Au total, on a complexifié un dispositif qui était au départ assez simple et qui a été voté par une très large majorité à l’Assemblée nationale, sur une base transpartisane, chaque groupe politique s’exprimant en faveur de cette interdiction totale.
L’interdiction pure et simple de vente aux particuliers n’empêcherait pas les usages médicaux et professionnels. Elle serait de nature à simplifier le droit. Enfin, elle ferait écho à tous les arrêtés visant à interdire la consommation et la vente de protoxyde d’azote qui ont été pris par des collectivités, comme Saint-Ouen, Marseille, Montpellier ou encore Dijon.
M. le président. L’amendement n° 10 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du premier alinéa, le mot : « mineur » est remplacé par le mot : « particulier » ;
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à interdire la vente de protoxyde d’azote aux particuliers.
Vous l’avez dit vous-même, monsieur le ministre, ce produit soulève un problème de santé publique. Ses effets sont graves et croissants. D’ailleurs, les hôpitaux rapportent une explosion des atteintes neurologiques sévères en 2022. Le protoxyde d’azote serait ainsi à l’origine de 90 % des cas d’intoxication des jeunes de 16 à 24 ans.
Autre constat, l’interdiction actuelle est inefficace – je n’y reviendrai pas. Nous proposons donc une solution simple et utile : l’interdiction de la vente aux particuliers. Cette mesure permettrait de réduire fortement l’accès au produit, alors que, aujourd’hui, plus de 50 % des grandes surfaces et des sites de vente en ligne le proposent toujours.
Cette interdiction contribuerait à améliorer la protection de la santé publique. En limitant l’accès aux professionnels, nous réduirions l’exposition des jeunes et la banalisation du produit.
Vous parliez tout à l’heure de signal, monsieur le ministre. Le signal, c’est que l’Irlande et les Pays-Bas, qui ont récemment adopté cette mesure, ont constaté une baisse de 30 % des intoxications en un an !
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Grand, Rochette et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. A. Marc, Wattebled, Capus et Brault, Mmes Bourcier et Lermytte, MM. Malhuret et H. Leroy, Mme Jacquemet, MM. Buis, Sol, Levi et Milon, Mme Belrhiti, M. Maurey, Mme F. Gerbaud, M. Belin, Mme Carrère-Gée, MM. Pillefer et Nougein, Mme Perrot et M. Chatillon, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 12
Rétablir les a à c dans la rédaction suivante :
a) Au début, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« La vente aux particuliers du protoxyde d’azote est réservée aux professionnels disposant d’un agrément délivré conjointement par le ministre de l’intérieur et le ministre en charge de la santé. Peuvent obtenir l’agrément les professionnels ayant suivi avec succès une formation adaptée sur les dangers liés à l’usage détourné du protoxyde d’azote.
« La vente du protoxyde d’azote aux particuliers est interdite entre 22 heures et 5 heures. Le contenant est soumis à un système de consigne et présente des caractéristiques garantissant la traçabilité des ventes. » ;
b) À la dernière phrase du premier alinéa, après le mot : « électronique », sont insérés les mots : « titulaires de l’agrément prévu au premier alinéa » ;
c) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les modalités d’application du présent article, notamment les modalités de délivrance de l’agrément prévu au premier alinéa et les caractéristiques des contenants prévues au deuxième alinéa, sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
II. – Alinéas 17 à 24
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Il s’agit de transformer le système déclaratif appliqué aux professionnels qui vendent le protoxyde d’azote en un système d’agrément, de façon à garantir une meilleure sécurité et une plus grande traçabilité, puisque les vendeurs seraient choisis.
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Pillefer et Longeot, Mmes Billon, Jacquemet et Devésa, M. Levi, Mme Saint-Pé, M. Duffourg, Mme Sollogoub, M. P. Martin, Mme Guidez et M. Courtial, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au troisième alinéa, le mot : « et » est remplacé par le signe : « , » et après le mot : « distribuer », sont insérés les mots : « , de détenir ou de transporter » ;
II. – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par exception, le fait de détenir ou de transporter tout produit mentionné au troisième alinéa du présent article est puni de 3750 euros d’amende. » ;
La parole est à M. Bernard Pillefer.
M. Bernard Pillefer. Le protoxyde d’azote, initialement utilisé en cuisine, est de plus en plus détourné à des fins psychoactives. Il est extrait de son contenant d’origine avec des crackers, des dispositifs spécialement conçus pour libérer le gaz et en exploiter les effets.
Pour lutter contre cet usage détourné, la loi de 2021 interdit la vente et la production de ces produits.
Madame la rapporteure, en commission, vous avez renforcé la sanction prévue par la loi, en doublant le montant de l’amende. En complément de cette mesure, cet amendement vise à instaurer une nouvelle infraction sanctionnant la détention et le transport de crackers. En effet, nulle personne détenant un cracker ne pourra se défendre qu’elle entend en faire un usage légal.
Je le rappelle, Mme Létard et le groupe Union Centriste avaient déposé une proposition de loi ayant le même objet, qui s’appuyait sur un rehaussement de l’amende. Cet amendement tend à s’inscrire dans cette logique.
M. le président. L’amendement n° 11, présenté par Mme M. Carrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18, première phrase
1° Remplacer les mots :
de la mairie
par les mots :
du maire de la commune concernée
2° Remplacer les mots :
de la préfecture
par les mots :
du préfet
II. – Alinéa 23
Remplacer les mots :
pendant les heures où cette vente est interdite
par les mots :
en dehors des heures autorisées
La parole est à Mme la rapporteure, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les autres amendements en discussion.
Mme Maryse Carrère, rapporteure. L’amendement n° 11 est un amendement rédactionnel.
Les amendements nos 6 et 10 rectifié tendent à s’aligner sur la proposition de loi adoptée le 29 janvier dernier à l’Assemblée nationale. Or l’auteur de la proposition de loi que nous examinons n’a pas fait le choix de l’interdiction de la vente du protoxyde d’azote, pas plus que la commission, et cela pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, le protoxyde d’azote est un produit de consommation courante, qui est employé non seulement dans le secteur alimentaire, où il est encadré par une réglementation européenne spécifique, mais aussi dans l’industrie automobile, la photographie ou l’horlogerie. Or, pour l’heure, il n’existe pas de substitut pour ces applications, et nous ne pouvons pas nous passer du protoxyde d’azote pour ces usages.
En outre, l’interdiction de vente aux particuliers ne réglera pas le problème des mésusages, qui sont largement alimentés par les marchés parallèles et les trafics émergents. Au contraire, une interdiction totale pourrait même les favoriser davantage. C’est à ces trafics qu’il faut s’attaquer directement, et non à la vente aux particuliers.
Par ailleurs, concernant les ventes de bonbonnes et de bouteilles, qui sont prohibées depuis janvier 2024, nous proposons justement de créer une sanction spécifique en cas de non-respect des formats des contenants, avec une amende d’un montant tout à fait dissuasif de 100 000 euros. Telle est l’orientation que nous avons privilégiée.
Enfin, l’interdiction d’importation serait problématique, puisque nous devons pouvoir nous fournir en protoxyde d’azote pour un usage médical.
C’est pour ces raisons que la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
L’amendement n° 2 rectifié bis vise quant à lui à rétablir les alinéas qui figuraient dans la version initiale du texte et que la commission a supprimés.
Nous avons privilégié un dispositif de déclaration administrative, plutôt qu’un régime d’agrément. En effet, le système d’agrément risquerait de pénaliser les circuits de vente légaux de protoxyde d’azote, notamment les acteurs de la grande distribution. Ceux-ci nous ont avoué qu’ils préféreraient délaisser cette vente, plutôt que de s’engager dans un dispositif d’agrément.
C’est en ce sens que s’est exprimée la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) lors de son audition. Le protoxyde d’azote ne représente en effet qu’une part très marginale de leurs ventes. La mise en œuvre d’un système d’agrément pourrait même se révéler contre-productive et alimenter des trafics illégaux.
L’enjeu porte aujourd’hui principalement sur la capacité des autorités à contrôler les achats et les ventes sur internet. C’est sur ce point qu’il faudrait concentrer nos efforts.
Par ailleurs, le texte de la commission a étendu les horaires d’interdiction de vente la nuit, de vingt-deux heures à huit heures, plutôt que jusqu’à cinq heures, de façon à les aligner sur les interdictions de vente de boisson.
L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement.
Enfin, en ce qui concerne l’amendement n° 1 rectifié, le développement d’un marché parallèle de vente de protoxyde d’azote s’est accompagné d’une diversification de l’offre, qui ne concerne pas seulement le format des contenants.
Si les bonbonnes et les bouteilles constituent désormais l’essentiel des produits vendus sur internet, il existe également des produits que l’on pourrait qualifier d’accessoires, notamment les crackers. Ces dispositifs permettent de percer les siphons de chantilly pour faciliter l’extraction du gaz qu’ils contiennent et transférer celui-ci dans un ballon.
La vente de ces dispositifs est totalement prohibée depuis 2021, mais on peut encore s’en procurer sur internet ou via des applications comme Snapchat. Compléter la loi pour accompagner l’interdiction de leur vente d’une prohibition de détention et de transport apparaît pertinent. Ce serait, en outre, facile à contrôler.
Sanctionner la détention ou le transport de ces dispositifs d’une amende moindre que la vente ou la distribution me semble également justifié. Le montant est suffisamment dissuasif pour les particuliers qui seraient directement visés par cette amende, alors que l’action de vendre ou de redistribuer vise davantage des réseaux structurés, qui s’exposeraient à une amende d’un montant deux fois plus élevé.
C’est pourquoi la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Je ne tiens pas à relancer le débat, car le temps de notre discussion est limité. Cependant, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez cité des études montrant que la légalisation du cannabis n’avait pas entraîné de surconsommation. Mais d’autres études, menées notamment au Canada et dans certains États des États-Unis, ont révélé que, au contraire, l’interdiction s’était accompagnée d’une augmentation de la consommation.
En ce qui concerne ces amendements, je m’efforce d’être cohérent avec les avis que j’ai émis à l’Assemblée nationale sur la proposition de loi visant à interdire la vente du protoxyde d’azote, à laquelle le Gouvernement était favorable.
Par souci de cohérence, donc, j’émets un avis de sagesse sur les amendements nos 6, 10 rectifié et 2 rectifié bis.
Par ailleurs, je suis favorable à l’amendement n° 1 rectifié, qui vise à interdire la détention et le transport de crackers, ainsi que sur l’amendement n° 11 de coordination de Mme la rapporteure.
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir émis un avis de sagesse sur les amendements visant l’interdiction du protoxyde d’azote. Je tiens donc surtout à m’adresser à mes collègues sur la question de la prévention.
Mes chers collègues, comment pouvez-vous imaginer convaincre des jeunes, notamment, que ce produit est dangereux et toxique, s’il est possible de se le procurer très facilement, notamment sur Internet ? Ce n’est évidemment pas dans une supérette, où la vente de ces produits est interdite à partir de minuit, qu’ils cherchent à les acheter ! Ils peuvent tout simplement les commander, et ce à n’importe quelle heure.
L’interdiction est bien plus cohérente. Peut-être cette mesure n’est-elle pas totalement efficace, mais elle est au moins logique. Pour les jeunes, si ce n’est pas interdit, c’est que c’est possible ! Certes, il y a un risque d’amende, mais encore faut-il se faire prendre…
Les élus locaux le disent : c’est un phénomène qu’ils n’arrivent pas à endiguer. C’est pour cette raison que plusieurs d’entre eux ont publié des arrêtés d’interdiction provisoires. Nous devons les soutenir.
M. le président. La parole est à M. Ahmed Laouedj, pour explication de vote.
M. Ahmed Laouedj. Madame la rapporteure, je vous invite à vous rendre en Seine-Saint-Denis, où beaucoup de jeunes consomment ce gaz hilarant, pour observer comment les choses se passent réellement.
Cette proposition de loi vise également à donner à la police, lorsqu’elle arrête des détenteurs de bonbonnes, les moyens de réagir, car, pour l’heure, il n’est pas possible de les sanctionner par une amende. En effet, contrairement à celle de cannabis ou de cocaïne, la consommation de gaz hilarant ne peut être avérée par un test.
La sanction est donc nécessaire. Bien entendu, je suis favorable de même au renforcement de la prévention. C’est d’ailleurs ce que prévoit également la proposition de loi.
Enfin, l’interdiction d’achat de protoxyde d’azote à tous les particuliers pourrait être mal perçue par ceux qui l’utilisent tout simplement pour faire de la chantilly.
Mme Silvana Silvani. Voyons, ce n’est pas sérieux !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 6.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 10 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 214 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 98 |
Contre | 243 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 11.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par Mme M. Carrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 30
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 3823-4, après les mots « Wallis et Futuna » sont insérés les mots « dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … visant à renforcer la lutte contre les usages détournés du protoxyde d’azote » ;
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Maryse Carrère, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1 est adopté.)
Article 2
Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° (nouveau) Le 5° du II de l’article L. 121-4-1 est ainsi modifié :
a) La seconde occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » ;
b) Après le mot : « soins », sont insérés les mots : « ou des conduites addictives » ;
2° L’article L. 312-18 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « cannabis », sont insérés les mots : « ainsi que sur les dangers liés aux usages détournés de produits de consommation courante, dont le protoxyde d’azote » ;
b) (nouveau) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Elles peuvent être réalisées en coordination avec les services de l’État compétents en matière de lutte contre les drogues et les conduites addictives. »
M. le président. L’amendement n° 13, présenté par Mme M. Carrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° La dix-septième ligne du tableau du second alinéa du I de l’article L. 165-1 est ainsi rédigée :
«
L. 121-4-1, 1er à 4e alinéas et 6e à 13e alinéas |
Résultant de la loi n° … du … visant à renforcer la lutte contre les usages détournés du protoxyde d’azote |
» ;
II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…° La vingt-huitième ligne du tableau du second alinéa du I de l’article L. 375-1 est ainsi rédigée :
«
L. 312-18 |
Résultant de la loi n° … du … visant à renforcer la lutte contre les usages détournés du protoxyde d’azote |
».
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Maryse Carrère, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique visant à appliquer les nouvelles dispositions aux îles de Wallis-et-Futuna.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 13.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 5, présenté par Mme Canalès, M. Kanner, Mmes Le Houerou, Lubin et Poumirol, M. Fichet, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…°Après le premier alinéa de l’article L. 312-13, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cet enseignement comprend une sensibilisation liée aux risques routiers de l’usage détourné de protoxyde d’azote pour en obtenir des effets psychoactifs. » ;
La parole est à Mme Marion Canalès.
Mme Marion Canalès. Cet amendement a pour objet d’introduire des mesures de sensibilisation dans le cadre de la sécurité routière.
On le sait, un très grand nombre d’accidents de la route sont dus à la consommation de protoxyde d’azote.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Maryse Carrère, rapporteure. Mes chers collègues, si je comprends bien votre intention, je ne serai pas favorable à votre amendement. Vous proposez en effet de compléter l’enseignement du code de la route à l’école par une sensibilisation au risque routier lié à l’usage détourné du protoxyde. Or ces dispositions seraient redondantes avec celle de l’alinéa 6, qui prévoit déjà une sensibilisation générale à ces risques dans les enseignements relatifs aux toxicomanies.
L’insertion de ces dispositions dans le code de l’éducation semble par ailleurs difficilement adaptée. Si la consommation de protoxyde d’azote au volant peut causer des accidents de la route, il faut resituer les enjeux de ce problème, qui demeure très circonscrit, si on le compare à la consommation d’alcool, de cannabis ou d’autres substances psychoactives. Or ces risques ne sont pas évoqués dans l’article visé par votre amendement, puisque tel n’est pas son objet.
Surtout, la sensibilisation à l’ensemble de ces consommations à risque est bien intégrée à la proposition de loi dans le cadre des séances d’éducation et d’information aux risques associés aux conduites addictives, notamment la consommation de protoxyde d’azote. Elle est précisément incluse dans l’article 2, qui précise les enseignements liés à la toxicomanie.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Madame la sénatrice, je vous rejoins sur la nécessité d’une sensibilisation des futurs jeunes conducteurs sur la consommation de protoxyde d’azote, qui pourrait d’ailleurs s’étendre à tous les produits psychoactifs.
Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Madame la rapporteure, je vous remercie de votre réponse. Cependant, mon amendement n’est pas redondant. L’alinéa que vous mentionnez concerne la prévention des toxicomanies. Or le protoxyde d’azote n’est actuellement pas considéré comme un stupéfiant. La frontière reste floue.
Il sera en tout cas nécessaire de sensibiliser les jeunes conducteurs.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 5.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Grand, Rochette et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. A. Marc, Wattebled, Capus et Brault, Mmes Bourcier et Lermytte, MM. Malhuret et H. Leroy, Mme Jacquemet, MM. Buis, Sol, Levi et Milon, Mme Belrhiti, M. Maurey, Mme F. Gerbaud, M. Belin, Mme Carrère-Gée, M. Nougein, Mme Perrot et M. Chatillon, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase, après le mot : « dans », sont insérés les mots : « les classes de cycle 3 des écoles élémentaires, » ;
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. L’usage détourné du protoxyde d’azote est en recrudescence chez les collégiens, les lycéens et les étudiants, avec des consommations parfois quotidiennes.
Cet amendement vise à renforcer la prévention relative aux usages détournés et dangereux du protoxyde d’azote dès les classes de CM1 et de CM2.
Il est essentiel d’expliquer de façon pédagogique les dangers associés à l’utilisation du protoxyde d’azote dès le plus jeune âge, de reconnaître les dangers associés à cette consommation et d’éviter de normaliser cette pratique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Maryse Carrère, rapporteure. Il est primordial de renforcer la sensibilisation aux conduites addictives dans les collèges et les lycées, mais aussi d’y intégrer les risques liés au protoxyde d’azote. C’est le sens des dispositions de l’article 2.
Toutefois, promouvoir la sensibilisation à une consommation détournée de protoxyde dans les écoles primaires peut sembler quelque peu précoce. Je le rappelle, selon les données de Santé publique France, la moyenne d’âge des consommateurs est de 22 ans. C’est entre 18 et 34 ans que se fait la majorité des expérimentations.
Si un peu moins de 20 % des expérimentations sont réalisées entre 15 et 18 ans, les moins de 11 ans n’apparaissent pas franchement concernés par ces enjeux. Prévoir une sensibilisation systématique de ces classes d’âge ne me semble donc pas adapté.
La commission émet par conséquent un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. La classe d’âge que vous visez me paraît un peu jeune, monsieur le sénateur. Je ne suis pas certain que le public en question ait la maturité suffisante pour être sensible à cette information.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 8, présenté par Mme Canalès, M. Kanner, Mmes Le Houerou, Lubin et Poumirol, M. Fichet, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au cinquième alinéa de l’article L. 5314-2 du code du travail, après les mots : « à la prévention », sont insérés les mots : « , notamment en matière d’usage détourné de protoxyde d’azote pour en obtenir des effets psychoactifs et des risques liés, ».
La parole est à Mme Marion Canalès.
Mme Marion Canalès. Cet amendement tend à élargir le spectre des lieux de prévention.
Nous avons largement parlé des écoles, des collèges et des lycées, mais certaines jeunes sortent du système scolaire dès 16 ans. Ils sont alors souvent accueillis par les missions locales. Nous le savons bien ici, car nombre d’entre nous président ces structures ou y participent : les missions locales contribuent à la lutte contre les addictions.
Je propose donc de les intégrer parmi les acteurs de la prévention, car nous ne devons pas oublier que certains jeunes quittent le lycée à 16 ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Maryse Carrère, rapporteure. Nous nous entendons sur un principe : il faut renforcer les actions de prévention en direction des jeunes publics pour ce qui concerne les risques associés aux usages détournés.
En revanche, il ne paraît pas suffisamment opportun d’inscrire la sensibilisation dans toutes les dispositions législatives.
Les missions locales ont pour objectif prioritaire de favoriser l’insertion professionnelle et sociale des jeunes. Elles peuvent, à ce titre, participer au repérage des situations.
Cependant, je ne crois ni utile ni pertinent de faire ici un cas particulier du protoxyde d’azote, étant donné que les autres conduites addictives ne sont pas signalées par les missions locales. Les actions de sensibilisation au risque de la consommation récréative sont essentiellement réalisées en dehors du domaine de la loi. Elles relèvent d’une impulsion politique.
Les acteurs agissant dans le champ de la prévention eux-mêmes, qu’il s’agisse de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) ou d’associations telles qu’Addictions France ou l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) considèrent qu’il faut intégrer le protoxyde d’azote dans une politique de prévention globale, sans en faire une priorité, au même titre que le tabac et l’alcool.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Le cadre législatif actuel permet déjà aux missions locales de réaliser des missions de prévention sur différentes addictions, que ce soit la drogue, l’alcool ou le tabac. Cet amendement est donc satisfait.
Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2.