EXAMEN EN COMMISSION
La
commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées a examiné le présent avis au cours de sa
réunion du 8 novembre 2001.
A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, un débat s'est
alors instauré entre les commissaires.
M. André Dulait s'est interrogé sur les conditions dans
lesquelles les différents pays créanciers contrôlent
l'affectation des ressources dégagées par les annulations de
dettes à la suite de l'initiative pour les pays pauvres très
endettés. Il a regretté, par ailleurs, la réduction des
moyens consacrés à l'assistance technique en rappelant
l'importance de l'aide au développement dans le cadre d'une meilleure
maîtrise des flux migratoires.
Mme Monique Cerisier ben-Guiga, après avoir marqué son accord
avec les principales conclusions du rapporteur pour avis, a
déploré la diminution régulière des crédits
d'aide au développement quels que soient les gouvernements en place.
L'intégration du secrétariat d'Etat à la
coopération au sein du ministère des affaires
étrangères devait, en principe, a-t-elle poursuivi, renforcer
notre politique de coopération. Elle s'est traduite, en
réalité, par un redéploiement des dotations permettant de
préserver les moyens de notre action culturelle au détriment de
l'aide au développement. Elle a souligné les risques de
dispersion de nos interventions à la suite de l'extension du nombre de
pays bénéficiaires de l'aide française dans le cadre de la
zone de solidarité prioritaire. Elle a regretté que notre pays
n'encourage pas suffisamment la capacité réelle des populations
à promouvoir le développement de leur économie.
M. Xavier de Villepin, président, a observé que l'effort
consacré à l'aide au développement devait
s'apprécier dans le cadre plus large de la réforme de l'Etat et
des priorités assignées à la dépense publique. Avec
M. Michel Caldaguès, il a invité les responsables politiques
à contribuer à cette réflexion sur les grands choix qui
doivent être faits dans ce domaine. M. Michel Caldaguès a
rappelé à cet égard que les secteurs couverts par la
Commission avaient tous supporté, au cours des dernières
années, d'importants transferts de ressources au profit d'autres actions
de l'Etat.
Mme Danielle Bidard-Reydet a regretté que les synergies que l'on pouvait
espérer de la réforme de la coopération n'aient pas encore
donné de résultats probants. Citant le cas du Burkina Faso
où la moitié des enfants ne sont pas scolarisés, elle a
déploré la faiblesse de l'action de la France dans le domaine de
l'éducation de base. Elle a également souligné que les
moyens mis en oeuvre dans la lutte contre le sida n'étaient pas à
la mesure de la gravité du fléau.
Après avoir critiqué la réduction régulière
des crédits d'aide au développement depuis plusieurs
années, M. Hubert Durand-Chastel a souligné la réduction
du niveau de vie dans les pays en développement liée à la
croissance démographique. Il a rappelé la vocation
particulière de notre pays en matière d'aide au
développement et insisté sur l'excellence de l'instrument que
constituait l'assistance technique, aujourd'hui menacée.
M. Xavier de Villepin, président, a souligné la
nécessité de définir des secteurs prioritaires
d'intervention pour l'aide au développement en rappelant
l'intérêt de pouvoir mettre en valeur des résultats
visibles en matière de coopération. Il a observé, avec le
rapporteur pour avis, et Mme Monique Cerisier ben-Guiga, que
l'éducation, la santé et la sécurité
intérieure devaient constituer des champs d'action
privilégiés.
M. André Rouvière a estimé que les aspects financiers ne
représentaient pas la seule clé du développement, mais que
les pays du sud devaient également surmonter de nombreux blocages
structurels de caractère social. Il a jugé, par ailleurs, utile
que l'action de la France puisse être présente dans le plus grand
nombre de pays.
M. Xavier de Villepin, président, a alors évoqué
l'infléchissement de la politique des Etats-Unis vis-à-vis de
l'Afrique, davantage orientée vers les transferts de ressources pour
satisfaire les besoins les plus urgents dans le domaine social plutôt que
sur le rappel des principes de bonne gouvernance. Il a également
souligné que l'Afrique était devenue le premier fournisseur de
pétrole des Etats-Unis, devant le Moyen-Orient, et que cette situation
conduirait les Etats-Unis à observer un intérêt pragmatique
pour ce continent. Il a relevé que, d'après le Conseil
français des investisseurs en Afrique, l'attention nouvelle des
Etats-Unis pour cette partie du monde correspondait aux intérêts
français dans la mesure où il était indispensable de
conjuguer les efforts des uns et des autres pour contribuer à une
Afrique pacifique et prospère.
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Au cours
de la réunion du 21 novembre 2001, la commission a examiné
l'ensemble des crédits du ministère des affaires
étrangères.
M. Xavier de Villepin, président, a estimé que le projet de
budget du ministère des affaires étrangères pour 2002
était insuffisant. Globalement, en effet, a-t-il précisé,
les crédits du ministère, en francs constants, marquaient une
stagnation par rapport à l'an passé. Déjà,
l'année dernière, la commission avait sévèrement
jugé les crédits dédiés à notre action
diplomatique. Espérant un effort réel pour l'exercice suivant,
elle avait cependant, a-t-il rappelé, voté les crédits
proposés. Cet effort n'était pas, malheureusement, au rendez-vous
aujourd'hui, malgré une actualité internationale, et pas
seulement depuis le 11 septembre, qui pouvait légitimement faire de
l'action diplomatique une priorité gouvernementale. Cela, a
ajouté M. Xavier de Villepin, président, en dépit de
l'action du ministre lui-même, qui n'a pas ménagé ses
efforts auprès de son collègue de l'économie et des
finances pour dégager des ressources supplémentaires,
indispensables à un meilleur fonctionnement de ses services et, d'une
façon générale, à l'influence extérieure de
notre pays.
Ce projet de budget ne paraissait pas, selon M. Xavier de Villepin,
président, à la hauteur de nos ambitions ni même de
l'action conduite, avec talent, a-t-il estimé, par le ministre des
affaires étrangères lui-même, sous l'autorité du
Président de la République et du Premier ministre.
Les moyens de fonctionnement, a-t-il déploré, étaient trop
chichement mesurés. Malgré de louables efforts de modernisation
et de rationalisation de la gestion, cette situation compliquait toujours
davantage le travail des agents du ministère, tant à
l'administration centrale que dans nos postes diplomatiques et consulaires. Les
crédits d'action internationale, pour leur part, avec une masse de
crédits globalement inchangée par rapport à l'an
passé, permettaient certes d'augmenter certains crédits d'action
culturelle, ce qui était une bonne chose. Cela se faisait cependant aux
dépens de notre action en faveur du développement ou de la
coopération militaire, dont les crédits diminuaient encore cette
année, malgré une réforme de nos structures de
coopération qui aurait justifié une tendance inverse.
Pour cet ensemble de raisons, M. Xavier de Villepin, président, a
indiqué que, pour sa part, il se résoudrait à
émettre un avis défavorable à l'adoption de ces
crédits.
M. Claude Estier s'est étonné de ce qui semblait être
l'intention de la majorité sénatoriale de rejeter les
crédits du ministère des affaires étrangères pour
2002. Ce budget ne lui paraissait pas plus insuffisant que celui de l'an
passé que le Sénat avait pourtant voté. Un tel rejet
interviendrait par ailleurs dans des circonstances internationales qui
conduiraient, à l'extérieur, à une mauvaise
interprétation de ce vote et comme un désaveu de l'action du
ministre.
M. Michel Caldaguès a estimé que le fait, pour des
parlementaires, de ne pas voter un budget ne devait pas conduire à les
placer en situation d'accusés. Au demeurant, le fait de pouvoir choisir
entre le pour et le contre constituait, en dernier ressort, la principale
liberté de tout Parlement.
La commission a alors émis un avis défavorable sur l'ensemble des
crédits du ministère des affaires étrangères
inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.