D. LES CHOIX GÉOGRAPHIQUES : LA ZONE DE SOLIDARITÉ EST-ELLE VRAIMENT PRIORITAIRE ?
Le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) institué dans le cadre de la réforme de la coopération (décret du 4 février 1983), a défini un zone de solidarité prioritaire (ZSP) dont la composition a été arrêtée en fonction de trois séries de critères.
En premier lieu, la ZSP réunit les pays les moins développés en terme de revenus et n'ayant pas accès aux marchés de capitaux.
Ensuite, la solidarité de la France s'exerce plus particulièrement vis-à-vis des Etats francophones.
Enfin, la définition de la ZSP vise également à renforcer la cohérence régionale des actions de développement. Une stratégie régionale de coopération et la mise en oeuvre des projets rassemblant plusieurs pays, devrait, d'après le ministre délégué à la coopération, permettre de dégager certaines synergies.
La liste définie en janvier 1999 réunit 61 Etats. Le CICID, réuni pour la deuxième fois le jeudi 22 juin 2000, a décidé de ne pas réexaminer cette composition avant 2001.
Zone de solidarité prioritaire en 1999
Anciens pays du champ |
Extension en 1999 |
|||
Bénin |
1978 |
Djibouti |
Liban |
|
Burkina-Faso |
1980 |
Guinée Equatoriale |
Palestine |
|
Cameroun |
Gambie |
Afrique du Sud |
||
Centrafrique |
Sainte-Lucie |
Algérie |
||
Congo |
Grenade |
RD Congo |
||
Côte d'Ivoire |
1983 |
Dominique |
Erythrée |
|
1959 |
Gabon |
Saint-Vincent |
Ethiopie |
|
Madagascar |
St Kittes et Neviez |
Ghana |
||
Mali |
1984 |
Guinée Conakry |
Guinée |
|
Mauritanie |
1985 |
Angola |
Kenya |
|
Niger |
Mozambique |
Liberia |
||
Sénégal |
1990 |
Namibie |
Maroc |
|
Tchad |
1993 |
Cambodge |
Ouganda |
|
Togo |
Sierra Leone |
|||
Zaïre |
Tanzanie |
|||
1964 |
Rwanda |
Tunisie |
||
Burundi |
Zimbabwe |
|||
1971 |
Maurice |
Laos |
||
1973 |
Haïti |
Vietnam |
||
1975 |
Comores |
Cuba |
||
Cap Vert |
République dominicaine |
|||
1976 |
Guinée Bissau |
Petites Antilles |
||
Sao Tomé |
Surinam |
|||
Seychelles |
Vanuatu |
• Les moyens de financement
Outre les crédits du titre IV mis à la disposition de nos ambassades pour la coopération et l'action culturelle, scientifique et technique, les deux principaux instruments de coopération au sein de la ZSP reposent sur les financements de l'Agence française de développement et le Fonds d'aide et de coopération (devenu Fonds de solidarité prioritaire).
Aucun pays ne dispose d'un droit de tirage automatique qui serait attribué selon des clés de répartition prédéfinies. En principe, un " accord de partenariat pour le développement " conclu avec chaque pays de la ZSP précisera dans un cadre pluriannuel les différents types de coopération définis d'un commun accord : développement, coopération militaire mais aussi maîtrise du flux migratoire. Un " document-cadre de partenariat " transcrira les termes de cet accord.
A ce jour, les accords de partenariat signés sont peu nombreux : cinq au total l'ont été (avec le Mali, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Mauritanie et le Tchad).
La procédure risque de se révéler assez lourde. Une approche par projets répond, semble-t-il davantage aux exigences de rapidité et d'efficacité .
La définition de la zone de solidarité prioritaire suscite une certaine perplexité à plusieurs titres.
En premier lieu, la priorité reconnue à cette zone demeure toute virtuelle car elle ne s'est traduite par aucuns moyens budgétaires nouveaux. Au contraire, la part de la ZSP au sein de l'aide totale apportée par la France, n'a cessé de se dégrader depuis la réforme de la coopération : elle est en effet passée de près de 50 % de l'APD bilatérale totale à 44 %.
Evolution de l'aide publique française au
développement
dans les pays de la zone de solidarité
prioritaire
en millions de FRF |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
APD bilatérale totale |
36 706 |
32 085 |
29 438 |
27 877 |
24 688 |
25 395 |
Zone de solidarité prioritaire |
19 241 |
15 155 |
14 198 |
13 880 |
10 979 |
11 214 |
Autres zones géographiques |
17 465 |
16 930 |
15 240 |
13 997 |
13 709 |
14 181 |
Part de la ZSP dans l'APD bilatérale |
|
|
|
|
|
|
Cette évolution soulève un vrai problème de cohérence au regard des objectifs et des ambitions affichés par notre coopération.
Par ailleurs, la part de l'Afrique au sein de l'aide bilatérale totale n'a cessé de se réduire : de 56,5 % en 1995 à 50,2 % en 1999, et pour l'Afrique subsaharienne, sur la même période, de 38,7 % à 34,2 %.
Ainsi, la mise en place de la zone de solidarité prioritaire s'accompagne d'un véritable risque de dispersion , voire de " saupoudrage " de nos actions.
Or, à vouloir assurer notre présence dans l'ensemble des pays en développement, nous courons le risque, surtout au moment où les moyens budgétaires sont limités, de ne compter vraiment nulle part.
Ainsi, notre pays pourrait perdre des deux côtés : l'espoir suscité dans certains pays par leur incorporation dans la zone de solidarité prioritaire sera déçu et nourrira de futures frustrations, tandis qu'au sein des anciens pays du champ se répand, sinon le sentiment d'un abandon, du moins celui d'une certaine " banalisation " de la position qu'ils occupaient auparavant . |
La définition d'objectifs trop ambitieux pourrait ainsi se traduire par une diminution de notre influence dans le monde. Etait-ce là l'objectif recherché par la réforme ?