M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Cédric Chevalier. Dans cet esprit de reconnaissance et de solidarité, le Gouvernement entend-il inscrire cet hommage dans la durée, sous la forme d’un rendez-vous annuel de mémoire nationale, afin de permettre aux Français de se souvenir, ensemble, des vies brisées par cette pandémie ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Cédric Chevalier, votre question nous rappelle que nous sommes entrés dans une nouvelle ère, celle des chocs externes : crises sanitaires, à l’image du covid-19, mais également chocs géopolitiques ou inflationnistes, à l’image de l’augmentation des prix alimentaires et énergétiques à laquelle nous assistons aujourd’hui. Tout cela nous oblige à nous poser la question fondamentale de la résilience nationale.
Votre proposition, consistant à instaurer un hommage national annuel aux victimes de la pandémie du covid-19, touche à un sujet essentiel : la mémoire collective. Nous nous souvenons tous de l’endroit où nous étions quand le Président de la République a annoncé le confinement et que le pays s’est arrêté. Vous l’avez rappelé, des familles ont perdu des proches sans pouvoir leur dire adieu, ce qui a provoqué des traumatismes intimes et collectifs, qui appellent un geste fort de la République.
Un hommage solennel, inscrit durablement dans notre calendrier républicain, serait un acte de reconnaissance, d’unité et de résilience nationales. Il pourrait rassembler autour de notre histoire récente nos douleurs partagées et, surtout, ce que nous avons appris ensemble. Ce serait également une manière de réaffirmer le rôle de l’État, en particulier de nos élus placés en première ligne – je pense aux maires –, comme garants du lien social et de la mémoire nationale.
Cette mémoire ne doit pas être figée, elle doit aussi nous permettre de tirer des leçons pour améliorer notre capacité à affronter les chocs externes.
Sur votre proposition d’instaurer une journée nationale d’hommage, je ne peux répondre ni m’engager formellement au nom du Gouvernement. En revanche, je peux vous dire que le Gouvernement souhaite qu’un débat puisse se tenir sur ce sujet.
Cette question mérite une réflexion collective, digne, à la hauteur de l’impact qu’a eu la pandémie sur notre société. C’est dans cet esprit d’écoute et de dialogue qu’il appelle à l’engagement de cette discussion, afin d’examiner avec vous les formes de reconnaissance et de mémoire les plus justes et les plus à même de nous rassembler.
délai de traitement des dossiers par la maison départementale des personnes handicapées 92
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, auteure de la question n° 421, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l’autonomie et du handicap.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur les graves difficultés que connaît la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du département dont je suis élue, les Hauts-de-Seine, et sur la détresse de ses usagers.
Alors que le délai d’instruction d’un dossier ne devrait officiellement pas excéder quatre mois, il a atteint à la MDPH des Hauts-de-Seine, lors du troisième trimestre de 2024, huit mois et demi en moyenne, et parfois même plus de douze mois !
Ces délais de traitement excessifs résultent de moyens notoirement insuffisants. Pour fonctionner correctement, la structure devrait compter quinze médecins ; or ils ne sont que dix…
Des opérations « coup de poing » ont été menées pour absorber les dossiers en attente, au détriment des rendez-vous et des visites à domicile. Forcément, la satisfaction des usagers a chuté, passant de 70 % en 2022 à 44 % en 2023. En outre, les conditions de travail du personnel se dégradent.
Vendredi dernier, lors d’un déplacement dans les Hauts-de-Seine consacré au sujet de la simplification administrative, le Premier ministre a rappelé que les familles confrontées au handicap faisaient face à un « parcours du combattant » et a souligné l’ardente nécessité qui s’impose aux pouvoirs publics : réduire la complexité administrative, afin de rendre effectif l’accès aux droits.
Madame la ministre, à l’heure où nous célébrons les 20 ans de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dite loi Handicap, envisagez-vous un plan d’urgence permettant de garantir un meilleur fonctionnement de la maison départementale des personnes handicapées des Hauts-de-Seine, afin d’éviter à nos concitoyens en situation de handicap de subir une double peine ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Aeschlimann, depuis leur création en 2006, les MDPH ont vu leur activité tripler. Cette tendance se poursuit, d’où une forte augmentation du nombre de dossiers à traiter.
En 2023, la MDPH des Hauts-de-Seine a ainsi enregistré une augmentation du nombre de demandes de plus de 25 % par rapport à 2022. Le nombre de postes budgétaires a connu, parallèlement, une augmentation progressive, mais les recrutements sur les postes vacants restent difficiles. L’équipe pluridisciplinaire d’évaluation, qui représente 59 % des postes budgétaires, est particulièrement touchée par ces difficultés de recrutement.
Bien que la réglementation impose de traiter les dossiers en quatre mois au maximum, ce qui est déjà long, le délai national moyen de traitement s’élevait à 4,7 mois au deuxième trimestre 2024, avec des écarts importants selon les territoires et la complexité des dossiers ; les dossiers relatifs à la prestation de compensation du handicap (PCH), par exemple, nécessitent un traitement pouvant durer jusqu’à 5,9 mois. On se demande comment font les familles pendant ce temps : s’arrêtent-elles de travailler ou s’endettent-elles pour pouvoir rester auprès des personnes vulnérables, en attendant la réponse des MDPH, même si les prestations sont rétroactives ?
L’État tente de répondre à ces défis. En vertu de la loi du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, 15 millions d’euros supplémentaires par an ont été alloués aux MDPH. Un décret du 29 juin 2021 garantit ainsi un niveau supplémentaire de financement d’au moins 10 % pour chaque MDPH. Des actions sont également menées pour réduire les délais et améliorer la qualité du service, notamment au travers de la garantie délai.
Objectivement, cela n’est pas suffisant, mais en 2025 la MDPH des Hauts-de-Seine devrait profiter de ces mesures pour optimiser son fonctionnement.
La réduction des délais et l’amélioration de l’équité de traitement restent des priorités du Gouvernement. Des simplifications du parcours sont en cours d’étude, ainsi que le Premier ministre l’a indiqué lors de son déplacement dans votre département, madame la sénatrice.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Une force opérationnelle, ou task force, a été constituée pour traiter ce sujet. Compte tenu de l’importance de la question des délais pour les familles, je vous propose de poursuivre cette discussion ultérieurement, madame la sénatrice.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour la réplique.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la ministre, je prends acte de ces bonnes nouvelles. Je connais votre attention et votre mobilisation sur ce sujet. C’est avec plaisir que je viendrai vous voir pour faire avancer ce dossier.
situation particulière des assistants familiaux recrutés par les départements
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, auteure de la question n° 423, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Mme Laurence Muller-Bronn. Madame la ministre, ma question concerne la situation des assistants familiaux employés par les départements et qui demandent la rupture de leur contrat de travail.
De plus en plus d’assistants familiaux sollicitent le retrait de leur agrément par les services du département, dans la perspective de rompre leurs contrats de travail, afin de pouvoir bénéficier d’indemnités de licenciement et des allocations d’assurance chômage.
Dans les faits, le retrait de l’agrément constitue aujourd’hui le seul moyen de rompre lesdits contrats de travail. Certes, il n’ouvre pas droit au versement d’une indemnité de licenciement, mais il permet de percevoir les allocations de retour à l’emploi.
Ce procédé place les départements dans une situation confuse et surtout contraire à leur mission.
Dans un jugement du 6 octobre 2023, le tribunal administratif de Melun a considéré que le courrier envoyé par un assistant familial dans lequel celui-ci ne renonce qu’à son agrément ne peut être considéré comme une lettre de démission.
Toutefois, dès lors que le département fait droit à la demande de l’assistant familial et retire son agrément, ce qu’il n’est pas tenu de faire, il doit procéder, comme employeur, en vertu de l’article L. 423-8 du code de l’action sociale et des familles, au licenciement de l’intéressé. Il s’agit alors d’une rupture du contrat de travail sur l’initiative de l’employeur, qui ouvre droit aux indemnités.
Face aux demandes de plus en plus fréquentes de ce type, les départements ont deux options : soit ils refusent la demande de retrait de l’agrément, au risque de mettre en péril l’accueil des mineurs par l’assistant familial forcé de poursuivre son travail ; soit ils procèdent au retrait de l’agrément, ce qui entraîne le licenciement du demandeur.
Or, dans ce cas, les départements employeurs doivent, d’une part, respecter la procédure de licenciement, qui implique la saisine de la commission consultative paritaire et, d’autre part, verser une indemnité de licenciement ainsi que, le cas échéant, des allocations de retour à l’emploi.
Ainsi, en l’état actuel des textes et de la jurisprudence, un assistant familial souhaitant démissionner peut demander le retrait de son agrément pour bénéficier ensuite de l’ensemble des droits liés au licenciement.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Laurence Muller-Bronn. Madame la ministre, quelles décisions envisagez-vous de prendre pour clarifier cette situation ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Muller-Bronn, l’agrément d’un assistant familial peut être retiré si les conditions de son octroi cessent d’être remplies. Ces conditions sont les suivantes : présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif ; passer un examen médical ayant pour objet de vérifier que son état de santé lui permet d’accueillir habituellement des mineurs ; disposer d’un logement.
Si ces conditions ne sont plus remplies, le président du conseil départemental peut procéder au retrait de l’agrément après avis de la commission consultative. Cette décision doit être motivée et collégiale, et elle est susceptible de recours. L’assistant familial qui fait l’objet d’un retrait d’agrément ne peut plus exercer sa profession et ses employeurs doivent alors le licencier.
Le souhait d’un assistant familial de se voir retirer son agrément ne constitue pas un motif légitime de retrait d’agrément. L’assistant familial ne peut être à l’initiative d’un retrait d’agrément, et il ne peut être mis fin au contrat que par rupture conventionnelle ou par démission.
Madame la sénatrice, le Gouvernement est conscient des difficultés que les départements rencontrent dans ces situations. Cette question sera soulevée dans le cadre de travaux à venir sur les assistants familiaux, afin d’envisager une évolution de la réglementation. En effet, le Gouvernement envisage de lancer, au cours du semestre en cours, une concertation avec les départements et les associations professionnelles, afin d’identifier des réponses concrètes et opérationnelles aux besoins des assistants familiaux.
protection de l’enfance
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, auteure de la question n° 296, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Mme Michelle Gréaume. Madame la ministre, plusieurs événements tragiques récents ont mis en lumière la situation dramatique, les failles et les dysfonctionnements de notre système de protection de l’enfance.
Je pense d’abord au procès du drame d’Amandine, jeune fille de 13 ans morte de faim et à la suite des mauvais traitements infligés par sa mère. Comment un tel drame a-t-il pu se produire malgré les signalements répétés aux services sociaux ? Pourquoi l’État n’a-t-il pas pu ou su protéger cette enfant ? Je pense ensuite à l’affaire Le Scouarnec. Comment un ex-chirurgien, accusé de viols et d’agressions sexuelles sur près de 300 victimes, a-t-il pu passer aussi longtemps sous les radars ?
Ces questions nous amènent tous à nous interroger. Depuis des années, magistrats, professionnels, élus et familles d’accueil tirent la sonnette d’alarme pour appeler notre attention sur l’état de la protection de l’enfance.
En octobre 2024, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a confirmé ce diagnostic alarmant. Le 28 janvier dernier, la Défenseure des droits a également dénoncé la dégradation préoccupante de la protection de l’enfance, soulignant que cette situation portait atteinte à l’intérêt supérieur et aux droits fondamentaux des enfants.
Près de 400 000 mineurs ou jeunes majeurs sont pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE), mais celle-ci peine à leur apporter la protection et l’aide nécessaires. Quelque 30 000 postes sont vacants dans les établissements du secteur médico-social, et 70 % des juges interrogés déclarent avoir déjà renoncé à placer des enfants faute de solution adéquate. En outre, l’accès aux soins n’est pas pleinement garanti.
Les départements, étranglés financièrement par les baisses de dotations et les transferts de charges non compensés, peinent à assumer leurs responsabilités en la matière.
La responsabilité de l’État, qui ne dispose même plus d’un ministère de plein exercice dédié à cette cause, est flagrante. L’obsession sécuritaire à l’encontre des mineurs a pris le pas sur la responsabilité de protéger les plus faibles, en particulier les enfants.
Madame la ministre, quelles dispositions le Gouvernement compte-t-il prendre pour garantir à chaque enfant la protection à laquelle il a droit ? Quels moyens humains et financiers seront consacrés à cette mission essentielle ?
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Michelle Gréaume. Quelles suites comptez-vous donner aux recommandations de la Défenseure des droits ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Michelle Gréaume, vos propos illustrent l’urgence de la refondation profonde du système de l’aide sociale à l’enfance. On ne peut plus continuer comme cela.
Le Gouvernement a décidé d’agir en mettant l’accent sur le renforcement de la prévention et le soutien à la parentalité. À titre personnel, j’insiste sur le rôle des pères, car les mères sont souvent laissées en première ligne.
Un plan de prévention périnatale sera déployé, incluant un accompagnement à domicile et une contractualisation avec les départements. L’objectif est de soutenir de manière ciblée les familles en difficulté, qu’il est nécessaire de mieux identifier. Nous devons absolument éviter que des situations de vulnérabilité ne débouchent sur des placements d’enfants.
Parallèlement, à court terme, nous renforçons les mesures de sécurisation et améliorons les conditions de placement, dont chacun connaît les limites.
Il nous faut également assurer un meilleur suivi des enfants confiés à l’ASE, ce qui passe par des contrôles accrus des établissements médico-sociaux et des évaluations rigoureuses. Il faut notamment revoir les normes d’accueil applicables aux pouponnières, au sujet desquelles certains témoignages sont terrifiants.
Dans le domaine de la santé, un bilan psychologique et somatique sera systématiquement réalisé dès la prise en charge des enfants, conformément au souhait de Mme Vautrin.
Le placement à dimension familiale doit être privilégié pour offrir aux enfants un environnement stable et chaleureux. Nous devons poursuivre la simplification des démarches permettant de recruter des assistants familiaux. La révision des modalités d’adoption complétera également cette démarche, afin de sécuriser durablement le parcours des enfants vulnérables.
Il est indispensable de repenser la gouvernance pour assurer une coordination optimale des actions. Un comité des financeurs en lien avec les départements se tiendra à la fin du mois d’avril, et le comité interministériel à l’enfance réunira, durant l’été, les ministères de la justice, de l’éducation nationale, des familles et de la santé.
Le Gouvernement mesure la gravité et l’urgence de la situation.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Nous nous engageons à mobiliser l’ensemble des moyens humains et financiers nécessaires pour améliorer les choses.
conséquences de la réduction des contrats « parcours emploi compétences » pour les collectivités territoriales
M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, auteure de la question n° 447, transmise à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi.
Mme Amel Gacquerre. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur l’annonce de la réduction drastique du nombre des contrats aidés « parcours emploi compétences » (PEC) au sein des collectivités territoriales.
Depuis le 1er janvier 2018, les contrats aidés dans les collectivités et associations ont été transformés en PEC, afin de faciliter l’insertion professionnelle des personnes les plus éloignées de l’emploi. Pour des milliers de citoyens, ces contrats représentent encore aujourd’hui l’unique opportunité d’accéder à un emploi.
Ils sont essentiels pour permettre à de nombreuses associations, mairies, départements ou régions d’assurer des missions indispensables de service public. Ils concernent des milliers d’agents d’accueil, de restauration scolaire, de service technique, qui agissent au plus près des habitants.
Ils constituent donc un outil majeur pour les collectivités territoriales, notamment rurales, dont les marges de manœuvre sont financièrement restreintes, alors que les besoins de service public n’ont jamais été aussi importants.
Malgré cela, on constate depuis plusieurs années une réduction significative du nombre de contrats PEC à l’échelle nationale. En 2023, leur nombre a diminué de 25 %, soit de 31 700 contrats, par rapport à 2022.
Cette dynamique baissière est observable dans le Pas-de-Calais, le département dont je suis élue, alors même que le taux de chômage y est toujours supérieur à celui de la moyenne nationale. Par exemple, un maire m’a interpellée il y a quelques jours, car en 2025 le nombre de nouveaux contrats PEC a baissé de 75 % dans sa commune.
Madame la ministre, le maintien du nombre de PEC étant indispensable pour assurer la continuité des services publics, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour soutenir les collectivités territoriales face à l’annonce de leur réduction brutale et sévère ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Madame la sénatrice Gacquerre, je le répète, en ce qui concerne les politiques d’insertion dans l’emploi, il faut sortir d’une logique d’entrée pour adopter une logique de sortie et s’assurer d’un meilleur accompagnement des personnes.
Je tiens à rappeler les chiffres. Sans même parler d’emploi durable, à la sortie des contrats aidés, 54 % des personnes trouvent un emploi, avec une forte différence entre le secteur marchand et le secteur non marchand ; en effet, plus on est proche de l’entreprise, plus les chances de trouver un emploi sont fortes. Ce taux atteint 45 % pour l’insertion par l’activité économique (IAE), et 52 % pour les contrats d’engagement jeune.
Plutôt que de toujours adopter des logiques attachées à l’entrée dans les dispositifs, qui ne permettent pas toujours de répondre aux questions, il faut regarder ces chiffres.
Dans le cadre d’une réduction des crédits de la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux », j’ai souhaité améliorer les solutions structurantes de sortie et l’accompagnement. Je ne sous-estime pas la difficulté de l’équation budgétaire des collectivités territoriales, mais, en tant que ministre chargée du travail et de l’emploi, je dois d’abord m’occuper de la logique d’accompagnement de ces personnes qui cherchent un emploi.
Cette année, j’ai souhaité laisser aux préfets beaucoup plus de souplesse pour leur permettre de répartir les moyens entre l’insertion par l’activité économique, les entreprises adaptées et les contrats aidés. Plutôt que d’obéir à des ordres venus de Paris, ils doivent décider en fonction des acteurs présents sur les territoires, qui peuvent localement améliorer les politiques d’accompagnement.
Encore une fois, sortons de la logique centrée sur les entrées, qui consiste à comptabiliser le nombre d’emplois aidés, pour regarder combien de personnes sortent avec un emploi durable des emplois aidés, de l’insertion par l’activité économique ou des contrats d’engagement jeune. C’est ainsi que nous répondrons au défi de l’emploi des personnes les plus éloignées du monde du travail et de nos jeunes.
M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, pour la réplique.
Mme Amel Gacquerre. Madame la ministre, je vous remercie de vos explications.
Toutefois, alors que je vous parle de personnes très éloignées de l’emploi et d’enjeux de service public, vous me répondez en évoquant les logiques d’entrée et de sortie. Il faut certes réfléchir à cette question, mais sur le terrain il y a un véritable enjeu : si ces personnes ne sont pas accompagnées et recrutées au sein de nos collectivités ou d’associations, elles ne trouvent pas d’emploi.
prise en charge des détenus en établissement de santé psychiatrique
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, auteur de la question n° 441, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.
M. Franck Menonville. Madame la ministre, ma question porte sur la sécurité du personnel soignant lors des transfèrements de détenus vers les établissements psychiatriques.
Les troubles psychiatriques sont trois fois plus élevés parmi la population carcérale que dans le reste de la population. De ce fait, la prise en charge médicale de ces patients au statut particulier est cruciale.
Si les détenus bénéficient systématiquement d’escortes sécurisées lors de consultations hospitalières conventionnelles, il n’en va pas de même lorsqu’ils présentent des troubles psychiatriques nécessitant une hospitalisation.
Lorsqu’il signe un arrêté de soins sans consentement sur décision d’un représentant de l’État (SDRE), le préfet détermine la nature de l’escorte et, force est de le constater, les soignants sont très fréquemment contraints d’assurer le transport de ces patients, s’exposant ainsi à des risques majeurs pour leur sécurité.
En outre, en cas d’hospitalisation, un transfert de responsabilité s’opère entre le directeur de l’établissement pénitentiaire et celui du centre hospitalier. Le détenu devenu patient dispose de droits régis par le code de la santé publique et non plus par le code pénitentiaire.
Néanmoins, aucune information relative à la nature de la détention ou à la dangerosité des individus n’est communiquée aux personnels de santé. Ainsi, dans un contexte tendu, alors que l’hôpital public est déjà confronté à des problèmes de recrutement et de sous-effectif, la dangerosité particulièrement élevée de ce type d’opérations se révèle de plus en plus préoccupante.
Madame la ministre, le personnel soignant a besoin d’être rassuré. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour renforcer leur sécurité tant lors des transfèrements qu’au cours de l’hospitalisation en psychiatrie des détenus ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi. Monsieur le sénateur Franck Menonville, vous m’interrogez sur la sécurité des soignants au contact de détenus qui nécessitent un suivi psychiatrique.
Dans le cadre de la dernière feuille de route Santé des personnes placées sous main de justice, une action est consacrée à « l’amélioration du parcours de soins en santé mentale sur […] trois niveaux ».
Vous le savez, bien que la prise en charge des personnes détenues nécessitant des soins psychiatriques sans consentement en hospitalisation complète soit en priorité orientée vers des unités d’hospitalisation spécialement aménagées (UHSA), un grand nombre d’entre elles fait l’objet d’une prise en charge dans d’autres services au sein d’établissements de santé autorisés en psychiatrie.
Cela nous a conduits à publier, à l’automne dernier, un guide de bonnes pratiques pour la prise en charge en établissement de santé autorisé en psychiatrie des personnes détenues hospitalisées en soins sans consentement.
Ce guide a été réalisé en étroite concertation avec tous les professionnels, notamment les représentants de l’Association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire (ASPMP), des membres de la commission nationale de psychiatrie (CNP) et de la sous-commission psychiatrie médico-légale, des représentants de l’association des établissements du service public de santé mentale (ADESM).
Il permet d’accompagner les professionnels et les directions hospitalières des établissements autorisés en psychiatrie amenés à prendre en charge des patients détenus, en apportant des réponses concrètes à chacune des difficultés rencontrées. Il rappelle notamment les règles applicables en matière d’escorte, ainsi que les modalités d’application des droits fondamentaux des patients.
Parallèlement, le ministre de la santé copilote avec le ministre de la justice le déploiement de la seconde tranche des UHSA, avec la construction de trois nouvelles unités. Celles-ci permettront la création de 160 lits supplémentaires, s’ajoutant aux 440 lits déjà existants.
Enfin, il faut souligner les travaux parlementaires sur ce sujet. La mission d’évaluation de la prise en charge des troubles psychiques des personnes placées sous main de justice, dont Mmes Josiane Corneloup et Élise Leboucher sont les rapporteures, permettra aussi d’appuyer l’action de l’État.
aide au financement du permis de conduire pour les apprentis de moins de 18 ans