I. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX DÉPARTEMENTS ET AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES D'OUTRE-MER
Seul
l'« Etat récapitulatif de l'effort budgétaire et
financier consacré aux départements et collectivités
territoriales d'outre-mer » (« jaune »
présenté en annexe du projet de loi de finances) permet
d'appréhender dans leur globalité les moyens budgétaires
consacrés, d'une part, aux départements d'outre-mer et, d'autre
part, aux collectivités territoriales d'outre-mer à statut
particulier de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
En effet, l'ensemble des ministères contribue à l'effort
financier en faveur de l'outre-mer, les crédits du secrétariat
d'Etat à l'outre-mer représentant moins de 11 % des
moyens budgétaires aux départements et collectivités
territoriales d'outre-mer pour 2002, moyens qui atteignent un
montant total
de 8,44 milliards d'euros (55,4 milliards de francs) pour les dépenses
ordinaires et crédits de paiement et 892 millions d'euros
(5,85 milliards de francs) en autorisations de programme
.
Au total, l'évolution de l'effort budgétaire global en faveur de
ces départements et collectivités se caractérise par une
progression de 7,13 % en crédits de paiement et de 5,11 % en
autorisations de programme.
Au-delà des dotations propres du secrétariat d'Etat à
l'outre-mer, le présent avis présenté par votre commission
des Lois s'attachera également à analyser les incidences
prévisibles des contributions des ministères de
l'intérieur et de la justice ainsi qu'à analyser la
budgétisation des dépenses induites par la loi n° 2000-1207
du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer et la loi n°
2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte.
Les deux tableaux suivants retracent l'évolution prévisionnelle
des moyens de paiement et autorisations de programmes.
Moyens
de paiement destinés aux DOM, à Mayotte et à
Saint-Pierre-et-Miquelon
(dépenses ordinaires et crédits
de paiement)
|
2001 |
2002 |
|
||
|
montant |
part
|
montant |
part
|
évolution
|
ensemble des ministères dont: |
7.881,44 |
100 % |
8.443,42 |
100 % |
+7,13 % |
- outre-mer |
828,61 |
10,51 % |
864.83 |
10,24 % |
+ 4,37 % |
- intérieur et décentralisation |
1.522,08 |
19,31 % |
1.519,16 |
17,99 % |
-1,91 % % |
- justice |
130,75 |
1,66 % |
132.79 |
1,57 % |
+1,56 % |
(tableau réalisé à partir des données du « jaune » budgétaire) (en millions d'euros)
Autorisations de programme destinées
aux DOM,
à
Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon
|
2001 |
2002 |
|
||
|
montant |
part
|
montant |
part
|
évolution en % |
ensemble des ministères dont: |
849,46 |
100 % |
892,90 |
100 % |
+ 5,11 % |
- outre-mer |
324,66 |
38,22 % |
352,26 |
39,45 % |
+ 8,50 % |
- intérieur et décentralisation |
163,06 |
19,19 % |
165,37 |
18,52 % |
+ 1,42 % % |
- justice |
5,25 |
0,62 % |
5,32 |
0,59 % |
+ 1,33 % |
(tableau réalisé à partir des
données
du « jaune » budgétaire) (en millions
d'euros)
On observe donc une progression tant des autorisations de programme
destinées aux départements d'outre-mer que des crédits
ordinaires.
Malgré tout, ce budget s'avère insuffisant.
1. Une progression marquée des dotations du secrétariat d'Etat à l'outre-mer
Les
dotations du secrétariat d'Etat à l'outre-mer en faveur des
départements et collectivités d'outre-mer connaissent une
progression (+ 4,37 %) en ce qui concerne les moyens de
paiement qui atteignent plus de 864,83 millions d'euros pour 2002, les
autorisations de programme progressant quant à elles de
8,5 %. La
part du budget de l'outre-mer dans l'ensemble des
moyens de paiement affectés aux départements d'outre-mer stagne
à 10,24 %
.
S'agissant cette fois de l'ensemble des crédits alloués au
secrétariat d'Etat à l'outre-mer (qui concernent tant les DOM et
collectivités à statut particulier que les TOM), on notera qu'il
dépasse pour la première fois le chiffre symbolique de 7
milliards de francs (1,07 milliard d'euros), avec une augmentation de
3,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001.
-
la poursuite de la mise en oeuvre de la loi d'orientation
1(
*
)
La loi d'orientation bénéficie d'un
financement
spécifique supplémentaire de 72 millions d'euros (qui s'ajoute
aux 50 millions d'euros inscrits l'an dernier)
2(
*
)
pour sa mise en oeuvre.
Le FEDOM (chapitre 44-03) est crédité à hauteur de 68,7
millions d'euros afin de financer pour 2,74 millions d'euros les 2.200 primes
à la création d'emploi, pour 21 millions d'euros les 10.000
projets initiatives-jeunes, pour 9,147 millions d'euros les 3.000
congés-solidarités et pour 12,19 millions d'euros les
allocations de retour à l'activité.
Sont également prévus au chapitre 41-91 0,4 million d'euros
destinés à la mise en place d'un office de l'eau, ainsi que 3,2
millions d'euros au chapitre 46- 94, destinés à permettre
à l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs
d'outre-mer de prendre en charge les frais de transport des stagiaires du plan
initiative jeunes, et l'augmentation de la dotation pour le fonds
d'échange à but éducatif, culturel et sportif et celles
des fonds de coopération régionale (Antilles, Guyane,
Réunion), créés en lieu et place de l'ancien fonds
interministériel Caraïbes.
- la mise en oeuvre de la loi relative à Mayotte
3(
*
)
Outre les 76.000 euros qui s'ajoutent aux crédits de fonctionnement
déjà mis en place pour la commission de réforme de
l'état-civil
4(
*
)
, Mayotte
bénéficie également de nouvelles dotations
spécifiques.
1,52 million d'euros sont ainsi prévus pour la dotation dite de
« rattrapage et de premier équipement des
communes », qui doit permettre aux communes mahoraises de mettre en
place les infrastructures de base (assainissement, eau potable, construction
d'écoles), ainsi que pour le fonds mahorais de développement,
dont l'objet est le financement de projets publics ou privés
d'aménagement et d'équipement du territoire, ainsi que le soutien
au développement des entreprises.
Mayotte bénéficiera également d'1,272 million d'euros afin
de créer un fonds de coopération régionale, essentiel pour
rompre l'isolement dont souffre encore trop le territoire, et de mener des
actions en faveur de la formation professionnelle (programme de formation des
cadres mahorais) et de la santé (instauration d'un fonds de concours
santé).
En matière sociale, 28,341 millions d'euros sont d'ores et
déjà prévus pour financer les futurs dispositifs pour
l'emploi, qui devraient être créés par ordonnance
5(
*
)
avant le 31 mars 2002.
Outre la mise en oeuvre des deux principales lois relatives à
l'outre-mer, le budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer
consacre une fois encore ses moyens prioritairement en faveur de l'emploi, du
logement et du développement économique.
- Le
soutien à l'emploi
demeure la
première
priorité du budget
du secrétariat d'Etat à
l'outre-mer, en représentant
46,8 %.
La dotation du fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer et
à Saint-Pierre-et-Miquelon (FEDOM) augmente de 25,5 %, comme en
2001, pour s'élever à
505,04 millions d'euros
(mesures
LOOM comprises).
Cette augmentation se poursuit cependant sans qu'aucun de la douzaine de
dispositifs financés n'ait fait l'objet d'une évaluation.
Elle doit permettre à la fois de renforcer les dispositifs d'insertion
traditionnels et d'accompagner la montée en puissance des mesures
prévues par la loi d'orientation pour l'outre-mer. 10 % des 10.000
nouveaux emplois-jeunes créés pour 2002 devraient être
réservés à l'outre-mer, ce qui portera le nombre total de
bénéficiaires à près de 14.000 dans les DOM, tandis
que le dispositif est étendu à Mayotte. Au total, près de
100.000 mesures sont prévues, dont 39.000 contrats
emploi-solidarité, 15.000 contrats d'insertion par l'activité.
- La
politique d'aide au logement
, qui était la grande
absente de la loi d'orientation pour l'outre-mer, malgré l'importance
des besoins en matière de logement et de l'évolution
démographique, constitue le deuxième poste de dépenses du
budget, avec 287 millions d'euros (+ 39,7 %) en autorisations de
programme et 161millions de francs (+ 11,19 %) en
crédits de paiement.
Cependant, cette augmentation doit être fortement relativisée
puisqu'elle correspond largement à la compensation de la suppression de
la créance de proratisation
6(
*
)
du fait de l'alignement du RMI
outre-mer sur celui de la métropole au 1
er
janvier 2002.
Ces moyens doivent permettre de financer la réhabilitation ou la
construction de 16.700 logements, contre 15.000 en 2001 et 13.400 en 2000,
tandis que la résorption de l'habitat insalubre devrait concerner
2.400 ménages.
Enfin, l'aide exceptionnelle aux ménages pour l'acquisition de terrains
situés dans la zone des 50 pas géométriques
7(
*
)
sera poursuivie avec une dotation de
4,57 millions d'euros en autorisations de programmes.
- La politique d'investissement et
d'appui au développement
économique
Est inscrit au budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer le
montant des tranches annuelles théoriques de ses engagements au titre
des
contrats de plan Etat-régions
(CPER) dans les
départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à
Mayotte, soit 48,5 millions d'euros, dont 46,5 millions d'euros au titre du
FIDOM. Les montants des tranches annuelles sont en forte augmentation par
rapport à la période précédente, ce qui place les
régions d'outre-mer en bonne position dans la répartition des
crédits. La Guyane, avec un ratio de 854,78 euros par habitant est
la première région française, la Guadeloupe la
deuxième, la Martinique la quatrième et la Réunion la
sixième.
- L'effort consacré à la
culture, à l'action sociale et
à la coopération régionale
s'accentue de 20,55 %
pour atteindre plus de 5,66 millions d'euros. Cette augmentation est due,
d'une part, à la poursuite de la mise en oeuvre de certaines mesures
relatives à la loi d'orientation, mais aussi à la création
d'un fonds de développement des nouvelles technologies de l'information
et de la communication.
- Le
service militaire adapté
8(
*
)
poursuit sa professionnalisation
et sa féminisation commencée en 1999, avec l'objectif
d'accueillir 3.000 jeunes au 1
er
janvier 2003, soit le même
nombre que celui des jeunes formés avant la suppression du service
national. Aux 2.000 emplois déjà créés s'ajouteront
500 emplois nouveaux.
2. Une stagnation de la contribution des ministères de l'intérieur et de la justice
-
Les crédits de paiement provenant du
ministère de
l'intérieur et de la décentralisation
, qui
représentent environ 18 % de l'effort financier global de
l'Etat en faveur des département d'outre-mer, (1.519 millions
d'euros pour 2002), régressent légèrement (-1,91 %),
tandis que les autorisations de programme stagnent à +
1,42 %, alors même que les collectivités d'outre-mer
sont toujours confrontées à une situation financière
difficile et à des problèmes récurrents de
délinquance.
Ces crédits correspondent à des dépenses de personnel, de
fonctionnement et d'équipement des services déconcentrés
et surtout à des subventions de fonctionnement et d'investissement aux
collectivités locales.
Ces dotations aux collectivités locales sont de deux natures :
D'une part, sont financés par prélèvements sur recettes,
pour un montant total de plus de 690 millions d'euros, la dotation globale de
fonctionnement (DGF : 478 millions d'euros), la dotation de
développement rural (DDR), le fonds national de
péréquation (FNP), le fonds de compensation pour la taxe sur la
valeur ajoutée (FCTVA) et la dotation spéciale instituteurs (DSI).
Les autres dotations aux collectivités locales sont financées par
des dotations figurant au budget du ministère de l'intérieur. Il
s'agit des dotations suivantes : dotation générale de
décentralisation (DGD), dotation régionale d'équipement
scolaire (DRES : 101 millions d'euros), dotation départementale
d'équipement des collèges (DDEC : 31,9 millions d'euros),
dotation globale d'équipement (DGE : 31,7 millions d'euros), ainsi
que des crédits de mise en sécurité des écoles.
- En ce qui concerne la contribution du
ministère de la
justice
, on observe,
après la forte progression
du montant
des autorisations de programme (+ 75,49 %) qui atteignaient
121,417 millions de francs, et la progression de 7,39 % des moyens
de paiement
en 2001, une stabilisation pour 2002
.
Ceci confirme
l'évolution erratique des autorisations de
programme
. Après avoir connu un important recul en 1998 et 1999,
elles progressaient de 140 % en 2000, puis de 75 % en 2001.
Or, les importants besoins des juridictions et des établissements
pénitentiaires des départements et collectivités
d'outre-mer
, que votre rapporteur pour avis a pu constater au cours de ses
missions en Guyane, aux Antilles, à la Réunion et à
Mayotte,
ne sont toujours pas satisfaits
.
Ces crédits, d'un montant de 133 millions d'euros en 2001, devraient se
traduire par des créations d'emplois et une modernisation du patrimoine
immobilier de l'institution judiciaire et des établissements
pénitentiaires, ce à quoi votre rapporteur appelle depuis
plusieurs années avec insistance.