DANEMARK
Le
Danemark a été le
premier pays européen
à
adopter en 1984, à l'occasion de la réforme de sa loi sur la
faillite, des dispositions permettant aux personnes surendettées de
demander un
plan d'assainissement
de leurs dettes.
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1) Les personnes concernées
Les
dispositions de la loi sur la faillite relatives au plan d'assainissement sont
réservées aux personnes physiques non commerçantes.
D'après la loi,
le débiteur doit prouver qu'il ne peut pas
assumer ses engagements financiers et qu'il n'a aucun espoir de le faire dans
les prochaines années.
De plus, la loi indique que "
la situation du débiteur et les
circonstances doivent plaider en faveur
" d'un plan d'assainissement,
ce qui suppose une appréciation subjective de la demande. C'est pour
cette raison que le débiteur est convoqué par le tribunal et
qu'il doit se présenter personnellement. La plupart des demandes
rejetées le sont en effet à ce stade.
Dans la pratique, il faut que les dettes se montent à au moins vingt
fois les revenus mensuels nets du foyer. De façon
générale, un salarié ne peut pas espérer obtenir un
plan d'assainissement si sa dette ne dépasse pas 200.000 francs.
Dans le cas d'une personne inactive, il faut que la dette se monte à
environ 100.000 francs. En tout état de cause, une dette
inférieure à 50.000 francs ne peut pas donner lieu à
un réaménagement.
2) L'ouverture de la procédure
Seul
le débiteur
peut introduire la procédure. En
général, il réalise auparavant ses biens de valeur, le
tribunal pouvant le lui ordonner pendant la procédure. Il n'existe
aucune obligation de tenter une conciliation extrajudiciaire avec les
créanciers.
A partir des éléments qu'il fournit au juge (importance,
ancienneté et origine des dettes, actifs disponibles, revenus du
ménage, perpectives d'avenir...), celui-ci prend la décision
d'ouvrir ou non la procédure. Cette décision est publiée.
Les créanciers sont invités à se faire connaître
dans le délai de quatre semaines. Le juge nomme un syndic. Il s'agit le
plus souvent d'un juriste rétribué sur des fonds publics.
L'ouverture de la procédure entraîne la suspension automatique
des mesures d'exécution,
sauf à l'égard des
créanciers munis de sûretés
. En effet, ces
créances sont en principe réglées par la vente des biens
grevés. C'est seulement lorsqu'une créance
privilégiée n'est pas complètement couverte par la
réalisation du bien que le solde est considéré comme une
créance ordinaire et à ce titre affecté par la
procédure de demande d'assainissement.
L'ouverture de la procédure n'interdit pas au débiteur de
gérer ses propres affaires, mais, pour toute transaction importante, il
doit demander l'avis du syndic.
3) Le déroulement de la procédure
Avec
l'aide du syndic, le débiteur prépare un
plan d'assainissement
fondé sur les revenus futurs espérés et sur les
dépenses nécessaires à la subsistance de la famille
,
ce qui peut supposer par exemple la vente du logement si les sommes
affectées au remboursement du prêt ayant permis son achat sont
trop importantes par rapport aux ressources.
Le plan définitif est adopté lors d'une réunion
rassemblant le débiteur, quelques créanciers et le juge.
Pour prendre sa décision, le juge tente d'apprécier
l'efficacité du futur plan. Si par exemple le demandeur établit
qu'il a tenté dans le passé de rembourser ses dettes, un plan
d'assainissement lui sera assez facilement accordé. A contrario, si le
demandeur ne se montre pas disposé à accepter une offre d'emploi,
il est vraisemblable qu'il se verra opposer un refus.
En fonction des revenus et des dépenses prévisibles, le juge
accorde une
réduction des dettes ou leur suppression
pure et
simple. La réduction des dettes s'exprime en pourcentage. Celui-ci est
fixé pour toute la durée du plan. Il ne varie pas en fonction de
l'évolution de la situation financière du débiteur. Cette
disposition correspond à une volonté de motivation des
intéressés car toute amélioration financière leur
profite nécessairement. Si le débiteur est retraité ou au
chômage, il obtient assez facilement une annulation de sa dette.
Le plan doit préciser non seulement le pourcentage des dettes qui sera
acquitté mais aussi sa durée d'exécution. Les
créanciers doivent en principe être traités de façon
égalitaire : le pourcentage de remboursement de chaque
créance doit être identique.
Le plan adopté a la valeur d'un compromis judiciaire. Il s'écoule
en général de six à neuf mois entre le dépôt
de la demande et l'adoption du plan.
4) Les effets
Toutes
les dettes contractées avant l'ouverture de la procédure sont
concernées par le plan, même si certains créanciers ne se
sont pas fait connaître au moment de l'ouverture. Cette disposition peut
conduire le tribunal à réexaminer le cas puisque le pourcentage
de remboursement s'applique de la même façon à toutes les
créances. En revanche, le plan ne touche ni les codébiteurs ni
les cautions du débiteur.
La normalisation de la situation financière de l'intéressé
doit avoir lieu à moyen terme, en règle générale
dans les
cinq ans
. Dans ces conditions, il n'est pas rare que les sommes
finalement payées par le débiteur ne se montent qu'à
5 % de la dette accumulée.
La remise de dettes est en principe
inconditionnelle : elle ne dépend pas du respect par le
débiteur des obligations du plan de remboursement
. Le tribunal peut
cependant, à la demande d'un créancier, annuler le plan si le
débiteur s'est conduit de manière frauduleuse ou s'il a
manifestement enfreint ses obligations.
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Cette
procédure est surtout utilisée par les personnes disposant de
biens immobiliers assez importants. La nécessaire prise en compte des
perspectives d'avenir pour bénéficier de l'assainissement
financier conduit en effet en pratique, d'une part, à rejeter de
nombreuses demandes émanant de personnes n'ayant pas de ressources
stables et, d'autre part, à privilégier les situations
désespérées. Ceci explique qu'en 1993, 2.400 des 7.500
demandes déposées aient été acceptées.
C'est pourquoi certains plaident en faveur de l'instauration d'une
procédure qui permettrait aux personnes peu endettées ou dont
l'endettement est récent, ainsi qu'à celles qui ont des
perspectives d'avenir encourageantes d'obtenir un rééchelonnement
de la dette en concertation avec leurs créanciers.
D'autres critiquent le trop grand rôle joué par le juge dans le
déroulement de la procédure et le caractère
discrétionnaire de ses décisions.