D. LE DYNAMISME DE LA COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE
Près de soixante liens de coopération décentralisée unissent aujourd'hui les collectivités territoriales françaises et japonaises, le plus souvent sous la forme de jumelages. Ils permettent de traiter de sujets concrets d'intérêt commun, tels les transports, l'environnement et l'aménagement urbain.
Le groupe d'amitié France-Japon du Sénat a pu en prendre la mesure à travers l'organisation, en janvier 2010, conjointement avec le Centre japonais des collectivités locales (CLAIR) d'un Colloque consacré au développement durable en France et au Japon 3 ( * ) .
Les premières Assises franco-japonaises de la Coopération décentralisée se sont tenues en octobre 2008 à Nancy, sous l'impulsion du maire de la ville, M. André Rossinot, dans le cadre de la commémoration du 150 e anniversaire des relations diplomatiques . Cette réunion a permis d'enrichir les relations franco-japonaises d'une nouvelle dimension et de susciter des projets innovants de la part des régions et des départements français et de leurs homologues japonais, en présence de nombreux élus des deux pays. Les deuxièmes Rencontres de la coopération décentralisée ont eu lieu les 12 et 13 mai 2010 à Kanazawa et une troisième édition se déroulera à Chartres en juillet 2011.
60 collectivités territoriales françaises sont engagées au Japon dans près de 70 projets de coopération décentralisée . La plupart de ces coopérations décentralisées concerne des jumelages de villes à villes. Ainsi, Paris, Marseille, Nancy, Nantes et Lyon sont liées à des villes japonaises. Il existe également des partenariats entre les Conseils généraux français et les départements japonais. Le Conseil général de l'Aveyron, le Conseil général de la Seine et Marne, le Conseil général du Vaucluse et celui du Val d'Oise, entre autres, sont concernés. Aucune région française n'est engagée au Japon.
La coopération la plus ancienne remonte à la fin des années 50 (Paris), après que les relations franco-japonaises, ont été normalisées suite à la signature du traité de San Francisco en 1951. L'essentiel des partenariats a été signé à partir des années 1980 et surtout au cours des années 1990.
Les domaines privilégiés des coopérations décentralisées franco-japonaises concernent :
- la culture et la francophonie
- le patrimoine et le tourisme
- l'enseignement et l'éducation
- le développement économique local
- l'environnement
- la jeunesse et le sport
1. La coopération entre les Conseils généraux et le Japon
Elle est diverse et peut aussi bien donner lieu à l'organisation de rencontres économiques (PME/PMI) qu'à des échanges d'étudiants ou à la participation à des salons professionnels et technologiques.
En 1987, le Conseil général du Val-d'Oise a signé une convention d'échanges et de partenariat dans les domaines de l'économie, de la culture et de l'enseignement supérieur avec l'Assemblée préfectorale d'Osaka.
En 1991, le Conseil général de la Seine-et-Marne et le Département de Hyogo ont mis en place une convention de partenariat. Elle concerne les secteurs de l'économie, de la culture et du tourisme.
En 2000, le Conseil général de l'Aveyron a aussi conclu une convention de partenariat avec le Département de Hyogo, il s'agit pour les deux collectivités de développer des relations culturelles, économiques, scientifiques, touristiques et administratives.
Le Conseil général du Vaucluse est lié au département de Tochigi. Le pacte d'amitié existe depuis 1989 et une nouvelle convention de coopération doit être signée prochainement.
2. La collaboration entre les villes françaises et le Japon
Cette collaboration prend plusieurs formes : échanges d'élèves, culturels, d'expériences, développement économique, etc.
La Ville de Paris entretient un lien très ancien avec les collectivités territoriales japonaises, au premier rang desquelles Kyoto et Tokyo.
Après son jumelage exclusif avec Rome, signé en 1956, c'est en effet avec Kyoto que Paris a engagé, dès 1958, son premier accord d'amitié et de coopération. Il s'agit de l'accord le plus ancien avec une collectivité territoriale française et une collectivité territoriale japonaise. Son cinquantième anniversaire a été fêté en 2008 en marge des premières assises de la coopération décentralisée franco-japonaises de Nancy.
L'accord d'amitié entre Paris et Tokyo a été établi en 1982.
Les relations entre Kyoto, Tokyo et Paris ont surtout prospéré dans le domaine culturel, mais les échanges portent aussi sur les transports, l'urbanisme, la jeunesse ou encore le sport.
Paris a également des liens avec Hiroshima, présidente de l'association mondiale des maires pour la paix, qui oeuvre à l'émergence d'un monde exempt d'armes nucléaires.
La Ville de Paris a engagé un échange en matière économique avec Osaka, qui n'a pas à ce stade débouché sur la signature d'un accord d'amitié et de coopération.
Enfin, la Ville de Paris accueille de très nombreuses délégations techniques ou d'élus en provenance du Japon, qu'il s'agisse de délégations municipales, provinciales, ou de niveau ministériel. Les thèmes de discussion et de visites les plus fréquents sont : les transports, et en particulier Vélib', l'assainissement, et notamment le traitement des déchets ménagers et le réseau d'égouts, la réhabilitation urbaine des quartiers anciens, les politiques sociales à destination des personnes âgées ou encore l'organisation politique et administrative de Paris et son lien avec l'État.
Marseille est liée est à Kobe par une convention de partenariat depuis 1961. Elle se fixe pour objectif la collaboration dans les secteurs de la culture, des risques naturels et de l'urbanisme.
Nantes a signé un pacte de partenariat avec Niigata en 1999. Elle a donné lieu à des manifestations culturelles (souhaits réciproques d'échanges muséographiques et musicaux) et se fixe aussi des objectifs en matière d'économie, d'éducation et d'administration municipale. Exemples récents de projets menés : organisation d'une exposition du Musée des Beaux Arts de Nantes à Niigata en 2002 (à l'occasion de la Coupe du Monde de Football), présence régulière au festival de Jazz à Niigata (août) et aux Rendez-Vous de l'Erdre (septembre).
La ville de Lyon est très active dans sa collaboration avec Yokohama. Leur jumelage date de 1959 et a été à l'origine de rencontres annuelles dans le secteur la biotechnologie, du festival du film français à Yokohama, d'opérations gastronomiques de chefs lyonnais dans cette même ville, etc.
3. Les difficultés rencontrées
La coopération décentralisée franco-japonaise souffre d'un certain nombre de difficultés.
Parmi celles-ci, on trouve surtout l'éloignement, qui se traduit par des coûts de transports élevés, ainsi que la barrière linguistique. La différence de culture qui suscite attirance et fascination, peut être également facteur d'incompréhension.
Enfin, les différences de moyens financiers posent quelques difficultés. Elles sont liées d'une manière générale à une différence de taille et de moyens entre collectivités françaises et japonaises. Les écarts parfois constatés entre partenaires peuvent nuire au développement des coopérations. A ceci s'ajoute des contraintes budgétaires du côté français qui occasionnent pour certaines collectivités françaises des difficultés à financer les manifestations liées au leur coopération au Japon.
4. Nouvelles dynamiques d'échanges et émergence de nouveaux champs de coopération
Limitées jusqu'à présent à des champs classiques de coopération-jumelage, dans les domaines culturels, du renforcement de la compréhension mutuelle ou des échanges de jeunes, les coopérations décentralisées franco-japonaises ont connu à partir de 2008 un nouvel élan.
Afin de donner un nouveau souffle aux coopérations décentralisées franco-japonaises, la France et le Japon ont décidé de réunir tous les 3 ans les collectivités territoriales françaises et japonaises.
Les 1 res Rencontres de la coopération décentralisée franco-japonaise se sont tenues les 27 et 28 octobre 2008 à Nancy dans le cadre des célébrations du 150 e anniversaire et du 35 e anniversaire des relations entre Nancy et la ville de Kanazawa. Organisées par la ville de Nancy, fortement portées par son maire, André Rossinot et le maire de Kanazawa, Tomatsu Yamade, elles ont constitué l'un des événements phares du 150 e anniversaire des relations franco-japonaises participe d'ailleurs aux rencontres de Nancy. Elles ont été soutenues par le MAEE (Délégation pour l'action extérieure des collectivités territoriales).
Les rencontres de Nancy qui ont porté sur le développement durable, les questions de société et sur l'économie ont permis de donner un nouvel élan aux relations entre les collectivités locales françaises et japonaises. Cet approfondissement se fera notamment dans le contexte de mise en oeuvre de politiques de décentralisation et d'expériences de gestion locale sur lesquelles nos deux pays ont beaucoup à échanger. Les deux parties ont décidé de travailler ensemble sur la gestion des villes et des territoires dans son aspect global, afin de susciter des échanges d'expériences et d'identifier des bonnes pratiques, dans un contexte de mondialisation qui affecte en profondeur le rôle des villes et des régions.
Les 2 es Rencontres de la coopération décentralisée franco-japonaise se sont tenues les 12 et 13 mai 2010 à Kanazawa, au Japon. Elles ont été organisées par le maire de Kanazawa et le maire de Nancy, en collaboration avec Cités Unies France et avec le soutien de la Délégation pour l'action extérieure des collectivités territoriales.
Ces deuxièmes rencontres, qui ont été un vrai succès, ont porté sur la gouvernance locale et le développement durable. Près de 80 élus dont une quarantaine de maires français (le maire de Nancy, de Grenoble, l'adjoint au maire de la Ville de Paris, le Président de l'assemblée des départements de France...) ont fait le déplacement à Kanazawa.
De ce constat de réussite et de la qualité de la relation franco-japonaise qui se fonde sur des valeurs communes est née la volonté de s'appuyer davantage sur les coopérations décentralisées existantes, qui concernent le domaine culturel, afin de renforcer et de développer les liens de coopération vers de nouvelles thématiques.
D'une part, vers des coopérations de type universitaire, scientifique ou économique (objectifs de poursuite de l'attractivité et de la compétitivité des territoires notamment).
D'autre part, la décentralisation est devenue un thème central de politique publique au Japon et les villes japonaises sont demandeuses de coopération de type institutionnel ou en ce qui concerne la gouvernance dans les domaines du tourisme, de l'urbanisme, des transports et de l'aménagement urbain.
Enfin, la piste des coopérations triangulaires avec des collectivités locales de pays tiers, notamment en Afrique est également à suivre.
Les 3 es Rencontres de la coopération décentralisée franco-japonaise se tiendront du 27 au 30 août 2012 à Chartres et auront pour thème : « Les collectivités territoriales face à la mondialisation ».
* 3 Colloque franco-japonais organisé par le Centre japonais des collectivités locales, « Le développement durable en France et au Japon », vendredi 22 janvier 2010, Palais du Luxembourg, Paris.