Réforme des collectivités territoriales
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.
Motion référendaire
M. le président. - J'informe le Sénat qu'en application de l'article 11 de la Constitution et de l'article 67 du Règlement, M. Bel, Mme Borvo Cohen-Seat et plusieurs membres de leurs groupes présentent une motion tendant à proposer au Président de la République de soumettre au référendum le projet de loi de réforme des collectivités territoriales.
En application de l'alinéa premier de l'article 67 du Règlement, cette motion doit être signée par au moins trente sénateurs dont la présence est constatée par appel nominal.
Il est procédé à l'appel nominal des signataires.
M. le président. - Acte est donné du dépôt de cette motion. Elle sera envoyée à la commission des lois. La discussion aura lieu conformément à l'article 67, alinéa 2, du Règlement « dès la première séance publique suivant son dépôt », c'est-à-dire demain mercredi 20 janvier à 14 heures 30. Conformément au droit commun défini à l'article 29 ter du Règlement, la discussion générale sera organisée sur deux heures, les inscriptions de parole devant être faites au service de la séance avant 11 heures.
Discussion générale
M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. - (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre ; commentaires sarcastiques sur les bancs socialistes) Alors que nous nous apprêtons à débuter nos travaux...
M. Jean-Pierre Michel. - Le Premier ministre ne s'est même pas déplacé !
M. Brice Hortefeux, ministre. - ...je veux partager avec vous le double sentiment qui m'anime. Tout d'abord, un sentiment de solennité. Une nouvelle fois, notre pays a rendez-vous avec son histoire institutionnelle. L'organisation territoriale de la France puise ses racines dans une histoire séculaire. Il s'agit de rester fidèle à cet héritage...
M. Jean-Louis Carrère. - La centralisation, chère au RPR !
M. Brice Hortefeux, ministre. - ...tout en adaptant notre organisation territoriale aux défis de notre temps.
Un sentiment de fierté : fierté d'inaugurer ce débat au Sénat, où bat le coeur de la République des territoires. L'histoire de la Haute assemblée, son mode d'élection, la qualité de ses travaux...
M. Jean-Louis Carrère. - C'est du violon !
M. Brice Hortefeux, ministre. - ...en font le premier représentant des collectivités territoriales.
M. Jean-Pierre Michel. - Le Premier ministre aurait pu se déplacer !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Nul doute que vos travaux en porteront le témoignage.
Aux côtés de Michel Mercier, je viens vous exposer notre ambition renouvelée pour une République décentralisée : celle d'une profonde réforme territoriale, trente ans après les premières lois de décentralisation.
M. Jean-Louis Carrère. - La recentralisation !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Longtemps, la centralisation a dominé l'histoire politique et administrative. Ce fut d'abord le lent effort de la monarchie pour réduire les féodalités et installer un État fort et centralisé. (Exclamations à gauche)
De la Révolution, nous avons hérité les institutions qui allaient dessiner l'administration locale, ainsi que des lignes de partage : jacobins contre girondins, partisans des départements aux contours géométriques contre défenseurs des réalités géographiques, Mirabeau contre Sieyès.
Du Consulat et de l'Empire, nous avons hérité du corps préfectoral, l'une de ces « masses de granit jetées sur le sol de France » selon la formule du Premier consul...
M. Jean-Pierre Michel. - Oh là là !
M. Brice Hortefeux, ministre. - ...et qui reste un pilier de l'organisation institutionnelle de notre pays.
Tout au long du XIXe siècle et durant une bonne partie du XXe, la France resta marquée du sceau de la centralisation et de l'uniformité, vécues comme des garanties pour l'unité de la Nation.
Peu à peu, pourtant, il y eut la lente progression des libertés locales, jamais linéaire : la Monarchie de Juillet et, surtout, les deux grandes lois de 1871 sur le département et de 1884 sur la commune.
Il a fallu attendre 1946 pour voir les collectivités territoriales consacrées dans la Constitution. Ainsi, à la naissance de la Ve République, celles-ci sont-elles encore très proches de celles crées sous l'Ancien régime. En deux siècles, notre organisation territoriale a finalement peu évolué.
Le général de Gaulle fut le premier à percevoir la nécessité d'une modernisation. Chacun a en mémoire son discours de Lyon du 24 mars 1968 et ses propos sur la centralisation multiséculaire qui ne s'imposait plus. Sans doute a-t-il eu raison trop tôt. Le septennat de M. Giscard d'Estaing a préparé les esprits ; mais l'histoire retiendra que c'est le président Mitterrand qui a enclenché de façon décisive le mouvement de décentralisation avec les lois Deferre. Le Président Sarkozy l'a dit dans son discours de Saint-Dizier le 20 octobre : trente ans après, beaucoup d'élus de l'opposition de l'époque ont regretté de ne pas avoir voté les lois historiques de 1982. (Rires moqueurs à gauche) Je dis cela devant M. le Premier ministre Pierre Mauroy. C'est la droite qui, par la loi d'orientation de 1995, a tiré les conséquences de la décentralisation sur l'aménagement du territoire. C'est la gauche, en 1999, qui amplifiera le mouvement d'intercommunalité, cette révolution silencieuse, complément pragmatique à l'émiettement communal caractéristique de notre pays. Je reconnais que tout le monde n'y était pas favorable à l'époque -je le dis devant le ministre d'État Jean-Pierre Chevènement. Ce sont la droite et le centre, en 2003...
Mme Nicole Bricq. - Raté !
M. Brice Hortefeux, ministre. - ...qui ont inscrit dans l'article premier de la Constitution que l'organisation de notre République est décentralisée ; qui ont consacré les régions dans notre texte fondamental ; qui y ont enfin affirmé, avec le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, les principes de subsidiarité et d'autonomie financière.
M. Jean-Louis Carrère. - Il n'est pas là !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Après trois décennies, la décentralisation n'est plus de droite ni de gauche ni du centre, elle est le patrimoine commun des républicains.
M. Jean-Louis Carrère. - Elle va devenir un patrimoine historique !
M. Brice Hortefeux, ministre. - La France a changé depuis trente ans, mais personne ne veut ni ne songe revenir sur cet acquis fondamental.
M. Jean-Pierre Michel et M. Jean-Louis Carrère. - Si, vous !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Faut-il pour autant s'interdire d'en relever les faiblesses ? Toute tentative d'en dresser le bilan serait-elle condamnée à être caricaturée comme recentralisatrice ?
M. Jean-Louis Carrère. - Votre atavisme est fort !
M. Brice Hortefeux, ministre. - La force d'une institution se mesure à sa capacité d'adaptation. La liste est impressionnante des rapports qui ont traité du sujet, celui du comité Balladur, les rapports Mauroy, Richard, Lambert, Attali, Warsmann, Saint-Etienne... Sans compter ceux publiés par la Cour des comptes sous l'égide de Philippe Séguin. Tous n'ont pas proposé les mêmes remèdes, mais tous, sans exception, ont fait le même diagnostic.
M. Jean-Pierre Sueur. - Aucun n'a proposé le conseiller territorial !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Tous ont pointé la fragmentation de notre paysage institutionnel, l'empilement des structures et l'enchevêtrement des compétences, la répartition par blocs n'ayant pas abouti. Tous ont relevé l'obsolescence et la complexité de notre fiscalité locale, qui éloignent les citoyens de la démocratie locale et découragent les bonnes volontés. On le sait : un seul mandat ne suffit plus à un maire pour mener à bien les projets sur lesquels il a été élu.
Le pire service à rendre à la décentralisation serait d'ignorer tous ces travaux et de ne rien entreprendre. En réformant notre organisation territoriale, nous la conforterons comme nous conforterons les libertés locales ; c'est en ne faisant rien que nous les affaiblirions. Le moment est venu d'agir. Le Président de la République en est convaincu (exclamations ironiques à gauche), le Gouvernement vous y invite. A vous de décider.
La préparation de toute réforme charrie son cortège d'idées tranchées et définitives, qui tiennent pour peu les réalités forgées par l'Histoire. Certains ont suggéré de supprimer les départements, trop petits et trop uniformes ; d'autres, de fusionner d'autorité les régions, trop exiguës et insuffisamment compétitives ; d'autres encore de réduire le nombre de communes, au motif que l'existence de 36 000 communes était le mal français par excellence. Le Gouvernement a écarté d'emblée ces idées fausses et à l'emporte-pièce : on ne gouverne pas par des contraintes imposées d'en haut. (Applaudissements à droite) Comme l'a dit le Premier ministre, l'Histoire n'est pas une page blanche sur laquelle on pourrait impunément tirer un trait.
Si le Gouvernement ne propose pas un big bang territorial, il se refuse au statu quo. Il a choisi une voie ambitieuse et pragmatique. Vous avez adopté récemment le texte organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux ; il vous soumet aujourd'hui une organisation territoriale articulée autour de deux pôles complémentaires, le pôle département-région et le pôle commune-intercommunalité, comme l'avaient suggéré le comité Balladur et la Cour des comptes.
Parmi les débats dont la France a le secret, l'un revient périodiquement : faut-il privilégier la région ou le département ? Le département, institution plus que biséculaire, a vu ses compétences s'accroître, en particulier dans le domaine social ; il est un appui indispensable aux communes rurales. Qui peut dire aujourd'hui qu'il ne dispose pas d'une forte légitimité ? Qui peut dire que nos concitoyens ne lui sont pas attachés ? (M. Bruno Sido renchérit) La région est, de son côté, la collectivité territoriale la plus jeune et par là la plus prometteuse ; la reconnaissance du fait régional a longtemps été défendue par des courants minoritaires. La région a vocation à conduire des politiques structurantes, notamment économiques, à mi-chemin entre l'État et l'échelon de proximité. Il faut conforter cette vocation.
Jamais notre République n'empruntera la voie du fédéralisme ; nos régions ne seront jamais des länder allemands ni des communautés autonomes espagnoles. Les évolutions en cours dans certains pays européens nous invitent d'ailleurs à la circonspection. J'ai la conviction que nous ne sommes pas condamnés à des choix binaires.
M. David Assouline. - Ce n'est pas votre genre !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Le Gouvernement souhaite ainsi laisser toute liberté aux régions et aux départements qui voudraient se regrouper. Une procédure est créée à cette fin. De même qu'est créée une institution nouvelle, le conseiller territorial, qui siégera à la fois au conseil général et au conseil régional.
M. Jean-Louis Carrère. - Un véhicule hybride !
M. Brice Hortefeux, ministre. - C'est l'article premier du texte, qui mérite à lui seul un débat de principe. Le Gouvernement fait confiance aux élus locaux pour engager le chantier de la clarification et de la simplification que, collectivement, nous n'avons pas su faire aboutir en trente ans. Demain, le conseiller territorial sera porteur d'une double vision ; sa connaissance du fonctionnement, des compétences et des modalités d'intervention des deux assemblées sera facteur de complémentarité, évitera les actions concurrentes, sinon redondantes. Il sera l'interlocuteur unique des acteurs territoriaux, contribuera à la cohérence des financements et à l'accélération du montage des projets. Ainsi la rationalisation ne viendra-t-elle pas d'en haut mais du terrain, aux mains d'élus moins nombreux mais plus puissants.
Cette réforme est un pari sur l'intelligence des territoires. La région, qui souffre d'un déficit de visibilité, peut y trouver un surcroît de légitimité. On connaît son maire, son conseiller général, plus rarement, même s'il y a des exceptions, son conseiller régional. Le dire n'est insulter personne. Le conseiller territorial sera un relais de proximité pour la région et un moyen pour le département d'élargir son horizon ; il sera un facteur de renouvellement de l'action publique locale. Et chacun voit combien une action plus complémentaire des départements et des régions peut servir la performance des territoires au service de nos concitoyens.
Le Gouvernement propose donc d'approuver avec ce texte le principe du conseiller territorial. Le mode de scrutin est un tout autre sujet, qui sera traité ultérieurement. (Marques d'ironie sur les bancs socialistes) Nous reprenons ainsi le schéma des lois de régionalisation, avec un principe fixé en 1982 et un mode d'élection déterminé en 1983. Pourquoi ce qui était de bonne méthode en 1982 serait-il devenu mauvais cette année ? (Applaudissements à droite)
Le Gouvernement vous proposera un mode de scrutin mixte. C'est une option, mais il peut y en avoir d'autres. (Marques d'intérêt à gauche) Le Gouvernement abordera ce débat dans un esprit d'ouverture, avec le souci de représenter l'ensemble du territoire, de prendre en compte les réalités démographiques, de respecter le pluralisme et la parité.
J'en viens au deuxième pilier de la réforme : renforcer le pôle constitué par les communes et les intercommunalités.
Vrai succès, l'intercommunalité est désormais parvenue à maturité. (M. Jean-Pierre Chevènement est congratulé par plusieurs de ses collègues) Nous devons maintenant franchir une étape en parachevant sa généralisation et en démocratisant son fonctionnement, sans jamais opposer communes et intercommunalités, car le couple qu'elles forment renforce nos territoires.
L'article 2 du projet de loi propose d'élire au suffrage universel direct les délégués communaux siégeant aux conseils communautaires. Concrètement, un système de fléchage est proposé pour les élections municipales, afin de ne porter aucune atteinte à la légitimité du maire. Cette solution figurait dans la proposition n°7 du rapport Mauroy d'il y a dix ans. Nous satisferons ainsi l'exigence démocratique, qui s'impose vu les compétences des structures intercommunales et l'ampleur du budget qu'elles gèrent : en 2008, les groupements à fiscalité propre ont dépensé 24,9 milliards d'euros, presque autant que les régions. Les citoyens pourront enfin s'approprier les débats communautaires, une avancée qui aura pour corollaire l'encadrement de la répartition des sièges, pour concilier la représentation de toutes les communes et le respect des réalités démographiques.
Le deuxième enjeu de l'intercommunalité est l'achèvement de la couverture du territoire, dont moins de 10 % restent à l'écart du mouvement. Sur plus de 36 000 communes, quelque 2 500 demeurent isolées, souvent pour des raisons de principe. La couverture intégrale doit aller de pair avec la rationalisation des périmètres et des structures, un chantier à conduire dans la concertation avec les communes, mais en se fixant un calendrier qui donne une impulsion. Le Gouvernement propose un horizon fin 2013, les schémas départementaux de coopération intercommunale étant élaborés par les préfets d'ici la fin de 2011. De nouveaux pouvoirs autoriseront les commissions départementales de coopération intercommunale à modifier les projets préfectoraux, sous réserve d'une majorité qualifiée. Nous voulons que chaque schéma résulte d'un travail conjoint entre le préfet et la commission départementale.
Enfin, le troisième défi de l'intercommunalité concerne la mutualisation des services.
Mais l'intercommunalité ne doit pas être le seul horizon des communes, car certains élus souhaitent aller plus loin dans l'intégration en transformant leur intercommunalité en commune nouvelle. De même, certaines petites communes, notamment rurales, peuvent avoir intérêt à fusionner. Le Gouvernement propose donc un dispositif de « communes nouvelles », plus souple, plus simple et plus incitatif que l'ancien système Marcellin.
J'en viens au troisième pilier de la réforme : faire émerger un réseau de métropoles.
Le Gouvernement ne propose évidemment pas de choisir les métropoles urbaines contre les territoires ruraux...
M. Guy Fischer. - Le Rhône est rassuré !
M. Brice Hortefeux, ministre. - ...selon une opposition frontale dénuée de sens. Il s'agit seulement d'organiser au mieux le fait métropolitain, au bénéfice du territoire national, conformément à une préoccupation exprimée aujourd'hui dans la presse par le président Gérard Longuet.
M. Jean-Louis Carrère. - Nous sommes sauvés !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Depuis une quinzaine d'années, notre pays vit à l'heure de la mondialisation. Les 38 principales métropoles de l'Union européenne couvrent à peine 1 % de son territoire, mais concentrent plus du quart de ses emplois et produisent le tiers de son PIB.
En 2008, près de 80 % des Français vivaient en ville, contre la moitié en 1936. Pourtant, nos métropoles restent modestes à l'échelle européenne et n'ont que des interactions insuffisantes avec leurs régions. Les esprits restant marqués par le scénario repoussoir de Paris et le désert français, notre aménagement du territoire demeure méfiant face au fait métropolitain.
Il est fondamental que les métropoles se fassent non pas contre le reste du territoire mais pour le bénéfice de tous. L'objectif étant ainsi défini, il reste à déterminer les voies et moyens. C'est ce que propose le Gouvernement avec les statuts des métropoles et des pôles métropolitains.
Fallait-il dresser dans la loi une liste limitative des métropoles, à l'instar des premières communautés urbaines en 1966 ? Je ne le crois pas, car la dynamique doit venir des territoires : des métropoles imposées par l'État assureraient des polémiques inutiles et conduiraient le dispositif à l'échec. Faisons confiance à l'intelligence territoriale, pour reprendre le titre du rapport de la mission présidée par le sénateur Belot ; fixons un cap pour la première étape institutionnelle des métropoles et faisons confiance aux élus pour faire évoluer ce nouvel outil dans le bon sens.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement propose d'ériger les métropoles en EPCI, non en collectivités territoriales à part entière. De même, je n'ai jamais été convaincu par l'hypothèse de la métropole-département, que j'ai trouvée à mon arrivée place Beauvau, car les métropoles doivent être complémentaires des départements et des régions. En particulier, je n'approuve pas un transfert automatique aux métropoles des compétences sociales exercées par les départements. Ce ne serait ni réaliste, ni pertinent. Au-delà d'un socle obligatoire de compétences, les départements, les régions et les métropoles doivent pouvoir déterminer conventionnellement une répartition optimale prenant en compte les spécificités territoriales. Nous cherchons à susciter un dialogue institutionnel, non à imposer une solution. Le Gouvernement propose de fixer le seuil des métropoles à 450 000 habitants, une solution que je crois équilibrée, à en croire la diversité des amendements qu'elle suscite.
Parallèlement, le projet de loi propose de créer des pôles métropolitains, formule plus souple permettant à plusieurs agglomérations de développer des coopérations renforcées dans des domaines stratégiques d'intérêt commun.
Fondées sur le volontariat, ces deux formules sont au service des projets des élus.
Pour le quatrième pilier de la réforme, qui tend à clarifier les compétences et les financements, nous proposons une méthode en deux étapes, tant le chantier est difficile et complexe.
La première étape figure à l'article 35 du projet de loi, qui suggère de définir un socle de principes clairs et souples inspirés par le bon sens, nous engageant sur la voie de la spécialisation des compétences départementales et régionales, tout en sauvegardant leur capacité d'initiative. La loi préciserait ainsi les compétences propres de chaque catégorie de collectivités. Lorsque des compétences partagées subsisteront, le législateur pourrait désigner un chef de file, ou laisser aux collectivités le soin de le désigner par convention. Simultanément, les financements croisés seraient mieux encadrés pour clarifier les rôles respectifs, dans un but d'efficacité et de célérité.
Nous devons continuer à soutenir les communes les plus modestes. Le rôle des départements dans l'aide aux communes rurales doit en particulier être conforté.
La répartition des compétences sera précisée par un autre projet de loi, que le Gouvernement veut préparer par une concertation approfondie. Plusieurs groupes de travail seront créés dans les semaines qui viennent pour que les représentants des parlementaires, des administrations et des associations nationales d'élus élaborent un texte d'ici l'été.
Au moment où nous nous apprêtons à examiner le texte de votre commission, je souhaite rendre hommage à son excellent travail, conduit sous la présidence de M. Hyest, assisté par le rapporteur, M. Courtois.
Sur les 241 amendements déposés au projet du Gouvernement, vous en avez adopté 151, dont 128 ont été proposés par votre rapporteur, dix sont dus à l'initiative de Mme Gourault ou de son groupe, sept ont été suggérés par M. Gérard Collomb, quatre proviennent du groupe UMP et deux ont été proposés par le Rassemblement démocratique et social européen (RDSE).
Le travail de la commission, utile et exigeant, a été guidé par quatre principes rappelés dans le rapport : pragmatisme, respect des libertés locales, souplesse, simplification. Je salue la façon dont elle a rapproché les points de vue. Je pense à la composition des conseils communautaires à l'article 3 ou au souci de réalisme qui vous a animés pour reconnaître le rôle de la commune-centre en matière de rationalisation de la carte intercommunale. Vous avez recherché le meilleur équilibre entre les pouvoirs du préfet et ceux des élus réunis au sein de la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI), afin de promouvoir une véritable coproduction. Je me réjouis que vous ayez conservé aux maires des compétences qui sont au coeur de leur mandat -je songe aux pouvoirs de police. Vous avez introduit des garanties dans le regroupement de régions et de départements et une nouvelle procédure pour la création d'une collectivité unique. Je salue enfin l'amélioration apportée à l'article 35 relatif à la clarification des compétences et des cofinancements.
Bien sûr, l'économie du texte issu de vos travaux en ce qui concerne les métropoles et les communes nouvelles n'est pas exactement celle que le Gouvernement avait proposée... Certes, l'équilibre entre le respect des communes, cellules de base de notre organisation territoriale, et l'ambition de structures plus intégrées n'est pas facile à trouver. Plusieurs sensibilités peuvent s'exprimer et je salue les propositions du rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Charles Guené. Le Gouvernement ne cherchera pas coûte que coûte à rétablir son texte initial.
M. Christian Cambon. - Très bien.
M. Brice Hortefeux, ministre. - II ne s'interdira pas non plus d'exprimer son point de vue ! Je crois normal que le débat puisse s'installer entre le Sénat et l'Assemblée nationale. Le Gouvernement, rejoignant le souhait du Président Larcher, n'a pas eu recours à la procédure accélérée. Nous avons donc tout le temps pour débattre sereinement et de manière approfondie, d'ici à l'été.
J'ai un seul voeu à formuler à l'entame de nos travaux : évitons les fausses querelles et, sur tous les bancs, sachons saisir l'occasion qui nous est offerte de débattre sereinement de l'organisation territoriale de la France. Que nos débats se tiennent éloignés des facilités, des caricatures ou des postures. Ne tombons pas dans le piège d'oppositions artificielles. N'opposons pas les décentralisateurs et de prétendus recentralisateurs, alors que personne ne soutient la recentralisation et que nous aspirons à donner un nouveau souffle à la décentralisation. (Contestations à gauche, applaudissements à droite) N'opposons pas les pro-région et les pro-département, trouvons comment assurer leur complémentarité. N'opposons pas l'intercommunalité et les communes : la progression de la première peut conforter les secondes. N'opposons pas territoires urbains et territoires ruraux. N'opposons pas l'État et les collectivités territoriales, réformons-les dans un même élan au bénéfice du pays tout entier. Et n'essayons pas de faire jouer à nos collectivités territoriales un rôle de contrepoids à l'action de l'État ; tel n'est pas leur rôle et elles ne se pensent pas ainsi. Ce serait contraire à l'idéal et à l'originalité de notre modèle républicain. Le Gouvernement s'est gardé de tomber dans ces travers durant l'élaboration des projets de lois. (Rires incrédules à gauche, applaudissements sur les bancs UMP) Il n'y a rien dans cette réforme qui ne serve l'équilibre et l'unité du pays.
Mme Raymonde Le Texier. - Tu parles !
M. Brice Hortefeux, ministre. - Je suis certain que la Haute assemblée partage l'ambition du Gouvernement (vives dénégations à gauche), rénover la décentralisation pour renforcer notre pays. (Applaudissements à droite)
M. le président. - Je salue le retour de M. Belot dans notre hémicycle. (Applaudissements)
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois - La République décentralisée a désormais atteint la maturité et l'heure est venue d'un nouveau bilan. La réforme proposée est une nécessité. Depuis 1982, les structures territoriales de notre pays ont connu de nombreuses adaptations et se sont considérablement développées. Toutes les conséquences n'ont pas été tirées de ces bouleversements. La décentralisation s'est appliquée dans un paysage territorial figé et l'État a eu du mal à accepter la nouvelle donne. En outre, ni l'empilement pyramidal des niveaux de collectivités, ni le format de chacun d'eux n'ont été remis en cause. S'est intercalé le niveau des EPCI. La logique de la décentralisation aurait dû conduire l'État à ne plus intervenir dans les secteurs transférés et à renoncer au pouvoir de pilotage et de gestion qu'il détenait dans la tradition jacobine. Mais il a bien tardivement réagi : la refonte de ses services déconcentrés, dans le cadre de la RGPP, date de 2007. Il conviendra d'en évaluer la pertinence et l'adéquation.
L'architecture territoriale actuelle n'est plus ni lisible pour les citoyens, ni satisfaisante pour les acteurs locaux. L'enchevêtrement des structures et des compétences, comme des financements, en est la preuve. Conscient de la nécessité d'une clarification, le Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, a conduit sa propre réflexion : la mission Belot a ainsi élaboré, sur le rapport de nos collègues Gourault et Krattinger, des propositions constructives. Le Sénat a eu l'occasion de prendre position lors de deux débats sur le sujet. La Haute assemblée a été saisie le 21 octobre dernier des quatre projets de loi visant à rationaliser les structures territoriales, moderniser l'exercice de la démocratie locale, clarifier la répartition des compétences et donner aux élus locaux des outils plus efficaces.
Comme rapporteur, j'ai voulu dépasser ma propre expérience d'élu local et prendre toute la mesure des blocages, des préoccupations et des espoirs. La commission des lois a organisé deux débats et une table ronde s'est tenue avec les trois principales associations d'élus locaux -AMF, ADF et ARF. La réforme des collectivités territoriales, sous peine d'être vouée à l'échec, doit recueillir la plus large adhésion de ceux qui la feront vivre. Elle doit tendre à faciliter l'action des élus. J'ai donc organisé mon travail autour de quatre principes : le pragmatisme, le respect des libertés locales, la souplesse et la simplification. La commission des lois y a adhéré, respectant globalement la logique du texte mais introduisant de nombreuses modifications afin de mettre l'accent sur la liberté des collectivités et leur capacité à exercer leurs compétences.
La création des conseillers territoriaux est l'une des mesures les plus controversées. Elle suscite de nombreuses craintes : les élus départementaux y voient parfois le prélude à une suppression des départements (« Bien sûr ! » sur les bancs socialistes), les élus régionaux craignent une « cantonalisation » de la région. Mais les conseillers territoriaux amélioreront la coordination entre les deux niveaux, sans remettre en cause les spécificités de chacun.
M. Guy Fischer. - Fadaises !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. - Leur création est un acte de confiance dans la démocratie locale : les conseillers territoriaux auront des missions plus étendues et des responsabilités plus larges. Cela correspond à une véritable attente de nos concitoyens et des entreprises qui auront désormais un interlocuteur unique. Nous ferons des économies et améliorerons l'efficacité des politiques publiques tout en favorisant les initiatives communes.
La commission s'est attachée à préserver la liberté des communes et à améliorer le fonctionnement de l'intercommunalité. Elle a privilégié la concertation pour fixer la composition des conseils communautaires. Le système proposé par le Gouvernement ne laisse aucune marge aux communes, or nous voulons préserver la liberté des membres des intercommunalités : ils doivent fixer eux-mêmes le nombre et la répartition des sièges au sein des organes délibérants de leur EPCI.
Soyons pragmatiques : le système en vigueur a fait ses preuves, il paraît inutilement risqué de le remettre en cause. Le texte de la commission autorise les communes membres à se dispenser d'appliquer le tableau de répartition des sièges, à condition de parvenir à un accord à la majorité qualifiée et de respecter certaines règles fondamentales -chaque commune doit obtenir au moins un siège et aucune ne disposera de plus de la moitié de ceux-ci. Telle était notre position dans l'attente d'un meilleur dispositif. Des amendements ont proposé une formule sans doute plus pertinente. Mais la commission a dû se prononcer avant d'avoir pu disposer de simulations fiables et concordantes. C'est pourquoi elle examinera demain les amendements Hérisson et Collomb, qui permettent de répondre aux inquiétudes et qui ont recueilli l'accord des associations d'élus. Puisse-t-elle les adopter.
Par pragmatisme, la commission a prévu que ces dispositions entreront en vigueur après le prochain renouvellement des conseils municipaux en 2014, sauf pour les établissements formés après la promulgation du présent texte.
Nous avons encadré le pouvoir du préfet de modifier la carte intercommunale en supprimant son pouvoir d'appréciation quant à la mise en oeuvre du schéma départemental de coopération intercommunale en 2012, en prévoyant l'accord de l'organe délibérant en cas de rattachement d'une commune à un EPCI et en précisant que les modifications adoptées par la CDCI à la majorité des deux tiers s'imposent à lui. Pour la commission, la commune-centre doit consentir aux procédures de création, de modification du périmètre, de fusion, de dissolution des EPCI ou des syndicats mixtes. S'agissant des orientations fixées au schéma départemental, la commission a supprimé le seuil de 5 000 habitants pour la constitution d'une communauté de communes, considérant qu'il n'était pas pertinent au regard de la diversité des territoires. En revanche, à l'initiative de Mme Gourault, elle a réactivé les pouvoirs spéciaux dont disposeront les préfets en 2012 en matière de fusion d'EPCI et d'extension de périmètre, à chaque révision du schéma départemental. Pour faciliter la recomposition des structures syndicales, elle a donné aux syndicats la faculté de recourir plus largement aux mécanismes de fusion, de dissolution ou de substitution. Enfin, elle a créé un collège spécifique pour représenter les syndicats mixtes et les syndicats de communes au sein de la CDCI afin de prendre acte de l'élargissement des interventions de ladite commission dans la vie des syndicats.
La commission, pour garantir le caractère consensuel du fonctionnement de l'intercommunalité, a rétabli la majorité qualifiée pour les transferts de compétences après la création d'un EPCI et la détermination de l'intérêt communautaire, contre la majorité simple prévue par le texte. Elle est également revenue sur le caractère obligatoire du transfert du pouvoir de police au président de l'EPCI dans certains domaines. De surcroît, elle a préservé l'autonomie des communes au sein des nouvelles métropoles en supprimant, sur la proposition de Mme Gourault et de M. Collomb, le transfert de l'ensemble de la fiscalité des communes à la métropole et en rendant facultatif le transfert de la DGF communale à celle-ci. Partageant l'objectif de souplesse et d'économie de fonctionnement des EPCI du Gouvernement, la commission a facilité les mises à disposition de services, notamment entre la métropole et le département ou la région.
La commission a précisé le régime des métropoles. Soit, celles-ci se distinguent des autres formes de coopération par leur plus grande intégration et leur rayonnement au niveau européen, mais il faut également préserver la proximité, facteur-clé d'une action locale efficace. A l'initiative de Mme Gourault, de M. Collomb et de son rapporteur, la commission a conservé aux maires leurs pouvoirs en matière d'autorisation d'utilisation du sol et a introduit la notion d'intérêt communautaire pour le transfert des équipements culturels et sportifs. Elle a précisé que le périmètre d'une métropole peut être étendu à une commune appartenant à une communauté de communes à DGF bonifiée. Pour conserver une cohérence à la déclinaison des EPCI selon leur degré d'intégration, votre commission a abaissé le seuil démographique de création des communautés urbaines. Votre commission des lois a approuvé le dispositif des pôles métropolitains ainsi précisé, qui donnent aux collectivités les plus dynamiques une structure labellisée pour conduire leurs projets.
La commission a retenu le système renouvelé des fusions de communes, sans optimisme excessif quant à son succès. Toutefois, elle l'a assorti de plusieurs garanties : extension, à l'initiative de M. Lecerf, de la consultation des électeurs à la demande de toutes les communes concernées en prévoyant, dans tous les cas, l'appréciation des résultats au niveau de chaque commune. La commission a attribué les qualités d'officier d'état civil et d'officier de police judiciaire au maire délégué, ce qui semble logique compte tenu de ce que les actes d'état civil seront établis dans l'annexe de la mairie et que le maire délégué pourra se voir confier l'exécution des lois et règlements de police.
La commission a voulu garantir les procédures de regroupement des départements et des régions en prévoyant l'accord de la population de chacun des territoires concernés de manière à éviter qu'un territoire plus peuplé ne force un autre à se regrouper avec lui.
M. Bruno Sido. - Très bien !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. - Elle a également prévu que les conseils généraux et le conseil régional qui le souhaitent pourront solliciter du législateur, avec l'accord de la population, la création d'une collectivité se substituant à la région et aux départements qui la composent.
Pour mettre fin aux subventions conditionnées par l'adhésion de la collectivité à une structure d'organisation ou de coopération intercommunale, nous avons ajouté aux exclusions prévues par le texte le cas des associations de collectivités territoriales derrière lesquelles pourraient se recréer les pays supprimés à l'article 25.
Cette réforme ayant pour but de simplifier les structures et l'action territoriales, la commission a précisé la nature de l'encadrement des cofinancements et supprimé l'évocation de la « part significative » du financement par le maître d'ouvrage, d'interprétation trop aléatoire. Elle a également ajouté, sur une suggestion de MM. Chevènement et Mézard, que les initiatives des départements et des régions dans les domaines non prévus par la législation devraient être motivées par des délibérations des assemblées locales.
Notre responsabilité est immense...
M. Dominique Braye. - C'est sûr !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. - ...quant à l'avenir de la décentralisation. Par notre vote, nous pourrons dépasser les blocages, les dysfonctionnements que, tous, nous constatons sur le terrain afin de conforter la vitalité de la démocratie locale, cheville ouvrière de la cohésion et de la solidité de notre société. Au bénéfice de ces observations, la commission des lois soumet au Sénat le texte qu'elle a établi. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Charles Guené, rapporteur pour avis de la commission des finances. - La réforme institutionnelle, a rappelé le rapporteur de la commission des finances, est liée à la suppression de la taxe professionnelle dans la loi de finances pour 2010. Ce lien est, d'abord, technique. Les deux textes ont été, par nécessité et choix politique, élaborés par des administrations différentes : Bercy pour la réforme de la taxe professionnelle, la place Beauvau pour le présent texte. Ce dernier, ayant été examiné par la commission des lois avant que le Parlement ait statué sur la réforme de la taxe professionnelle, ne tient pas compte des évolutions importantes apportées lors de l'examen de la loi de finances. Il faut, à cet égard, se réjouir que la discussion n'ait pas eu lieu le 15 décembre, comme initialement programmé, mais après la publication au Journal officiel de la loi de finances pour 2010 le 30 décembre 2009.
Ces deux réformes sont également liées en ce qu'il faut assurer la cohérence entre les regroupements institutionnels, les compétences des collectivités et les moyens accordés pour assurer ces compétences. De ce point de vue, nous avons commencé par la fin en définissant d'abord les attributions fiscales des collectivités.
M. Daniel Raoul. - Pensez-vous !
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est bien de le reconnaître !
M. Charles Guené, rapporteur pour avis. - Mais il fallait redonner rapidement des marges de compétitivité à nos entreprises, surtout dans le domaine industriel. (Marques d'ironie sur les bancs socialistes) Ensuite, le Sénat a prévu des clauses de rendez-vous afin d'ajuster, si besoin est, les différents volets de la réforme.
La commission des finances a strictement limité sa saisine aux articles ayant une incidence sur les finances locales : l'article 5 relatif à l'organisation de la métropole, les articles 8, 9 et 10 relatifs à la création d'une commune nouvelle, à l'intégration fiscale des communes nouvelles et à l'adaptation du code général des collectivités territoriales à la création des communes nouvelles et, enfin, l'article 35 relatif aux financements croisés.
Premier point, les métropoles. Si la commission des lois a nettement amélioré la rédaction du texte initial concernant la définition des compétences, la réintroduction de la condition de l'intérêt communautaire et la souplesse introduite pour le partage des services entre la métropole et les collectivités départementales et régionales, notre commission considère qu'elle est revenue sur les points les plus innovants du régime financier des métropoles en réaffirmant le principe de la perception des impôts par les communes membres des métropoles, en supprimant le principe d'une dotation de reversement de la métropole vers les communes membres et, enfin, en prévoyant que le transfert de la DGF des communes membres à la métropole s'effectue sur délibération concordante de l'organe délibérant de la métropole et des conseils municipaux.
Pour la commission des finances, l'intégration fiscale et budgétaire très poussée des métropoles va dans le sens des dispositions votées en loi de finances 2010, qui créent le régime nouveau des EPCI anciennement à taxe professionnelle unique (TPU). Pour compenser la disparition de la taxe professionnelle, ces EPCI se voient affecter des ressources fiscales nouvelles sur les entreprises -imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, contribution économique territoriale- mais aussi sur les ménages via la taxe d'habitation en provenance des départements.
Ce régime s'appliquera aux communautés urbaines auxquelles le texte assimile les métropoles. Il est donc nécessaire d'aller encore plus loin vers l'intégration si l'on souhaite donner du sens à la nouvelle structure intercommunale que seront les métropoles. C'est ce qui justifie le transfert global de la fiscalité au niveau métropolitain, même si l'on peut comprendre le souhait d'acter ce transfert par une délibération des communes. C'est ce qui justifie, aussi, une première expérimentation de la DGF territorialisée qu'appelait de ses voeux la mission d'information présidée par notre collègue Claude Belot.
La métropole bénéficie, en effet, d'une dotation globale de fonctionnement composée d'une dotation forfaitaire, d'une dotation de compensation et d'une dotation communale, somme des dotations dues aux communes membres de la métropole au titre de la dotation globale de fonctionnement. En parallèle, la compensation financière des transferts de compétences est organisée, dans le respect du principe de neutralité budgétaire, sous le contrôle d'une commission consultative d'évaluation des charges et par le moyen d'une dotation de compensation versée par la région et le département et d'une dotation de reversement à la charge de la métropole et à destination des communes.
Même si certains aspects de son statut mériteraient d'être justifiés, comme l'absence de notion de ville-centre, la métropole ne représente pas, aux yeux de la commission des finances, un danger pour l'équilibre institutionnel du territoire. La métropole est créée sur la base du volontariat, ce statut n'est accessible, compte tenu des critères exigés, qu'à huit agglomérations -Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice et Strasbourg-, elles-mêmes déjà constituées en communautés urbaines. Dans ces conditions, la création de métropoles par transformation de communautés urbaines existantes ne pèsera pas sur l'ensemble de la DGF des communes. La dotation « métropoles », qui s'imputera sur la part « intercommunalité » de la DGF, est en effet calée sur la dotation de type « communautés urbaines », qui a un caractère forfaitaire et ne varie pas en fonction du coefficient d'intégration fiscale. Si l'intercommunalité a effectivement un coût pour l'ensemble des collectivités en termes de ponction sur la DGF, il serait injuste et inexact de laisser croire que ce coût est lié aux métropoles.
La commission des finances s'est aussi saisie de la question des « communes nouvelles ». Le Gouvernement veut donner un nouveau dynamisme au processus de fusion de communes. Le paysage communal français est particulièrement morcelé, avec 36 686 communes auxquelles s'ajoutent les structures intercommunales, et cet émiettement nuit à l'efficacité de l'action publique. Les plus petites communes notamment n'ont pas les moyens humains ni financiers de faire face aux charges qui leur incombent. La loi de juillet 1971, dite « loi Marcellin », principale initiative prise pour remédier à l'émiettement communal, s'est soldée par un échec incontestable puisque, depuis cette date, le nombre net de communes effectivement supprimées par application de la loi s'élève à 1 100, soit moins de 3 % du total. Les articles 8 à 11 prévoient la possibilité de créer des « communes nouvelles » qui se substitueront à plusieurs communes et auront, seules, le rang de collectivités territoriales. Le dispositif d'incitation financière proposé par le Gouvernement créait un « bonus » de DGF pour les communes nouvelles. Comme l'a relevé la commission des lois, ce bonus aurait amputé la DGF des autres communes. Le bonus a donc été supprimé. L'effet pervers de cette suppression est que l'on aboutit à un texte qui, aussi bien sur le plan procédural que sur le plan financier, est autant, voire plus strict que celui de la loi Marcellin. Si nous ne voulons pas, trente-neuf ans plus tard, voter un dispositif qui connaîtra le même sort que cette loi, il faut trouver de nouvelles incitations financières et, au moins, éviter de pénaliser les regroupements de communes. La commission des finances vous proposera donc un amendement garantissant aux communes qui se regroupent un montant de dotation de solidarité rurale (DSR) égal à celui qu'elles perçoivent actuellement. Il serait en effet absurde que des communes qui souhaitent se regrouper en soient dissuadées parce qu'elles franchiraient les seuils démographiques nécessaires pour bénéficier de certains avantages. Si c'était le cas, les communes qui se regroupent seraient pénalisées par une perte de dotations, et les regroupements bénéficieraient à l'ensemble des autres communes.
Votre commission des finances a aussi prévu les coordinations nécessaires avec la suppression de la taxe professionnelle, et des amendements de simplification, notamment de l'indexation des dotations de l'État aux collectivités territoriales.
Enfin, elle s'est saisie de l'article 35, en ce qu'il traite des cofinancements de projets par plusieurs collectivités territoriales. Dans la perspective du futur projet de loi répartissant les compétences entre les différentes catégories de collectivités territoriales, l'article 35 pose dès maintenant certaines orientations de principe. Après avoir été profondément modifié par la commission des lois, il prévoit désormais que : d'une part, « la pratique des financements croisés entre les collectivités territoriales est encadrée afin de répartir l'intervention publique en fonction de l'envergure des projets ou de la capacité du maître d'ouvrage à y participer » ; et d'autre part, « le rôle du département dans le soutien aux communes rurales sera confirmé ». La commission des finances considère, et ce point a d'ailleurs été relevé par notre rapporteur Jean-Patrick Courtois, qu'il s'agit d'une simple déclaration de principe, dépourvue de valeur normative. Elle préfère envisager, en fonction de l'envergure des projets et de la capacité du maître d'ouvrage à y participer, une intervention alternative de la région ou du département dans le financement d'un projet. Ce serait d'autant plus intéressant que les compétences des départements et des régions pourraient être strictement délimitées par le futur projet de loi, auquel cas le cumul de leurs participations financières ne se justifierait plus. Il paraît toutefois difficile, sans connaître le contenu de ce futur projet de loi sur les compétences, de s'engager aujourd'hui dans une déclaration de principe telle que proposée par l'article 35. Les principes que nous poserons aujourd'hui en matière de répartition de compétences pourront toujours être modifiés par le texte qui traitera précisément de ce sujet. C'est pourquoi votre commission n'a pas proposé d'amendements sur cette partie du texte.
Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle vous présentera, votre commission des finances a donné un avis favorable à l'adoption des dispositions du projet de loi dont elle s'est saisie. (Applaudissements à droite et sur de nombreux bancs au centre)
M. Alain Lambert, président de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation. - Sept ans, déjà, que le Constituant a promu la décentralisation comme oxygène de notre République indivisible. Pourtant la vitalité démocratique de ce grand dessein se heurte encore et toujours au carcan administratif, voire au centralisme bureaucratique. L'organisation territoriale de l'État n'a pas suivi la vision moderne d'une action publique plus proche du citoyen ; les transferts de compétences n'ont pas été accompagnés des traductions financières appropriées ; la clarification des financements et des compétences n'a pas répondu aux impératifs d'une démocratie locale efficiente. Or il n'y a pas de démocratie sans responsabilité claire. Et que devient la responsabilité quand le citoyen se perd dans le labyrinthe des compétences, des guichets, des imprimés redondants, des décisions enchevêtrées et des financements croisés ?
Le constat est partagé par tous. L'organisation décentralisée de notre République ne souffre pas d'un manque de diagnostics mais d'une absence de traitement. Comme cela a été dit : il est temps de décider !
Alors, décidons. Décidons en allant le plus loin possible dans la voie du consensus : l'enjeu est trop grand pour demeurer l'otage des querelles partisanes. Décidons avec pragmatisme, en nous inspirant des travaux de qualité dont nous disposons, au premier rang desquels ceux du rapporteur et les conclusions de la mission présidée par notre collègue Claude Belot et rapportées par Jacqueline Gourault et Yves Krattinger. Mais le pragmatisme n'interdit pas l'audace, et c'est le mérite du Président de la République et du Gouvernement d'avoir pris l'initiative d'une réforme ambitieuse.
Votre Délégation sénatoriale n'a pas pour rôle de se substituer aux commissions mais au contraire de leur apporter son appui et notamment de rechercher les plus vastes espaces de consensus supra-partisan. Elle a l'intention d'apporter sa contribution sur les questions fondamentales que cette réforme soulèvera, comme elle a d'ailleurs commencé à le faire sur les valeurs locatives. Elle le fera aussi en amont que possible, afin que, lors du dépôt d'un texte, le Sénat dispose déjà de l'analyse de l'une de ses composantes représentative de sa configuration politique.
C'est cependant, à titre personnel, que je m'exprimerai aujourd'hui car l'installation récente de votre Délégation ne lui a pas permis de débattre en amont de sujets relevant de ce projet de loi. Mes observations seront formulées à l'aune des principes impératifs de la décentralisation : la légitimité et l'efficacité. Ces principes sont au coeur de bien des dispositions proposées et je me limiterai à quatre illustrations.
D'abord, la recherche d'une meilleure assise démocratique des autorités locales, à commencer par l'élection au suffrage universel direct des délégués des communes dans les EPCI à fiscalité propre, qu'avait déjà proposée la mission Belot. C'était une nécessité eu égard à l'importance prise par l'intercommunalité ces dernières années et à l'ambition affichée de la renforcer. Pour le reste, veillons à ce que la question controversée des conseillers territoriaux n'affecte pas la qualité de nos travaux. Le texte sur le mode d'élection nous offrira un large espace de débat : votre Délégation entend bien contribuer à préparer ce rendez-vous.
Je salue également, toujours au nom des mêmes principes, les apports du projet de loi en matière d'intercommunalité et de regroupement de communes. Je pense par exemple à la création de communes déléguées au sein des communes nouvelles issues de fusion d'EPCI, solution habile pour concilier intercommunalité et proximité de l'action publique. Je m'interroge cependant, même si je comprends l'objectif de la commission des lois, sur la réduction d'un tiers du nombre de représentants du conseil général à la CDCI. Dans les départements ruraux, qui est tête de réseau des intercommunalités, sinon le conseil général ?
La mutualisation des services est un enjeu majeur au regard de l'impératif d'efficacité. Le projet de loi va dans le bon sens, mais reste encore un peu timide, d'autant que les contraintes du droit communautaire s'allègent.
Faut-il ainsi maintenir l'obligation de passer par un syndicat mixte pour la création d'une cantine commune à une école primaire, à un collège et à un lycée ? Il faut absolument traiter ces sujets.
Enfin, la légitimité et l'efficacité sortiront renforcées si des principes clairs permettent de clarifier les compétences.
Les financements croisés devront être encadrés car ils brouillent la vision du citoyen sur les responsabilités de chaque échelon public. La commission des lois souhaite, à juste titre, confirmer le rôle du département dans le soutien aux communes rurales. On pourrait utilement y ajouter les intercommunalités.
Vous avez dit, monsieur le ministre, qu'il ne fallait pas opposer l'État aux collectivités. C'est pourquoi il est d'autant plus urgent de redéfinir son rôle : il faut enfin choisir entre le rôle d'arbitre, qui est naturellement le sien, et celui d'acteur qui n'a plus lieu d'être avec les compétences transférées. En disant cela, je ne vise pas le ministère de l'intérieur. Quant aux compétences des collectivités, travaillons dans la concorde pour, l'année prochaine, parvenir à une clarification idéale. Le citoyen devra savoir qui fait quoi, qui finance et à quelle hauteur.
Enfin, il conviendrait de reconnaître la règle élémentaire du décideur-payeur. La séparation du maître d'oeuvre et du maître d'ouvrage doit être à la décentralisation ce qu'est la séparation de l'ordonnateur et du comptable aux finances publiques : un principe clé !
Comment conclure sans évoquer ce qui ne figure pas formellement dans les textes mais qui est à l'esprit de chacun : la place de l'État. Légitimité comme efficacité commandent qu'il joue le jeu de la décentralisation. L'organisation décentralisée de notre République a besoin d'un État fair-play et sincère. L'État fair-play, c'est celui qui accepte de tirer les conséquences d'un transfert de compétences en laissant aux autorités locales la responsabilité des décisions à prendre, c'est celui qui sait opter entre le rôle de contrôleur et celui de prescripteur. L'État fair-play, ce n'est donc pas celui qui confère une compétence pour imposer, le lendemain, ses propres objectifs par voie réglementaire. L'État sincère, c'est celui qui prend des engagements et qui les tient, c'est celui qui applique le principe de la compensation intégrale des dépenses qu'il engage par collectivités interposées et qui réalise les transferts de personnels correspondant aux compétences transférées. L'État sincère, c'est celui qui garantit aux collectivités le respect d'un cadre financier pluriannuel. Ce n'est donc pas celui qui invente une allocation personnalisée d'autonomie dont il n'assure qu'un tiers du financement, laissant aux conseils généraux une facture de 3 milliards. Ce n'est pas non plus celui qui crée des maisons départementales du handicap en conservant ses agents qui géraient les Cotorep. La rétention des personnels par l'État l'oblige à s'acquitter à la fois de la rémunération des agents qu'il conserve et de la compensation financière des dépenses des collectivités territoriales pour les agents qu'elles doivent recruter !
C'est donc ensemble, en ayant l'audace et la générosité de dépasser nos clivages, que nous moderniserons l'organisation territoriale de la République pour le plus grand bien de la démocratie. Je veux y croire car légitimité et efficacité nous rassemblent et transcendent tous les courants politiques. Héritiers de Tocqueville ou chantres du jacobinisme, nous avons tous un même devoir vis-à-vis de la Nation : nous devons être crédibles pour la rassurer et nous devons faire preuve de responsabilité pour mériter le mandat que nous avons reçu. (Applaudissements à droite et sur de nombreux bancs UC et RDSE)
présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - (Applaudissements sur les bancs CRC) Malgré les multiples critiques venant de tous horizons, le Président de la République nous a informés, le 31 décembre, qu'il était déterminé à mettre en oeuvre sa réforme des collectivités locales, à laquelle ne s'opposeraient, selon lui, que des conservatismes. Il avait d'ailleurs donné au comité Balladur une feuille de route très claire : casser l'autonomie des collectivités grâce à une reprise en main par l'État et à une réduction drastique des dépenses publiques. Les justifications les plus fallacieuses ont été utilisées pour convaincre : nos concitoyens attendaient cette réforme ! Outre qu'ils ont bien du mal à faire face à leur quotidien, ils ont estimé à 76 % d'entre eux que la réforme était incompréhensible et confuse tandis que 73 % refusent la suppression du département...
M. Éric Doligé. - Bonne nouvelle !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - ...et le transfert de ses compétences à d'autres échelons.
Deuxième argument : la France irait à contre-courant de l'Europe. Or, dans la plupart des pays européens, il y a trois niveaux de collectivités. Si la France compte un nombre très important de communes, elles sont le fruit de l'histoire et nos concitoyens les plébiscitent. Votre argument est d'autant plus spécieux que vous inventez de nouvelles configurations : métropoles, pôles métropolitains, et même une nouvelle collectivité devant se substituer à la région et aux départements qui la composent ! Vous tentez d'opposer nos concitoyens à leurs élus en affirmant que ces derniers coûtent cher. Or, pour l'essentiel, ils sont des bénévoles. L'argument est d'autant plus spécieux que vous ne nous dites pas combien coûteront les nouveaux conseillers territoriaux et leurs remplaçants. Il est à parier qu'ils coûteront plus cher qu'aujourd'hui.
Autre argument : avec les financements croisés, la gestion serait inextricable et confuse pour nos concitoyens. Mais sans eux, de nombreux projets ne verraient pas le jour. Ce sujet aurait d'ailleurs mérité une étude d'impact.
En revanche, les dernières lois de décentralisation de 2003 et 2004 ont confondu les rôles en transférant des responsabilités de l'État sans justification, si ce n'est le transfert de charges. Vous dénoncez un accroissement des dépenses locales et des impôts locaux mais il est de votre fait ! Votre politique sociale et économique est désastreuse, tandis que l'État se désengage et que les compétences transférées sont mal compensées, comme l'a d'ailleurs confirmé la Cour des comptes. Que dire en outre de la réduction des dotations nationales aux collectivités, de la fin du pacte de stabilité et de croissance, de la RGPP et de la suppression de la taxe professionnelle ? Enfin, nos concitoyens savent bien que les collectivités contribuent à la richesse nationale avec 73 % des investissements publics.
En réalité, vous n'ignorez rien de cela, monsieur le ministre, et votre discours n'a qu'un objectif : rassurer vos amis. Mais la présentation de votre réforme n'est pas sincère : son financement n'est pas prévu, du fait de la suppression de la taxe professionnelle. Vous voulez bouleverser le paysage institutionnel, en supprimant les départements et les communes, mais vous ne pouvez pas le reconnaître ni engager une nouvelle réforme constitutionnelle. Vous supprimez donc la compétence générale des départements et la spécificité de leurs élus. Vous voulez que les communes rejoignent des intercommunalités et leur transfèrent leurs compétences. Vous voulez mettre fin à l'autonomie des communes en créant de nouvelles communes et réorganiser notre territoire autour de métropoles, innovation phare, qui cumuleront l'essentiel des compétences et des moyens.
En même temps, vous supprimez ce qui fonctionne en matière de coopération volontaire. Certes, les collectivités territoriales doivent se moderniser. Mais cette réforme va à contresens, notamment parce qu'elle ne se penche pas sur la pertinence des différents niveaux de compétences, ce qui aurait contraint l'État à reconnaître qu'il a opéré des transferts abusifs et qu'il doit reprendre en charge les grands services publics nationaux pour restaurer l'égalité des citoyens. Tout regroupement de collectivités doit être volontaire. La commune doit être l'échelon premier de proximité, les décisions devant être prises selon le principe de subsidiarité.
Or, votre réforme contredit l'aspiration de nos concitoyens à plus de démocratie. Jamais, jusqu'ici, la libre administration des collectivités et leur droit à décider de leur politique n'avaient été mis en cause, même si les lois de décentralisation de 2003 et 2004 leur ont porté des coups. Les textes de 1982 voulaient instaurer plus de démocratie et de proximité, l'inverse de ce que vous faites aujourd'hui. Vous supprimez la compétence générale des départements et des régions alors qu'elle est consubstantielle de cette libre administration des collectivités. Avec cette réforme, c'est la fin de trente années de décentralisation et de démocratie locale. Vous prévoyez une recentralisation des décisions mais, à la différence de l'avant-1982, l'État a abandonné pour partie les grands services publics nationaux. Les collectivités seront, de fait, sous sa tutelle. Il pilotera tout mais il paiera de moins en moins.
Vous avez d'ailleurs réorganisé les services de l'État dans cette perspective : la région est devenue le premier échelon décentralisé de l'administration de l'État au lieu du département. Les décisions sont concentrées autour de super préfets, à l'image des directeurs des agences régionales d'hospitalisation.
La démocratie, c'est la reconnaissance des droits des citoyens, des personnels et des élus. Ce projet de loi est à mille lieues des budgets participatifs, de l'initiative législative des citoyens et des collectivités locales, du référendum d'initiative citoyenne. Vous préférez casser la souveraineté populaire et éloigner les populations des lieux de décisions alors qu'elles revendiquent la proximité.
Des élus, c'est le maire qui a la plus grande confiance des Français.
La création des conseillers territoriaux est caricaturale. Hybrides, puisqu' ils auront à la foi des pouvoirs dans les départements et les régions, et sans doute annonciateurs de la disparition des départements, élus dans des cantons dont nul ne connaît la configuration avant un découpage dont il y a tout à craindre. Le mode de scrutin que vous envisagez pousse à la bipolarisation et à la fin de la parité. Avec ces super élus professionnalisés cumulant deux mandats, on nie la démocratie locale.
Vous proclamez l'objectif de réduire les dépenses publiques locales, c'est-à-dire -appelons les choses par leur nom- de mettre en cause les services publics locaux. Le Président répète à qui veut l'entendre que notre pays a été moins éprouvé que beaucoup d'autres grâce à notre modèle social, contre lequel vous vous acharnez. Vous avez déjà réduit la capacité d'intervention de l'État dans sa mission de garant de la solidarité nationale. Avec cette réforme, vous voulez réduire celle des collectivités locales et casser ainsi les possibilités de relance que constituent leurs investissements. Le privé est absent de vos propos mais il est en embuscade. Vous tenez pour une anomalie insupportable que 73 % de l'investissement public et de nombreux services publics locaux échappent aux appétits des grands groupes privés et à leur logique de compétitivité et de rentabilité.
Les fonctionnaires territoriaux seront déplacés comme des pions au gré des regroupements et réorganisations. Vous ne prévoyez pas de les consulter et ne dites rien des conséquences de cette réforme sur leur statut. Le Président de la République se vante que l'État ait supprimé en un an 35 000 fonctionnaires et il déplore que les collectivités locales recrutent. Disposent-elles de trop de moyens ? Sont-ils trop nombreux, ces 1 750 000 agents publics territoriaux qui assurent au quotidien le service public ? Ceux qui ont travaillé ces dernières semaines dans des conditions très difficiles pour que le pays continue à fonctionner malgré la neige ? Sont-ils trop nombreux les agents des crèches ? Les TOS que vous avez décentralisés ? Excusez-moi, la liste est longue.
Oui, il faut moderniser et développer la fonction publique territoriale nationale dont le statut, depuis 1983, garantit la pérennité du service public. Derrière ce texte, qui traite pour l'essentiel de l'intercommunalité et de divers regroupements, se cachent des mesures extrêmement graves et beaucoup de non-dits. L'enjeu est énorme car ce texte est un vecteur d'un projet rompant avec notre histoire d'autonomie communale et de démocratie locale. Vous nous demandez un chèque en blanc puisque vous ne dévoilerez que plus tard les compétences des collectivités, les modes de scrutin et les découpages électoraux.
C'est inacceptable et nous nous opposerons sans compromis à cette réforme. (Applaudissements à gauche)
M. Hervé Maurey. - Le moment est venu d'aborder réellement une réforme essentielle de ce quinquennat : la réforme des collectivités locales, qualifiée par le Président de la République de « réforme ambitieuse qui renforcera les communes dans leur rôle ». J'espère qu'il en sera vraiment ainsi car je suis de ceux qui jugent cette réforme indispensable. Nous avons en effet beaucoup trop de strates territoriales alors qu'il y a quarante ans, nous ne comptions que la commune et le département. Plus personne ne se retrouve dans cet enchevêtrement de compétences invraisemblable, pas même les élus. C'est pourquoi il faut réformer la sacro-sainte clause générale de compétences, chère à certains. (Murmures improbateurs à gauche) Que tout le monde s'occupe de tout n'est certainement pas gage d'efficacité, de rationalité et de maîtrise des coûts.
La réforme est donc nécessaire et je regrette qu'à quelques semaines des élections régionales, certains tentent d'exploiter la peur du changement. (Approbation à droite ; protestations à gauche) J'entends, dans mon département, des élus expliquer que la réforme entraînera la disparition des communes, la disparition des départements, la fin des financements et, par là même, des projets et des investissements communaux ! (« Eh si ! » sur les bancs socialistes)
Mme Nicole Bricq. - Cela, c'est déjà fait !
M. Hervé Maurey. - Mais cette réforme est nécessaire si, et seulement si, elle rend plus lisible l'action publique, clarifie les compétences, simplifie les processus décisionnels, rationalise la gestion et même économise l'argent public. Je ne suis pas certain que la création d'un nouvel échelon, la métropole, aille vraiment dans ce sens...
Je regrette qu'une telle réforme soit l'objet de quatre textes distincts. Pourquoi ne pas avoir abordé globalement la question ? Certains mauvais esprits, dont je ne suis pas, pensent que c'est justement pour éviter que nous ayons cette vision globale que le Gouvernement procède ainsi. Je ne peux naturellement pas l'imaginer. (Sourires)
M. Jean-Jacques Mirassou. - Naïf !
M. Hervé Maurey. - Le Gouvernement propose aujourd'hui de créer le conseiller territorial. C'est la clé de voûte de la réforme : rapprocher le département et la région. Je n'ai pas, loin s'en faut, d'opposition de principe mais comment se prononcer sans connaître son mode d'élection, la taille de son territoire, ni les conditions dans lesquelles il exercera ce lourd mandat qui fera de lui un élu à temps plein et requerra un véritable statut, ni comment sera réglée la question de la parité ?
Le mode de scrutin envisagé par le Gouvernement, c'est-à-dire le scrutin uninominal à un tour avec une dosette de proportionnelle, n'est pas acceptable. (« Ah ! » sur les bancs socialistes) Contraire à toute notre tradition électorale et démocratique, c'est une machine à broyer le pluralisme politique pour imposer le bipartisme. Nous ne l'accepterons pas. Nous proposerons un mode d'élection juste et efficace...
M. Jean-Pierre Sueur. - Bonne idée !
M. Hervé Maurey. - ...qui concilie un scrutin uninominal, pour la représentation des territoires et un scrutin proportionnel qui assure le pluralisme politique, la représentation démographique et la parité. On pourrait ainsi créer des cantons de taille humaine sur la base des territoires et des bassins de vie dont les disparités démographiques seraient corrigées par le scrutin proportionnel.
Le sort de cet amendement conditionnera notre vote sur la création du conseiller territorial. Nous ne pouvons pas, vous le comprendrez, voter la création du conseiller territorial sur la seule base de l'article premier de ce projet de loi : il est un peu court. J'ajoute, pour dédramatiser le débat, que le conseiller territorial pourrait très bien ne pas être créé dans ce texte mais dans un texte ultérieur.
Nous regrettons aussi que ne soient pas abordées les conditions de désignation des conseillers communautaires et, par là même, le mode de scrutin des conseillers municipaux. J'en profite pour réaffirmer l'hostilité générale des élus de terrain à l'abaissement à 500 habitants du mode de scrutin actuellement applicable dans les communes de plus de 3 500 habitants. Tous les maires craignent à juste titre la politisation des élections et, par là même, de la vie municipale.
Pourquoi attendre plus d'un an pour se pencher sur la question de la répartition des compétences et se limiter dans ce texte à poser le principe de compétences exclusives avec celui des compétences partagées à titre exceptionnel ainsi que la capacité d'initiative ? Cette double exception pourrait nous ramener à la clause générale de compétences ; je souhaite des blocs de compétences bien définis dont on ne sorte qu'à titre réellement exceptionnel.
Un autre sujet me parait tout à fait essentiel, et je m'étonne de son absence de ce débat : le cumul des mandats.
M. Jean Arthuis. - Très bien !
M. Hervé Maurey. - Alors que les structures intercommunales jouent un rôle de plus en plus important que cette réforme va encore renforcer, les fonctions exercées au sein de ces structures doivent être intégrées dans le cumul des mandats et le mandat de simple conseiller municipal en être exclu.
Nous sommes à un moment décisif. S'il est indispensable d'entendre les élus, il ne faut pas vider le texte de sa substance. Une réformette serait la pire des choses. La voie est étroite, mais nous pouvons ensemble réaliser la réforme ambitieuse dont notre pays a besoin. Nous sommes prêts à vous y aider, monsieur le ministre, pour peu que vous nous entendiez. (Applaudissements au centre et sur plusieurs bancs à droite)
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous sommes pour la réforme, et ce depuis longtemps. En 1982, nous avons voté toutes les lois de décentralisation du gouvernement Mauroy. (Exclamations à droite) Certains discours de l'opposition d'alors mériteraient d'être relus ! (M. Jean-Louis Carrère le confirme vigoureusement)
Nous avons défendu la deuxième étape de la décentralisation, avec les lois de 1992 et 1999 sur l'intercommunalité. Aujourd'hui, une troisième étape est nécessaire. Ce texte marque-t-il cette étape ? (« Non ! » sur les bancs socialistes) Non, à l'évidence.
Prenons le schéma départemental de coopération intercommunale. Qui décide ? Le préfet.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Comme aujourd'hui.
M. Jean-Pierre Sueur. - Pour les métropoles ? Le préfet ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Comme aujourd'hui.
M. Jean-Pierre Sueur. - Les intercommunalités ? Les communes nouvelles ? Les fusions de départements, de régions ? Toujours le préfet !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Conformément aux lois de 1982 !
M. Jean-Pierre Sueur. - En 1981, François Mitterrand disait : « Ils veulent garder le pouvoir, nous voulons le rendre ». Aujourd'hui, vous voulez le reprendre ! (Applaudissements à gauche)
Certaines évolutions dans les collectivités vous déplaisent, et vous voulez y porter un coup d'arrêt. D'où cette proposition confuse, que vous avez bien du mal à défendre... Principale confusion : la création du conseiller territorial, que pas une association d'élus n'a demandée.
M. Brice Hortefeux, ministre. - Ce n'est pas surprenant...
M. Jean-Pierre Sueur. - Est-ce la tutelle du département sur la région, ou l'inverse ? En tous cas, c'est l'institutionnalisation du cumul des mandats ! Les élus de la majorité ont beau déployer des trésors d'euphémismes, des chefs-d'oeuvre de litotes, difficile de défendre cette innovation ! Même le texte de M. Longuet dans Les Échos est d'une confusion rare, lui d'ordinaire si clair !
M. Copé parle d'une première étape, avant la fusion des administrations départementales et régionales... Si vous comptez supprimer le département, dites-le donc ouvertement !
M. Josselin de Rohan. - Vous ne savez pas lire !
M. Jean-Pierre Sueur. - Cette réforme, c'est le sparadrap du capitaine Haddock : vous n'arrivez pas à vous en dépêtrer ! Elle est trop contraire au cartésianisme, à l'esprit de clarté des auteurs classiques... et Hergé est de ceux-là.
Oui à la réforme, et par conséquent, non au statu quo.
M. Josselin de Rohan. - Pas mal, comme sophisme !
M. Jean-Pierre Sueur. - Nos amendements ne visent pas uniquement à s'opposer mais à proposer, à dessiner ce que pourrait être la troisième étape de la décentralisation.
Nous reprenons l'intuition de Pierre Mauroy de métropoles fortes, élues au scrutin universel direct.
M. Jean-Louis Carrère. - Peut-être le Gouvernement vous écoutera-t-il ?
M. Jean-Pierre Sueur. - En même temps, nous défendrons bec et ongles l'existence des communes à l'intérieur des métropoles, car les maires ne sauraient être cantonnés aux cérémonies du 14 juillet et à l'état civil !
M. Josselin de Rohan. - D'où sortez-vous ça ?
M. Adrien Gouteyron. - C'est tout le contraire !
M. Jean-Pierre Sueur. - Dans les scrutins départementaux, il faut prendre en compte le poids croissant des communautés, espaces de solidarité inscrits dans le paysage. Nous voulons la parité dans les 36 700 communes. Nous proposons d'abaisser le seuil pour les communautés urbaines à 300 000 habitants : nous voulons des territoires urbains structurés, comme les territoires ruraux, par les communautés de communes, révolution tranquille menée à bien par la gauche...
La justice est bien absente de votre texte. La péréquation est pourtant indispensable ! Le statu quo n'est plus possible : il faut plus de solidarité. Autre mot absent du texte... (M. Adrien Gouteyron s'exclame)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Sur la taxe professionnelle, c'est le Sénat qui a renforcé la péréquation !
M. Jean-Pierre Sueur. - A la confusion, au nouveau jacobinisme, au retour de l'étatisme, nous préférons des ambitions fortes pour les territoires, les solidarités locales, le respect des libertés locales républicaines. (« Bravo ! » et applaudissements prolongés à gauche)
M. Jean-Michel Baylet. - Le comité pour la réforme des collectivités locales et la mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités locales ont dressé le bilan de la décentralisation, initiée, non sans mal, en 1982 et approfondie par les lois de 2003 et 2004 -que nous avons votées. S'appuyant davantage, hélas, sur le rapport Balladur que sur la mission de Claude Belot, le Gouvernement nous soumet une série de textes qui bouleversent le paysage institutionnel local.
J'ai souvent insisté sur la nécessité de clarifier les compétences et la fiscalité locale, et de renforcer la démocratie de proximité. Mais était-il opportun d'engager un si vaste chantier en période de crise ? De toucher à la représentativité des élus locaux, à trois mois des régionales ? Ne pouviez-vous au moins prévoir un calendrier d'examen cohérent ?
Guidée par des impératifs politiciens, cette entreprise est menée en dépit du bon sens. D'une clarification préalable des compétences aurait pu découler une vraie réforme, consensuelle. Au lieu de cela, nous avons dû nous prononcer à la hâte sur la taxe professionnelle, et ce n'est qu'en 2011 que nous aborderons la question des compétences. L'article 35 se contente de poser des principes sans portée normative, au risque de se voir censuré par le Conseil constitutionnel.
Malgré les réserves, voire l'opposition des associations d'élus et de nombreux membres de la majorité, vous mettez les parlementaires au pied du mur. L'évaporation des départements et des communes, revendiquée par certains, est clairement en cours, avec le rapprochement des communes et de l'intercommunalité d'une part, du département et de la région d'autre part. L'achèvement de la carte intercommunale ne doit pas conduire à diluer complètement les communes ! Les débats en commission ont montré la difficulté de trouver une juste représentation des communes au sein des conseils communautaires. Il faudra être vigilant, d'autant que la métropole va, de son côté, absorber des communes qui perdront de leurs compétences et de leur autonomie financière.
Les pouvoirs exorbitants du préfet en matière de création de communes nouvelles ou de schéma départemental de coopération intercommunale signent une tentative de recentralisation. La concertation avec les élus doit être au centre de la réorganisation territoriale : sans elle, point de démocratisation.
Les articles 12 et 13, qui favorisent le regroupement des régions et des départements, ajoutés au dispositif de captation des compétences départementales par les métropoles, menacent l'existence même des départements. L'argument du mille-feuille territorial, derrière lequel vous vous retranchez, est fallacieux ; d'autant que la création des métropoles ne va rien simplifier. C'est une véritable pièce montée que vous nous proposez.
Il faut rationaliser la dépense publique, dites-vous ; les élus coûteraient trop cher et seraient trop dépensiers. L'Association des départements de France (ADF) soutient à raison que cette rationalisation repose avant tout sur une bonne répartition des compétences -par laquelle vous auriez dû commencer. Selon une étude de la même ADF, les surcoûts sont liés à l'existence des financements croisés, qui sont pour beaucoup à l'initiative de l'État. Je pense évidemment à la ligne à grande vitesse en Poitou-Charentes, Aquitaine et Midi-Pyrénées, que vous nous demandez de financer à 50 % tout en stigmatisant les financements croisés... En d'autres temps, l'État a assumé la ligne Paris-Lyon-Marseille... J'ajoute que les financements croisés sont souvent indispensables ; la commission des lois a bien fait de vouloir les encadrer plutôt que les supprimer.
Après le premier chèque en blanc qu'a signé la majorité en votant le texte -et pas dans les meilleures conditions- organisant la concomitance du renouvellement des conseils généraux et régionaux, voici la deuxième étape, la création du conseiller territorial. L'éclatement en trois textes distincts ne permet pas un vrai débat démocratique. Nous ne connaissons à ce jour ni le nombre de ces nouveaux conseillers, ni leur mode d'élection. Le marchandage auquel se livrent le Gouvernement et le groupe centriste autour de la bonne dose de proportionnelle est attendu, mais peu respectueux de la démocratie parlementaire.
Le Gouvernement organise une extraordinaire confusion institutionnelle en inventant un élu censé représenter la proximité et dans le même temps assurer une mission de développement stratégique ; c'est beaucoup pour un seul homme. Quoiqu'on dise, les conseillers territoriaux ne seront pas des élus de proximité. L'inconstitutionnalité de la création d'un élu représentant deux collectivités sonnera peut-être la fin de ce projet détestable.
La France est riche de ses 500 000 élus locaux, dont l'existence fonde la démocratie locale et l'action le développement de nos territoires. Votre réforme, depuis le début, porte atteinte aux fondements de notre République. Hier, la réforme de la taxe professionnelle faisait peu de cas du principe d'autonomie fiscale ; aujourd'hui, ce texte risque de mettre bas nos équilibres républicains ; demain, la représentativité écartelée du conseiller territorial ajoutera une incertitude constitutionnelle. Les radicaux de gauche n'approuveront pas ce texte de démantèlement de la décentralisation. (Applaudissements à gauche et sur les bancs RDSE)
M. Jean Louis Masson. - Les propositions du comité Balladur sont globalement pertinentes, innovantes même s'agissant des rapports entre les départements et les régions ; la suppression de la clause de compétence générale devrait en particulier éviter une concurrence stérile. Et le remplacement des conseillers généraux et régionaux par les conseillers territoriaux garantira une meilleure coordination.
Il était urgent de faire évoluer notre organisation territoriale. La décentralisation a en effet multiplié les féodalités locales. (Mouvements divers sur les bancs socialistes) Beaucoup de présidents de conseil général ou régional se comportent en petits seigneurs qui entretiennent conflits de voisinage et querelles de préséance...
M. Jean-Louis Carrère. - Surtout depuis qu'ils ne sont plus de votre bord !
M. Jean Louis Masson. - ...et sacrifient souvent l'intérêt général au profit des intérêts de leur collectivité, quand ce n'est pas des leurs ou de leur vanité personnelle.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Nul !
M. Jean Louis Masson. - J'approuve ainsi sans réserve les conclusions du rapport Balladur sur ces points. Mais je m'oppose très fermement au mode de scrutin que le Gouvernement et le Président de la République voudraient imposer. Il ne faut pas que cette excellente réforme soit dévoyée par des manipulations politiciennes. (« Ah ! » sur les bancs socialistes) Je regrette enfin que ne soit pas interdit le cumul d'un mandat parlementaire et d'une fonction exécutive locale, qui sont l'un et l'autre des activités à plein temps.
La séance, suspendue à 16 h 50, reprend à 17 heures.
présidence de M. Gérard Larcher