II. LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE SOUTIEN AU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET SA TRADUCTION AU NIVEAU NATIONAL
A. LA POLITIQUE EUROPÉENNE DE SOUTIEN AU DÉVELOPPEMENT RURAL
Le
soutien au développement rural est devenu un élément
fondamental de la politique agricole européenne dont il constitue le
« deuxième pilier ».
Cette orientation relativement récente -puisque la naissance officielle
de cette politique date de l'accord de Berlin sur l'Agenda 2000 de mars
1999- repose sur la prise de conscience de l'importance de l'enjeu que
représente le développement équilibré du territoire
rural au sein de l'espace européen.
La politique européenne de soutien au développement rural trouve
une traduction au travers de deux instruments : le règlement de
développement rural et les programmes d'initiatives communautaires.
1. Le règlement européen de développement rural
a) Contenu du règlement
Le
règlement CE n° 1257/1999 du 17 mai 1999
concernant le soutien au développement rural par le FEOGA regroupe
l'ensemble des actions européennes en faveur des structures agricoles et
des zones rurales, qui relevaient auparavant soit des politiques structurelles,
soit des mesures d'accompagnement de la PAC.
Classées en neuf catégories différentes, ces mesures, au
nombre de vingt deux, visent à développer la dimension
multifonctionnelle de l'agriculture, c'est-à-dire sa contribution,
au-delà de la simple activité productive, à l'occupation
de l'espace, à l'aménagement du territoire, à l'animation
de la vie rurale
Seule la mesure agro-environnementale doit obligatoirement être mise en
oeuvre par les Etats membres, les autres mesures ne revêtant qu'un
caractère facultatif. En autorisant la définition des
priorités de développement rural au niveau national, le
règlement fait donc une large place au principe de subsidiarité.
b) Canaux de financement
Le
règlement de développement rural prévoit le cofinancement
de l'ensemble des mesures précitées par le FEOGA et les Etats
membres.
S'agissant du cofinancement communautaire, il distingue toutefois entre les
deux catégories de mesures de soutien :
- les
mesures d'accompagnement de la PAC
(mesures
agro-environnementales, préretraites, boisement, indemnités
compensatoires) font l'objet d'un cofinancement par
la section garantie du
FEOGA
sur l'ensemble du territoire ;
- les
autres mesures
de soutien sont cofinancées :
soit par
le FEOGA-orientation
, lorsqu'elles sont
destinées aux
régions de l'objectif 1,
c'est à
dire les régions en retard de développement ;
soit par le
FEOGA-garantie
lorsqu'elles bénéficient
aux
régions de l'objectif 2-
régions
confrontées à des difficultés d'ordre structurel.
Les ressources allouées au
FEOGA-garantie
pour les
dépenses de développement rural représentent
30,37 milliards d'euros pour la période 2000-2006
,
l'enveloppe annuelle étant plafonnée à
4,3 milliards d'euros
.
Les ressources accordées au
FEOGA-orientation
pour la même
période s'élèvent, quant à elles, à
195 milliards d'euros
, dont 70 % sont toutefois
réservés aux régions de l'objectif 1.
2. Le programme d'initiative communautaire Leader +
Aux
termes du règlement européen de développement rural, un
programme d'initiative communautaire spécifique au développement
rural peut être mis en oeuvre pour étendre le champ d'application
des mesures cofinancées par le FEOGA-orientation au-delà des
régions de l'objectif 1.
Ce type de programme vise à soutenir les initiatives prises par des
acteurs locaux en faveur du développement rural, ces partenaires
étant désignés par le terme de « groupes
d'action locale » (GAL).
Deux initiatives, appelées LEADER I et LEADER II, ont déjà
vu le jour en 1991et en 1994.
Les objectifs et les modalités de mise en oeuvre du dernier programme,
dénommé LEADER+, ont été définis par une
communication de la Commission européenne du 14 avril 2000.
L'initiative communautaire LEADER+ se voit assigner pour objectifs :
- de soutenir des stratégies de développement rural
présentées par les GAL pour des territoires donnés,
chacune de ces stratégies devant être fondée sur un projet
mobilisateur tel que la valorisation de produits locaux ou l'introduction de
nouvelles technologies ;
- d'encourager la coopération entre territoires ruraux d'un
même Etat ou d'Etats membres différents ;
- d'inciter à la mise en réseau des groupes d'actions
locales ainsi que des administrations impliquées dans l'application du
programme.
La dotation du FEOGA-orientation affectée à cette initiative
s'élève à 2,02 milliards d'euros pour la période
2000-2006.
Sa mise en oeuvre au niveau national est subordonnée à la
présentation par chaque Etat membre de propositions définissant
les territoires retenus, les critères de sélection des projets
des groupes d'actions locales, ainsi que les financements
complémentaires proposés.
B. LA TRANSCRIPTION DE CES PRIORITÉS AU NIVEAU NATIONAL
1. La mise en oeuvre de la politique européenne de soutien au développement rural
a) L'application du règlement européen de développement rural
Les
orientations du règlement de développement rural sont mis en
oeuvre dans deux cadres complémentaires
Le plan de développement rural national (PDRN)
Approuvé formellement par la Commission européenne le
7 septembre 2000, le plan français de développement
rural programme seize des vingt deux mesures proposées par le
règlement européen.
PROGRAMMATION FINANCIÈRE DES MESURES
DU PLAN DE
DÉVELOPPEMENT RURAL NATIONAL
POUR L'ANNÉE 2000 ET POUR LA
PÉRIODE 2000-2006
Mesures |
2000 |
2000-2006 |
||
|
Coût total ou
|
Coût total ou
|
Coût total ou
|
Coût total ou
|
Investissement dans les exploitations agricoles |
1 199,66 |
182,88 |
10 088,06 |
1 537,91 |
Installation de jeunes agriculteurs |
1 476,29 |
225,05 |
12 346,80 |
1 882,25 |
Formation |
56,00 |
8,53 |
766,00 |
116,77 |
Préretraite |
589,00 |
89,94 |
2 49,16 |
380,23 |
Zones
défavorisées
|
2 530,00 |
385,69 |
18 623,44 |
2 839,12 |
Agri-environnement |
2 450,00 |
375,5 |
15 125,79 |
2 305,91 |
Amélioration de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles |
2 333,33 |
355,71 |
16 333,33 |
2 490,00 |
Boisement de terres agricoles |
86,17 |
13,1 |
789,85 |
120,41 |
Autres mesures forestières |
218,85 |
33,36 |
3 444,89 |
525,17 |
Amélioration des terres |
15,15 |
2,31 |
106,06 |
16,16 |
Remembrement des terres |
100 |
15,24 |
700,00 |
106,71 |
Instauration de services de remplacement sur l'exploitation et de services d'aide à la gestion agricole |
- |
- |
- |
- |
Commercialisation des produits agricoles de qualité |
37,5 |
5,71 |
366,25 |
55,83 |
Services essentiels pour l'économie et la population rurale |
- |
- |
98,39 |
15,00 |
Rénovation et développement des villages et protection et conservation du patrimoine rural |
22,5 |
3,43 |
219,75 |
33,50 |
Diversification des activités agricoles ou proches de l'agriculture en vue de créer des activités multiples ou des alternatives de revenu |
37,5 |
5,71 |
366,25 |
33,50 |
Gestion des ressources en eau destinées à l'agriculture |
22,5 |
3,430 |
- |
33,50 |
Développement et amélioration des infrastructures liées au développement de l'agriculture |
- |
- |
- |
- |
Encouragement des activités touristiques et artisanales |
- |
- |
- |
- |
Protection de l'environnement en ce qui concerne l'agriculture, la sylviculture et la gestion de l'espace naturel, ainsi que l'amélioration du bien-être des animaux |
60 |
9,14 |
1 181,00 |
180,04 |
Reconstitution du potentiel de production agricole endommagé par des catastrophes naturelles et mise en place des instruments de prévention appropriés |
- |
- |
- |
- |
Programme |
11 235,46 |
1 712,85 |
83 269,82 |
12 694,40 |
(1)
Somme de la contribution nationale et de la
contribution européenne
Source
:Ministère de l'Agriculture et de la
Pêche
Il s'applique à l'ensemble du territoire national pour les quatre
mesures d'accompagnement et aux zones autres que celles relevant de l'objectif
1 pour les autres mesures. Il est cofinancé par le seul FEOGA-garantie.
?
Les documents uniques de programmation (DOCUP) dans les
régions d'objectifs 1 et 2
En complément des aides versées directement aux exploitants
agricoles dans le cadre du PDRN, la France bénéficie, au profit
de certaines régions éligibles, de crédits communautaires
inscrits dans les documents uniques de programmation.
Il convient de distinguer entre :
- d'une part, les
« DOCUP objectif 1 »,
destinés à programmer les mesures autres que les quatre mesures
d'accompagnement dans les régions en retard de développement
-c'est à dire les départements d'outre-mer, la Corse et le
Hainaut- et qui sont abondés par le FEOGA-orientation ;
- d'autre part, les
« DOCUP objectif 2 »,
permettant de mobiliser quinze mesures différentes dans les zones en
difficultés structurelles et financés par le FEOGA-garantie, le
FEDER et le FSE.
b) La mise en oeuvre de Leader +
L'enveloppe allouée à la France pour la mise en
oeuvre
de LEADER + s'élève à 268 millions d'euros.
Le programme français est en cours d'adoption par l'Union
européenne. Un appel à candidature a parallèlement
été lancé en mai 2001 au niveau national, qui vise
à sélectionner quelques 140 GAL.
2. Le rôle des CTE
Créés par l'article premier de la loi
d'orientation
agricole du 9 juillet 1999 en vue de mettre en pratique le concept de la
mutifonctionnalité de l'agriculture, les contrats territoriaux
d'exploitation (CTE) sont pour le Ministère de l'Agriculture et de la
Pêche l'instrument privilégié d'action en faveur du
développement rural.
Ils doivent, en effet, rémunérer les nouvelles fonctions que se
voient reconnaître les agriculteurs dans les domaines de l'environnement,
de la qualité et de la sécurité alimentaire, ainsi qu'en
matière de revitalisation de l'espace rural.
En contrepartie de ces engagements, les agriculteurs perçoivent des
aides à l'exploitation, cofinancées par les crédits
nationaux et européens, conformément au règlement
européen de développement rural.
Conclu pour une durée de cinq ans entre un agriculteur et le
représentant de l'Etat dans le département, chaque CTE doit
comporter à la fois un volet socio-économique et un volet
environnemental/territorial. Tout projet individuel doit être compatible
avec un contrat-type départemental élaboré à partir
d'orientation définies par le Ministère de l'Agriculture. La
signature d'un CTE peut, par ailleurs, s'inscrire dans une démarche
collective, lorsque plusieurs exploitants signent le même contrat en vue
de concrétiser un projet commun.
La montée en charge du dispositif s'est effectuée avec une
certaine lenteur, qui s'explique pour partie par la complexité de cet
instrument.
A titre d'exemple, les règles de financement du CTE diffèrent
pour chacun des volets qui composent ce contrat. Le volet environnemental et
territorial donne lieu au versement d'une aide annuelle et plafonnée,
qui varie annuellement en fonction de la perte encourue et des surcoûts
générés par les engagements agri-environnementaux. Le
financement du volet socio-économique comporte quant à lui une
rémunération des frais liés à la préparation
du projet et une rémunération variable dépendant des
objectifs atteints.
Au 19 octobre 2001, 14.100 CTE avaient été signés et
18.325 avaient fait l'objet d'un avis favorable par les commissions
départementales d'orientation agricole (CDOA). Le montant moyen des
aides allouées dans le cadre d'un CTE s'établit à
250.000 francs.
L'analyse des CTE signés révèle une
surreprésentation des contrats signés avec des exploitants
situés en zone de montagne. Représentant 11 % des
agriculteurs français, ils ont souscrits 18 % des contrats. Une
part significative des CTE signés accompagne également des
conversions à l'agriculture biologique.
L'année 2001 a été marquée par le lancement de
CTE-cadres destinés à favoriser l'émergence de projets
collectifs.
S'inscrivant dans une démarche simplificatrice, ces CTE-cadres sont en
quelque sorte des contrats-types, déclinés par système de
production. Les agriculteurs peuvent y adhérer sans les modifier ou, au
contraire, l'enrichir de mesures correspondant mieux à leur projet
personnel. Par ailleurs, ces CTE-cadres présentent l'avantage d'avoir
été préalablement agréés par les CDOA, ce
qui dispense les signataires d'un examen individuel par ces commissions.
Premier
CTE-cadre, le CTE « élevage-herbager » a
été lancé en février 2001. Il a été
suivi d'un CTE « élevage porcin » et d'un CTE
« laitier ». D'autres sont en préparation, dans les
domaines des grandes cultures, de l'agri-tourisme ainsi que des fruits et
légumes.