II. LA SITUATION ÉCONOMIQUE DE LA HONGRIE À LA VEILLE DE LA PRÉSIDENCE DE L'UNION EUROPÉENNE
A. UNE SITUATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE PRÉOCCUPANTE
La Hongrie a été l'un des pays leaders de la transition économique en Europe centrale, attirant près du tiers des investissements dans la région de 1990 à 2008. Malgré cette manne, elle a laissé s'installer des déséquilibres macroéconomiques majeurs qu'elle a commencé à corriger en 2006, au prix d'une croissance fortement ralentie. C'est donc fragilisée qu'elle a été confrontée à la crise financière de l'automne 2008.
Afin de rétablir les comptes de la Hongrie en vue de son entrée dans la zone euro, la politique d'austérité 10 ( * ) visant à assainir les finances publiques, conduite dès 2006 par le gouvernement GYURCSANY et poursuivie par le gouvernement BAJNAI en 2009, a atteint les objectifs fixés. Elle a toutefois constitué le principal facteur de l'alternance d'avril 2010.
A l'automne 2008, le « sauvetage » de l'économie hongroise a été entrepris par l'action conjuguée de la communauté financière internationale :
- accord de confirmation du FMI de 12,5 milliards d'euros,
- mobilisation de l'instrument de « soutien financier à moyen terme » de l'Union européenne et prêt de 6,5 milliards d'euros,
- prêt d'1 milliard d'euros de la Banque Mondiale.
Ces accords arrivent à échéance en octobre et novembre.
La Hongrie a connu une profonde récession en 2009 avec une contraction du PIB de 6,3 %, un taux de chômage qui a atteint 11 %, un record depuis 1994, et une dette publique la plus élevée d'Europe centrale, représentant 80 % du PIB.
La dette privée est également particulièrement préoccupante. De nombreux Hongrois avaient pris des crédits en devises étrangères il y a quelques années, surtout en francs suisses et en euros parce que les taux d'intérêts étaient nettement plus avantageux que ceux en forints. Mais la chute de la devise nationale a rendu le remboursement de ces dettes particulièrement difficile. Environ 1,5 million de Hongrois doivent rembourser un crédit en devises étrangères et cette dette en devises se chiffre à 24 milliards de forints (87,6 millions d'euros) avec des intérêts d'un montant de 1,254 milliard de forints. Le gouvernement envisage de créer un fonds public pour aider les Hongrois les plus endettés à convertir leurs crédits contractés en devises étrangères en crédits en forints, mais le président de la Banque centrale hongroise a jugé que cette opération était trop coûteuse.
Au premier semestre 2010, la reprise semble se confirmer. Cependant, elle reste essentiellement tirée par les exportations. La demande intérieure reste atone.
Dès sa prise de fonction, le Premier ministre a affirmé qu'il chercherait à négocier avec les bailleurs de fonds internationaux sans toutefois se laisser dicter la marche à suivre. Il a déclaré le 26 avril 2010 : « Ni le FMI ni les organes financiers de l'UE ne sont nos patrons. Nous ne leur sommes pas subordonnés. Nous négocierons mais l'objectif de ces discussions n'est pas d'écouter des diktats ».
Mais la dernière revue menée par les services du FMI et de la Commission, en juillet, a conduit au départ anticipé de ces derniers en raison de désaccords avec plusieurs mesures préparées par le gouvernement hongrois. La question de la poursuite du programme de réformes structurelles et d'assainissement des finances publiques est au coeur des préoccupations. La Hongrie a alors été mise sous surveillance par l'agence de notation Moody's le 23 juillet 2010. Toutefois, comme le note la presse : « C e coup d'éclat avec le FMI n'a pas provoqué la panique des investisseurs. Tout juste le forint s'est-il un peu déprécié. A tous leurs visiteurs, les membres de l'exécutif font remarquer que le pays emprunte sans peine sur les marchés. Au premier semestre, ses émissions de dette lui ont permis de lever deux fois plus d'argent que prévu : un signe imparable de la confiance retrouvée de la communauté financière » (Le Monde, 14 août 2010).
Si la Hongrie n'a pour le moment ni la volonté ni le besoin de travailler avec le FMI 11 ( * ) , il pourrait en être autrement en 2011, tant la situation économique et financière de ce pays reste fragile. Les relations avec l'institution financière sont par ailleurs obérées par l'une des mesures de redressement décidée par le gouvernement Orban, à savoir la taxation temporaire du secteur financier. Les discussions avec le FMI devraient reprendre cet automne.
Les entretiens conduits par votre délégation à la Confédération du patronat hongrois (MGYOSZ), avec son président M. Peter Futó, et avec M. Péter Vadász , vice-président, ont permis d'évoquer les objectifs économiques ambitieux de ce pays et notamment la création d' un million d'emplois en dix ans , afin de rattraper la moyenne européenne. Pour atteindre cet objectif, les représentants des employeurs attendent un soutien à l'innovation et au financement des entreprises, une meilleures utilisation des fonds communautaires, la baisse du nombre et du taux des impôts - citant l'exemple français de la baisse du taux de TVA à 5,5 % en faveur du tourisme - ou encore l'allégement de la bureaucratie, évalué à 7 % du PIB hongrois pour une moyenne européenne de 3,5 %.
* 10 Avec comme principales mesures : hausse de 5 points de la TVA, aujourd'hui à 25 % ; âge légal de départ à la retraite porté à 65 ans ; gel des salaires des fonctionnaires pour deux ans ; suppression du treizième mois des retraités ; baisses des aides publiques à l'agriculture et aux transports publics.
* 11 Le Premier ministre a indiqué en juillet 2010 qu'il ne voulait plus d'accord avec le FMI. Le gouvernement hongrois a un temps indiqué « ne vouloir désormais que travailler avec la Commission européenne ». Il est depuis revenu sur ces déclarations.