Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 938 rectifié.

M. Franck Menonville, rapporteur. L’association dans une société n’est pas simple. Il s’agit d’un projet à la fois entrepreneurial et personnel, mais aussi d’une question de relations humaines. Il convient donc de tester ces différentes dimensions.

Tel est l’objet de ce droit à l’essai que nous entendons ainsi mettre en place. Ce statut est sécurisant, tant pour le cédant et les associés existants, qui ouvrent leur société, que pour l’entrant, qui peut ainsi s’assurer qu’il y sera bien et qu’il pourra mener son projet à terme.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Aux arguments qui ont déjà été avancés, notamment la nécessité d’assurer la sécurisation juridique, j’en ajoute un autre : le dispositif prévu par ces amendements présente l’intérêt de permettre à un jeune se lançant dans une association de producteurs d’en mesurer toutes les implications personnelles.

En effet, je suis frappée de voir combien les mésententes se multiplient, par exemple au sein des Gaec. Les conflits, parfois interminables, sont très complexes ; ils font courir de grands risques aux exploitations et déstabilisent les associés.

Le droit à l’essai est intéressant, car il permet de mesurer concrètement ce que signifie être associé et de se rendre compte qu’un divorce d’association, toujours compliqué, emporte des conséquences importantes.

Pour cette raison et pour celles qui ont été avancées auparavant, le Gouvernement émet un avis tout à fait favorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.

Mme Marie-Do Aeschlimann. L’idée d’un droit à l’essai en agriculture est très positive. Si les terres cultivées agricoles ne sont pas nombreuses dans le département des Hauts-de-Seine, la moitié du territoire de l’Île-de-France est de nature agricole.

Or je rencontre de nombreuses personnes qui, dans une seconde partie de leur vie active, souhaitent se reconvertir et donner du sens à leur vie professionnelle, notamment en se rapprochant de la nature. Toutefois, comme elles ne sont pas fils ou filles d’agriculteur, ces personnes ne peuvent être certaines que leurs aspirations correspondent à cette expérience professionnelle et à la réalité si singulière de la vie d’agriculteur.

Donner aux actifs la possibilité de bénéficier d’un droit à l’essai est donc une bonne chose.

En outre, dans le cadre du renouvellement des générations, il est important d’aider davantage de jeunes à s’orienter et à se former aux métiers agricoles, mais aussi de donner aux actifs, parfois d’un certain âge, la possibilité de retrouver un métier qui a du sens.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Tissot. Nous voterons en faveur de ces deux amendements identiques, par idéologie et en assumant complètement notre dogmatisme, car il est important de soutenir le travail collectif ! (Sourires.)

En effet, on constate que les jeunes projetant de s’installer se tournent non vers des Gaec, mais plutôt vers des structures individuelles, pourtant souvent plus précaires et fragiles. Il est donc très important d’encourager ce système d’association provisoire, tout en maintenant une porte de sortie si l’essai n’est pas concluant.

Vous l’avez bien expliqué, madame la ministre, le système présente l’intérêt de faire comprendre à de futurs associés quelles sont les difficultés, mais aussi les avantages et la sécurité que fournit l’association, en matière tant de savoir-faire que de revenus.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Nous sommes également très favorables au droit à l’essai, particulièrement efficace pour les personnes qui ne sont pas issues du milieu agricole.

J’ai reçu le témoignage d’une personne qui voulait s’installer en Gaec, mais avec des membres de sa famille. Or cette hypothèse, loin d’être plus simple, était très compliquée à mettre en œuvre. Il est essentiel de disposer d’un temps d’appropriation du travail collectif avant de voir si l’on peut poursuivre l’essai.

En revanche, nous avons défendu lors de l’examen des articles 1er et 8 des droits à l’essai bien plus étendus, qui comportaient en particulier la possibilité de tests, dont le manque se fait cruellement sentir.

Nous ne sommes pas parvenus à faire adopter ces dispositions par le Sénat. Pourtant, de tels tests sont essentiels pour les expérimentations, parfois réalisées en dehors du cadre collectif, que nous défendons par ailleurs. Ils permettent également à un jeune, ou à un moins jeune, d’expérimenter et de constater ce qui fonctionne, ou non, avant de s’engager durablement.

Nous voterons donc en faveur de ces amendements, mais en regrettant beaucoup que le dispositif n’ait pas été élargi et qu’il demeure trop restrictif.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.

M. Gérard Lahellec. Il s’agit ici de créer un statut visant à favoriser la reprise et la pérennisation des exploitations agricoles. Le droit à l’essai est un atout, et nous voterons par conséquent en faveur de ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je remercie Mme la ministre de son avis favorable.

Nous sommes en train de combler un vide. Dans les années 1980, quand je n’avais pas encore de cheveux blancs et que j’étais président du Centre départemental des jeunes agriculteurs (CDJA) des Vosges, nous avions créé le contrat emploi formation installation, financé par le conseil général.

Dès cette époque, le souci était d’accueillir des personnes qui n’étaient pas issues du milieu agricole. En effet, la condition pour pouvoir souscrire ce contrat est de ne pas avoir de lien de parenté avec la personne transmettant son exploitation.

Comme Mme la ministre l’a souligné, dans la plupart des sociétés, les échecs sont dus non à des raisons financières, mais à des mésententes ou à des incompréhensions, qui font parfois s’écrouler de très beaux projets.

Le dispositif que nous allons adopter constitue un premier pas, mais nous devrons le consolider pour permettre à tous les agriculteurs, réunis dans une association ou bien à titre individuel, de bénéficier de ce droit à l’essai. Nous devons accueillir les femmes et les hommes qui ont envie de prendre la responsabilité de devenir agriculteur.

Nous avons beaucoup parlé du métier d’éleveur. À cinq années de la retraite, combien d’exploitants ont envie d’avoir un jeune à leurs côtés, qui leur permet d’éviter le déclin de leur exploitation et de conserver leur enthousiasme ? Car c’est ainsi que nous y arriverons !

Mes chers collègues, je le répète, nous nous apprêtons à faire un premier pas, mais il faudra retravailler ce dispositif.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 619 rectifié bis et 938 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 10 bis est ainsi rédigé, et les amendements nos 450 et 132 rectifié quater, les amendements identiques nos 72 rectifié, 198 rectifié ter, 217 rectifié, 240 rectifié bis, 250 rectifié quater et 650 rectifié bis, ainsi que l’amendement n° 698 rectifié, n’ont plus d’objet.

Article 10 bis
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Article 11

Après l’article 10 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 700 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol et Brisson, Mme Berthet, MM. Burgoa, Klinger et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon et Belin, Mmes Josende et Joseph, MM. Genet, Somon et Bacci, Mme Dumont, M. Pointereau, Mmes Bellurot et Drexler, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent et Milon, est ainsi libellé :

Après l’article 10 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre Ier du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 321-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 321-7.- Le chef d’exploitation et l’associé d’exploitation prévoient, d’un commun accord et par écrit, que la participation à la mise en valeur de l’exploitation relève du statut d’associé d’exploitation, ainsi que le délai dans lequel l’une ou l’autre des parties pourra dénoncer l’adhésion au statut. » ;

2° L’article L. 321-8 est abrogé ;

3° Au début de l’article L. 321-9, les mots : « À défaut du chef d’exploitation et de l’associé d’exploitation à la convention type départementale prévue à l’article L. 321-7, en cas de dénonciation ou à défaut d’existence d’une telle convention, » sont supprimés ;

4° L’article L. 321-10 est ainsi modifié :

a) La première phrase est supprimée.

b) Au début de la seconde phrase, les mots : « À défaut de convention type, » sont supprimés ;

5° Le second alinéa de l’article L. 321-12 est supprimé.

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. Cet amendement vise à reprendre le statut d’associé d’exploitation créé en 1964, à la suite des lois d’orientation agricole. Ce statut était réservé aux fils et aux filles d’agriculteurs, qui pouvaient en bénéficier pendant un certain temps. Il a besoin d’être toiletté : figurez-vous que, à l’époque, si un associé d’exploitation se mariait, il perdait son statut dans les deux ans.

Cet amendement tend également à effectuer un autre toilettage : les bases de rémunération de ce statut sont toujours fixées à 860 francs de l’époque…

Ce statut est issu des grandes lois d’orientation de 1960 et 1962, qui ont permis de faire tellement évoluer l’agriculture dans nos territoires. Même s’il n’apporte pas toutes les réponses, je propose ici de le restaurer et d’en profiter pour mettre à jour l’indemnité mensuelle que toucheraient les jeunes qui bénéficieraient de ce statut.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Je comprends l’enjeu et l’engagement de Daniel Gremillet, mais je préfère que nous investissions le dispositif qui a été adopté à l’instant à l’article 10 bis. Le statut d’associé d’exploitation existe depuis longtemps, mais il n’a pas été beaucoup utilisé.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur Gremillet, je vous rejoins : ce statut mérite d’être réinterrogé, voire actualisé. En effet, son application est demeurée assez faible. En revanche, il ne me semble pas souhaitable d’inscrire cette évolution dans la loi.

Une étude d’impact préalable est nécessaire : il faut prendre le temps de la réflexion. Si vous le souhaitez, monsieur le sénateur, nous pourrons y travailler ensemble.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Madame la ministre, je vous remercie de votre proposition. Il est important de travailler sur ce statut, car il serait dommage d’abandonner ce qui a été réalisé dans les années 1960.

En tout cas, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 700 rectifié est retiré.

Après l’article 10 bis
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Après l’article 11

Article 11

(Non modifié)

La section 2 du chapitre Ier du titre V du livre III du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 351-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 351-8-1. – Lorsqu’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire est ouverte à l’égard d’une entreprise exerçant une activité agricole, au sens de l’article L. 311-1, et membre de l’un des groupements d’employeurs mentionnés aux articles L. 1253-1 et L. 1253-17 du code du travail, les créances détenues par ce groupement d’employeurs sur cette entreprise sont garanties :

« 1° Pour la part des créances correspondant à la facturation des sommes dues aux salariés mis à la disposition de l’entreprise, par des privilèges identiques à ceux applicables aux créances des salariés dans les conditions prévues au 3° de l’article 2331 et au 2° de l’article 2377 du code civil et aux articles L. 3253-2 et L. 3253-4 du code du travail ;

« 2° Pour la part des créances correspondant à la facturation des charges sociales dues au titre des salariés mis à la disposition de cette entreprise, par un privilège identique à celui applicable aux créances des organismes de sécurité sociale dans les conditions prévues à l’article L. 243-4 du code de la sécurité sociale. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, sur l’article.

Mme Marion Canalès. L’objectif du projet de loi est également de permettre le renouvellement des générations. Alors que, à ce titre, il faudrait envoyer des signaux positifs à la protection sociale des agriculteurs, ce sujet n’a malheureusement pas été inclus dans ce texte, ce que nous regrettons.

Les retraites des non-salariés agricoles restent en moyenne très inférieures à la moyenne des autres régimes. Surtout, les femmes retraitées agricoles, anciennes conjointes, collaboratrices et aides familiales continuent de percevoir des pensions nettement inférieures à celles de leurs compagnons du fait que leurs carrières ne sont pas reconnues ou le sont mal. Concrètement, ces femmes touchent en moyenne entre 550 euros et 700 euros de pension.

On parle de la création d’un nouveau droit à l’essai, on aborde d’autres sujets… Les avancées contenues dans les lois Chassaigne 1 et 2 ont certes permis d’améliorer les retraites de nombreux salariés agricoles, mais, depuis lors, elles ont été minorées par des dispositions d’origine gouvernementale, qui restreignent ou limitent leur portée.

Ainsi, dans nos territoires, nous constatons l’écrêtement des pensions des polypensionnés ou l’exclusion du complément différentiel de retraite complémentaire obligatoire, qui empêchent les aides familiaux ou les conjoints de toucher des pensions représentant 85 % du Smic.

En février 2023, nous avons ouvert la voie à un alignement progressif des pensions de retraite dans le PLFSS, mais des injustices demeurent, en particulier pour les veuves et les veufs. André Chassaigne y travaille, mais nous nous devons de souligner que de telles dispositions auraient pu figurer dans le projet de loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 11.

(Larticle 11 est adopté.)

Article 11
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Article 12

Après l’article 11

Mme la présidente. L’amendement n° 76 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au plus tard le 31 décembre 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la nécessité d’inclure les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification « agriculture et espaces verts » dans le champ d’application du décret n° 2022-1714 du 29 décembre 2022 relatif à l’aide unique aux employeurs d’apprentis et à l’aide exceptionnelle aux employeurs d’apprentis et de salariés en contrat de professionnalisation.

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Par cet amendement, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport évaluant la nécessité d’inclure les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (Geiq) « agriculture et espaces verts » dans le champ d’application du décret relatif à l’aide unique aux employeurs d’apprentis et à l’aide exceptionnelle aux employeurs d’apprentis et de salariés en contrat de professionnalisation.

Le 27 avril 2024, le décret portant suppression de l’aide exceptionnelle aux employeurs de salariés en contrat de professionnalisation a supprimé, à compter du 1er mai 2024 l’aide à l’embauche pour les alternants en contrat de professionnalisation, qui pouvait atteindre 6 000 euros.

Cette suppression a un impact majeur sur le fonctionnement des Geiq, ces collectifs d’entreprises pilotés par leurs adhérents, qui organisent des parcours d’insertion et de qualification.

Porté sur un territoire par les entreprises qui y adhèrent, chaque Geiq met à la disposition de celles-ci des salariés pour des parcours allant de six à vingt-quatre mois. Chaque parcours vise une qualification, généralement de premier niveau, et permet au salarié d’acquérir des savoir-faire inhérents à son poste, dans un cadre sécurisant et motivant, propice à son développement.

Cet amendement d’appel vise à étudier la possibilité de rétablir l’aide exceptionnelle aux employeurs de salariés en contrat de professionnalisation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Monsieur Cabanel, votre amendement vise à étudier la possibilité de rétablir cette aide, mais aussi à en évaluer les impacts. Bien évidemment, la commission étant défavorable aux demandes de rapport, son avis sera défavorable.

Nous devons nous saisir des outils de contrôle dont nous disposons, comme les questions écrites ou orales au Gouvernement, ou encore les auditions en commission, pour évaluer les effets de ces décrets. Par ailleurs, Mme la ministre s’exprimera peut-être sur ce sujet.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Les contrats de professionnalisation dépendent non pas du ministère de l’agriculture, mais de celui du travail, qui est quantitativement bien plus concerné par cette question.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 76 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 11
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Après l’article 12

Article 12

(Suppression maintenue)

Mme la présidente. L’amendement n° 7 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chevalier et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault, Capus et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Médevielle, Rochette, L. Vogel, Verzelen et Wattebled, est ainsi libellé :

Rétablir l’article 12 dans la rédaction suivante :

I. - Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le chapitre II du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime est complété par un article L. 322-25 ainsi rédigé :

« Art. L. 322-25. – I. – Tout groupement foncier agricole mentionné à l’article L. 322-1, qui lève des capitaux auprès d’investisseurs en vue de les investir dans l’intérêt de ces derniers et conformément à une politique d’investissement que ce groupement ou sa société de gestion définit, est un groupement foncier agricole d’investissement. Ce groupement est soumis à l’article L. 214-24 du code monétaire et financier.

« Un groupement foncier agricole d’investissement est une société civile régie par les articles 1832 à 1870-1 du code civil et par les articles L. 322-1 à L. 322-21 et L. 322-23 du présent code. Il peut offrir au public ses parts sociales.

« II. – L’offre au public de ses parts sociales par un groupement foncier agricole d’investissement est soumise aux articles L. 214-86 à L. 214-113 du code monétaire et financier et respecte les conditions suivantes :

« 1° Les statuts prévoient au profit des membres du groupement autres que les personnes morales un droit de préférence pour l’acquisition des parts mises en vente. Les statuts peuvent accorder un droit de priorité aux associés participant à l’exploitation des biens du groupement, notamment en vertu d’un bail à long terme ;

« 2° À concurrence de 15 % au moins, le capital maximal du groupement, tel que fixé par ses statuts, doit être souscrit par le public dans un délai de deux années après la date d’ouverture de la souscription. À défaut, le groupement est dissous et ses associés sont remboursés du montant de leur souscription ;

« 3° L’ensemble des biens immobiliers du groupement foncier agricole doit être donné à bail à long terme ;

« 4° L’actif du groupement foncier agricole d’investissement est constitué d’immeubles à usage ou vocation agricole en vue de l’exercice d’une activité agricole définie à l’article L. 311-1 du présent code et de liquidités ou valeurs assimilées. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions et limites de détention et de gestion de ces actifs, en particulier pour ce qui concerne la composition de l’actif du groupement foncier agricole d’investissement, les opérations d’échange et de cession de l’actif, les règles de gestion et de fusion des groupements fonciers agricoles d’investissement ;

« 5° Pour l’application de l’article L. 214-89 du code monétaire et financier, la responsabilité de chaque associé d’un groupement foncier agricole d’investissement qui a recours à l’offre au public ne peut dépasser le montant de sa part dans le capital.

« III. – Le groupement foncier agricole d’investissement mentionné au II est soumis aux articles L. 231-8 à L. 231-21 du code monétaire et financier.

« IV. – Pour l’application des articles L. 321-1, L. 411-1 à L. 412-1, L. 621-1, L. 621-8 à L. 621-8-2 et du I de l’article L. 621-9 du code monétaire et financier, les parts des groupements fonciers agricoles d’investissement sont assimilées à des instruments financiers.

« V. – Pour l’application des articles L. 621-5-3, L. 621-5-4 et L. 621-8-4 du code monétaire et financier, les groupements fonciers agricoles d’investissement sont assimilés à des organismes de placement collectif.

« VI. – Le règlement général de l’Autorité des marchés financiers précise les conditions d’exercice de l’activité de gestion des groupements fonciers agricoles d’investissement relevant du présent article.

« VII. – L’application du présent article ne permet de déroger à aucune des règles applicables aux baux ruraux prévues au chapitre VI du titre Ier du livre IV du code rural et de la pêche maritime. »

2° Le 3° du II de l’article L. 141-1 est complété par les mots : « ou la totalité des parts de groupements fonciers agricoles d’investissement tels que définis à l’article L. 322-25 » ;

3° Après la première phrase de l’article L. 322-13, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce délai est porté à deux ans pour les groupements fonciers agricoles d’investissement définis à l’article L. 322-25. »

II. - Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° À l’intitulé du paragraphe 4 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre II, après le mot : « forestière », la fin est ainsi rédigée : « , groupements forestiers d’investissement et groupements fonciers agricoles d’investissement » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 214-86, après le mot : « forestier », sont insérés les mots : « et les groupements fonciers agricoles d’investissement définis à l’article L. 322-25 du code rural et de la pêche maritime » ;

3° Aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 214-89, après le mot : « investissement », sont insérés les mots : « et des groupements fonciers agricoles d’investissement » ;

4° Au début du deuxième alinéa de l’article L. 214-103, sont ajoutés les mots : « Sous réserve de l’article L. 322-10 du code rural et de la pêche maritime, ».

La parole est à M. Vincent Louault.

M. Vincent Louault. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur de la commission des affaires économiques. La commission n’a pas souhaité réintroduire l’article 12, supprimé par nos collègues députés.

Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Comme M. le rapporteur vient de l’indiquer, la question a été assez longuement débattue par l’Assemblée nationale. Nous n’avons pas voulu ouvrir le foncier agricole aux fonds d’investissement privés, car nous ne souhaitions pas risquer de financiariser les terres agricoles.

Pour autant, hier, le Sénat a adopté un amendement de M. le rapporteur visant à créer des fonds d’investissement mixtes, public-privés, toujours placés sous la tutelle ou le contrôle de l’État, qui s’implique dans leur gestion, ce qui limite les risques en matière de financiarisation des terres.

Au reste, ce dispositif existe déjà : il ne s’agissait que de l’inscrire dans la loi. Mais il n’est pas bien formulé.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. En effet, nous avons chassé les groupements fonciers agricoles d’investissement (GFAI) par la porte, mais, hier, ils sont revenus par la fenêtre : le Sénat a ouvert le foncier agricole à l’investissement privé, en l’encadrant peut-être un peu plus, mais en ouvrant tout de même une brèche.

Hier, nous avons voté contre l’intrusion du privé dans le foncier agricole,…

Mme Annie Genevard, ministre. Cela existe déjà !

M. Daniel Salmon. … car nous estimons que celui-ci doit absolument être protégé de toute spéculation.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Hier, nous n’avons pas du tout ouvert de brèche ! Nous avons permis, lorsque les collectivités investissent dans le foncier agricole, que le secteur privé fasse un apport à cet investissement. Ce n’est pas du tout la même chose !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Exactement !

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.

M. Christian Redon-Sarrazy. Le point ne m’a pas semblé aussi clair que les explications de la ministre… J’en appelle à la vigilance lors de la commission mixte paritaire, pendant laquelle ce sujet reviendra probablement.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous serons vigilants !

M. Christian Redon-Sarrazy. Nous devrons préciser les modalités selon lesquelles le secteur privé peut concourir au portage du foncier.

En effet, nous avons peut-être ouvert une porte par laquelle je ne doute pas que certains investisseurs français ou étrangers seraient prêts à s’engouffrer. Soyons prudents et clarifions ce point lors de la navette.