Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. D’abord, je tiens à remercier Laurent Duplomb de sa dernière intervention. En quelques mots, il vient de résumer le drame de l’agriculture française,…
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Vous y avez contribué !
M. Ronan Dantec. … qui consiste à produire toujours plus, mais avec de moins en moins de revenus. Il l’a très bien dit : cela fait trente ans, et même beaucoup plus longtemps, soixante ans probablement, que cela dure.
Face à ce constat implacable, qu’il fait lui-même, Laurent Duplomb nous propose pourtant l’inverse de ce qu’il faut faire. C’est extraordinaire ! (M. le rapporteur fait des signes de dénégation.) Il est le témoin concret des impasses de l’agriculture française, d’une agriculture à laquelle on demande de produire beaucoup pour pas cher, de sorte que les marges de l’agrobusiness, qui tient la FNSEA, soient préservées. Il le sait et l’explique parfaitement, et pourtant, d’amendement en amendement, il nous propose d’aller toujours plus loin dans l’impasse. Bravo !
M. Guillaume Gontard. C’est le syndrome de Stockholm !
M. Ronan Dantec. C’est tout à fait cela !
Nous savons très bien qu’il est demandé aux paysans de produire bon marché pour l’agro-industrie française.
Nous savons très bien qu’il est demandé à la société française de payer la totalité du coût des externalités négatives : je veux parler des inondations qui surviennent quand on draine de trop et qu’on enlève les haies, de la dépollution de l’eau qui doit se faire quand on accepte les pesticides. Concernant ces derniers, désormais, à en croire le rapporteur, ce n’est même plus leur toxicité qui devrait compter : il est simplement question de savoir si l’on peut les remplacer !
On marche sur la tête, et c’est Laurent Duplomb, avec ses mots et fort de son expérience, qui nous l’explique le mieux ! Merci à lui. Maintenant, il faut qu’il se réveille pour que l’on sorte de cette impasse ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Mme Evelyne Corbière Naminzo applaudit également.)
M. Roger Karoutchi. Il faut en revenir aux amendements maintenant !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Franck Menonville, rapporteur. Je vais faire en sorte de m’exprimer avec le plus de calme et de sérénité possible sur le sujet, car je crois qu’il faut sortir des caricatures.
Mme Frédérique Puissat. Tout à fait !
M. Franck Menonville, rapporteur. La profession agricole serait-elle la seule qui n’aurait pas le droit de se moderniser, d’évoluer et d’accéder au progrès ? C’est bien de cela qu’il est question aujourd’hui ! Mes chers collègues du groupe écologiste, votre image de l’agriculture reste figée.
Je vais tenter de donner une définition précise de l’agriculture familiale. Certes, celle-ci est diverse et variée dans notre pays : elle concerne tout autant l’élevage que la polyculture, les céréales que la vigne. Mais il est avant tout question d’exploitations autonomes, dont les capitaux sont détenus par une famille, un couple, des enfants, une société regroupant des associés.
Nous le verrons dans la suite de l’examen de ce texte, les jeunes agriculteurs ne s’installeront bien évidemment pas demain dans les mêmes conditions qu’il y a vingt ou trente ans.
Dans mon département, d’ailleurs, je compare souvent les aspirations des jeunes agriculteurs à celles des médecins de campagne. Il y a quelques dizaines d’années, un médecin de campagne s’installait seul dans son cabinet ; il travaillait entre cinq jours et demi et six jours par semaine, tandis que son épouse s’occupait du secrétariat. Aujourd’hui, les jeunes agriculteurs et ceux qui entreront bientôt dans le métier veulent avoir du temps libre et une certaine qualité de vie, ils veulent avoir accès à toutes les nouvelles technologies et à la modernité. Ils veulent aussi être les détenteurs du capital de leur exploitation.
À cet égard, il ne faudrait pas laisser croire que, parce qu’on la valorise au travers de coopératives, de filières et de productions, l’exploitation n’est pas autonome en France. Elle l’est en effet bel et bien : dans notre pays, les exploitations sont détenues par des familles, des capitaux privés, des apporteurs de capitaux, qui financent et donnent à bail. Voilà ce qui fonde notre modèle agricole.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Madame la ministre, je vous remercie d’avoir déposé l’amendement n° 808, car, d’une certaine façon, c’est un peu d’identité française que vous réintroduisez dans le texte.
M. Daniel Gremillet. L’agriculture française, si on la compare à l’agriculture européenne, se distingue par sa richesse, par sa diversité, par les familles qui la composent, lesquelles ont une pratique bien différente en fonction de chaque territoire, mais qui produisent toutes pour un même marché.
Autre précision non négligeable, n’oublions pas que la France est l’un des rares pays à bénéficier de la reconnaissance des groupements agricoles d’exploitation en commun (Gaec), qui ne sont ni plus ni moins que l’addition d’exploitations familiales travaillant ensemble autour d’un projet commun.
Votre amendement est donc essentiel, madame la ministre, et je le voterai avec beaucoup de détermination. J’aurais même souhaité – je l’ai d’ailleurs dit en commission – que l’on aille plus loin, que l’on donne une définition plus précise de l’exploitation agricole et de l’agriculteur dans la France d’aujourd’hui – cela fait partie des manques de ce texte.
Cela étant, ce n’est pas le débat du moment ; alors, réjouissons-nous de remettre l’identité française au cœur de notre paysannerie si riche de sa diversité !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Au terme de ce débat, je voudrais en remercier tous les protagonistes.
Toutefois, je veux vous dire, monsieur le sénateur Dantec, qu’en parlant de l’agriculture comme vous venez de le faire, vous ne pouvez que décourager les jeunes qui souhaiteraient entrer dans le métier.
Mme Frédérique Puissat. Tout à fait !
M. Ronan Dantec. C’est la vision de Laurent Duplomb qui décourage !
Mme Annie Genevard, ministre. Vous avez présenté l’agriculture sous le seul angle d’un productivisme débridé et pollueur, inconscient dans ses investissements, et le métier d’agriculteur comme peu rémunérateur : c’est désespérant !
M. Guillaume Gontard. Mais c’est la réalité !
Mme Annie Genevard, ministre. Face à vous, monsieur le sénateur, j’ai entendu des propos absolument remarquables, qui ont contribué à définir ce qu’est l’essence même de l’agriculture française. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe GEST.)
On a cité l’exemple des Gaec : Daniel Gremillet le sait, le Gaec entre époux a été une immense avancée pour les femmes en agriculture. Dans une telle configuration, l’agriculture familiale prend tout son sens.
Tous ceux ici qui connaissent un tant soit peu le métier savent pertinemment ce que recouvre la notion d’agriculture familiale en termes de réalité vivante – j’en parle, parce que l’on a demandé quelle en était la définition dans le code rural. Au fond, le Gaec correspond lui aussi à une forme d’engagement familial.
Aussi, monsieur le sénateur, je vous invite à être beaucoup plus prudent dans votre expression : si nous voulons véritablement faire entrer des jeunes dans le métier,…
M. Ronan Dantec. Plus aucun jeune ne peut devenir paysan !
Mme Annie Genevard, ministre. … il faudra que vous abandonniez un certain nombre d’idées reçues, de caricatures, de propos réducteurs, qui ne peuvent que désespérer une jeunesse qui ne demande qu’à s’engager dans ce magnifique métier du vivant. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi qu’au banc des commissions. – Mme Anne-Sophie Patru applaudit également.)
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.
M. Christian Redon-Sarrazy. Nous voterons probablement, nous aussi, ces deux amendements du Gouvernement. Cela ne mange pas de pain, nous semble-t-il, que de faire figurer une telle précision dans le texte.
En revanche, je suis très dubitatif vis-à-vis de la définition de l’agriculture familiale qu’a tenté de faire le rapporteur Franck Menonville, d’autant que la notion de famille est aujourd’hui difficile à cerner.
En outre, on n’a toujours pas donné de véritable définition – Daniel Gremillet vient d’en parler – de l’actif agricole. Si la définition de l’exploitation familiale permet d’y comprendre une exploitation dont les capitaux sont détenus par des personnes extérieures et gérés par un siège parisien, avec des actifs dont le statut est hybride, je ne suis pas sûr que cela corresponde à l’image qu’un certain nombre de collègues ici même s’en font. Si, un jour, on parvenait à définir ce en quoi consiste un actif agricole, on aboutirait sans doute à une meilleure définition de ce qu’est une agriculture familiale.
Mme la présidente. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.
M. Michaël Weber. On le voit bien, le constat à dresser fait débat. Ce que l’on observe sur le terrain, ce qui nous a conduits, en définitive, à l’examen de ce projet de loi d’orientation agricole, prouve que nous sommes arrivés au bout d’un modèle.
Le problème, mes chers collègues, c’est que vous essayez de réhabiliter le modèle que vous soutenez et développez depuis des années, et qui consiste à laisser croire aux agriculteurs que leur revenu ne pourrait être décent que s’ils agrandissaient leur exploitation. Nous pensons, pour notre part, qu’il existe un autre modèle.
Nous avons nombre de contre-exemples à opposer aux exemples que vous avez cités tout à l’heure, monsieur le rapporteur, cher Laurent Duplomb.
Moi-même, j’ai été très longtemps maire d’une commune où il existe une exploitation agricole dont la surface a diminué, mais qui a su s’engager dans la transformation de produits à la ferme et se convertir à l’agriculture biologique, une exploitation qui vit très bien et qui a permis aux paysans qui s’en occupent de trouver la qualité de vie qu’évoquait tout à l’heure Franck Menonville. Je crois que cet exemple est tout à fait généralisable.
On a parlé des jeunes. De ce côté-ci de l’hémicycle, nous souhaitons évidemment que les jeunes agriculteurs aient une meilleure qualité de vie et qu’une partie de la jeunesse se tourne vers l’agriculture. Mais beaucoup de jeunes, qui veulent effectivement choisir cette voie, ne le peuvent pas à cause de l’accaparement des terres.
M. Ronan Dantec. Absolument !
M. Michaël Weber. J’ai en tête l’exemple d’anciens responsables agricoles, qui soulignaient auprès des jeunes agriculteurs l’importance de la transmission des exploitations, mais qui, in fine, ont vendu leurs fermes à de grands groupes et de grandes organisations. Tout cela manque franchement de cohérence. Alors, remettez-vous un peu en question ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 712 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 34
Remplacer les mots :
rechercher l’équilibre des relations commerciales, notamment par un meilleur partage de la valeur ajoutée, et de contribuer à l’organisation collective des acteurs
par les mots :
garantir l’équilibre des relations commerciales, un meilleur partage de la valeur, notamment en encadrant les marges, et de contribuer à l’organisation collective pluraliste des agriculteurs ;
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 591, présenté par M. Buis, est ainsi libellé :
Alinéa 34
Après les mots :
notamment par
Insérer les mots :
le rééquilibrage des négociations commerciales entre acteurs et
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement vise à introduire à cet alinéa la notion de « rééquilibrage des négociations commerciales » au profit des producteurs pour assurer un meilleur équilibre des relations commerciales. Cet ajout est fondamental pour permettre aux producteurs de défendre leurs intérêts face à l’aval et de leur assurer une plus juste rémunération au moment des négociations commerciales.
Mme la présidente. L’amendement n° 592, présenté par M. Buis, est ainsi libellé :
Alinéa 34
Après les mots :
notamment par
insérer les mots :
le renforcement du pouvoir de négociation des producteurs et
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement a presque le même objet que le précédent ; il n’en diffère que parce que nous retenons cette fois la notion similaire de « renforcement du pouvoir de négociation des producteurs ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 712 rectifié.
Quant aux amendements nos 591 et 592, elle en demande le retrait, car ils sont satisfaits : il y a en effet peu de différence entre la notion de « rééquilibrage des négociations commerciales » et celle que nous avons retenue dans le texte d’« équilibre des relations commerciales ».
M. Bernard Buis. Je retire mes amendements !
Mme la présidente. Les amendements nos 591 et 592 sont retirés.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 712 rectifié ?
Mme la présidente. L’amendement n° 809, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 35
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 15° De reconnaître et de valoriser le rôle des femmes en agriculture en veillant à ce qu’elles puissent exercer sous un statut adapté à leur situation et soient informées et accompagnées dans le choix des modes d’exercice de leur profession, en bénéficiant d’un accès facilité au statut de chef d’exploitation, à la formation continue, à une rémunération équitable, et à une protection et une action sociales aux règles adaptées pour tenir pleinement compte des spécificités des métiers et des contraintes des femmes chefs d’exploitations et salariées agricoles, notamment par la prise en compte de leurs parcours professionnels pour améliorer le calcul des droits à retraite ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. C’est un amendement auquel j’attache une importance toute particulière. Il a pour objet la valorisation du rôle des agricultrices et se justifie, me semble-t-il, par son texte même.
Le Gouvernement entend valoriser le rôle essentiel des agricultrices. Vous savez que le statut de conjoint collaborateur va s’éteindre ; il va donc falloir que celles-ci choisissent un autre statut : soit celui de chef d’exploitation, soit celui de salarié agricole. Dans certains cas, il peut même arriver que des agricultrices choisissent de quitter le métier – elles en parlent aussi. Il me paraît important, au moment où nous cherchons à inciter de plus en plus de nos concitoyens à s’orienter vers les métiers agricoles, d’encourager les femmes à le faire.
Cette approche, je le crois, pourrait susciter des vocations pour les métiers de l’agriculture. L’amendement du Gouvernement vise ainsi à souligner l’importance des femmes dans le monde agricole et à les aider à persévérer dans le métier et à y acquérir un statut clair, ainsi qu’une pleine et entière reconnaissance.
La question de la valorisation de leurs droits se pose aussi. Lorsqu’on examine leur situation, on s’aperçoit que les femmes agricultrices perçoivent des revenus et des pensions plus faibles et qu’elles obtiennent plus difficilement leur congé de maternité – elles préfèrent même parfois la compensation financière, parce qu’elles ont difficilement accès aux services de remplacement.
Beaucoup de travail reste à faire pour une pleine reconnaissance des femmes. C’est la raison pour laquelle je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à adopter cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il est favorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 715 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 35
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« … De garantir le respect du pluralisme dans la gouvernance des instances agricoles et alimentaires et la participation de la société civile ;
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 715 rectifié est retiré.
L’amendement n° 720 rectifié, présenté par MM. Lahellec et Xowie, Mme Corbière Naminzo, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 35
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« … De veiller à ce que les politiques de la souveraineté alimentaire tiennent compte des spécificités des outre-mer ainsi que de l’ensemble des enjeux économiques, sociaux et environnementaux de ces territoires. Elles ont pour objectif de favoriser le développement des productions agricoles d’outre-mer, en soutenant leur accès aux marchés, le revenu des agriculteurs, la recherche et l’innovation, l’organisation et la modernisation de l’agriculture par la structuration en filières organisées compétitives et durables, l’adaptation des exploitations au changement climatique, l’emploi, la formation, le renouvellement des générations, la satisfaction de la demande alimentaire par des productions locales, notamment en s’appuyant sur les filières de diversification, la préservation et la pleine mobilisation de la surface agricole utile, des démarches de qualité particulières et de l’agriculture familiale, ainsi que de répondre aux spécificités de ces territoires en matière de santé des animaux et des végétaux ;
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. L’agriculture dans nos territoires d’outre-mer a des particularités qu’il ne faudrait pas oublier dans ce texte.
Les activités agricoles ultramarines sont très sensibles aux aléas climatiques et exogènes. J’en prendrai comme illustration les effets de la fluctuation des marchés mondiaux sur la compétitivité des filières sucre et banane, ou encore des événements majeurs tels que les ouragans ou les cyclones, comme celui qui a frappé à Mayotte tout récemment.
Nos économies ultramarines sont donc structurellement importatrices – je ne vous apprends rien. Le taux de dépendance aux importations alimentaires a même augmenté, passant de 54 % en moyenne en 1995 à 71 % en 2011. Cette moyenne ne reflète cependant pas la diversité des situations dans nos territoires. À La Réunion, le taux de couverture des besoins de la population par la production locale dépasse ainsi 70 %.
Il est donc absolument nécessaire que les territoires dits d’outre-mer puissent être parfaitement intégrés dans les dispositifs prévus par le présent texte. Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement pour la raison que j’ai déjà invoquée tout à l’heure, à savoir, ma chère collègue, que ce que vous demandez est déjà satisfait par les dispositions en vigueur du code rural.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 416 rectifié ter, présenté par MM. M. Weber, Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 36
Compléter cet alinéa par les mots :
notamment en concourant à la réduction de l’usage des produits phytosanitaires et de la pollution de l’eau imputable à l’agriculture par un plan stratégique dédié
La parole est à M. Michaël Weber.
M. Michaël Weber. Nous proposons, par cet amendement, de compléter l’objectif de protection de la santé publique inscrit à cet alinéa en prévoyant l’ouverture de deux chantiers majeurs : la lutte contre la pollution généralisée de l’eau, d’une part, et la réduction de l’usage des produits phytosanitaires, de l’autre. Ces deux points clés sont d’ailleurs liés : je rappelle que 97 % des eaux souterraines françaises sont aujourd’hui contaminées par un ou plusieurs pesticides.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il est défavorable, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement a déjà engagé des politiques concrètes de réduction de l’usage des produits phytosanitaires. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 416 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 569, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 17° De préserver la souveraineté de l’élevage et de l’agropastoralisme en France par un plan stratégique déterminant notamment les modalités de transition vers plus de durabilité socio-économique et environnementale, d’assurer le maintien de l’élevage dans les systèmes plein air, herbager, biologiques et d’accompagner la transition de l’élevage français vers ces systèmes, d’assurer l’approvisionnement en protéines animales des Français tout en accompagnant le changement des pratiques alimentaires vers des produits animaux issus de modes de production durable et de maintenir et de restaurer l’ensemble de ses fonctionnalités environnementales, sociales, économiques et territoriales ainsi que ses complémentarités agronomiques avec les productions végétales ;
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à réorienter les objectifs du plan stratégique pour la souveraineté de l’élevage inscrits au présent article.
Un tiers des exploitations d’élevage a disparu entre 2010 et 2020. Cette tendance à la baisse se poursuit aujourd’hui, au détriment des exploitations les plus vertueuses.
Pour mettre un terme à ce cercle vicieux et sortir de l’impasse dans laquelle se trouvent de nombreux éleveurs, le plan stratégique pour l’élevage prévu à cet article est donc tout à fait utile – je dirais même, indispensable. Toutefois, nous estimons qu’il doit d’abord permettre d’orienter les filières et d’accompagner les agriculteurs, notamment ceux qui souhaitent tendre vers des modèles durables et résilients d’un point de vue socioéconomique et environnemental.
Le présent amendement tend à réorienter les objectifs du plan stratégique pour les rendre plus ambitieux d’un point de vue agroécologique. Nous proposons également d’assurer le maintien de l’élevage dans les systèmes de plein air, herbagers et biologiques, et d’accompagner la transition de l’élevage français vers ces systèmes, comme le demandent un certain nombre d’agriculteurs.
Madame la ministre, vous parlez souvent de « faire envie ». Pour ma part, je considère que de nombreux modèles font envie. J’en connais moi-même un, très près de chez moi : ce sont deux agriculteurs regroupés en Gaec – on vient d’en parler –, qui se sont mis au bio il y a cinq ans et qui en vivent très décemment, parce qu’ils ne supportent plus tous les coûts liés aux intrants, aux produits phytosanitaires ou aux engrais. Ils peuvent désormais se permettre la monotraite en été. Et comme ils sont en Gaec, ils peuvent partir un week-end sur deux… Voilà un modèle qui fait envie, qui donne du sens au travail des agriculteurs et qui doit, par conséquent, mener des jeunes, ou même des moins jeunes qui seraient en reconversion professionnelle, vers l’agriculture.
Ce n’est pas, hélas ! le modèle que vous défendez ni celui qui a été défendu jusqu’à présent, et qui a entraîné la disparition de près de 100 000 exploitations en dix ans. Si l’on continue dans cette voie, ou si l’on accélère, nous perdrons au moins 100 000 autres exploitations dans les dix années à venir. Voilà pourquoi il faut un plan stratégique pour l’élevage.
Mme la présidente. L’amendement n° 570, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 17° D’assurer le maintien de l’agropastoralisme et de l’élevage pâturant en plein air tout en assurant la transition de l’élevage vers ces systèmes, et lutter contre la décapitalisation de ces élevages par un plan stratégique dédié déterminant notamment les objectifs de production ;
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à celui que je viens de défendre : il vise à instaurer un objectif, moins ambitieux, de lutte contre la décapitalisation de l’élevage, en favorisant le modèle pâturant, de plein air, et en facilitant la transition depuis le système actuel.
Ainsi, on garantirait le maintien de l’élevage herbager, c’est-à-dire de celui qui assure aux animaux un accès au plein air, qui est le modèle le plus vertueux pour le vivant, les agriculteurs et le bien-être animal, un modèle essentiel à la dynamique des écosystèmes et des territoires ruraux.
Nous y proposons également d’assurer la transition des modes d’élevage actuels vers celui-ci, en faisant en sorte que le plan stratégique en faveur de l’élevage renforce la lutte contre la décapitalisation de ces élevages via des politiques agissant à la fois sur l’offre et la demande.
En effet, ce que l’on observe de plus en plus aujourd’hui, c’est la multiplication d’élevages où les animaux sont élevés en bâtiment et ne sortent plus dans les champs. Il convient de mettre de nouveau en avant le pâturage, le modèle herbager, parce qu’il s’agit, j’y insiste, du plus vertueux.