Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Lafon. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Cédric Vial applaudit également.)

M. Laurent Lafon. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite à mon tour me féliciter de l’examen par la Haute Assemblée de ce texte, dont l’adoption, j’en suis persuadé, permettra de mettre un terme aux incertitudes relatives aux modalités de financement des sociétés de l’audiovisuel public.

Près de trois ans après l’adoption du collectif budgétaire supprimant la contribution à l’audiovisuel public et de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, ayant modifié le régime des taxes affectées, il y avait en effet urgence.

Urgence d’abord à rassurer les acteurs du secteur, en sécurisant la ressource mise à leur disposition et en évitant une budgétisation susceptible de laisser planer un doute sur leur indépendance.

Urgence aussi à rassurer les partenaires étrangers d’Arte et de France Médias Monde et à garantir la crédibilité de ces chaînes sur la scène internationale de même que le respect de nos engagements diplomatiques.

Au cours des semaines à venir, nous aurons à débattre du montant de ce financement, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, mais cette proposition de loi organique constitue une première marque de soutien du Sénat à l’égard d’un secteur dont le rôle démocratique demeure évidemment essentiel.

Toutefois, nous sommes d’accord avec vous, madame la ministre, l’adoption de ce texte ne sera qu’un premier pas sur le chemin de la nécessaire réforme de l’audiovisuel public. Le Sénat, en particulier sa commission de la culture, a toujours insisté sur le fait que la réforme du financement et celle de la structure de l’audiovisuel public devaient aller de pair. Jean-Pierre Leleux et André Gattolin en 2015 – cela fait déjà presque dix ans – puis Jean-Raymond Hugonet et Roger Karoutchi, plus récemment, ont insisté sur la nécessité de traiter ces deux sujets dans un même mouvement.

Il convient ainsi de réformer la gouvernance de l’audiovisuel public en créant une holding susceptible de définir une stratégie d’ensemble concernant l’offre de proximité, l’offre d’information, l’offre numérique et l’offre culturelle. Le président de l’Arcom le soulignait à juste titre, la semaine dernière, devant notre commission. Dans le même temps, il conviendra de réduire les asymétries de concurrence qui pénalisent depuis trop longtemps nos acteurs privés par rapport à leurs concurrents délinéarisés, essentiellement américains.

Cette réforme de l’audiovisuel, que le Sénat appelle de ses vœux depuis tant d’années, le Gouvernement a la possibilité de la mener à son terme au cours des semaines à venir, en permettant, d’ici à la fin de l’année, l’adoption définitive de cette proposition de loi organique et de la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle, adoptée par le Sénat et déjà examinée en commission à l’Assemblée nationale. Reculer encore et encore la réforme de la gouvernance de notre audiovisuel public ferait courir un risque à ce dernier, qui ne peut se satisfaire des bonnes audiences actuelles sans se rendre compte que son public vieillit et que d’autres acteurs, aux moyens financiers puissants, prennent chaque jour des parts de marché et menacent son modèle.

Nous avons bien compris, madame la ministre, votre volonté de mener à son terme cette indispensable réforme. Nous connaissons votre détermination. Sachez-le, vous pouvez compter sur le Sénat pour vous aider, comme nous le faisons ce soir, à mettre en place ce que vous avez appelé l’ambition d’ensemble dont l’audiovisuel public a besoin. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Bernard Buis applaudit également.)

Mme la présidente. Madame la ministre, mes chers collègues, je vous propose de poursuivre nos travaux jusqu’à l’achèvement de l’examen de cette proposition de loi organique.

Y a-t-il des oppositions ?…

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je suis le dernier à prendre la parole après onze autres orateurs ; je vais donc me passer du discours que j’avais préparé, puisque tout a été dit et que ma collègue Sylvie Robert a exposé la position du groupe des socialistes écologistes et républicains.

Elle l’a dit, nous continuons de plaider pour une taxe progressive, universelle et équitable ; toutefois, faute de mieux et face à l’urgence, à l’impréparation et aux décisions hâtives prises par le précédent gouvernement, nous voterons ce texte.

Je me contenterai donc de vous poser trois questions ou séries de questions, madame la ministre, puisque vous avez pris, dans votre propos liminaire, des engagements : vous allez sanctuariser – je n’ai pas dit « pérenniser », notre collègue Hugonet n’a pas tort à cet égard –, stabiliser et garantir la prévisibilité du financement de l’audiovisuel public, et assurer son indépendance. Si j’ai bien compris l’économie du texte, il s’agit de modifier la Lolf afin d’affecter une fraction de TVA à un compte de concours financiers, ce qui empêcherait toute régulation infra-annuelle. Si c’est bien de cela qu’il s’agit, nous serions quelque peu rassurés, mais cela ne suffit pas à me rendre tout à fait serein pour ce qui concerne le respect de vos engagements.

Première série de questions : l’enveloppe pilotable va-t-elle être transformée ? Les crédits du fameux programme 383, que vous avez créé et doté de 69 millions d’euros, dont 45 millions pour France Télévisions, n’ont pas été intégralement versés à ce jour ; France Télévisions n’a reçu que 12 millions d’euros, mais j’imagine que les cinq autres entreprises doivent être dans le même cas. Le solde sera-t-il versé avant décembre ?

Par ailleurs, votre collègue ministre chargé du budget et des comptes publics a déclaré hier à l’Assemblée nationale que quelque 12 milliards de crédits ne seraient pas consommés et que l’État, dans le projet de loi de finances de fin de gestion, procéderait à des annulations à hauteur de 6 milliards d’euros. Nous garantissez-vous que ce qui est inscrit aujourd’hui, en 2024, sera préservé dans les arbitrages ? Et je ne parle pas de l’hypothèse, fort probable, selon laquelle votre budget serait adopté via l’article 49.3.

Deuxième question : pour empêcher totalement la régulation infra-annuelle, prenez-vous l’engagement devant nous de transférer tous les crédits du programme de transformation aux dotations de base des six entreprises du secteur de l’audiovisuel ?

J’en viens à ma troisième question. Conformément à la Lolf, le montant de la TVA, de même que celui des impositions de toutes natures, doit être défini dans la première partie du projet de loi de finances. Théoriquement, le texte devrait être adopté dans les mêmes termes à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Prenez-vous l’engagement de reprendre, par amendement gouvernemental, la rédaction qui sortira de l’Assemblée nationale, pour garantir que le texte soit adopté en première lecture, afin d’éviter le phénomène de l’entonnoir ?

M. Jean-François Husson. Bien sûr ! (Sourires.)

M. Victorin Lurel. Je préférerais l’entendre de la bouche de la ministre, mon cher collègue ! (Nouveaux sourires.) À cette condition, nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi organique portant réforme du financement de l’audiovisuel public

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public
Après l’article 1er

Article 1er

Le premier alinéa du II de l’article 2 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances est complété par une phrase ainsi rédigée : « Un montant déterminé d’une imposition de toute nature peut, sous les mêmes réserves, être directement affecté aux organismes du secteur public de la communication audiovisuelle. »

Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article 2 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Les organismes du secteur public de la communication audiovisuelle sont notamment financés par une redevance intégralement affectée et progressive. Cette redevance résulte d’une disposition d’une loi de finances. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. L’examen de cet amendement va permettre d’ouvrir le débat sur un autre mode de financement de l’audiovisuel public.

Il s’agit de rétablir une redevance affectée, mais progressive. L’objectif est de garantir à la fois la justice fiscale et la stabilité des ressources des organismes bénéficiaires.

Le recours à la TVA actuellement en vigueur pour financer ce secteur est socialement injuste : en tant qu’impôt sur la consommation, la TVA touche de manière égale tous les consommateurs, ce qui pèse évidemment davantage sur les ménages les plus modestes. C’est pour lutter contre cette injustice que nous proposons une redevance progressive, qui permettrait de mieux répartir l’effort fiscal, ce que ne permettait pas la contribution à l’audiovisuel public précédente.

Je souligne que nous avons déjà défendu cette solution lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2022, lorsque la précédente majorité présidentielle nous proposait la suppression de la contribution à l’audiovisuel public et cette solution temporaire de l’affectation d’une fraction de TVA, qui nous contraint aujourd’hui à légiférer de nouveau.

Cette proposition s’appuie sur les travaux de l’économiste Julia Cagé et permet, je le répète, de garantir à l’audiovisuel public des ressources stables, justes et suffisantes, afin de préserver son indépendance.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Cet amendement vise à recréer une redevance, ce qui relève d’un projet de loi de finances.

Par ailleurs, et cela a été souligné à plusieurs reprises, nous agissons dans l’urgence, dans des délais contraints.

Je note la parfaite cohérence de cet amendement avec les propos tenus par notre collègue en discussion générale, mais ce n’est pas l’objet du présent texte.

La commission n’a donc pu qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, ministre. Le débat a été tranché en 2022. Vous dites, monsieur le sénateur, que la solution actuelle est fiscalement injuste, mais vous recréez une taxe…

J’adhère aux arguments du rapporteur : avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. L’idée est justement que la nouvelle contribution soit plus juste, en étant calculée selon les revenus de chacun.

J’y insiste, ce que nous sommes en train de faire, pour parer à l’urgence, n’est toujours pas satisfaisant du point de vue budgétaire. Je me suis replongé dans les débats de 2022 ; vous indiquez que cette question a été tranchée, madame la ministre, mais il y avait eu plusieurs alertes soulignant que ce mode de financement serait forcément temporaire et creuserait de nouveau le déficit de l’État. Ces interpellations émanaient de toutes les travées, notamment de Laurent Lafon, mais également d’autres sénateurs, et Gabriel Attal avait très peu répondu sur le fond.

Aujourd’hui, nous nous en rendons compte, nous en payons la note dans le budget de l’État et l’on cherche des économies partout pour compenser cette suppression, sans pour autant prévoir un financement.

L’indigence de la réponse de Mme la ministre s’inscrit dans ce débat, tiré vers le bas à l’époque et qui l’est encore aujourd’hui.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Même si, sur le fond, je comprends assez bien l’idée de notre collègue Thomas Dossus, je ne voterai pas cet amendement, en premier lieu parce que, le rapporteur l’a rappelé, ce n’est pas l’objet de notre texte.

Je souhaite néanmoins appeler l’attention de chacun sur le fait que, pendant plus de quinze ans, plusieurs d’entre nous, dans cet hémicycle, ont tenté de réformer la contribution à l’audiovisuel public. Or les gouvernements de droite comme de gauche, bien qu’hostiles à la redevance, ne l’ont jamais engagée, parce que Bercy avait décidé que, quoi qu’il arrivât, on ne ferait pas de réforme.

Mme Catherine Morin-Desailly. Même François Hollande, qui avait conclu en 2014 un colloque au Conseil supérieur de l’audiovisuel en indiquant qu’il ferait la réforme de la redevance, ne l’a jamais faite !

Par ailleurs, monsieur Dossus, il n’est pas tout à fait exact que la contribution à l’audiovisuel public fût socialement injuste : il y avait tout de même plus de 4,5 millions de foyers qui ne la payaient pas. En revanche, ce en quoi elle était injuste, c’est qu’elle ne reposait pas sur l’ensemble des écrans recevant la télévision. Là est la véritable injustice, c’est la fracture numérique qui pose un problème et qui justifie une réforme. Est-ce possible ou non ? Je n’en sais rien…

En tout état de cause, je suis d’accord avec le rapporteur, l’objet de nos débats est de voter ce texte sans modification.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par MM. Bacchi, Lahellec, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Remplacer les mots :

Un montant déterminé d’une imposition de toute nature

par les mots :

Le pourcentage d’une imposition de toute nature dont le montant est défini par une loi de programmation conformément à l’alinéa 21 de l’article 34 de la Constitution

La parole est à M. Jérémy Bacchi.

M. Jérémy Bacchi. Nous sommes opposés à la modification apportée par la commission à l’article 1er, la rédaction initiale nous paraissant plus conforme à l’ambition des auteurs de ce texte.

Dorénavant, avec la mention d’un « montant déterminé », les recettes affectées à l’audiovisuel public seraient modifiables chaque année. Cela nous paraît de nature à remettre en cause la sanctuarisation d’un budget, indépendant du pouvoir politique, consacré au service public de l’audiovisuel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Il s’agit de la fraction dynamique versus le montant.

Je l’ai expliqué dans mon propos liminaire, cette fraction dynamique est potentiellement dangereuse, car elle peut être à la hausse comme à la baisse. Nous avons donc choisi de privilégier le montant, qui a le mérite de fixer les choses très clairement : avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis, madame la présidente. Le montant est plus prévisible et protecteur.

(M. Loïc Hervé remplace Mme Sylvie Vermeillet au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé

vice-président

M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.

M. Cédric Vial. La position que défend mon collègue Bacchi est celle de Bercy : il doit probablement s’agir d’une erreur… (M. Jérémy Bacchi lève les bras au ciel en souriant.)

M. Jean-François Husson. Il aime bien Bercy !

M. Cédric Vial. La commission a souhaité préciser mon texte initial pour le rendre plus protecteur en proposant un montant en valeur absolue, donc fixe, car la dynamique d’une taxe peut être à la hausse ou à la baisse.

Bercy souhaitait une fraction avec un plafond et un plancher pour éviter que cette hausse ne soit trop forte ou trop basse. Or que se passe-t-il quand on vote une fraction avec un plafond et un plancher ? Cela signifie qu’entre les deux un curseur se balade… Et par qui est-il fixé ? Par Bercy ou, à tout le moins, par le Gouvernement, ce qui revient à une forme de budgétisation, c’est-à-dire exactement ce que l’on veut éviter.

Nous proposons donc de sanctuariser le montant par un vote du Parlement, qui décidera également de la somme à affecter à chaque société publique. Par ailleurs, ce montant sera garanti. C’est ce que souhaitent les médias publics pour préserver leur indépendance.

Après plusieurs phases de réflexion, nous avons à présent la conviction qu’il s’agit de la manière de fonctionner la plus protectrice pour le secteur.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public
Article 2

Après l’article 1er

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par MM. Bacchi, Lahellec, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. - Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l’article 2 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent II, les organismes de l’audiovisuel public peuvent faire l’objet de l’affectation d’une imposition de toute nature. Cette imposition ne peut résulter que d’une disposition d’une loi de finances. »

II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Jérémy Bacchi.

M. Jérémy Bacchi. Comme je l’ai rappelé dans mon propos liminaire, l’audiovisuel public est un service public essentiel pour notre démocratie.

Un audiovisuel public fort améliore la connaissance des citoyens sur les affaires publiques, favorise la réduction des inégalités en termes d’information et entraîne une couverture de l’actualité plus diversifiée et plus critique, mais à la condition qu’il soit suffisamment financé et protégé.

Le dispositif qui nous est proposé ne répond qu’en partie à l’impératif d’indépendance dans la mesure où l’audiovisuel public reste tributaire de la fluctuation des recettes.

Pour autant, il existe d’autres solutions que le recours à la TVA ou à une taxe reposant sur le foyer au sens de la taxe d’habitation, comme cela a été le cas pour la redevance. Je pense, par exemple, à une taxe sur le foyer, au sens fiscal du terme. Or il est contraire à la Lolf de proposer une recette autre que la fraction d’une recette déjà existante.

Le caractère encore perfectible du dispositif proposé dans ce texte tient sans doute en partie à l’urgence d’éviter toute budgétisation de l’audiovisuel. Toujours est-il qu’il serait très regrettable de clore le débat sur la création d’une nouvelle recette au bénéfice direct de l’audiovisuel public.

C’est en ce sens que nous proposons cet amendement visant à permettre aux parlementaires d’avoir ce débat à l’occasion d’un projet de loi de finances et de défendre ainsi d’autres propositions de recettes affectées au service public de l’audiovisuel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. L’adoption de cet amendement aurait exactement le même effet que celle de l’amendement n° 2, à l’article 1er. C’est toujours la même fraction de TVA dynamique contre le montant : avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, ministre. Même avis, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 7, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme Ollivier, M. Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa du I de l’article 21 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les opérations relatives aux organismes du secteur public de la communication audiovisuelle créés par la loi sont retracées dans les mêmes conditions sur un unique compte d’affectation spéciale. »

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. En complément du financement proposé à l’article 1er, cet amendement vise à prévoir à l’article 21 de la loi organique relative aux lois de finances la création d’un compte d’affectation spéciale pour les services audiovisuels publics.

La Lolf prévoit déjà des dispositifs similaires pour les opérations financières liées aux participations de l’État et aux pensions.

Cet amendement vise à isoler les dépenses liées aux services publics audiovisuels du reste des dépenses de l’État, l’idée étant de mieux garantir leur indépendance budgétaire.

Il vise également à permettre d’abonder à l’avenir ce compte d’affectation spéciale par d’autres recettes que celles qui sont prévues à l’article 1er. Je crains en effet que la solution de l’affectation d’une part de TVA ne soit pas compatible avec l’exigence d’indépendance prévue par le règlement européen du 11 avril 2024.

Au travers de cet amendement, je vous propose de ne pas clore ce débat, ici, aujourd’hui, dans l’urgence, et de discuter prochainement de la possibilité de créer un compte d’affectation spéciale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. C’est une sorte de redevance déguisée : faute d’avoir pu entrer par la porte, on cherche à passer par le vasistas… (Sourires.)

Quoi qu’il en soit, ma chère collègue, tout cela serait inopérant puisque l’article 1er a été validé…

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, ministre. Il existe déjà un compte de concours financier : avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 7.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 1er
Dossier législatif : proposition de loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public
Article 3 (début)

Article 2

(Supprimé)

M. le président. L’amendement n° 6, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, M. G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au quatrième alinéa de l’article 6 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, après le mot : « profit », sont insérés les mots : « de la chaîne culturelle européenne, ».

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à rétablir l’article 2, supprimé en commission, qui permettait de créer une modalité de financement spécifique à la chaîne culturelle européenne Arte.

Cette chaîne occupe une place singulière dans notre paysage audiovisuel comme dans le paysage audiovisuel européen. Elle est le fruit d’un partenariat franco-allemand, qui repose sur un équilibre délicat entre les financements des deux pays. Ce modèle binational implique des engagements financiers des deux côtés du Rhin. Il nous paraissait essentiel de garantir un financement sécurisé et spécifique pour Arte France afin de préserver cet équilibre.

La création d’un prélèvement sur recettes permettrait de mettre cette chaîne à l’abri des aléas liés au mode de financement de l’audiovisuel public. L’objectif est simple : il s’agit de préserver les ressources pour garantir la pérennité de ce modèle unique de coopération culturelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Une nouvelle fois, un PSR n’est pas davantage protecteur que la fiscalité.

Par ailleurs, l’adoption de cet amendement reviendrait à mettre Arte sur le même plan que les collectivités et l’Union européenne. N’est-ce pas un peu déséquilibré ?

Enfin l’État est actionnaire à 100 % d’Arte France.

M. Roger Karoutchi. Tout à fait !

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Je comprends votre démarche, mais elle n’est pas opérante. Je suis donc opposé à l’idée d’un PSR. Au moment où il est question de fusion, l’audiovisuel public doit rester un et indivisible.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, ministre. Je souscris aux excellents arguments de M. le rapporteur. L’audiovisuel public doit être un et indivisible et il n’y a aucune raison pour qu’Arte soit logée à une enseigne différente. Par ailleurs, l’État est effectivement actionnaire à 100 % d’Arte France.

M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour explication de vote.

Mme Monique de Marco. Je ne suis pas du tout convaincue par les arguments du Gouvernement et de la commission. Lors de son audition, M. Patino, président d’Arte France, a rappelé que le traité interétatique devait respecter l’indépendance financière de la chaîne. Or, selon lui, un PSR serait plus conforme, Arte étant un cas spécifique par sa gouvernance et son financement.

En outre, un PSR peut être assorti d’une prévision sur plusieurs années.

La création d’un tel prélèvement a été proposée à l’Assemblée nationale, mais également par M. Cédric Vial pour répondre aux exigences du traité franco-allemand ayant donné naissance à la chaîne Arte. Or M. Hugonet nous explique que cela n’apporterait aucune garantie supplémentaire… J’aimerais comprendre !

Je me permets enfin de vous rappeler que le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) est défavorable à la solution proposée aujourd’hui.

M. Jean-François Husson. Nous sommes au Sénat !

M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.

M. Cédric Vial. Monsieur Dossus, madame de Marco, je vous remercie de vouloir rétablir ma rédaction initiale : je vous en cède très volontiers les droits d’auteur. (Sourires.)

Je me suis en effet posé les mêmes questions que vous, tout comme d’ailleurs nos collègues députés Quentin Bataillon et Jean-Jacques Gaultier, dont j’ai repris le texte.

Nous avons discuté avec M. le rapporteur de la question de savoir si Arte devait rester dans le droit commun et continuer à être financée par une fraction de la TVA. Je n’y ai été favorable qu’à une seule condition : que cela ne pose pas de problème diplomatique, politique ou d’organisation pour Arte. J’ai obtenu des assurances sur ce point.

Par ailleurs, comme l’a souligné M. le rapporteur, il serait en effet disproportionné de mettre symboliquement Arte sur le même plan que les collectivités territoriales ou l’Union européenne.

De surcroît, nous avons acquis la certitude lors des auditions et des discussions que le maintien de l’affectation d’une fraction de TVA à Arte France était plus protecteur que la création d’un PSR, qui était la solution préconisée par Bercy – ce qui doit nous mettre la puce l’oreille… (Sourires.)

Je n’aurais pas soutenu la suppression de cet article sans la certitude que cette solution protégerait Arte. Voilà pourquoi je rejoins aujourd’hui la position défendue par M. le rapporteur.