M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Antoine Armand, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur Henno, je vous remercie de rappeler ainsi la réalité et le contexte global dans lequel nous nous inscrivons.

En effet, cette année, près de 64 000 défaillances d'entreprises seront à déplorer, alors que nous n'avons connu que 25 000 à 30 0000 défaillances pendant le covid-19.

Vous avez mentionné, en creux, un effet de rattrapage ; notons que le nombre de défaillances a été inférieur au record de 2015 : on en comptabilisait alors plus de 64 000.

Il est compréhensible que des défaillances surviennent, mais je rappellerai tout de même que, l'année dernière, il y a eu 830 000 créations nettes d'entreprises.

Pour répondre à la situation actuelle, j'ai demandé qu'il soit procédé à un suivi particulier, notamment dans votre département du Nord, qui traverse des turbulences économiques et industrielles. Nous nous appuierons sur la délégation interministérielle aux restructurations d'entreprises, le comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) et les services déconcentrés de l'État.

En effet, monsieur le sénateur, la solution doit être recherchée du côté de la compétitivité des entreprises.

Vous le savez, la première partie du projet de loi de finances pour 2025, qui prévoyait des dizaines de milliards d'euros d'impôts supplémentaires sur les entreprises, a été rejeté par l'Assemblée nationale.

C'est la preuve que nous devons faire confiance aux chefs d'entreprise, leur simplifier la vie et baisser les impôts dont ils sont redevables.

Il nous faut aussi tenir le cap sur le coût du travail, car ce sont bien les chefs d'entreprise qui créent de l'emploi et de l'activité dans ce pays.

Je suis certain que, dans votre assemblée, les propositions formulées lors de l'examen du budget défendront l'intérêt des entreprises, et donc de l'emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour la réplique.

M. Olivier Henno. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Du reste, nous tenons à alerter le Gouvernement sur ce point particulier : aux contraintes financières connues, il ne faut à aucun prix, dans l'intérêt du pays, ajouter des difficultés économiques ou, plus grave encore, une éventuelle crise sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

perspectives de grèves dans les transports

M. le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Tabarot. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports.

Si le Gouvernement doit faire face actuellement à des appels à la grève, il en est un qui a un air malheureusement trop connu, celui du traditionnel chantage à la grève de Noël à la SNCF.

Après un galop d'essai prévu le 21 novembre prochain, c'est bel et bien une grève illimitée qui est annoncée à partir du 11 décembre.

Cela aura des conséquences directes sur des millions d'usagers et un coût pour les contribuables, puisqu'une journée de grande grève coûte entre 10 millions et 20 millions d'euros.

Situation du fret ou mise en concurrence des lignes de transport express régional (TER) : tous les prétextes sont utilisés. Ne soyons pas dupes d'un timing parfaitement choisi, celui des négociations annuelles obligatoires (NAO), qui portent notamment sur les revalorisations salariales.

On pourrait débattre à l'envi des défis ferroviaires, mais, en définitive, les usagers du mois de décembre n'y seront pour rien : ils souhaiteront simplement retrouver leur famille à la veille de Noël.

Au bout du compte, c'est toujours l'usager qui trinque, d'autant plus que, depuis 1947, il n'y a pas eu une année sans un jour de grève à la SNCF.

Tout en réexpliquant les garanties apportées aux salariés du fret et l'obligation de procéder à une réorganisation pour sauver 5 000 emplois et éviter de rembourser 5 milliards d'euros indûment perçus, ne serait-il pas temps de briser le tabou de la grève et d'encadrer son exercice dans les transports ? (M. Fabien Gay s'exclame.)

Nous pourrions, à cette fin, reprendre les mesures de la proposition de loi tendant à assurer l'effectivité du droit au transport, à améliorer les droits des usagers et à répondre aux besoins essentiels du pays en cas de grève, présentée entre autres par Bruno Retailleau et Hervé Marseille.

En effet, nous n'avons pas attendu certains députés populistes qui se réveillent aujourd'hui pour faire un travail de fond afin de sanctuariser certains jours dans l'année et lutter contre les grèves du quotidien.

Mme Cécile Cukierman. Noël, c'est un jour : le 25 décembre !

M. Philippe Tabarot. Monsieur le ministre, n'est-il pas temps désormais de respecter pleinement la liberté d'aller et venir des Français ? Oui, le droit de grève est un droit constitutionnel ; c'est pourquoi nous n'acceptons pas de le voir détourné, et encore moins dévoyé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP. – Protestations sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

M. François Durovray, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports. Je vous remercie, monsieur le sénateur Philippe Tabarot, de votre question qui m'offre l'occasion de saluer votre travail au sein de cette assemblée sur les transports (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.), en particulier votre proposition de loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports, qui sera examinée par l'Assemblée nationale le 9 décembre prochain, et votre proposition de loi visant à concilier la continuité du service public de transports avec l'exercice du droit de grève, sujet fondamental pour les élus de la Nation comme pour les usagers de la SNCF.

La continuité du service public est un principe constitutionnel au même titre que le droit de grève. Je suis également attaché à chacun de ces deux principes.

Trois motifs ont présidé au dépôt d'un préavis de grève par les organisations syndicales.

Le premier a trait au fret. Lors d'une réponse à une précédente question, j'ai rappelé les dispositions qui ont été prises par le Gouvernement pour lui assurer un avenir positif.

Le second motif porte sur les négociations salariales, qui, comme dans toute entreprise, relèvent de la direction générale de l'entreprise. Je note toutefois que, au cours des années passées, les agents et l'entreprise ont bénéficié de conditions favorables liées à l'évolution de l'usage du train par les Français. Je note également que l'inflation a aujourd'hui fortement ralenti – et c'est heureux pour les Français et pour leur pouvoir d'achat –, ce qui change le cadre des discussions.

Enfin, le troisième motif est lié à la mise en concurrence des trains express régionaux (TER) : le Gouvernement a apporté toutes les garanties sur les conditions sociales de ce processus.

Le dialogue a lieu et il se poursuit. Les Français ne comprendraient pas qu'une grève les pénalise dans leurs déplacements quotidiens, en particulier vers leur lieu de travail, et pour rendre visite à leur famille à l'occasion des fêtes de fin d'année. En tout état de cause, j'ai confiance dans la responsabilité et la capacité de dialogue de l'entreprise et des organisations syndicales. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Bernard Buis applaudit également.)

finances des collectivités locales

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Émilienne Poumirol. Ma question s'adresse à Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.

En mai 2024, les conclusions du rapport rendu par Éric Woerth à la demande du Président de la République confortaient le rôle du département et préconisaient de reconnaître celui-ci comme la strate de la solidarité et de la résilience des territoires.

En dépit de la prise de conscience du rôle central joué par les départements, ces derniers subissent une asphyxie budgétaire insoutenable.

Selon un rapport de la Cour des comptes d'octobre 2023, les départements sont l'échelon de collectivité territoriale le plus soumis aux fluctuations économiques et disposant des ressources financières les plus instables.

Du fait de la crise du marché immobilier, les départements ont vu baisser les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui constituent leur principale ressource, de 20 % l'an dernier.

Confrontés à une situation financière profondément dégradée, les départements font face à un risque systémique majeur. Leur financement se révèle totalement déconnecté des compétences qu'ils exercent et de leur démographie.

De fait, les départements voient leurs dépenses liées à la demande sociale fortement augmenter. Selon l'Observatoire de la décentralisation et de l'action sociale (Odas), en 2023, la dépense nette d'action sociale des départements a augmenté de 5,2 %. Ces derniers doivent également faire face au financement des décisions prises par l'État – le Ségur de la santé, l'évolution du point d'indice, la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), etc. – sans compensation financière adéquate.

Face à cette augmentation des dépenses qu'ils ne peuvent contrôler et dépourvus d'un levier fiscal pour accroître leurs recettes, les départements, acteurs clés de la justice sociale et de la résilience territoriale, voient leur rôle gravement compromis. Alors que la situation est déjà critique et que les courbes de dépenses et de recettes se croisent, le projet de loi de finances pour 2025 porte un coup de rabot intolérable à leurs finances, et ce, sans aucun dialogue ni concertation préalable.

Comment comptez-vous répondre au cri d'alarme de l'Assemblée des départements de France (ADF), madame la ministre ? Comment éviter que certains départements ne soient mis sous tutelle ou en cessation de paiements ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.

Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation. Je vous remercie de votre question, madame la sénatrice Poumirol. Vous savez dans quelles conditions le projet de loi de finances pour l'année 2025 a été élaboré.

M. Rachid Temal. Non ! Il faut demander à Attal !

Mme Catherine Vautrin, ministre. Vous savez aussi que la situation difficile des finances publiques de notre pays a constitué le point de départ de ce projet de loi de finances. La dette publique s'élève en effet à 3 228 milliards d'euros et les intérêts de la dette, à 55 milliards d'euros.

Partant de cet état de fait, le Gouvernement a travaillé sur une réduction des dépenses, de l'État tout d'abord, à hauteur de 20 milliards d'euros, puis des dépenses sociales, à hauteur de 15 milliards d'euros. Il a enfin sollicité un effort des collectivités locales.

Pour autant, je partage votre constat selon lequel la situation des départements est tout à fait particulière, au moins pour deux raisons.

La première raison tient à l'incapacité dans laquelle se trouvent les départements à déterminer le montant des prestations qu'ils versent au titre des aides individualisées de solidarité et, partant, aux incidences très particulières que cela emporte sur leurs comptes.

La seconde raison a trait aux fameux DMTO et aux recettes par habitant très inégales que les départements en tirent. Dans un département côtier ou montagnard, ces recettes sont sans commune mesure avec les recettes que perçoivent des départements qui ne sont ni côtiers ni montagnards, et qui peuvent de ce fait se trouver dans une situation que j'oserai qualifier de plus précaire. Nous avons donc une difficulté en termes de ressources.

Sous la direction du Premier ministre, le Gouvernement, et plus particulièrement mon collègue chargé du budget et des comptes publics, travaille pour apporter des réponses très concrètes à la fois à ces différences de recettes issues des droits de mutation à titre onéreux et aux difficultés qu'emporte la ponction que vous évoquez pour les départements concernés, madame la sénatrice.

Dès cette fin de semaine, lors des assises des départements de France, le Premier ministre aura l'occasion de préciser l'engagement du Gouvernement auprès des départements. (MM. Laurent Somon et François Patriat applaudissent.)

agression d'un militaire à besançon

M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jacques Grosperrin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, comme de nombreux départements, le département du Doubs n'est pas épargné par des événements d'une grande violence.

Jeudi soir dernier, à la sortie d'une boîte de nuit, un jeune militaire du 19e régiment du génie de Besançon a été sauvagement agressé. Il se trouve à cet instant en état de mort cérébrale.

Cet été, Besançon avait déjà été endeuillé par l'assassinat froid de deux personnes en pleine rue.

Malgré le travail remarquable de la police nationale, de la gendarmerie et des procureurs, Besançon symbolise à elle seule l'accumulation d'actes nombreux qui angoissent la population.

La récente commission d'enquête du Sénat sur l'impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier, menée par Étienne Blanc et Jérôme Durain, a analysé avec lucidité cette situation dangereuse pour le pays.

Si je connais votre détermination, monsieur le ministre, il reste que chacun doit agir dans le même sens. Il nous faut transcender les clivages et combattre les discours portés par une idéologie qui nie les violences, voit dans l'insécurité un simple sentiment et s'offusque dès que le mot « répression » est prononcé.

Dans la ville natale de Victor Hugo, ces démagogies dépassent l'imaginable, car même si les polices municipales, en appui, ne sont pas la solution à tous les problèmes, elles doivent jouer leur rôle et être utilisées dans toute l'étendue de leurs compétences.

Peut-être faudrait-il s'assurer qu'un maire ne puisse pas vider sa police municipale de toute efficacité en la privant d'armement. La priorité que nous devons donner à nos concitoyens est à ce prix et parfaitement conciliable avec la libre administration des collectivités locales.

Il nous faut également développer partout la vidéosurveillance, encore trop souvent refusée alors qu'elle est un appui inestimable dans le travail de la police et de la justice.

Ma question est simple, monsieur le ministre : pouvons-nous durablement accepter qu'un maire interdise à sa commune et à sa population les moyens de l'efficacité pour leur sécurité ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Jacques Grosperrin, la situation que vous venez de décrire et dont j'ai eu connaissance il y a quelques heures est, hélas ! révélatrice de l'hyperviolence que connaissent beaucoup de nos compatriotes, mais aussi, vous l'avez souligné, nos forces de l'ordre.

Toutes les vingt minutes, un refus d'obtempérer. Chaque jour qui passe, plus de 1 000 agressions, sans compter celles qui ne sont pas déclarées.

Derrière ces froides statistiques, ce sont autant de vies brisées, d'existences volées. Quand la République ne parvient pas à protéger les siens, notamment les plus fragiles, la confiance est blessée.

Demain, non loin du Sénat, je réunirai l'ensemble des préfets de France, des commandants de groupement de gendarmerie et des directeurs départementaux de la police nationale pour leur présenter une stratégie et leur donner des instructions en matière de lutte contre le narcotrafic – je l'ai déjà indiqué –, mais aussi de sécurité du quotidien.

Ce plan, cette stratégie, fixe à la fois une méthode et des objectifs.

La méthode consiste à donner, dans le cadre de chaque département, beaucoup plus de liberté aux commandants de groupement de gendarmerie et aux directeurs départementaux de la police, car l'on ne protège bien que ce que l'on connaît bien et que Paris ne sait pas tout. Cette méthode repose donc sur la subsidiarité.

Les objectifs ont pour leur part trait à l'amélioration de la visibilité et de l'efficacité. Il nous faut en effet davantage de visibilité, de manière à déployer la bonne patrouille, au bon endroit et au bon moment. Par ailleurs, entre 5 % et 10 % des multirécidivistes sont à l'origine de plus de 50 % des actes de délinquance. Nous allons donc les cribler et les cibler afin de gagner en efficacité.

Je vous rejoins toutefois, monsieur le sénateur : nous ne parviendrons pas à rétablir l'ordre républicain sans la coopération des communes. Comme vous, je suis favorable à un continuum de sécurité, à l'armement des policiers municipaux et à davantage de vidéoprotection.

Je réunirai bientôt un Beauvau de la sécurité et j'inscrirai ces dispositions à l'ordre du jour législatif. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour la réplique.

M. Jacques Grosperrin. Je vous remercie, monsieur le ministre. Nous connaissons votre engagement et la force de vos convictions. J'insiste sur la nécessaire mobilisation des maires, qui ne doivent pas rester à l'écart de ce continuum si nous voulons que celui-ci assure efficacement la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

difficultés à l'exportation de la filière des spiritueux

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Laurent. Lors d'un déplacement à Shanghai à l'occasion de la foire internationale des importations de Chine, la ministre Sophie Primas a abordé avec ses homologues chinois la surtaxe douanière frappant le cognac, l'armagnac et les brandies.

L'enquête antidumping lancée par les autorités chinoises a déjà exigé une coopération coûteuse de la filière. Ces investigations s'inscrivent dans un contexte de tensions commerciales entre la Chine et l'Europe à la suite d'un vote intervenu le 4 octobre dernier autorisant une hausse significative des droits de douane appliqués sur les véhicules électriques chinois importés en Europe, puis de la riposte chinoise par laquelle, dès le 11 octobre, un cautionnement de 38 % a été imposé sur certaines importations européennes.

Depuis, les exportateurs français subissent des annulations et des reports de contrats qui accentuent leur situation de vulnérabilité. Je remercie d'ailleurs notre président Gérard Larcher du soutien apporté à ces derniers.

Les représentants de la filière ont réaffirmé leur souhait de préserver la liberté de commercer et leur crainte de devenir les victimes collatérales de ces conflits.

J'ajoute que la réactivation de la taxe Trump, pour l'heure en suspens, pourrait également menacer nos exportations.

Vous avez évoqué l'importance de privilégier les négociations, monsieur le ministre. Je soutiens une telle approche. Ces difficultés qui concernent aujourd'hui le cognac et l'armagnac pourraient toutefois affecter demain les filières laitière et porcine. À l'approche du G20 au Brésil, nous espérons donc un engagement fort du Président de la République.

Nous avons appris hier que la Chine avait pris la décision encourageante de permettre aux importateurs de présenter des garanties bancaires en remplacement des cautionnements.

Où en sont les négociations, monsieur le ministre ? Quelles actions envisagez-vous de prendre pour protéger ce secteur essentiel à notre économie et à notre patrimoine ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur Daniel Laurent, après un an d'enquête diligentée en toute transparence, de manière contradictoire et dans le respect des règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), l'Union européenne a décidé d'un relèvement des droits de douane appliqués aux véhicules électriques chinois qui est entré en vigueur le 30 octobre dernier.

À l'inverse, la décision chinoise de relever les droits de douane sur les produits d'un certain nombre de filières européennes, en particulier le cognac et les produits laitiers, est injustifiée et ne respecte en aucun cas les règles de l'OMC.

La Commission européenne a donc réagi rapidement. Dès le 23 septembre, elle a engagé une procédure relative à l'enquête menée par la Chine sur les produits laitiers auprès l'OMC. Le 8 octobre, elle a ouvert une nouvelle procédure devant l'OMC, concernant cette fois les droits provisoires appliqués par la Chine sur les brandies, et donc sur le cognac.

La ministre Sophie Primas, bien connue au Sénat, s'est rendue du 3 au 6 novembre dernier à Shanghai pour rappeler avec fermeté aux autorités chinoises notre détermination à défendre nos filières contre ces droits de douane illégitimes. Comme vous l'avez indiqué, nous avons obtenu un premier geste des autorités chinoises. L'assouplissement des conditions d'application de ces droits provisoires permettra d'en limiter l'impact sur les filières.

C'est un premier pas, mais ce n'est pas suffisant. Nous continuerons donc à travailler jusqu'à ce que nous obtenions la levée définitive de ces droits de douane injustifiables et inacceptables. Tel est l'engagement du Gouvernement sous l'autorité du Premier ministre. Soyez assuré, monsieur le sénateur, que Sophie Primas, Annie Genevard, ministre de l'agriculture et moi-même sommes mobilisés en ce sens. (MM. François Patriat, Jean-Baptiste Lemoyne, Alain Milon et Roger Karoutchi applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, pour la réplique.

M. Daniel Laurent. N'oublions pas, monsieur le ministre, que la filière du cognac représente 4 000 exploitations, 250 maisons de négociation et 70 000 salariés. Quant à la filière de l'armagnac, qui réalise 14 % de son chiffre d'affaires en Chine, elle fait vivre 700 viticulteurs et assure 1 500 emplois directs.

Ces produits incarnent notre patrimoine immatériel et notre savoir-faire unique. La filière riche de ce savoir-faire ancestral compte sur votre appui, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

renouveau des bassins miniers

M. le président. La parole est à M. Christopher Szczurek, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

M. Christopher Szczurek. Ma question s'adresse à Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine, Valérie Létard.

Le bassin minier attend des actes, madame la ministre. Nous connaissons les difficultés nombreuses, mais aussi les formidables opportunités qu'offre ce territoire dont comme vous, je suis élu.

Pendant des décennies, les habitants de cette terre de travail, de partage et de fierté ont contribué à donner à notre pays sa grandeur et sa prospérité au prix d'extraordinaires sacrifices et d'autant d'efforts.

En 2017, à Oignies, commune de l'agglomération d'Hénin-Beaumont dont je fus premier adjoint au maire pendant dix ans, le Président de la République François Hollande avait promis le déblocage de 100 millions d'euros pour financer la rénovation thermique de logements dans 251 communes du bassin minier du Pas-de-Calais et du Nord.

En 2022, le candidat Emmanuel Macron s'était offert un grand tour du bassin minier, toujours dans la circonscription de Marine Le Pen, à Carvin. À l'occasion de cette tournée électorale, le Président de la République avait promis un engagement supplémentaire de 100 millions d'euros pour rénover les espaces publics du bassin minier.

Trois ans plus tard, les habitants et les élus attendent la concrétisation totale de cette promesse présidentielle qui engage autant Emmanuel Macron que ceux qui ont contribué à le faire réélire.

Où en sommes-nous donc aujourd'hui ? Selon le projet de loi de finances pour 2025, les quelques crédits inscrits pour le renouveau du bassin minier participeraient à clôturer les financements précédents, sans nouvel engagement financier de l'État.

Les médias ne retrouvant pas la trace de crédits sous l'intitulé « Engagement pour le renouveau du bassin minier » (ERBM), ils s'en sont inquiétés, peut-être à juste titre, la politique étant fatalement aussi une question d'affichage. Il reste que l'émoi et l'incertitude ont gagné les esprits à la fin du mois d'octobre.

Mes questions sont très simples, madame la ministre. Pouvez-vous nous confirmer que les 100 premiers millions d'euros pour la rénovation de l'habitat ont été consommés et nous assurer que 100 autres millions d'euros seront bien affectés aux espaces publics de nos résidences minières ? Les collectivités ont besoin d'être rassurées sur la participation financière de l'État à leurs projets de réhabilitation.

Notre territoire fut jadis considéré comme possédant le plus beau logement social du monde. Traumatisé sur le plan économique, social et écologique, il a aujourd'hui besoin d'un soutien sur le long terme, au-delà du seul ERBM. (MM. Aymeric Durox et Joshua Hochart applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine.

Mme Valérie Létard, ministre du logement et de la rénovation urbaine. Monsieur le sénateur Szczurek, étant moi-même élue du territoire du bassin minier, et portant cette cause depuis des années, vous imaginez sans doute que je n'ai pas attendu votre question pour me préoccuper de l'avenir de l'engagement pour le bassin minier. Avec ma collègue Agnès Pannier-Runacher, tout aussi mobilisée que moi, et avec Mme Apourceau-Poly, M. Rapin, Mme Gacquerre et M. Corbisez, tous mobilisés en lien avec moi, nous travaillons pour que le Gouvernement soit au rendez-vous en 2025.

M. Christopher Szczurek. On n'a pas remarqué…

Mme Valérie Létard, ministre. Le Président de la République s'était engagé à allouer 100 millions d'euros à l'ERBM entre 2018 et 2027. Dès 2023, cet engagement était honoré.

Il s'était de plus engagé, non pas seulement à allouer 100 millions d'euros supplémentaires, mais à financer l'ensemble des besoins de rénovation de ce parc. En 2024, un financement de 17 millions d'euros supplémentaires a été accordé.

Pour 2025, il fallait évaluer les besoins de manière à tenir l'engagement d'une rénovation complète d'ici à 2027. Je me suis attelée à cette tâche dès ma prise de fonctions. Avec le préfet, avec les parlementaires mobilisés et les élus locaux, nous avons chiffré ces besoins.

La discussion, ici même, au Sénat, d'un amendement gouvernemental qui sera déposé sur la seconde partie du projet de loi de finances vous convaincra sans doute, monsieur le sénateur, que nous n'avons attendu après vous ni pour honorer les engagements du Président de la République ni pour nous occuper des habitants du bassin minier. (Applaudissements sur de nombreuses travées.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Notre prochaine séance de questions au Gouvernement aura lieu le mercredi 20 novembre 2024, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt,

est reprise à seize heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.