B. DES SIGNES ENCOURAGEANTS POUR LA RELANCE DU LOGEMENT SOCIAL
1. Un contexte économique défavorable pour la construction de logements sociaux
Depuis
plusieurs années, à l'occasion de l'examen du projet de loi de
finances, les rapporteurs chargés d'examiner les crédits
consacrés au logement soulignent le décalage croissant entre les
objectifs de construction ambitieux affichés, et les réalisations
effectives dont le nombre ne cesse de diminuer.
Les causes de ce décalage sont multiples et concernent aussi bien la
demande de logements que la réponse des organismes HLM.
- On peut estimer que le logement social qui représente environ une
résidence principale sur six, a atteint son régime de
croisière au plan national. Compte tenu des besoins de renouvellement de
ce parc, on peut considérer que sa croissance doit aussi
représenter entre un cinquième et un sixième des besoins
en nouveaux logements, soit 50.000 logements par an, ce qui ne signifie
pas pour autant entre 50.000 et 60.000 logements neufs. En effet, compte
tenu de la localisation trop concentrée du parc, son renouvellement
passe davantage qu'aujourd'hui par l'acquisition de logements existants,
accompagné ou non de travaux selon les besoins, prioritairement
situés sur les territoires dont les loyers du parc privé, sont
notamment, plus élevés que ceux du logement social.
- S'agissant de l'offre de logements par les organismes HLM, il faut
reconnaître que les conditions de l'équilibre financier des
opérations étaient loin d'être atteintes. Certes la
création du PLUS a répondu au souci d'offrir un produit de
mixité sociale, ouvert réellement aux trois quarts de la
population. Mais, la volonté de travailler à budget constant a
fait que le PLUS, dès son lancement, n'était pas
réellement mieux équilibré que le PLA. Le
rétablissement de la subvention, et la baisse du taux concomitante
à celle du livret A, ont été en effet entièrement
réinvesties d'une part dans la diminution du loyer, d'autre part dans la
prise en compte de la hausse des prix pour le calcul économique
d'équilibre du produit. La réalisation de nouveaux logements a
donc continué à reposer sur la péréquation avec le
parc ancien, celui-ci étant supposé dégager des marges
grâce aux financements privilégiés dont il a
bénéficié. Les besoins de réinvestissement sur ce
parc ancien étaient supposés s'équilibrer eux-mêmes
grâce à la PALULOS
3(
*
)
et aux hausses de loyer permettant
de rembourser les prêts complémentaires.
Ce mécanisme s'essoufflait depuis quelques années, avec
l'épuisement progressif des marges de manoeuvre pour augmenter les
loyers -les plafonds de convention étant de plus en plus souvent
atteints- et la prise de conscience des organismes de la
nécessité d'un entretien en continu, mobilisant davantage de
fonds propres, ceux-ci étant par ailleurs sollicités par l'enjeu
du renouvellement urbain. Dans ce contexte délicat, le PLUS n'a pas eu
le temps de faire ses preuves, et a subi d'une part l'effet de la hausse des
coûts de construction consécutive à la reprise
économique dans le bâtiment, d'autre part l'impact du
relèvement à 3 % du taux du livret A.
2. Le plan de relance du logement social de mars 2001
Dans ce
contexte économique défavorable, la priorité à la
réalisation de logement sociaux a été affirmée
à travers un train de mesures annoncées par le Gouvernement en
mars 2001.
Ce plan de relances s'articule autour des trois axes que sont
l'amélioration de l'équilibre financier des opérations, la
diversification de la production et la simplification des procédures.
CONTENU DU PLAN DE RELANCE DU LOGEMENT SOCIAL
Améliorer l'équilibre financier des
opérations
: l'une des principales mesures consiste en une
augmentation significative des « valeurs de base »,
c'est-à-dire des montants qui servent d'assiette à la subvention
de l'Etat incluse dans le PLUS. Ces valeurs sont indexées sur le
coût de la construction qui est un indice global alors que le prix de
revient des opérations, dans un contexte de hausse des prix du terrain,
croît beaucoup plus vite. Aussi ces valeurs de base ont été
majorées de 10 % par un arrêté du
23 avril 2001 ;
- les taux des subventions PLUS ont, pour les opérations en contrat
de relance de production locative, été portés de 5
à 8 % dans le neuf et de 10 % à 15 % sur l'achat
d'immeubles existants, par l'article 9 du décret 2001-336 du
18 avril 2001. Conclu par les préfets pour trois ans, mais
avec des objectifs de réalisation annuels, ces contrats doivent
permettre de relever substantiellement le niveau de production de logements
PLUS ;
- pour améliorer les conditions de financement des
opérations PLUS en zones tendues, lorsque la participation de la
collectivité locale au financement du dépassement de la charge
foncière de référence, mentionnée à
l'article R. 331-24 II du CCH, atteint 40 % de ce dépassement,
le taux de la subvention de l'Etat peut être porté à
60 % du dépassement, dépassement plafonné, le cas
échéant, à 2 fois VFR (Valeur foncière de
référence) x SU (surface utile) en construction neuve. Le taux
de la subvention de l'Etat peut être porté à 60 % du
dépassement, dépassement plafonné, le cas
échéant, à 0,4 fois VFA x SU en
acquisition-amélioration, avec VFA = valeur foncière de
référence en acquisition-amélioration.
Par ailleurs, pour compléter l'équilibre financier des
opérations, le 1 % logement, apporte un concours d'un milliard de
francs, distribué sous forme de prêts destinés à
compléter le PLUS. Particulièrement attractifs, au taux de
1,25 %, ils sont remboursables sur 39 ans dont 35 ans de
différé d'amortissement, avec une remise d'intérêt
totale sur les dix premières années. Outre ces conditions
très intéressantes, ces prêts ne sont soumis à
aucune réservation des logements par les collecteurs du 1 %
logement. Ils peuvent ainsi venir en complément des prêts
accompagnés de réservations locatives, qui représentent
3,5 Mds F par an. Cette mesure est intégrée dans une
convention signée avec l'UESL, qui concerne également les
nouveaux emplois du 1 %.
Mesures destinées à diversifier la production
: Les
organismes d'HLM peuvent désormais, de plein droit, acquérir des
immeubles sans réalisation de travaux ou en différant la
réalisation de ces travaux, à l'aide d'une PALULOS obtenue
désormais sans période de carence. Les articles 2 et 4 du
décret 2001-336 du 18 avril 2001 traduisent ce dispositif.
En outre, la possibilité de réaliser des opérations dans
le cadre d'un bail emphytéotique a été rendue effective,
aussi bien en PLUS qu'en PLA-I par l'article 4 du décret 2001-336
du 18 avril 2001.
Par ailleurs, la mise en place du nouveau prêt locatif social (PLS) par
le décret 2001-207 du 6 mars 2001, permet à tout
investisseur, public ou privé, de bénéficier de
prêts aux taux avantageux et des aides fiscales liées au logement
social : TVA à taux réduit et exonération de la taxe
foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Les
plafonds de loyer sont fixés à 150 % de ceux du PLUS, et les
plafonds de ressources à 130 % (cf. arrêté du
3 mai 2001).
Simplifications administratives et contrats de relance
Plusieurs mesures de simplification des procédures existantes doivent
faciliter la mise en oeuvre du plan de relance. Il s'agit en particulier
d'allègements de procédure concernant les pièces à
produire pour l'attribution d'une subvention PLUS, PLA-I ou d'une subvention
foncière précisées en annexe 7 de la circulaire de
programmation des crédits n° 2001-6 du 12 mars 2001,
ou du report de la signature de la convention conclue au titre de l'APL
(art. 5 du décret 2001-207 du 6 mars 2001).
Des contrats locaux de relance ont été conclus en 2001 entre
l'Etat et les maîtres d'ouvrage sociaux qui s'engagent à
accroître leur production de logements sociaux. Les maîtres
d'ouvrage qui ont signé avec l'Etat un tel contrat peuvent
bénéficier de taux de subvention PLUS majorés (taux de
8 % pour les opérations de construction neuve et taux de 15 %
pour les opérations d'acquisition-amélioration).
Ces contrats, auxquels peuvent être associés, le cas
échéant, les collectivités territoriales
intéressées ou leurs groupements, sont conclus au niveau
départemental ou régional pour une durée de 3 ans et
comportent des objectifs annuels en nombre de logements, correspondant à
des dossiers complets permettant l'octroi d'une décision favorable avant
la fin de l'exercice.
Source : DGUHC
Les effets attendus de ces différentes mesures doivent permettre de
produire 50.000 logements locatifs sociaux en 2001 et d'atteindre le nombre de
55.000 logements pour 2002 afin de se rapprocher de l'objectif de
l'article 55 de la loi SRU qui impose aux communes de plus de
50.000 habitants comprenant au moins une commune de plus de
15.000 habitants de disposer d'au moins 20 % de logements locatifs
sociaux dans leur parc de résidences principales d'ici vingt ans.
3. Les choix budgétaires pour 2002
On
peut rappeler que la ligne budgétaire 65-48/10 est devenue totalement
fongible en 2000 ; elle finance aujourd'hui les opérations de
réhabilitation du parc HLM à travers la PALULOS et les
opérations de logements locatifs sociaux (PLUS neuf et
acquisition-amélioration dans l'ancien), les opérations PLU
reconstruction-démolition, introduits en loi de finances 1998, les
opérations de PLA d'intégration (PLA-I), ainsi que la surcharge
foncière de ces opérations.
Les orientations du Gouvernement en matière d'utilisation des
crédits des aides à la pierre sont précisées dans
une circulaire spécifique diffusée au début de chaque
année.
La répartition du chapitre 65-48/10 constatée à partir des
consommations réelles s'établit comme suit ces dernières
années :
|
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001* |
PLA/PLUS + surcharge foncière |
63 % |
46 % |
10 % |
11 % |
48 % |
57 % |
69 % |
PALULOS |
37 % |
54 % |
90 % |
89 % |
52 % |
43 % |
31 % |
(*)
répartition fixée comme objectif.
Source
: secrétariat d'Etat au logement
La dotation budgétaire prévue pour 2002 en faveur des PLA/PLUS
et de la PALULOS est de 457,350 millions d'euros (3 milliards de
francs) pour les autorisations de programme et de 399,260 millions d'euros
(2,619 milliards de francs) pour les crédits de paiement.
- Cette dotation doit permettre de financer un programme physique d'un peu
plus de 55.000 logements PLUS, PLA d'intégration et PLS, tant en neuf
qu'en acquisition-amélioration, avec des opérations
adaptées aux ressources des demandeurs, et en faveur d'une plus grande
mixité sociale, notamment dans les communes qui n'atteignent pas
l'objectif de 20 % de logements sociaux tel que prévu dans la loi
SRU.
Par ailleurs, il est également demandé aux préfets de
favoriser le financement des petites opérations
d'acquisition-amélioration bien insérées dans le tissu
existant. Tout en participant au remodelage des quartiers anciens, ces
opérations permettent de freiner l'extension urbaine, de garantir
à leurs occupants une meilleure intégration sociale et urbaine et
de faciliter l'accès des occupants à l'ensemble des
équipements de la ville.
- S'agissant de la PALULOS, en 2002, le volume qui lui sera
consacré ne devrait pas dépasser 142 millions d'euros
(932 millions de francs), ce qui autorise 110.000 opération au
lieu de 120.000 en 2001 afin de maintenir la priorité à la
production de logements sociaux. Il convient de noter que, compte tenu de la
généralisation de la TVA à taux réduit sur
l'ensemble des travaux d'amélioration du parc HLM, de la
possibilité pour les organismes de mobiliser un prêt sans
subvention auprès de la CDC pour financer ces travaux, des provisions
pour grosses réparations réalisées par les organismes, la
réduction des moyens budgétaires consacrés à la
PALULOS ne devrait pas entraîner une réduction des moyens
d'intervention des organismes sur leur parc.
En outre, la programmation PALULOS doit intégrer une
préoccupation de gestion locative et urbaine de proximité : la
réhabilitation du bâti n'aura son plein effet que si
l'évolution de la quittance de loyer est maîtrisée et
l'environnement pris en compte.
Dans cette optique, sont prioritaires les opérations :
- situées dans les quartiers jugés prioritaires au regard de
la politique de la ville ;
- qui accompagnent un projet de renouvellement urbain. Dans ce cas,
lorsque des restructurations lourdes seront nécessaires, le taux du
prêt complémentaire à la PALULOS peut -en concertation avec
la CDC- être abaissé à 3 % et la durée du
prêt être allongée jusqu'à 25 ans ;
- qui contribuent à la maîtrise de la progression de la
quittance globale après travaux, notamment en permettant des
économies de charges locatives;
- qui améliorent la qualité de la vie quotidienne des
habitants, comme la réalisation de loges de gardiens et la lutte contre
le bruit. Pour ce dernier point, qui constitue une priorité du
gouvernement, des dérogations aux montants plafonds de travaux peuvent
être accordées. Ainsi, un programme expérimental
«PALULOS acoustique» portant sur 1.000 logements a été
lancé en 1999.
Par ailleurs, dans le cadre du renouvellement urbain qui constitue une -autre
priorité gouvernementale-, le comité interministériel des
villes du 1
er
octobre a décidé le triplement des
crédits pour améliorer le financement de la démolition des
logements locatifs sociaux dégradés et accélérer
les démolitions.
Le comité a adopté une série de mesures donnant
une
nouvelle impulsion au programme de démolition des immeubles HLM
obsolètes
afin de porter le nombre de logements effectivement
démolis qui était de 3.500 en 1998 et de 7.000 en 2000, à
près de 10.000 en 2001 et à environ 15.000 en 2002
.
Les crédits budgétaires progressent de 26 millions d'euros
(170 millions de francs) en 2001 à 76 millions d'euros
(500 millions de francs) en 2002.
- Les procédures sont simplifiées par la
déconcentration de toutes les décisions de financement
liées aux autorisations de démolition et la suppression de l'avis
préalable du comité départemental de l'habitat.
- La subvention apportée par l'Etat est améliorée en
élargissant l'assiette de calcul, avec l'intégration des
coûts sociaux dès l'initialisation des opérations pour les
organismes HLM et en réajustant les taux, pour aboutir à une
augmentation de 25 % de la subvention moyenne par logement.
- Pour encourager les organismes HLM à développer une vision
globale de l'évolution de leur parc de logements qui prenne en compte la
qualité du service global (qualité du logement, qualité
des espaces extérieurs, services urbains de proximité) à
offrir aux habitants et pour analyser les perspectives alternatives de
démolition et de réhabilitation, le CIV a également
décidé que l'élaboration des plans stratégiques de
patrimoine serait subventionnée par l'Etat, à hauteur de
50 % dans la limite d'un coût de 61.000 euros
(400.000 francs) ; 3,05 millions d'euros (20 millions de
francs) sont réservés sur le budget du logement à ce titre
dès 2002.
Ces plans stratégiques de patrimoine permettront de fixer les
priorités en matière de réhabilitation et de choisir en
connaissance de cause entre démolition ou réhabilitation, en
fonction de critères liés à l'état du bâti et
à l'environnement urbain ainsi que des caractéristiques du
marché local de l'habitat.
Enfin, il faut noter tout l'intérêt qu'il y a à
identifier
dans le projet de loi de finances initiale,
une ligne
« qualité de service dans le logement social »
dotée de 47,26 millions d'euros en autorisation de programme et de
11,43 millions d'euros en crédits de paiement
. Ces
crédits, en augmentation pour 2002, étaient
prélevés jusqu'à présent en cours d'exercice sur la
ligne fongible. Ils servent à financer des opérations
améliorant les services aux locataires, ainsi que des équipements
de sécurité.
Sur ce volet du budget du logement, auquel votre rapporteur pour avis souscrit
totalement, il convient néanmoins de souligner que ceci ne doit pas
entraîner de restrictions trop sévères s'agissant de la
distribution des PALULOS. Il ne faudrait pas que la priorité
donnée à la production de logements freine, dans la pratique, la
consommation de ces crédits qui sont indispensables, compte tenu de
l'âge moyen du parc HLM et des besoins en logement social localement
identifiés.
En outre, il convient de signaler le contenu de la récente
convention, signée le 12 octobre 2001 entre l'Etat et l'Union
d'économie sociale du logement, fixant des nouvelles interventions du
1 % logement pour 2002-2006.
La principale innovation de cette convention réside dans
l'investissement massif du 1 % logement pour le financement du
renouvellement urbain à travers deux dispositifs :
- une participation aux opérations de
démolition-construction à hauteur de 3 milliards de francs par
an, en régime de croisière ;
- la création d'une société foncière pour
financer l'acquisition de logements locatifs privés libre ou sous
condition de loyers et de ressources destinés en priorité aux
salariés. A moyen terme, la société investirait
7 milliards de francs par an.
Votre rapporteur pour avis prend acte de ce dispositif, qui mobilisera des
fonds importants pour le logement
. Il convient cependant de définir
avec précision, dans la convention d'application à venir, les
modalités de sa mise en oeuvre,
afin que cet outil participe
effectivement à une plus grande mixité sociale
. En
particulier, il faut veiller à ce que les opérations de la
société foncière soient complémentaires et non pas
concurrentes des activités des organismes d'HLM.
Plus généralement, et afin de relancer effectivement la
production de logements sociaux -sous une forme diversifiée-
répondant aux besoins identifiés localement,
il convient de
rechercher des solutions permettant de mieux financer la surcharge
foncière dans les opérations de type PLUS, PLA-I et PLS en milieu
urbain
, et notamment en Ile-de-France, afin de ne pas freiner le rattrapage
des communes ne satisfaisant pas aux objectifs de la loi SRU. Dans de nombreux
cas, le financement de cette surcharge ne peut plus être laissé
aux seules communes, certaines d'entre elles ayant un potentiel fiscal faible.
Il faut dégager des moyens supplémentaires ou étudier une
modification des zonages, s'agissant du niveau des loyers autorisés.
Enfin, compte tenu de la diversité des situations à prendre en
compte, en matière de logement,
il conviendrait de mener une
réflexion approfondie sur la déconcentration -voire la
décentralisation- de la politique du logement
, en déterminant
l'échelon pertinent, qui pourrait être celui de la
communauté d'agglomération.