M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Madame la ministre, vous m’avez demandé sur quels faits se fondait l’argument que j’ai exposé lors de notre précédente discussion, selon lequel les salariés qui souhaitent reprendre leur entreprise n’ont pas accès au crédit.

Quels sont « les principaux risques à envisager lors d’une opération de reprise d’entreprise » ? Les voici : l’insuffisance d’actif ou la création d’un passif ayant pour origine la gestion antérieure ; la difficulté d’accès au crédit ; la recréation de l’activité à l’extérieur par le cédant ; la perte de substance dans l’entreprise ; le départ d’un cadre ; la dépréciation des stocks.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Ça vient d’où, ça ?

M. Fabien Gay. Ce n’est pas moi qui le dis : vous trouvez ces risques énumérés sur le site de Bpifrance, qui, si je ne me trompe, est le bras armé du Gouvernement !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Non, c’est le bras armé des entrepreneurs de France…

M. Fabien Gay. C’est le bras armé de la politique gouvernementale, ce qui n’est pas grave ! Vous m’avez demandé mes sources : les voilà.

Je vous repose donc la question : si l’on met de côté les « y a qu’à » et les « on m’a dit que », quels sont les faits exacts sur lesquels vous vous appuyez pour montrer que ce droit des salariés à être informés au plus tard deux mois avant la vente de leur entreprise met en difficulté les projets de reprise ? Je veux des faits : c’est important.

Par ailleurs, nous partageons les propos de nos collègues des groupes socialiste et écologiste : vous nous dites que ce dispositif d’information préalable ne fonctionne pas et que par conséquent il faut réduire encore le délai.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Décidément, vous avez du mal à comprendre…

M. Fabien Gay. En un sens, la droite sénatoriale, elle, est plutôt cohérente : elle propose de supprimer ce qui, à ses yeux, ne fonctionne pas. Quant à vous, madame la ministre, considérant que le dispositif ne fonctionne pas, vous proposez de réduire le délai d’un mois.

De deux choses l’une : soit ce délai d’information n’est pas propice au plein développement des reprises, auquel cas il faut améliorer le droit – nous nous rallierons nous aussi à l’amendement de notre collègue Poncet Monge –, soit, s’il veut faire preuve de cohérence, le Gouvernement devrait, comme la droite sénatoriale, proposer la suppression totale de la disposition dont nous débattons – les choses, au moins, seraient plus nettes. (Mme la ministre déléguée proteste.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 476.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 213 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 227
Pour l’adoption 38
Contre 189

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 376, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dossus, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

I. – Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 141-23, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « quatre » ;

2° À l’avant-dernier alinéa de l’article L. 23-10-1, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « quatre » ;

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut comprendre notre vote précédent à la lumière de celui qui va suivre.

Selon BPCE L’Observatoire, chaque année, 60 000 entreprises changent de mains. La vaste majorité d’entre elles sont des TPE-PME, qui peinent souvent à trouver des repreneurs extérieurs. Comme le souligne CCI France, « la plupart des repreneurs visent une entreprise ayant au minimum dix salariés et réalisant plus de 1 million d’euros de chiffre d’affaires annuel, mais les entreprises ayant de telles caractéristiques représentent moins de 10 % des offres disponibles ».

Ainsi, sachant que, selon Bpifrance, les salariés, eu égard à leur savoir-faire, sont souvent les mieux positionnés pour reprendre correctement l’entreprise, l’enjeu de la reprise est patent s’agissant de protéger les emplois et de contrer les risques de délocalisation. Le renforcement des capacités de reprise par les salariés devient donc un enjeu social.

Or, malgré ces données, et en dépit du fait qu’il existe de nombreux exemples d’entreprises reprises par leurs salariés grâce au dispositif de la loi Hamon – je vous renvoie au détail de l’objet de mon amendement, mes chers collègues –, la commission a décidé de l’abroger en partie.

Les limites de ce dispositif, qui sont réelles, se trouveraient aggravées par l’adoption de l’amendement du Gouvernement : réduire ou supprimer le délai d’information préalable des salariés ne constitue en rien une solution dans la lutte contre la disparition des entreprises.

C’est plutôt en déterminant ce qui limite le dispositif que nous pourrons répondre partiellement au problème. En l’occurrence, selon nous, le délai applicable à l’obligation d’information des salariés, qui est de deux mois, est bien trop court.

À rebours de ce qui est proposé par le Gouvernement, l’augmentation de cette durée pourrait permettre de consolider les projets de reprise et les montages financiers afférents, qui ont leurs difficultés spécifiques, et d’assurer ainsi le succès de ces projets, ce qui préserverait l’emploi de centaines de milliers de salariés.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Fantasmes !

Mme Raymonde Poncet Monge. Je pense ici aux entreprises qui n’ont pas été reprises, que ce soit par les salariés ou par d’autres repreneurs, et qui ont tout simplement dû fermer.

Nous proposons donc, par cet amendement, de porter le délai applicable au droit d’information des salariés à quatre mois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La commission spéciale est pour la suppression totale du délai d’information préalable. En outre, nous venons de voter contre l’amendement qui visait à le rétablir en le fixant à un mois. À plus forte raison, nous ne saurions évidemment accepter qu’il soit porté de deux à quatre mois.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. À l’heure actuelle, ce dispositif ne fonctionne tout simplement pas, que le délai d’information soit fixé à soixante jours ou à zéro jour : 19 Scop ont été issues de la reprise d’une entreprise en difficulté et 55 ont été issues de la transmission d’une entreprise saine en 2019, madame la sénatrice. L’évolution observée entre 2017 et 2023 est assez éclairante : le nombre de reprises d’entreprises par les salariés a décru de 20 % à 30 %. Cela ne fonctionne pas !

L’U2P et la CPME nous l’ont très clairement dit, et cette question est au cœur de leurs propositions : ce dispositif est identifié par le chef d’entreprise comme un frein à la cession.

S’il y a bien une chose sur laquelle nous sommes tous d’accord, me semble-t-il, c’est que la cession de 350 000 entreprises au cours des dix prochaines années nous oblige à revoir ce dispositif.

J’entends bien quel est l’enjeu du côté du salarié, et il est tout à votre honneur de le souligner, mais je rappelle que le présent texte est aussi destiné aux entreprises et aux entrepreneurs… (Exclamations sur les travées des groupes GEST et SER.)

M. Thomas Dossus. On avait compris !

Mme Raymonde Poncet Monge. Il n’est même que ça !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Non, il ne leur est pas exclusivement destiné, madame la sénatrice : il sert aussi les salariés. Mais il est temps que l’on aide les entrepreneurs, notamment les petits.

M. Simon Uzenat. C’est cela…

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Il faut bien des entrepreneurs pour reprendre les entreprises. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

M. Michaël Weber. C’est fou !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. J’y insiste, un délai d’information des salariés plus long est de nature à compromettre la vente. Il risque de dissuader les potentiels acquéreurs.

Je vous aurais bien invités à y travailler avec moi, mesdames, messieurs les sénateurs, mais je n’ai pas le sentiment que vous en ayez envie,… (Protestations sur les mêmes travées.)

Mme Raymonde Poncet Monge. C’est quand vous voulez !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. … ce qui est dommage.

Voici tout ce que nous nous disons depuis bientôt une heure sur l’article 6 : il existe un délai d’information qu’il me paraît important de préserver, et pas seulement à l’aune du droit européen. Et il y a une réalité sur laquelle nous sommes à peu près d’accord : ce dispositif pourrait mieux fonctionner, pour le dire positivement.

M. Fabien Gay. On est d’accord là-dessus !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Très prosaïquement, en préparant ces débats, je me suis dit que nous pourrions envisager la création d’une mission sur la transmission-reprise étudiant les cas où l’entreprise est transmise aux salariés ou reprise par eux.

Pourquoi ne pas y travailler ensemble, pour essayer de voir ce qui fonctionne et ce qui pourrait mieux fonctionner ? Mais ce n’est qu’une proposition…

M. Fabien Gay. Je suis disponible !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Quant à l’avis du Gouvernement sur cet amendement, vous l’aurez compris : il est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

M. Michel Canévet. Les membres du groupe écologiste évoquent, dans l’objet de leur amendement, un certain nombre d’exemples de reprise d’entreprise par les salariés. Sont cités notamment, pour ce qui concerne le Finistère, la reprise de l’entreprise de bâtiment Le Berre-Joncour, à Pont-l’Abbé, que je connais particulièrement bien, car j’ai moi-même accompagné sa reprise par les salariés.

Or je ne voudrais pas laisser croire que la majorité sénatoriale serait contre la reprise des entreprises par les salariés. Bien au contraire, nous souhaitons l’encourager. Mais nous considérons tout simplement que la méthode qui est actuellement retenue pour favoriser les reprises, c’est-à-dire celle de la loi Hamon, n’est pas la bonne. Sa mise en œuvre peut au contraire conduire à la destruction d’un certain nombre d’entreprises, en tout cas à leur non-reprise.

Nous souhaitons quant à nous encourager le climat de confiance qui a été instauré dans les entreprises pour ce qui concerne la reprise par les salariés. Mais ni l’amendement qui a été défendu par le Gouvernement ni encore moins celui dont nous sommes en train de débattre ne sont de nature, à notre sens, à permettre que de tels dossiers aboutissent. C’est pourquoi nous ne pouvons que nous y opposer.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. J’ai déjà indiqué tout à l’heure que notre groupe voterait cet amendement.

Madame la ministre, nous travaillons tous ici dans un esprit de coconstruction de la loi. Je ne voudrais pas vous fâcher : nous ne sommes pas là pour ça… (Sourires.) Nous sommes là pour réfléchir et pour examiner ensemble les problèmes, non pour vous heurter.

Or, après avoir tout d’abord suggéré que vous pourriez être en désaccord sur ce point avec le ministre Le Maire, vous nous dites tout à coup, quand arrive en discussion l’amendement un peu « dur », celui qui a pour objet d’étendre le délai de la loi Hamon en le portant à quatre mois, que le dispositif ne fonctionne pas en réalité, car les reprises, qu’il convient de ne pas freiner, sont peu nombreuses. Et l’on sent qu’en définitive vous seriez tout de même assez d’accord avec Bruno Le Maire… Voilà qui est difficile à entendre.

C’est cela qui nous perturbe : il n’y a de notre part aucun manque d’envie de travailler avec vous. Personne ici ne nie la réalité que vivent les entreprises ; il n’y a pas, dans cet hémicycle, d’un côté ceux qui connaîtraient bien la vie des entreprises et, de l’autre, ceux qui la connaîtraient moins bien. Notre groupe comprend des sénateurs qui connaissent aussi bien la vie de l’entreprise que vous-même, madame la ministre, et que certains de nos collègues d’autres groupes.

Par ailleurs, pour avoir participé aux débats parlementaires sur la future loi Hamon en 2014, j’entends aujourd’hui, exactement réitérés, les mêmes arguments qu’à l’époque. Bien sûr, personne n’est contre le droit d’information préalable. Bien sûr, personne n’est contre la reprise des entreprises par les salariés. « Mais quand même », ne manque-t-on pas d’ajouter… « Mais quand même pas comme ça », « mais quand même pas maintenant », « mais quand même pas un droit assorti d’un délai aussi long ».

Soyons tous constructifs ! En l’occurrence, nous pensons que cette loi avait une raison d’être. Même si elle ne résout pas à elle seule tous les problèmes économiques de notre pays, et certainement pas celui du chômage, cette raison d’être est toujours valable.

C’est la raison pour laquelle nous voterons cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou, pour explication de vote.

M. Christophe Chaillou. Madame la ministre, votre intervention a suscité chez moi une certaine perplexité. Pour vivre en ce moment même, dans mon département du Loiret, une situation très complexe liée au dépôt de bilan de la verrerie Duralex, et eu égard aux grandes difficultés qu’il y a à mobiliser, notamment le secteur privé, je puis vous le dire : heureusement que, en l’espèce, il y a des salariés qui se sont retroussé les manches et qui travaillent ardemment, avec le soutien d’ailleurs du directeur de l’entreprise, pour créer une Scop.

Aussi est-il difficile de vous entendre dire, madame la ministre, que ce dispositif ne fonctionne pas et qu’il n’est pas une solution. Il est heureux qu’il existe pour répondre à un certain nombre de situations ! Il faut donc donner du temps aux salariés, car c’est accroître leurs chances de reprendre l’entreprise, ce qui est loin d’être évident : cela nécessite des moyens particuliers.

Je veux au passage saluer la mobilisation, localement, des services de l’État pour accompagner le projet de reprise que j’ai évoqué. Je ne sais s’il aboutira concrètement, car d’autres offres ont été déposées. En tout état de cause, j’y insiste, il est des situations où la reprise par les salariés est bel et bien une solution.

Que des salariés d’un certain nombre d’entreprises, confrontés au peu d’offres de reprise, travaillent ensemble pour essayer de trouver une solution, voilà qui mérite d’être pleinement pris en compte, respecté et encouragé.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Évacuons un point : le débat contradictoire n’est pas grave ; il est même l’essence d’une démocratie, aussi longtemps que ce sont des arguments qui sont échangés. D’ailleurs, les désaccords sont plutôt une bonne chose : c’est ainsi que l’on arrive à trouver des solutions aux problèmes. Comme nous allons passer une longue journée et une longue nuit ensemble, madame la ministre,…

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Ce n’est que le début ! (Sourires.)

M. Fabien Gay. … le mieux est d’aplanir ce différend.

Nous parvenons au terme de ce débat et nous n’aurons pas réussi à tomber d’accord quant au cœur même du sujet. Le droit d’information préalable des salariés, tel qu’il existe, n’est pas satisfaisant ; il ne règle pas tous les problèmes. Faut-il, pour atteindre nos objectifs, le restreindre ou plutôt l’étendre ?

De toute façon, cela a été dit, même si ce droit était élargi – nous y sommes favorables et nous voterons évidemment l’amendement de nos collègues écologistes –, cela ne réglerait pas tous les problèmes, nous le savons bien, y compris sur les travées de la gauche.

Un tel élargissement permettra peut-être à des salariés de reprendre leur entreprise – ou non, car ma collègue socialiste a raison : ce n’est pas parce qu’ils disposent d’un droit d’information préalable en cas de cession de leur entreprise que tous les salariés de France et de Navarre lèveront la main si émerge un projet de reprise.

De nombreuses questions restent, quoi qu’il arrive, en suspens – j’ai déjà évoqué l’accès au crédit. La reprise peut par ailleurs prendre diverses formes, selon qu’elle concerne un ou plusieurs salariés ou qu’elle se fait sous le statut de Scop – c’est le modèle des ex-Fralib, que nous connaissons bien, qui suppose de surmonter des difficultés particulières.

Je reprends au bond votre proposition, madame la ministre : travaillons-y collectivement.

Mme Raymonde Poncet Monge. Nous y sommes prêts !

M. Fabien Gay. La délégation sénatoriale aux entreprises a beaucoup travaillé sur la question de la transmission ; s’il faut remettre l’ouvrage sur le métier en vue d’un texte spécifique portant sur cette question-là, allons-y !

Nous y sommes prêts, et nombre de nos collègues seront volontaires ; nous sommes même d’accord pour travailler avec M. Canévet ! (Sourires. – M. Guislain Cambier applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. J’abonderai dans le sens de mes collègues.

Pour ce qui est du constat, on nous dit qu’un délai de zéro jour n’est pas satisfaisant, qu’un délai de soixante jours ne l’est pas, non plus qu’un délai de cent vingt jours ! Je continue à ne pas comprendre votre logique, madame la ministre : pourquoi trente jours seraient-ils le bon niveau ? Comme le disait tout à l’heure Fabien Gay, on ne sait pas selon quels critères est déterminée cette modification du délai, dont je ne vois pas non plus en quoi elle serait une simplification.

Je rebondis par ailleurs sur votre proposition : donnons-nous le temps nécessaire pour travailler à la bonne formule.

Nous l’avons dit à plusieurs reprises hier lors de la discussion générale : le temps qui a été consacré à l’examen des vingt-huit articles du projet de loi initial s’est révélé insuffisant ; il ne nous a pas permis de mener à bien toutes les auditions nécessaires et d’achever l’étude des propositions qui nous sont soumises. Nous ne faisons ici que payer le prix d’une telle précipitation.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 376.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 214 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l’adoption 113
Contre 228

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’article 6.

(Larticle 6 est adopté.)

Article 6
Dossier législatif : projet de loi de simplification de la vie économique
Article 7 (supprimé)

Après l’article 6 (priorité)

M. le président. L’amendement n° 164 rectifié, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Folliot, Fargeot, Burgoa, Khalifé, Anglars, Karoutchi, Milon et H. Leroy, Mmes Jacques et Herzog, MM. Panunzi, Laugier, Duffourg et Brisson, Mmes Josende, Romagny et Petrus, MM. Mandelli, Favreau et Laménie, Mme Belrhiti, M. Tabarot, Mme Bonfanti-Dossat et MM. J.B. Blanc et Somon, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 210-2 du code de commerce, il est inséré un article L. 210-2-… ainsi rédigé :

« Art. L. 210-2-…. – Lors de la création d’une société, les associés doivent être informés de la possibilité d’insérer dans les statuts une clause prévoyant la prorogation tacite de la durée de vie initiale de la société. Cette clause doit préciser que, sauf opposition des associés représentant au moins un tiers du capital social, la durée de vie de la société est renouvelée automatiquement pour une période égale à la durée initiale.

« Un an avant la date d’expiration de la durée de vie de la société, le greffe du tribunal de commerce notifie aux associés ou actionnaires l’imminence de cette échéance. Cette notification rappelle les démarches nécessaires pour la prorogation de la société, y compris la possibilité de recourir à la clause de prorogation tacite mentionnée au précédent alinéa. »

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement vise à introduire une clause de prorogation tacite de la durée de vie d’une société.

Chacun sait que la durée de vie d’une société, définie par ses statuts, n’est jamais indéterminée, mais qu’elle est limitée à quatre-vingt-dix-neuf ans en vertu de l’article L. 210-2 du code de commerce. Aujourd’hui, il n’existe que deux voies, prévues par l’article 1844-6 du code civil, pour proroger la durée de vie d’une société, mais elles sont toutes deux suspendues à une démarche expresse et positive de la part des associés.

La première solution est un vote à l’unanimité des associés ou, si les statuts le prévoient, à la majorité, qui doit avoir lieu au moins un an avant la date d’expiration initiale de la société.

La seconde a été créée par la loi du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés ; elle intervient sur saisine du président du tribunal de commerce, qui peut valider la prorogation rétroactivement dans les douze mois suivant la fin de vie statutaire de la société.

À défaut de prorogation, la société perd sa personnalité morale, et tous ses actes ultérieurs sont frappés de nullité. Cette situation est source d’insécurité juridique, tant pour la société que pour ses créanciers. Or elle n’est pas exceptionnelle, qu’elle survienne par manque d’information ou par négligence.

Nous proposons donc, par cet amendement, une mesure de simplification visant à éviter que des sociétés ne disparaissent dans ce genre de situations : une clause de prorogation tacite qui serait insérée dans les statuts et une notification obligatoire mise à la charge des greffes aux fins d’informer les associés, un an avant la fin prévue de la société, de la nécessité d’entamer des démarches pour la proroger en temps voulu.

Grâce aux nouvelles technologies, une telle notification pourrait se faire de façon très simple, sous la forme d’une alerte informatique.

Cette mesure de simplification, qui permettrait de réduire les démarches et les coûts associés à la prorogation pour les associés ou les actionnaires, constitue aussi une protection de la société, en particulier en cas de transmission-reprise.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Catherine Di Folco, rapporteur. N’ayant pas eu le temps d’expertiser cette disposition, la commission spéciale s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, des échanges que nous avons eus à l’article 6, y compris de la part d’humour à laquelle ils ont donné lieu. Madame la sénatrice Linkenheld, nous ne saurions nous fâcher : nous allons passer toute la journée ensemble ! J’apprécie toujours le débat, même lorsque j’en sors perdante. (Sourires.)

Pour ce qui concerne votre proposition de supprimer la limitation de la durée de vie des sociétés, madame la sénatrice Aeschlimann, je rappelle que cette limite résulte d’un principe important prévu par notre code civil, celui de la prohibition des engagements perpétuels.

Nous avons consulté 75 organisations professionnelles et reçu de leur part 1 500 propositions, et cette mesure de renouvellement obligatoire du pacte social par période de quatre-vingt-dix-neuf ans n’a jamais été mentionnée comme étant une formalité qui pèserait sur la bonne marche de l’entreprise.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 164 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré, dans le projet de loi, après l’article 6.

L’amendement n° 6, présenté par M. Karoutchi, Mme Chain-Larché, MM. Cuypers, Cambon, Milon et Burgoa, Mme Lavarde, MM. Sido, D. Laurent et Levi, Mme Malet, MM. Laugier, Anglars et de Legge, Mmes Eustache-Brinio, Imbert et Romagny, MM. Saury et Meignen, Mme Aeschlimann, MM. Daubresse, H. Leroy et Paul, Mmes Devésa, Micouleau et Billon, M. Genet, Mmes Dumas, Bonfanti-Dossat et Josende, M. Henno, Mme Canayer, MM. Belin, Brisson, Savin, Panunzi et Lefèvre et Mmes Dumont et Schalck, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre unique du titre Ier du livre Ier de la première partie du code du travail est abrogé.

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Le calcul des effectifs des entreprises détermine un certain nombre d’obligations.

Or ce calcul se fait parfois en application de dispositions du code du travail, parfois en application d’autres dispositions, inscrites dans le code de la sécurité sociale. Notre idée est donc la suivante : simplifions – c’est le cas de le dire ! – et faisons en sorte d’arrêter les contradictions et les confusions, afin que l’ensemble des calculs se fasse sur la base des articles du code de la sécurité sociale qui ont trait à cette question.