité pénale engagée que s'ils se sont
abstenus d'agir « en connaissance de cause ». Il
réaffirme (inutilement) un principe bien établi de notre droit
pénal selon lequel « il n'y a pas de crime ou de délit
sans intention de le commettre » (article 121-3 du code pénal).
L'article s'inspire ensuite des critères de connaissance et d'action
utilisés à l'article précédent pour définir
les conditions de mise en cause de la responsabilité pénale des
hébergeurs. Néanmoins, deux différences notables doivent
être relevées.
D'une part, la connaissance est ici placée sur le terrain de
l'évidence et non plus sur celui de l'apparence puisque l'article vise
les informations et les activités dont l'hébergeur ne peut
« ignorer le caractère illicite ».
D'autre part, et contrairement à ce que prévoit la directive, les
termes définissant l'obligation d'action en matière pénale
sont différents de ceux retenus pour la responsabilité civile.
Que signifie « faire cesser la diffusion » des
données suspectes, si ce n'est les retirer du serveur ou bien rendre
leur accès impossible ?
-
Article 43-10 (Exclusion des prestataires techniques de la
responsabilité éditoriale au titre de producteurs de services de
communication audiovisuelle)
Cet article tend à rappeler l'existence de deux catégories
d'opérateurs aux responsabilités éditoriales
différentes au sein du secteur des services de la société
de l'information : les intermédiaires techniques, qui dès
lors qu'ils s'abstiennent de toucher aux contenus qu'ils stockent ou
éditent ne peuvent pas être inclus dans le système de
responsabilité éditoriale et les auteurs de contenus, sur qui, au
contraire pèse une responsabilité éditoriale pleine et
entière.
Quel que soit le mode de communication utilisé, la responsabilité
d'un message illicite ou préjudiciable incombe à celui qui est
à l'origine de ce message.
En matière de délits de presse, la loi du 29 juillet 1881
définit un système de responsabilité en cascade qui
désigne comme auteurs principaux les directeurs de publication ou
éditeurs, puis, à défaut, les auteurs, puis, à
défaut, les imprimeurs puis, à défaut, les vendeurs,
distributeurs et afficheurs. Cette déclinaison de responsables a
été transposée au secteur de l'audiovisuel par la loi
n° 85-1317 du 13 décembre 1985, dans les articles
93-2 et 93-3 insérés dans la loi n° 82-652 du
29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.
L'article 93-2 dispose que tout service de communication audiovisuelle doit
disposer d'un directeur ou d'un co-directeur de la publication. L'article 93-3
précise que ce directeur ou co-directeur de la publication est
responsable en premier lieu sur le plan éditorial. A défaut, les
poursuites peuvent porter sur l'auteur puis, à défaut, sur le
producteur.
L'application de ces articles, selon une jurisprudence confirmée, aux
sites télématiques puis à l'ensemble des services de
communication en ligne, que l'on pouvait à juste titre assimiler, du
fait de leur insertion dans la loi du 30 septembre 1986, à des
services de communication audiovisuelle a été contestée
par la doctrine et les professionnels, tant leur esprit ne correspond pas
à la logique et aux pratiques du monde des réseaux. En effet, la
détermination de la chaîne des responsabilités impose de
dépasser la première apparence selon laquelle le fournisseur
(« producteur ») du contenu serait nécessairement
l'auteur de la mise en ligne.
Pour résoudre cette difficulté, le Conseil d'État a
suggéré « de maintenir la responsabilité
éditoriale pour ce qui la concerne, c'est-à-dire la fonction
d'édition de contenus mais de retenir un régime de
responsabilité de droit commun pour toutes les autres fonctions
exercées sur le réseau et notamment les fonctions
d'intermédiation technique ou d'ensemblier (...) Concrètement, un
fournisseur d'accès ne serait donc a priori responsable que de ses
propres contenus, édités par lui-même, mais non de ceux-ci
auxquels ils donnent accès ou qu'il héberge ; il ne serait
ainsi ni le directeur de la publication des pages personnelles de ses
abonnés, ni responsable des propos émis dans les
forums. ».
Ces conseils semblent avoir été entendus puisque cet article
dispose que les intermédiaires techniques (tant les fournisseurs
d'accès que les hébergeurs) ne peuvent être
considérés comme des « producteurs » au sens
de l'article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982. Dès lors qu'ils
s'abstiennent de toucher aux contenus qu'ils stockent ou éditent (ce qui
est leur caractéristique principale), ces intermédiaires ne
peuvent donc plus être inclus dans le système de
responsabilité éditoriale en cascade qui ne concerne que les
auteurs de contenus.
-
Article 43-11 (Absence d'obligation générale des
prestataires techniques de surveiller les contenus stockés ou
transmis)
Cet article tend à transposer le premier paragraphe de l'article 15
de la directive « commerce électronique », qui pose
un principe d'absence d'obligation générale des prestataires
techniques de surveiller les contenus stockés ou transmis.
Ceux-ci ne sont donc pas tenus :
- « de surveiller les informations qu'ils stockent ou
transmettent » ;
- « de rechercher des faits ou des circonstances
révélant des activités illicites ».
La seule différence entre le présent article et la directive
concerne ce dernier point : là où la directive évoque
l'absence d'obligation de rechercher « activement » des
faits ou circonstances révélant des activités illicites,
le projet de loi se contente du seul mot « rechercher ». Ce
choix permet de lever une importante ambiguïté, car la reprise de
la notion de recherche « active » aurait pu laisser penser
que, a contrario, les intermédiaires techniques n'étaient pas
exonérés de tout devoir de recherche...
Il convient de préciser que si les prestataires techniques ne sont pas
tenus de surveiller a priori les contenus qu'ils stockent ou transmettent, rien
ne leur interdit cependant de le faire, ce qui en pratique, comme l'ont
confirmé les représentants de l'Association des fournisseurs
d'accès (AFA) au cours de leur audition, est généralement
le cas, notamment par le biais de sondages.
-
Article 43-12 (procédure de
référé)
Cet article tend mettre en place, conformément aux termes des
articles 12 (relatif aux fournisseurs d'accès) et 14 (relatif aux
hébergeurs) de la directive, une voie de recours complémentaire
permettant à « une juridiction ou une autorité
administrative (...) d'exiger du prestataire qu'il mette un terme à une
violation ou qu'il prévienne une violation. »
Le projet de loi reprend cette possibilité à travers le
présent article ainsi que, de façon plus spécifique pour
ce qui concerne l'atteinte aux droits de la propriété
intellectuelle, dans son article 3.
Fournisseurs d'accès et fournisseurs d'hébergement peuvent donc
se voir imposer par l'autorité judiciaire, sous forme d'une ordonnance
de référé, « toute mesure propre à faire
cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de
communication publique en ligne ». Le juge agira donc sur la demande
d'une personne s'estimant lésée par un contenu diffusé par
un service de communication publique en ligne.
La procédure du référé permet au juge d'ordonner
des mesures d'application immédiate à l'issue d'un débat
contradictoire. Celui-ci est nécessaire puisque les hébergeurs,
même s'ils ne sont pas les auteurs des contenus mis en ligne, se voient
désormais imposer par la loi une responsabilité certes
limitée mais néanmoins réelle du fait de ces contenus
qu'ils hébergent, dès lors qu'ils sont clairement illicites. Le
débat contradictoire peut donc être utile pour éclairer le
juge sur la demande du requérant et les mesures déjà
engagées par le prestataire.
A titre d'exemple, l'article précise que le juge peut ordonner des
mesures « visant à cesser de stocker ce contenu »
(ce qui ne peut concerner qu'un hébergeur) ou « à
défaut, à cesser d'en permettre l'accès » (ce
qui concerne les deux types d'intermédiaires). Aux termes de l'article,
la priorité doit donc être donnée aux mesures portant sur
le stockage.
Un tel choix s'explique par le fait que les mesures de filtrage imposées
aux fournisseurs d'accès sont particulièrement difficiles
à mettre en oeuvre et d'une efficacité toute relative. Ces deux
difficultés ont d'ailleurs été soulignées par l'ART
dans son avis sur le présent projet de loi : « dans ce
cas, le fournisseur d'accès ne peut couper la source d'émission
des informations et doit donc contrôler que ses abonnés ne
reçoivent pas d'informations en provenance du site hébergeant le
contenu en question. Pour cela, un filtrage du trafic à destination ou
en provenance de ses abonnés est nécessaire. Dans le cas des
services Internet, le fournisseur d'accès doit bloquer les informations,
par exemple sur la base de leur adresse IP ou de domaine. Ce filtrage
nécessite une adaptation du réseau du fournisseur d'accès
et l'utilisation d'équipements spécifiques de traitement du
trafic (...). ».
« En outre, l'efficacité de telles mesures prescrites à
des fournisseurs d'accès doit être examinée. Dans le cas
d'Internet, un contenu hébergé sur un site est accessible par
l'intermédiaire de tout fournisseur d'accès. Par
conséquent, pour rendre inaccessible à tous les internautes
français le contenu mis en cause, la prescription du juge devrait
s'appliquer à tous les fournisseurs d'accès à l'Internet.
Le juge ne pouvant prendre une décision de portée
générale, cette condition paraît difficile à
remplir. Les fournisseurs d'accès à l'Internet sont nombreux (150
recensés par l'INSEE en 2000) et difficiles à recenser de
manière exhaustive puisqu'il s'agit d'une activité libre (article
L. 34-2 du code des postes et télécommunications). La
décision du juge pourrait donc porter sur certains fournisseurs
d'accès, mais son efficacité resterait très
relative ».
De plus, des expertises judiciaires menées dans le cadre des
enquêtes sur les affaires Yahoo ! Inc et Front 14 laissent à
penser qu'aucune des technologies disponibles actuellement ne permet
d'empêcher efficacement d'accéder aux contenus prohibés.
Les moyens de contournement sont nombreux, tant pour le fournisseur de contenu
que pour les internautes eux-mêmes.
Il reste que lorsque l'hébergeur n'est pas installé sur le
territoire français, l'action contre des fournisseurs d'accès,
aussi aléatoire soit-elle quant à ses résultats, demeure
pour le juge la seule possibilité de faire cesser un dommage.
-
Article 43-13 (Conservation et transmission des données
d'identification des auteurs de contenus)
Le premier alinéa de cet article tend à préciser les
obligations imposées aux fournisseurs d'accès et aux
hébergeurs en matière de conservation et transmission des
données d'identification des auteurs de contenus. Il donne aux
hébergeurs le pouvoir d'identifier tant les éditeurs de contenu
que les utilisateurs enrichissant le contenu d'un site.
Votre commission, lors de l'examen de la loi du 1er août 2000, avait
déjà tenté de préciser la nature de ces
données : parmi elles figuraient des données relatives
à l'identité des abonnés au service d'accès ou
d'hébergement recueillies lors de l'abonnement, des données de
connexion, les heures de début et de fin de connexion, le numéro
IP de l'appelant, les sites visités... Toutefois, eu égard aux
menaces qu'une telle obligation pouvait faire peser sur les libertés
individuelles, le choix avait finalement été fait de renvoyer la
définition de ces données ainsi que la durée et des
modalités de leur conservation à un décret en Conseil
d'État pris après avis de la CNIL, qui n'a, depuis lors, jamais
été pris.
Le choix de renvoyer à un décret en Conseil d'Etat la
définition des données ainsi que celui de la durée et des
modalités de leur conservation, en dépit des difficultés
qu'il semble poser, est réaffirmé par le présent projet de
loi.
Le deuxième alinéa de cet article dispose que les
intermédiaires techniques doivent fournir aux éditeurs de
services de communication publique en ligne les moyens techniques de satisfaire
à leur obligation d'identification (prévue à l'article
43-14).
Le troisième alinéa dispose que l'autorité judiciaire peut
demander aux prestataires intermédiaires de lui communiquer ces
données d'identification. Cette disposition est tout à la fois
cohérente avec les préconisations du Conseil d'État
évoquées ci-dessus et avec les dispositions de l'article 15
de la directive « commerce électronique » qui
prévoit, à la fin de son paragraphe 2, que les Etats membres
peuvent instaurer, pour les prestataires de services de la
société de l'information, l'obligation « de communiquer
aux autorités compétentes, à leur demande, les
informations permettant d'identifier les destinataires de leurs services avec
lesquels ils ont conclu un accord d'hébergement ».
Enfin, le quatrième alinéa prévoit que les articles
226-17, 226-21 et 226-22 du code pénal (qui assurent la protection et la
confidentialité des données nominatives faisant l'objet d'un
traitement automatisé) sont applicables au traitement de ces
données d'identification.
-
Article 43-14 (Obligation d'identification des éditeurs de
services)
Cet article tend à imposer aux éditeurs de services en ligne de
« tenir à la disposition du public » un certain
nombre d'éléments permettant de les identifier et, le cas
échéant, de mettre en cause leur responsabilité.
Il s'inscrit dans la démarche consistant à responsabiliser les
auteurs de contenus et à dégager la responsabilité,
très subsidiaire, des prestataires techniques. Il ne concerne que les
« éditeurs » de services de communication publique
en ligne et non pas, comme l'article 43-13, toute personne contribuant
« à la création du contenu ou de l'un des
contenus » d'un tel service.
Le texte du présent article distingue deux degrés
d'identification :
- Le paragraphe I prévoit l'identification directe des personnes dont
l'activité professionnelle est d'éditer un service en ligne.
Les personnes physiques doivent rendre publics sur le service leurs nom,
prénom et domicile.
Les personnes morales, quant à elles, doivent tenir à disposition
du public leur dénomination ou leur raison sociale ainsi que leur
siège social et, s'il s'agit d'entreprises assujetties aux
formalités d'inscription au registre du commerce et des
sociétés ou au répertoire des métiers, le
numéro de leur inscription, leur capital social, l'adresse de leur
siège social.
Dans les deux hypothèses et conformément aux
référence figurant à l'article 93-2 de la loi
n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle sont
également requis le nom du directeur ou du co-directeur de la
publication et, le cas échéant, celui du responsable de la
rédaction.
Enfin, le dernier alinéa du paragraphe prévoit que les
éditeurs doivent également tenir à la disposition du
public les coordonnées (dénomination ou raison sociale et
adresse) de leur hébergeur.
- Le paragraphe II prévoit une identification indirecte des
éditeurs non professionnels.
Cette catégorie d'éditeurs amateurs, dont il est
présumé qu'elle est nécessairement composée des
personnes physiques, peut choisir de conserver l'anonymat, sous réserve
que les personnes qui la composent communiquent au public, le nom et les
coordonnées de l'hébergeur et, à l'hébergeur, les
éléments d'identification requis des professionnels (nom,
prénom et domicile).
II. Texte adopté par l'Assemblée nationale
• Paragraphe 1
L'Assemblée nationale a adopté un amendement
prévoyant que les compétences spécifiques exercées
par le CSA en matière de concurrence ne s'appliquaient pas aux services
de communication publique en ligne.
Il ne lui apparaît pas que le Conseil de la concurrence ait besoin de
l'éclairage du CSA pour juger des concentrations et des pratiques
anticoncurrentielles dans le secteur de la communication publique en ligne, car
celui-ci n'est pas soumis aux mêmes contraintes que le secteur
audiovisuel classique, notamment en termes de rareté des moyens de
diffusion.
• Paragraphe 2
-
Article 43-8
L'Assemblée nationale, sur proposition de la commission des lois, avec
l'avis favorable de la commission des affaires économiques, de
l'environnement et du territoire, et du Gouvernement, a inséré un
second alinéa à l'article 43-8 visant à
protéger les hébergeurs contre les tentatives de pression ou
d'intimidation destinées à obtenir le retrait d'un contenu.
Ainsi, les personnes ayant abusivement qualifié un contenu d'illicite
afin d'obtenir son retrait, engageraient leur responsabilité
pénale pour entrave à la liberté d'expression, du travail,
d'association, de réunion ou de manifestation, que l'article 431-1 du
code pénal punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros
d'amende.
-
Article 43-9-1 (nouveau)
Sur proposition de M. Patrice Martin Lalande, l'Assemblée nationale
a adopté un nouvel article 43-9-1 tendant à instaurer une
procédure de notification facultative permettant à
l'hébergeur d'avoir une connaissance précise des raisons et des
auteurs d'une plainte concernant le caractère illicite du contenu d'un
site.
Aux termes de cet article, le plaignant se voit tenu de préciser :
- la date de la notification ;
- si le notifiant est une personne physique : ses nom,
prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de
naissance ; si le requérant est une personne morale : sa
forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la
représente légalement ;
- les nom et domicile du destinataire, ou, s'il s'agit d'une personne
morale, sa dénomination et son siège social :
- la description des faits litigieux et leur localisation
précise ;
- les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré
comprenant la mention des dispositions légales et des justifications de
faits ;
- la copie de la correspondance adressée à l'auteur ou
à l'éditeur des informations ou activités litigieuses
demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la
justification de ce que l'auteur ou l'éditeur n'a pu être
contacté.
-
Article 43-11
Sur proposition du rapporteur de la commission des affaires économiques,
de l'environnement et du territoire, l'Assemblée nationale a
complété l'article 43-11 par un second alinéa
tendant, en dépit des dispositions de l'article 15 de la directive
« commerce électronique » précitée,
à imposer aux hébergeurs d'effectuer une surveillance afin
d'empêcher la diffusion d'informations faisant l'apologie des crimes de
guerre, des crimes contre l'humanité, incitant à la haine raciale
ou ayant un caractère pédophile.
-
Article 43-13
L'Assemblée nationale a souhaité que les prestataires techniques
mentionnées aux articles 43-7 et 43-8, à savoir les
fournisseurs d'accès et les hébergeurs de sites, soient tenus non
seulement de détenir et de conserver les données permettant
d'identifier quiconque a contribué à la création du
contenu des services dont ils sont prestataires, mais également de
vérifier ces mêmes données, afin d'éviter que les
informations fournies ne soient fantaisistes.
-
Article 43-14
Au-delà d'un amendement rédactionnel, l'Assemblée
nationale, sur proposition du rapporteur de la commission des affaires
économiques, de l'environnement et du territoire, a ajouté le
numéro de téléphone des éditeurs de services de
communication publique en ligne à la liste des informations que ces
derniers sont tenus de mettre à la disposition du public.
-
Article 43-14-1 (nouveau)
Considérant que le droit de réponse, garde-fou naturel de la
liberté d'expression, doit pouvoir s'exercer sur tous les supports,
l'Assemblée nationale a adopté cet article définissant les
modalités d'exercice de ce droit sur les services de communication en
ligne.
Dans sa rédaction actuelle, il ouvre un droit de réponse à
toute personne nommée ou désignée dans un service de
communication publique en ligne utilisant un mode écrit de diffusion de
la pensée, mis à disposition du public en général
ou des catégories de public.
L'exercice du droit de réponse n'est donc pas ouvert à l'encontre
de tous les services proposés sur Internet. En effet, à la
demande de M. Jean Dionis du Séjour, rapporteur du texte à
l'Assemblée nationale, seuls les services de communication publique en
ligne « utilisant un mode écrit de la pensée mis
à la disposition du public en général ou de
catégories de publics » sont obligés de s'y plier.
Cette expression, issue de l'article premier de la loi n° 86-897
du 1
er
août 1986 portant réforme du
régime juridique de la presse, aux termes duquel
« l'expression "publication de presse" désigne tout service
utilisant un mode écrit de diffusion de la pensée mis à la
disposition du public en général ou de catégories de
publics et paraissant à intervalles réguliers. » limite
en fait l'exercice du droit de réponse aux sites de presse en ligne.
Si l'article réduit le champ de sites concernés par l'exercice du
droit de réponse, en contrepartie, il n'impose aucune restriction quant
à la nature des imputations justifiant l'utilisation de ce droit, se
rapprochant ainsi de la philosophie de l'article 13 de la loi de 1881 sur
la liberté de la presse, qui reconnaît un droit de réponse
à toute personne mise en cause, fut-ce en termes élogieux, et
écartant de ce fait les restrictions imposées par
l'article 6 de la loi du 29 juillet 1982, qui n'ouvre quant à
lui ce droit qu'en cas d'imputation portant atteinte à l'honneur ou
à la réputation de la personne considérée.
Le délai de demande d'exercice du droit de réponse est
fixé à trois mois à compter de la date à laquelle
cesse la mise à disposition du public du message incriminé.
En cas de refus ou de silence gardé par le destinataire de la demande de
droit de réponse dans les huit jours de la réception de celle-ci,
le demandeur peut recourir au juge pour faire respecter son droit : saisi
en référé, le président du tribunal de grande
instance peut ordonner, au besoin sous astreinte, la mise à disposition
du public de la réponse.
Les modalités d'exercice du droit de réponse sur les services de
communication publique en ligne utilisant un mode écrit de diffusion de
la pensée seront fixées en Conseil d'Etat.
• Paragraphe IV (nouveau)
Ce paragraphe additionnel, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de la commission des lois, et avec l'accord de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, et du Gouvernement, institue des peines d'amende spécifiques pour les personnes physiques ou morales qui n'auraient pas respecté les prescriptions de l'article 43-13 relatives à la conservation des données de nature à permettre l'identification de quiconque ayant contribué à la création d'un contenu en ligne ou qui n'auraient pas déféré à la demande d'une autorité judiciaire d'avoir communication desdits éléments.
• Paragraphe V (nouveau)
Ce paragraphe additionnel vise à remplacer la référence 43-11 par la référence 43-16 aux articles 26, 33-1, 44, 44-1 et 53 de la loi du 30 septembre 1986.
• Paragraphe VI (nouveau)
Ce
paragraphe additionnel est la conséquence de la mise en place d'un droit
de réponse sur les services de communication en ligne. En effet, il tend
à supprimer le dernier alinéa du I de l'article 6 de la
loi du 29 juillet 1982 qui prévoit déjà un
droit de réponse pour les services de vidéographie dont certains
sont assimilables aux services de communication en ligne et qui se verraient
donc appliquer deux régimes de droit de réponse différents.
III. Position de la commission
• Paragraphe I
Votre commission vous propose d'adopter ce paragraphe sans modification.
• Paragraphe II
-
Article 43-8
Votre commission vous propose de modifier ce paragraphe par
deux
amendements
.
Le premier tend à élargir la définition des services
d'hébergement. En effet, alors que, de l'avis même des services de
la Commission européenne, et notamment de la direction
générale du marché intérieur, la définition
des services d'hébergement prévue à l'article 14 de
la directive doit être entendue le plus largement possible, le projet de
loi limite à tort cette définition aux services
d'hébergement qui stockent de manière directe et permanente les
informations. Une telle définition exclut par conséquent des
services qui font manifestement partie de la catégorie des services
d'hébergement tels que les forums de discussion.
La substitution de l'expression stockage durable à celle de stockage
direct et permanent permet de respecter la lettre de la directive et de tenir
compte de l'ensemble des fonctionnalités techniques de
l'hébergement.
Le second vise à préciser que la responsabilité de
l'hébergeur ne peut être engagée que si, en présence
de faits ou de circonstances qui témoignent, à l'évidence,
d'un caractère illicite, il s'est abstenu d'agir.
Il s'agit donc de réduire la marge d'appréciation de
l'hébergeur et le risque qu'il voit sa responsabilité
engagée en introduisant l'idée d'évidence dans le
caractère illicite du contenu mis en cause.
-
Article 43-9-1
L'instauration d'une procédure facultative de notification de
l'existence de faits litigieux aux hébergeurs répond au
légitime souci d'encadrer les éventuels signalements de contenus
illicites qui seraient effectués par les utilisateurs auprès des
hébergeurs.
Néanmoins, l'institution d'une telle procédure, aux effets
juridiques au demeurant limités, puisqu'il s'agit seulement d'instituer
une présomption de connaissance de l'existence de données,
présentées comme illicites, crée davantage de
problèmes qu'elle n'en résout. Il convient notamment
d'éviter que le formalisme ainsi imposé aux utilisateurs des
services de communication publique en ligne ne les dissuade, en fait, de
signaler les contenus présentant un caractère illicite.
Il serait par conséquent souhaitable de préserver l'état
actuel du droit, selon lequel il appartient, en cas de litige, à toute
personne s'estimant lésée par l'inaction d'un hébergeur,
de prouver que l'existence d'un contenu, présenté comme illicite,
a bien été signalée à cet hébergeur. Rien
n'empêcherait cependant que les hébergeurs mettent
d'eux-mêmes à la disposition des internautes des formulaires en
ligne qui permettraient de guider leur démarche.
Votre commission vous propose donc d'adopter
un amendement
visant
à supprimer cette procédure de notification.
- Article 43-11
Votre commission vous propose d'adopter
un amendement
tendant à
supprimer l'obligation faite aux hébergeurs de sites de mettre en oeuvre
tous les moyens conformes à l'état de l'art pour prévenir
la diffusion de données constitutives de certaines infractions
(atteintes volontaires à la vie, apologie des crimes de guerre, des
crimes contre l'humanité...).
Si l'objectif de cet alinéa introduit par l'Assemblée nationale
est louable d'un point de vue moral, il se heurte à une contrainte
juridique importante. En effet, il paraît contraire à
l'article 15 de la directive qui interdit explicitement
«
d'imposer aux hébergeurs une obligation
générale de rechercher activement des faits ou des circonstances
révélant des activités illicites
».
-
Article 43-13
L'obligation de vérifier les données de nature à permettre
l'identification de quiconque a contribué à la création
d'un site, imposée aux hébergeurs par l'Assemblée
nationale, est ambiguë. Si elle porte sur l'existence de ces
données, elle est inutile. Pour détenir des données, il
faut qu'elles existent. Si elle porte sur la véracité de ces
données, elle suscite de fortes critiques : elle est d'abord tout
à fait irréaliste, car certains prestataires et notamment les
hébergeurs à titre gratuit, ne pourront, pour des raisons
techniques, satisfaire cette obligation. Elle peut ensuite sembler contraire
à la directive du 8 juin 2000 qui n'impose pas une telle
obligation.
Par conséquent, votre commission vous propose d'adopter
un amendement
tendant à supprimer cette obligation de vérification.
-
Article 43-14
Votre commission vous propose d'adopter
deux amendements
: un
amendement rédactionnel et un amendement de précision.
-
Article 43-14-1
Votre commission vous propose d'adopter
deux amendements
.
Le premier tend à étendre le champ d'exercice du droit de
réponse à l'ensemble des services de communication en ligne.
En effet, s'il paraît nécessaire d'instaurer un droit de
réponse sur ces services, la limitation de son champ d'exercice aux
services utilisant un mode écrit de diffusion de la pensée,
c'est-à-dire aux sites de presse en ligne, est discutable. D'une part,
parce que l'identification des sites de presse en ligne sur Internet est
délicate, d'autre part parce que les personnes physiques ou morales
attaquées sur les sites autres que ceux de presse en ligne, et notamment
sur les pages personnelles, se verront injustement privées de droit de
réponse.
Le deuxième tend à préciser les destinataires du droit de
réponse sur Internet, à savoir, comme dans le cas de la presse
écrite et de la communication audiovisuelle, le directeur de la
publication. Lorsque celui-ci n'est pas connu du public, l'éditeur non
professionnel ayant souhaité garder l'anonymat, l'hébergeur doit
recevoir cette demande, à charge pour lui de la transmettre au directeur
de la publication dont il possède nécessairement les
coordonnées.
• Paragraphe IV
Votre commission vous propose d'adopter ce paragraphe sans modification.
• Paragraphe V
Votre commission vous propose d'adopter ce paragraphe sans modification.
• Paragraphe VI
Votre
commission vous propose d'adopter ce paragraphe sans modification.
Sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous
propose de donner
un avis favorable à l'adoption du présent
article.
Article 3
(art. L. 332-1 du code de la propriété
intellectuelle)
Protection de la propriété
intellectuelle
I.
Texte du projet de loi
L'article 3 du projet de loi vise à donner les moyens aux
autorités judiciaires d'intervenir efficacement pour faire cesser les
atteintes aux droits d'auteur et aux droits voisins sur les services de
communication en ligne.
Pour ce faire, le paragraphe premier de cet article étend les pouvoirs
du président du tribunal de grande instance, statuant par ordonnance sur
requête, selon la procédure spécifique de la
saisie-contrefaçon prévue par l'article 332-1 du code de la
propriété intellectuelle.
Le deuxième paragraphe ouvre, quant à lui, au tribunal, la
faculté d'ordonner la publication du jugement sur un service de
communication en ligne en cas de condamnation pour contrefaçon.
• La transposition de l'article 8 de la directive
10(
*
)
du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains
aspects du droits d'auteur et des droits voisins
Le texte de l'article 8 de la directive est très contraignant s'agissant
de la procédure et des bénéficiaires des mesures
destinées à punir les atteintes portées aux droits de la
propriété intellectuelle sur les services de communication en
ligne. Il précise en effet que :
«Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour
faire en sorte que les titulaires de droits dont les intérêts sont
lésés par une infraction commise sur son territoire puissent
intenter une action en dommages-intérêts et/ou demander qu'une
ordonnance sur requête soit rendue
ainsi que, le cas
échéant,
demander la saisie du matériel concerné
par l'infraction ainsi que des dispositifs, produits ou composants
visés à l'article 6, paragraphe 2.
Les États membres veillent à ce que les titulaires de droits
puissent
demander qu'une ordonnance sur requête soit rendue à
l'encontre des intermédiaires dont les services sont utilisés par
un tiers pour porter atteinte à un droit d'auteur ou à un droit
voisin
. ».
• L'extension de la procédure de saisie-contrefaçon
Le texte de la directive laissant aux États membres une marge de
manoeuvre relativement étroite dans le choix de l'instrument juridique,
le Gouvernement a choisi de recourir au cadre préexistant de la
procédure de saisie-contrefaçon. Le paragraphe premier de
l'article 3 du projet de loi complète le cadre défini à
l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle.
La procédure de saisie-contrefaçon décrite à
l'article 332-1 de ce code donne en effet au juge des moyens rapides et
efficaces pour lutter contre le piratage, véritable fléau de la
communication publique en ligne. Vis à vis de l'autre moyen de preuve
qui s'offre à l'auteur victime d'une contrefaçon, à savoir
le procès-verbal dressé par un officier de police judiciaire dans
le cadre d'une enquête de flagrance, d'une enquête
préliminaire ou d'une instruction, la procédure de
saisie-contrefaçon présente un double avantage : outre sa
fonction probatoire, qui présente un intérêt majeur dans
l'instance au fond, notamment pour une action en dommages et
intérêts, elle est dotée d'une fonction coercitive qui se
traduit par la confiscation des objets contrefaisants.
Aux termes de l'article L. 332-1 du code de la propriété
intellectuelle, elle peut être exécutée selon deux
modalités :
- le requérant peut, par simple requête au commissaire de
police, exiger que ce dernier - à défaut le juge d'instance
là où il n'y a pas de commissaire de police - aille
pratiquer, aux heures ouvrables, une saisie probatoire ou réelle dans
tous les lieux où se trouvent des objets constituant une reproduction
illicite de l'oeuvre protégée ;
- la saisie peut également intervenir par voie d'ordonnance sur
requête du président du tribunal de grande instance, qu'il
s'agisse de :
-
-
o retarder ou de suspendre des présentations ou des exécutions
publiques en cours ou déjà annoncées,
o faire suspendre toute fabrication en cours tendant à la reproduction illicite d'une oeuvre,
o saisir, quels que soient le jour et l'heure, des exemplaires constituant une reproduction illicite de l'oeuvre, déjà fabriqués ou en cours de réalisation, des recettes réalisées et des exemplaires illicitement utilisés,
o ou de saisir les recettes provenant de toute reproduction, représentation ou diffusion, d'une oeuvre de l'esprit, en violation des droits de l'auteur.
L'ordonnance sur requête, définie à l'article 493 du nouveau code de procédure civile, se présente comme « une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse ». Aux termes de l'article 495, l'ordonnance « est exécutoire au seul vu de la minute ».
Elle se caractérise donc par l'efficacité indispensable pour traiter le cas particulier des oeuvres en ligne, dans la mesure où elle allie un formalisme limité et une effectivité quasi-immédiate.
Ce souci d'une intervention rapide et efficace explique la nature très large des pouvoirs reconnus dans ce cas de figure au président du tribunal de grande instance : lui est ainsi reconnue la faculté de suspendre par tout moyen le contenu d'un service de communication publique en ligne portant atteinte à l'un des droits de l'auteur, qui inclut notamment la suppression des données stockées ou, à défaut, la coupure de l'accès. Il est par ailleurs précisé que, dans ce cas précis d'application de la procédure de saisie-contrefaçon, le délai de mainlevée prévu à l'article L. 332-2 du code de la propriété intellectuelle, fixé à trente jours dans les cas précités, est réduit à quinze jours. Dans un domaine où les éléments techniques confèrent une grande importance au facteur temps, il importe, en cas d'intervention in fine injustifiée du juge, de rétablir au plus vite les droits de l'hébergeur ou du fournisseur d'accès.
• Les bénéficiaires de la procédure
Le projet de loi contribue à combler une lacune importante de notre droit de la propriété intellectuelle.
En effet, conformément à l'article 8 de la directive précitée, le troisième alinéa de l'article 3 du projet de loi étend aux titulaires de droits voisins que sont, par exemple, les artistes-interprètes, les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes ou les entreprises de communication audiovisuelle, le droit de saisine du président du tribunal de grande instance, dans le cadre de la procédure de saisie-contrefaçon définie par l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle.
Aux termes de l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle, seuls sont aujourd'hui recevables à agir « l'auteur d'une oeuvre protégée par le livre Ier » du code, ses ayants droit ou ses ayants cause, les titulaires de droit voisins définis au livre II du code de la propriété intellectuelle étant, par conséquent, exclus du champ des personnes admises à introduire une requête de saisie-contrefaçon. Seule l'action pénale leur est ouverte, au contraire des auteurs qui ont accès aux deux procédures, civile et pénale.
L'action pénale, définie par l'article L. 335-1 du code de la propriété intellectuelle, s'applique donc indifféremment aux auteurs ou aux titulaires de droits voisins. Selon cette procédure, les officiers de police -seuls compétents- peuvent procéder, dès la constatation de la diffusion illicite de l'oeuvre, à la saisie des phonogrammes et vidéogrammes reproduits illicitement, des exemplaires et objets fabriqués ou importés illicitement et des matériels spécialement installés en vue de tels agissements. Il est à noter qu'aucune saisie recette n'est prévue pour les titulaires des droits voisins.
Lourde, d'une efficacité limitée dans le cadre de contrefaçons classiques, et par conséquent insuffisante à la mise en oeuvre d'une véritable protection des droits voisins, la procédure pénale est totalement inadaptée dans le cadre de violations des droits voisins sur des services de communication en ligne.
• La publication en ligne du jugement de condamnation pour contrefaçon
Dans un second paragraphe, l'article 3 autorise le tribunal prononçant une condamnation pour contrefaçon à ordonner, aux frais du condamné, la publication intégrale ou par extrait du jugement sur les services de communication publique en ligne. Sont ici visées les infractions suivantes :
- l'édition d'écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs (art L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle) ;
- l'exportation et l'importation des ouvrages contrefaits (même article) ;
- la reproduction, la représentation ou la diffusion d'une oeuvre de l'esprit y compris les logiciels, en violation des droits de l'auteur (art. 335-3 du code de la propriété intellectuelle) ;
- la fixation, la reproduction, la communication ou la mise à disposition du public ou la télédiffusion, l'importation ou l'exportation d'une prestation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme réalisé sans l'autorisation de l'artiste-interprète, du producteur ou de l'entreprise de communication audiovisuelle (art. L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle).
Cette disposition, directement inspirée de la recommandation du Conseil d'État formulée en 1998, rappelle que, certes soumise à un redoutable défi par les nouvelles technologies, la règle de droit peut aussi en faire le vecteur de sa pleine et entière application.
II. Position de l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
III. Position de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 5 bis
(art. 42-1 et 42-2 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986
relative à la liberté de
communication)
Pouvoir de sanction pécuniaire du CSA
à
l'égard des opérateurs privés de radio et de
télévision
I.
Texte adopté à l'Assemblée nationale
Sur proposition de M. Patrice Martin-Lalande, l'Assemblée nationale a
adopté cet article qui autorise le CSA, après les avoir mis en
demeure de respecter les obligations qui leurs sont imposées par les
textes législatifs et réglementaires, à prononcer des
sanctions pécuniaires à l'encontre des éditeurs et des
distributeurs de services de radio ou de télévision dont le
manquement constaté est constitutif d'une infraction pénale.
Conformément à la jurisprudence du Conseil
constitutionnel
11(
*
)
, le dispositif
prévoit que le montant de la sanction pécuniaire prononcée
par le CSA ne puisse excéder le montant prévu par la sanction
pénale.
Pour ce faire, l'article précise que, lorsque le CSA prononce une
sanction pécuniaire définitive punissant un manquement
constitutif d'une infraction pénale avant que le juge, saisi sur les
mêmes faits ou des faits connexes, ait statué
définitivement, ce dernier peut ordonner que la sanction
pécuniaire s'impute sur l'amende qu'il prononce.
II. Position de votre commission
Votre commission considère que la possibilité offerte au CSA
d'infliger des sanctions pécuniaires aux éditeurs et aux
distributeurs dont les manquements seraient constitutifs d'une infraction
pénale va dans le sens d'une meilleure régulation des services de
radio et de télévision privés diffusés sur le
territoire national.
Il s'agit là d'une évolution significative et bienvenue d'un
dispositif dont le président du CSA avait eu l'occasion, lors de son
audition par la commission le 28 mai 2003, de souligner les faiblesses.
Concernant les chaînes de télévision et les stations de
radio privées hertziennes comme pour l'ensemble des chaînes du
câble et du satellite, le CSA possède en effet, aux termes de
l'article 42-1 de la loi, la gamme suivante de sanctions :
- suspension de l'autorisation ou d'une partie du programme pour un mois
au plus ;
- réduction de la durée de l'autorisation dans la limite
d'une année ;
- sanction pécuniaire, assortie éventuellement d'une
suspension de l'autorisation ou d'une partie du programme, si le manquement
n'est pas constitutif d'une infraction pénale ;
- retrait de l'autorisation.
Pour les câblo-opérateurs, les sanctions sont les mêmes,
à l'exception de la suspension d'une partie du programme.
Le montant de la sanction pécuniaire doit être fonction de la
gravité des manquements commis et en relation avec les avantages
tirés du manquement, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre
d'affaires, ce maximum étant porté à 5 % en cas de
nouvelles violations de la même obligation.
En théorie donc, la gamme de sanctions mise par le législateur
à la disposition de l'autorité de régulation semble
suffisamment graduée pour permettre à cette dernière
d'agir efficacement à l'encontre des éditeurs et des
distributeurs de services qui ne respecteraient pas les obligations que leur
imposent les lois, les décrets d'application et les conventions.
En pratique cependant, cette gamme de sanctions se trouve largement
inadaptée, notamment pour faire face aux manquements des éditeurs
de services télévisés.
En effet, si les faits reprochés à l'éditeur ou au
distributeur sont constitutifs d'une infraction pénale, ce qui n'est pas
rare
12(
*
)
, le CSA, à défaut de
pouvoir prononcer dans les plus brefs délais une sanction
pécuniaire, se voit contraint de choisir entre deux procédures
extrêmement lourdes : la remise en cause de l'autorisation d'usage
de la ressource radioélectrique (« retrait, suspension ou
réduction de la durée d'autorisation) ou la saisine du parquet,
préalable nécessaire à l'ouverture de poursuites
pénales.
En élargissant le champ des sanctions pécuniaires, cet article
devrait par conséquent rendre une certaine efficacité aux
pouvoirs de sanction du CSA.
Pour compléter le travail amorcé à l'Assemblée
nationale, votre commission vous propose d'adopter
un amendement
tendant
à modifier l'intitulé des quatre types de sanctions
prévues par l'article 42-1 de la loi n° 86-1067 du
30 septembre 1986.
En effet, si la loi n° 2000-719 du
1
er
août 2000 a opportunément modifié
le premier alinéa de cet article afin d'étendre la portée
du pouvoir de sanctions du CSA à tout éditeur ou distributeur de
services de radio ou de télévision refusant de se conformer aux
mises en demeure qui lui sont adressées, et non plus seulement aux
services autorisés, c'est-à-dire les services hertziens, en
revanche, chacune des quatre sanctions fait encore référence
à cette même autorisation, soit qu'elle la suspende, soit qu'elle
en réduise la durée, soit qu'elle la retire.
Ces sanctions, par conséquent inadaptées aux chaînes et aux
services du câble et du satellite soumis à des régimes
conventionnés ou déclaratifs, doivent donc à leur tour
être modifiés pour rendre effective l'extension
opérée par la loi du 1
er
août 2000
précitée.
Sous réserve de cet
amendement
, votre commission vous propose
d'adopter cet article.
Article 5 ter
(art. 42-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre
1986
relative à la liberté de communication)
Pouvoir du
CSA d'ordonner la diffusion d'un communiqué à
l'antenne
I.
Texte adopté par l'Assemblée nationale
L'article 5 ter, adopté à l'Assemblée nationale, attribue
au CSA le pouvoir d'ordonner aux chaînes du câble et du satellite
ayant manqué à leurs obligations législatives,
réglementaires ou conventionnelles, l'insertion d'un communiqué
dans leurs programmes et détermine, pour la mise en oeuvre de ce
même pouvoir, une procédure contradictoire simplifiée.
• Le pouvoir dont dispose le CSA d'ordonner aux titulaires d'une
autorisation d'exploiter un service de communication audiovisuelle l'insertion,
à l'antenne, d'un communiqué dont il fixe les termes et les
conditions de diffusion, est élargi à l'ensemble des
éditeurs de services de radio et de télévisions
privés.
Les éditeurs des chaînes thématiques du câble et du
satellite seront par conséquent désormais soumis au pouvoir de
sanction défini par l'article 42-4.
• Une procédure simplifiée est déterminée pour
la mise en oeuvre de ce pouvoir de sanction.
Ainsi, avant d'ordonner l'insertion d'un communiqué à l'antenne
et conformément au principe du droit de la défense, le CSA est
tenu de demander à l'éditeur concerné de présenter
ses observations dans un délai de deux jours francs à compter de
la réception de la demande. Ce n'est qu'une fois que ce délai est
arrivé à échéance que le CSA peut prononcer sa
décision.
Une procédure identique avait déjà été
prévue au paragraphe VI de l'article 71 de la loi n°2000-719 du
1
er
août 2000. Toutefois, au motif que ce paragraphe faisait
de l'obligation de diffuser un communiqué en cas de manquement aux
obligations précitées une sanction automatique, le Conseil
constitutionnel, dans sa décision n°2000-433 DC du 27 juillet 2000,
s'est vu contraint d'en censurer l'ensemble des dispositions, y compris celles
concernant la procédure à mettre en oeuvre.
Depuis lors, si, aux termes de l'article 48-3 de la loi du 30 septembre 1986,
le CSA peut utiliser cette procédure simplifiée à
l'encontre des sociétés nationales de programmes (France 2,
France 3, La Cinquième [France 5], Réseau France
Outre-mer [RFO], Radio France et Radio France Internationale), il n'a d'autre
possibilité, à l'égard des services hertziens, que
d'utiliser la procédure extrêmement lourde prévue à
l'article 42-7
13(
*
)
. C'est à cette
situation que le présent article tend à remédier.
• En cas de refus de se conformer à la demande du CSA
d'insérer un communiqué à l'antenne, l'éditeur est
passible d'une sanction pécuniaire dont le montant, en vertu de
l'article 42-2 de la loi du 30 septembre 1986, est fonction de la
gravité des manquements commis, sans pouvoir excéder 3 % de
son chiffre d'affaire (5 % en cas de récidive).
II. Position de la commission
Votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification
.
Article 5 quater
(art. 48-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre
1986)
Pouvoir de sanction pécuniaire du CSA
à
l'égard des sociétés nationales de
programmes
I.
Texte adopté par l'Assemblée nationale
L'objet de cet article est à rapprocher de celui de l'article 5 bis.
Il tend en effet à autoriser le CSA, après les avoir mises en
demeure de respecter les obligations qui leur sont imposées par les
textes législatifs et réglementaires, à prononcer une
sanction pécuniaire à l'encontre des sociétés
nationales de programmes énumérées à l'article 44
de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
14(
*
)
dont le manquement constaté est constitutif
d'une infraction pénale.
II. Position de votre commission
Votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification
.
Article additionnel après l'article 5 quater
Protection de
l'enfance et de l'adolescence
I.
Position de la commission
En l'état actuel de la législation, le Conseil supérieur
de l'audiovisuel peut difficilement sanctionner les éditeurs et les
distributeurs de services de radio et de télévision ne respectant
pas ses prescriptions en matière de protection de l'enfance et de
l'adolescence.
D'une part car, si aux termes des dispositions de l'article 15 de la loi
du 30 septembre 1986, le CSA veille à ce que des programmes
susceptibles de nuire à l'épanouissement des mineurs ne soient
pas mis à leur disposition sur les antennes de radio et de
télévision, aucune sanction n'est prévue dans le cas
où de tels programmes seraient diffusés à des heures de
grande écoute.
D'autre part, l'article 42 de cette même loi ne cite, parmi les
obligations à respecter sous peine de mise en demeure puis de sanctions,
que celles imposées par les principes définis à l'article
premier de cette même loi.
C'est pourquoi, votre commission vous propose d'adopter
un
amendement
tendant à insérer un article additionnel visant
à faire figurer parmi les principes justifiant la mise en place de
limites à l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle
énumérées à l'article 1
er
de la loi du
30 septembre 1986, la protection de l'enfance et de l'adolescence.
Symbolique en ce qu'elle permet de réaffirmer l'importance que votre
commission attache à la protection du jeune public à
l'égard de la diffusion d'images de plus en plus violentes à des
heures de moins en moins tardives, cette mention a également une
dimension juridique non négligeable puisqu'elle permettra
désormais à l'autorité de régulation d'invoquer les
termes de l'article premier de la loi pour prendre des sanctions à
l'encontre des éditeurs et des distributeurs ne respectant pas les
prescriptions prises par l'autorité de régulation dans le domaine
de la protection de l'enfance et de l'adolescence.
Sous réserve de cet amendement, elle vous propose d'adopter le
présent article.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une réunion tenue le 10 juin 2003, sous la présidence de
M. Jacques Valade, président
, la commission a examiné
le rapport pour avis de
M. Louis de Broissia
sur le projet de loi
n° 195 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale,
relatif à
l'économie numérique
.
A l'issue de l'exposé du rapporteur pour avis, un débat s'est
engagé.
M. Jacques Valade, président
, a précisé que, bien
qu'il soit toujours délicat de limiter la création artistique et
l'innovation culturelle, il incombait néanmoins au législateur de
veiller à ce que des dispositions soient prises pour sanctionner, dans
ces domaines, la promotion et la diffusion d'attitudes et de contenus
répréhensibles.
Soulignant qu'il était favorable à l'introduction de la morale et
de l'éthique dans les nouvelles technologies,
M. Ivan Renar
s'est
néanmoins opposé au développement du moralisme. Il a
rappelé que si la régulation des nouveaux médias
était nécessaire et bienvenue, les deux garde-fous que
constituent la liberté d'expression et de création ne devaient en
aucun cas être dépassés.
M. Pierre Laffitte
a voulu savoir si les forums de discussion
étaient placés sous la surveillance du CSA.
M. Michel Thiollière
s'est demandé si le texte en
discussion pouvait être considéré comme la première
pierre d'un droit européen relatif à la communication en ligne.
Après s'être inquiétée de la signification et de la
portée des pouvoirs de régulation attribués au CSA,
Mme
Danièle Pourtaud
a souhaité savoir si les services à
la demande restaient dans le champ de compétence de l'autorité de
régulation. Concernant la responsabilité des hébergeurs et
des fournisseurs d'accès, elle a souligné le risque qu'ils
appliquent systématiquement le principe de précaution et
s'érigent en censeurs des contenus. Elle a indiqué que, sur ce
sujet, les dispositions de la loi sur la société de l'information
lui paraissaient plus équilibrées.
M. Philippe Nogrix
a estimé qu'il était indispensable
d'asseoir l'autorité du CSA. Compte tenu des dégâts
causés par les programmes de télévision, et maintenant par
certains services proposés sur internet, sur les personnes les plus
fragiles, il a souligné qu'il était nécessaire de poser
certaines limites à la liberté de communication et qu'il
était indispensable qu'une autorité de régulation puisse
sanctionner rapidement les abus.
Notant qu'il était difficile de trouver une voie médiane entre
trop de laxisme et trop de répression,
Mme Brigitte Luypaert
a
jugé que, devant les risques encourus par les personnes les plus
fragiles, et notamment les jeunes, il était peut-être
nécessaire de prendre le risque d'être sévère.
Répondant aux divers intervenants,
M. Louis de Broissia, rapporteur
pour avis
, a formulé les remarques suivantes :
- bien qu'il ne faille jamais négliger l'importance de la
liberté d'expression et de création, il convient néanmoins
de se méfier des comportements et des messages qui pourraient être
dangereux pour les personnes les plus vulnérables. L'approche
proposée donnerait au CSA les pouvoirs de sanction suffisants pour
dissuader les éditeurs mal intentionnés de mettre à
disposition des citoyens les plus fragiles des contenus illicites ;
- il est extrêmement délicat de fixer une frontière
entre les services faisant partie de la catégorie des services
audiovisuels et les autres. Par conséquent, il convient de
privilégier une approche pragmatique et de déterminer, au cas par
cas, la compétence des différentes autorités de
régulation ;
- la transposition de la directive relative à l'économie
numérique, en attendant la transposition de celle relative aux
communications électroniques, doit être considérée
comme le premier texte visant à réguler, à
l'échelle européenne, la communication en ligne ;
- le cas particulier de la régulation des services audio et
vidéo à la demande sera traité dans le texte de
transposition de la directive relative aux communications électroniques
qui sera présenté à l'automne devant le Parlement.
Puis la commission a abordé l'examen des articles.
Elle a adopté une nouvelle rédaction de l'article 1er
(définition de la communication publique en ligne) visant à
limiter le champ de compétence du CSA aux services de
télévision et de radio sur tous les supports et à
définir les services précités.
Après l'article 1
er
, elle a adopté un amendement
tendant à insérer un article additionnel visant à
substituer dans la législation le terme de radio à celui de
radiodiffusion sonore.
A l'article 2 (obligations et responsabilités des prestataires
intermédiaires), elle a adopté neuf amendements visant
respectivement :
- à élargir la définition des services
d'hébergement prévus à l'article 43-8 de la loi du
30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication ;
- à préciser au même article que la
responsabilité de l'hébergeur ne pourra être engagée
que s'il s'est abstenu d'agir en présence de faits ou de circonstances
à l'évidence illicites ;
- à supprimer la procédure facultative de notification aux
hébergeurs de l'existence de faits litigieux (article 43-9-1) ;
- à supprimer l'obligation faite aux hébergeurs de mettre en
oeuvre tous les moyens conformes à l'état de l'art pour
prévenir la diffusion de données constitutives de certaines
infractions (article 43-11) ;
- à supprimer l'obligation de vérifier les données
d'identification des auteurs de contenus imposée aux hébergeurs
et aux fournisseurs d'accès (article 43-13) ;
- à supprimer la mention selon laquelle des clauses contractuelles
peuvent limiter l'étendue de l'obligation de non-divulgation des
éléments d'identification des auteurs de contenus imposée
par la loi aux hébergeurs (article 43-14) ;
- à préciser les destinataires de la demande de droit de
réponse sur les services de communication en ligne (article
43-14-1) ;
- à préciser expressément que ce sont les
hébergeurs qui sont assujettis au secret professionnel (article
43-14-1) ;
- à élargir le champ d'exercice du droit de réponse
à l'ensemble des services de communication en ligne (article 43-14-1).
A l'article 5 bis (pouvoir de sanction du CSA à l'égard des
opérateurs privés de radio et de télévision), elle
a ensuite adopté un amendement visant à étendre aux
services déclaratifs et autorisés les pouvoirs de sanction du CSA.
Puis la commission a adopté un amendement tendant à
insérer un article additionnel après l'article 5 quater afin
de faire figurer parmi les principes essentiels justifiant la mise en place de
limites à l'exercice de la liberté de communication
audiovisuelle, la protection de l'enfance et de l'adolescence.
Sous réserve de l'adoption de ces amendements, la commission a
donné un avis favorable à l'adoption du projet de loi ainsi
modifié.
AMENDEMENTS PRÉSENTÉS PAR LA COMMISSION
Article additionnel après l'article 1er
Amendement
Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
Dans l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires
en vigueur, les mots « radiodiffusion sonore » sont
remplacés par le mot « radio ».
Article 1er
Amendement
Rédiger comme suit cet article :
I. Les trois derniers alinéas de l'article 1er de la loi du 30 septembre
1986 précitée sont supprimés.
II. L'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative
à la liberté de communication est complété par
trois alinéas ainsi rédigés :
« On entend par communication publique en ligne toute communication
audiovisuelle transmise sur demande individuelle formulée par un
procédé de télécommunication. »
« Est nécessairement considéré comme un service
de télévision tout service de communication audiovisuelle
accessible en temps réel et de manière simultanée pour
l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme
principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions
comportant des images et des sons, à l'exception des images consistant
essentiellement en des lettres, des chiffres ou des images fixes. »
« Est nécessairement considéré comme un service
de radiodiffusion sonore tout service de communication audiovisuelle accessible
en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du
public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est
composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des
sons. »
III. L'article 4 de la loi du 30 septembre 1986 précitée est
modifié comme suit :
1°) Avant le premier alinéa sont insérés deux
alinéas ainsi rédigés :
« I.- Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, autorité
indépendante, garantit l'exercice de la liberté de communication
audiovisuelle en matière de radio et de télévision par
tout procédé de télécommunication, dans les
conditions définies par la présente loi. Il assure
l'égalité de traitement ; il garantit l'indépendance
et l'impartialité du secteur public de la radiodiffusion sonore et de la
télévision ; il veille à favoriser la libre
concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre
éditeurs et distributeurs de services ; il veille à la
qualité et à la diversité des programmes, au
développement de la production et de la création audiovisuelles
nationales ainsi qu'à la défense et à l'illustration de la
langue et de la culture françaises. Il peut formuler des propositions
sur l'amélioration de la qualité des programmes.
Il peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de
radiodiffusion sonore et de télévision des recommandations
relatives au respect des principes énoncés dans la
présente loi. Ces recommandations sont publiées au Journal
officiel de la République française. »
2°) Le premier alinéa est précédé de la
mention « II ».
Article 2
(art. 43-8 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986)
Amendement
Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour
l'article 43-8 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986,
remplacer les mots :
direct et permanent
par le mot :
durable
Article 2
(art. 43-8 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986)
Amendement
Au premier alinéa du texte proposé par le III de cet article
pour l'article 43-8 de la loi n° 86-1067 du
30 septembre 1986, remplacer les mots :
faits et circonstances faisant apparaître ce caractère illicite
par les mots :
faits et circonstances mettant en évidence ce caractère illicite
Article 2
(art. 43-9-1 de la loi n°
86-1067 du
30 septembre 1986)
Amendement
Supprimer le texte proposé par le III de cet article pour
insérer un article 43-9-1 dans la loi n° 86-1067 du
30 septembre 1986.
Article 2
(art. 43-11 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986)
Amendement
Supprimer le second alinéa du texte proposé par le III de cet
article pour l'article 43-11 de la loi n° 86-1067 du
30 septembre 1986.
Article 2
(art. 43-13 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986)
Amendement
Au premier alinéa du texte proposé par le III de cet article
pour insérer un article 43-13 dans la loi n° 86-1067 du
30 septembre 1986, remplacer les mots :
sont tenues de vérifier, de détenir et de conserver
par les mots :
détiennent et conservent
Article 2
(art. 43-14 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986)
Amendement
A la fin du dernier alinéa du texte proposé par le III de
cet article pour insérer un article 43-14 dans la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :
la personne concernée
supprimer la fin de la phrase
Article 2
(art. 43-14 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986)
Amendement
Au début du dernier alinéa du texte proposé par le III de
cet article pour insérer un article 43-14 dans la loi
n° 86-1067 du 30 septembre 1986, remplacer le mot :
Les prestataires sont assujettis
par les mots :
Les personnes mentionnées à l'article 43-8 sont assujetties
Article 2
(art. 43-14-1 de la loi n°
86-1067
du 30 septembre 1986)
Amendement
Dans le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article
pour insérer un article 43-14-1 dans la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986, supprimer les mots :
utilisant un mode écrit de diffusion de la pensée mis à la
disposition du public en général ou de catégories de public
Article 2
(art. 43-14-1 de la loi n°
86-1067
du 30 septembre 1986)
Amendement
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet
article pour insérer un article 43-14-1 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986, remplacer les mots :
doit être présentée
par les mots :
est adressée au directeur de la publication ou, lorsque la personne
éditant à titre non professionnel un service de publication en
ligne a choisi de conserver l'anonymat, à la personne mentionnée
à l'article 43-8 qui la transmettra sans délai au directeur de la
publication
Article 5 bis
Amendement
Rédiger ainsi le I de cet article :
I.- L'article 42-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
précitée est ainsi modifié :
1°) Dans le deuxième alinéa (1°), les mots :
« de l'autorisation » sont remplacés par les
mots : « de l'édition ou de la distribution du ou des
services » ;
2°) Dans le troisième alinéa (2°), après les
mots : « de l'autorisation » sont
insérés les mots : « ou de la
convention » ;
3°) Après les mots : « assortie
éventuellement », la fin du quatrième alinéa
(3°) est rédigée comme suit : « d'une
suspension de l'édition ou de la distribution du ou des services ou
d'une partie du programme ; » ;
4°) Le cinquième alinéa (4°) est complété
in fine
par les mots : « ou la résiliation
unilatérale de la convention. ».
Article additionnel après l'article 5 quater
Amendement
Après l'article 5 quater, insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
Dans le second alinéa de l'article 1er de la loi n° 86-1067 du
30 septembre 1986 précitée, après les mots :
"d'autre part," sont insérés les mots "par la protection de
l'enfance et de l'adolescence,".
1
Discours du Premier ministre du 12
novembre
2002 devant l'assemblée générale de l'Electronic Business
Group.
2
La population de référence est la population des
internautes de 11 ans et +, soit 20 429 000 individus s'étant
connectés à Internet au cours des 30 derniers jours quelque soit
leur lieu de connexion : domicile, travail, autres lieux : lieux
d'éducation, lieux publics ou privés tels les cybercafés,
les bibliothèques, chez des amis...
3
Internet et les réseaux numériques, Conseil d'Etat,
Section du rapport et des études, rapport adopté le
2 juillet 1998.
4
Rapport n° 340 (1999-2000) fait par M. Jean-Paul Hugot,
au nom de la commission des affaires culturelles, sur le projet de loi,
adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en
2
e
lecture, modifiant la loi n° 86-1067 du
30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
5
Décision n° 2000-43 du 27 juillet 2000.
6
Art. 2 alinéa 2 de la loi du 30 septembre 1986.
7
Circulaire des ministres de la culture et de la communication, de
la justice et de l'industrie, « prise en application de l'article 43
de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la
liberté de la communication, concernant le régime applicable
à certains services de communication audiovisuelle ». J.O. du
9 mars 1988.
8
La définition des services de la société de
l'information existe déjà en droit communautaire. Elle figure
dans la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil
du 22 juin 1998 prévoyant une procédure
d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques
et des règles relatives aux services de la société de
l'information et dans la directive 98/84/CE du Parlement européen et du
Conseil du 30 novembre 1998 concernant la protection juridique des
services à accès conditionnel et des services d'accès
conditionnel.
Cette définition couvre tout service fourni,
normalement contre rémunération, à distance au moyen
d'équipement électronique de traitement (y compris la compression
numérique) et de stockage des données, à la demande
individuelle d'un destinataire de services (...)
9
Décision n°2000-433 DC du 27 juillet 2000
10
2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil
11
Décision n° 89-260 DC, loi relative à la
sécurité et à la transparence du marché
financier :
22. Considérant que la possibilité n'en est pas moins reconnue
à la Commission des opérations de bourse de prononcer une
sanction pécuniaire pouvant aller jusqu'au décuple du montant des
profits réalisés par l'auteur de l'infraction et qui est
susceptible de se cumuler avec des sanctions pénales prononcées
à raison des mêmes faits et pouvant elles-mêmes atteindre un
montant identique ; que si l'éventualité d'une double
procédure peut ainsi conduire à un cumul de sanctions, le
principe de proportionnalité implique
, qu'en tout état de
cause, le montant global des sanctions éventuellement prononcées
ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des
sanctions encourues
; qu'il appartiendra donc aux autorités
administratives et judiciaires compétentes de veiller au respect de
cette exigence dans l'application des dispositions de l'ordonnance du 28
septembre 1967 modifiée
12
Est notamment constitutif d'une infraction pénale, le fait
pour les éditeurs et les distributeurs de services de
méconnaître les dispositions réglementaires et
conventionnelles relatives au nombre et à la nationalité des
oeuvres cinématographiques diffusées (art.79 de la loi du 30
septembre 1986).
13
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel notifie les griefs
à l'éditeur ou au distributeur du service de radiodiffusion
sonore ou de télévision pour l'exploitation d'un service de
communication audiovisuelle qui peut consulter le dossier et présenter
ses observations écrites dans le délai d'un mois. En cas
d'urgence, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel
peut réduire ce délai sans pouvoir le fixer à moins de
sept jours.
L'éditeur ou le distributeur de services est entendu par le Conseil
supérieur de l'audiovisuel. Il peut se faire représenter. Le
Conseil supérieur de l'audiovisuel peut également entendre toute
personne dont l'audition lui paraît susceptible de contribuer utilement
à son information.
14
France 2, France 3, La Cinquième
(France 5), Réseau France Outre-mer (RFO), Radio France et Radio
France Internationale.