Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article 1er constituant l’ensemble de la proposition de loi ouvrant la possibilité de concilier une activité professionnelle avec la fonction d’assistant familial.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 205 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 247
Pour l’adoption 246
Contre 1

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Mme Catherine Conconne applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je souhaite d’abord, en conclusion de ce débat, saluer l’initiative de notre collègue Xavier Iacovelli et du groupe RDPI. Le texte est désormais voté.

Je veux, bien entendu, féliciter chaleureusement notre rapporteure, dont c’était le premier gros dossier. Je la remercie de sa capacité d’écoute. (Applaudissements sur les mêmes travées.)

Un certain nombre d’arguments ont été avancés dans les débats. Je retiens surtout que c’est une brique dans la prise en charge – enjeu fondamental – des enfants, dans un contexte extrêmement compliqué.

Madame la ministre, nous vous avons entendue vous engager, ce soir, à publier rapidement les décrets d’application et à dialoguer avec l’ensemble des partenaires ; je pense notamment aux départements et aux associations. Nous comptons sur vous pour que l’engagement que vous avez pris permette de lever les nombreux questionnements et doutes exprimés sur diverses travées de notre hémicycle !

Par ailleurs, nous avons de nouveau travaillé, ce soir, sur une proposition de loi. De fait, nous attendons toujours l’initiative gouvernementale sur l’enjeu fondamental qu’est la protection de l’enfance, notamment en ce qui concerne l’attractivité des métiers.

Nous sommes heureux d’y avoir contribué, par une petite pierre, mais il faut désormais apporter une réponse globale. Nous vous attendons, madame la ministre, sur ce grand enjeu. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de Mme Sylvie Vermeillet.)

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi ouvrant la possibilité de concilier une activité professionnelle avec la fonction d'assistant familial
 

7

La France a-t-elle été à la hauteur des défis et de ses ambitions européennes ?

Débat organisé à la demande du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, sur le thème : « La France a-t-elle été à la hauteur des défis et de ses ambitions européennes ? ».

Nous allons procéder au débat sous la forme d’une série de questions-réponses, dont les modalités ont été fixées par la conférence des présidents.

Je rappelle que l’auteur de la demande dispose d’un temps de parole de huit minutes, puis le Gouvernement répond pour une durée équivalente.

À l’issue du débat, l’auteur de la demande dispose d’un droit de conclusion pour une durée de cinq minutes.

Dans le débat, la parole est à M. Didier Marie, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Didier Marie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que la neuvième législature du Parlement européen se conclut dans quelques jours, mes collègues du groupe socialiste et moi-même avons souhaité que se tienne ce débat de contrôle sur l’action du Gouvernement à l’échelle de l’Europe durant cette période.

Nous nous étonnons que vous n’ayez pas souhaité, monsieur le ministre, faire le bilan de cette législature devant le Parlement, ce qui aurait permis de dresser un tableau détaillé de l’action gouvernementale et de rendre compte à la représentation nationale de l’ensemble des décisions prises.

Alors que nos concitoyens sont parfois critiques envers l’Union européenne et ses institutions, et l’expriment au travers de leurs intentions de vote pour le 9 juin prochain en plaçant l’extrême droite largement en tête, il me semble que nous leur devons la plus grande transparence et la plus grande honnêteté sur le rôle de notre pays dans des décisions européennes qui ont des conséquences directes sur leur quotidien.

Nous entendons aujourd’hui la majorité se tresser des louanges sur son action au Parlement européen et au Conseil de l’Union, faisant siennes toutes les avancées réalisées durant ces cinq années. Si la France en a accompagné une part significative, elle n’en aura été que trop rarement à l’initiative, quand elle ne les a pas combattues.

On aura entendu pendant ces cinq années de grands et beaux discours proeuropéens, mais nous n’en avons pas beaucoup vu la traduction en actes.

L’Union européenne est pourtant à un tournant de son histoire. Menacée à ses frontières, attaquée sur ses valeurs et sur l’État de droit, concurrencée économiquement par des puissances étrangères qui mènent des actions déloyales, confrontée aux effets concrets du dérèglement climatique, elle fait face à de nombreux défis et combats. En son sein même, le manque de cohésion, le retour des égoïsmes, la poussée des populismes et des nationalismes sont des sources d’inquiétude et méritent des réponses qui soient à la hauteur.

Pourtant, lors des situations de crise de ces dernières années, l’Union européenne a su montrer le meilleur d’elle-même. Qu’il s’agisse des mesures d’urgence prises pendant la crise du covid-19, du lancement du Green Deal, du renforcement des droits sociaux, de la lutte pour les droits des femmes, de la défense de l’État de droit ou de la promotion de normes à valeur mondiale, elle a su prendre conscience de l’importance de l’action publique face à des logiques économiques dangereuses.

Ces réactions positives sont avant tout le fait des forces proeuropéennes et progressistes, qui ont indéniablement permis à l’Union d’engager un changement de cap, qu’il convient désormais de confirmer.

Malheureusement, le bilan de l’exécutif à l’échelle européenne est pour le moins contrasté. Vous avez certes accompagné la dynamique collective, monsieur le ministre, mais vous vous êtes aussi souvent trouvés en décalage avec les positions de nos partenaires, quand vous n’adoptiez pas une attitude de blocage.

Pour illustrer mon propos, je prendrai l’exemple de plusieurs textes emblématiques récents.

Tout d’abord, en ce qui concerne la directive visant à améliorer les conditions d’emploi des personnes travaillant via une plateforme numérique, la France a été le principal fer de lance de l’opposition à ce texte, qui concerne pourtant près de 30 millions de personnes, dont 5 millions sont particulièrement exploitées et précarisées.

En s’opposant à la présomption de salariat et à toute obligation de contrôle, la France s’est clairement positionnée contre l’amélioration des droits sociaux des travailleurs et porte aujourd’hui la responsabilité de l’affaiblissement de ce texte majeur, heureusement adopté.

Ensuite, sur le devoir de vigilance, sujet pour lequel la France est pionnière, le Gouvernement a pesé de tout son poids pour empêcher l’inclusion des acteurs financiers dans le dispositif. Alors que les flux financiers sont mondialisés et qu’ils exercent une influence considérable dans les choix d’investissements des acteurs privés, ce retrait affectera de manière indéniable l’efficacité de cette directive.

Enfin, la France a parfois eu un rôle décisif pour réduire la portée de certains textes renforçant les libertés. Je pense ici à la législation européenne sur la liberté des médias – la France a lutté contre des dispositions ambitieuses portant sur la protection des sources des journalistes – ou encore à la directive contre les violences faites aux femmes, le Gouvernement s’étant opposé à une définition commune du viol fondée sur la notion de consentement, que le Président de la République défend pourtant aujourd’hui.

Je pourrais également citer le règlement établissant des règles harmonisées pour l’intelligence artificielle : le Gouvernement a fortement pesé pour assouplir le cadre réglementaire applicable aux modèles d’intelligence artificielle puissants, alors qu’il paraît indispensable de les encadrer strictement.

En résumé, lorsque la voix de la France a pu être déterminante sur le sort des textes, c’est trop souvent pour en restreindre la portée et rendre le champ des lois européennes moins protecteur pour les travailleurs et les libertés.

Par ailleurs, la position ambivalente et contradictoire de la France sur certains sujets a également nui aux ambitions de l’Union européenne.

En premier lieu, sur les politiques environnementales, la France a accompagné positivement l’émergence du Pacte vert pour l’Europe au début de cette législature. Malheureusement, dès les premières contestations de ce grand changement pour l’Union européenne, instrumentalisées par la droite conservatrice et l’extrême droite, l’exécutif français a appelé à une pause réglementaire environnementale et même à des reculs. Je pense, en particulier, à la dernière révision de la politique agricole commune et à la réautorisation du glyphosate pour les dix prochaines années. L’histoire retiendra les conséquences de ces choix, que ce soit pour la vitalité de nos sols ou la santé de nos agriculteurs.

De plus, le retrait de la directive dite SUR (Sustainable Use of Pesticides) relative à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable et celui de la directive dite Reach (Registration, Evaluation, Authorization and Restriction of Chemicals) sur l’encadrement des produits chimiques sont également regrettables.

Dans cette ambivalence des discours dans la lutte contre le changement climatique, l’exécutif a plaidé pour la conclusion d’accords de libre-échange, sans que la France ait défendu l’introduction de clauses miroirs et de sanctions en cas de non-respect des normes sociales, sanitaires et environnementales.

De même, tout attachée à la promotion de la filière nucléaire, la France n’a pas su faire émerger une politique énergétique à la hauteur des enjeux. Les divergences avec l’Allemagne ont mené à une modeste réforme du marché de l’énergie, qui ne remet pas en cause ces deux grands principes que sont l’ordre de mérite et la tarification marginale. Alors que certains pays européens sont encore très fortement dépendants du gaz russe et que la France accuse un considérable retard dans le développement des énergies renouvelables, la politique énergétique doit rester l’une des priorités du prochain mandat de la Commission européenne.

En deuxième lieu, les décisions financières et budgétaires de l’Union européenne sont également décevantes.

Les pays dits frugaux semblent une nouvelle fois avoir gagné cette bataille, avec une réforme du pacte de stabilité conservant les mêmes plafonds d’encadrement de la dette et du déficit public, pénalisant ainsi les politiques d’investissements nationales et la transition écologique.

La France, qui s’est prononcée en faveur de nouveaux investissements nécessitant davantage de ressources propres, notamment pour répondre à l’Inflation Reduction Act (IRA) américain ou aux mesures protectionnistes chinoises, a toujours refusé une taxation des ultrariches au niveau européen et semble avoir cédé sur la taxe sur les transactions financières, pourtant annoncée par l’exécutif. L’échec du fonds souverain pour les investissements est, à ce titre, particulièrement emblématique.

Par ces décisions, l’exécutif français s’incline, malheureusement, devant une orthodoxie budgétaire synonyme d’austérité, qui a toujours pénalisé l’Union européenne et qui risque de fortement nuire à l’Europe de demain.

En dernier lieu, j’évoquerai deux thématiques majeures qui ont pâti de l’absence d’un engagement clair de la France : l’évolution institutionnelle de l’Union européenne et de l’État de droit et, bien sûr, la question de l’élargissement.

Sur le premier point, la conférence sur l’avenir de l’Europe, annoncée sur l’initiative de la France, devait être un tournant institutionnel et démocratique. Malheureusement, près de trois ans plus tard, rien n’est concrètement ressorti de cette conférence, hormis un profond sentiment de désillusion chez nos concitoyens. La France doit réhabiliter et porter bien plus efficacement les conclusions de cette conférence.

Alors que l’extrême droite continue de prendre pied dans de nombreux États membres et que les ingérences étrangères se multiplient, l’Europe doit défendre et renforcer avec vigueur son État de droit. C’est dans ce cadre que le flou de la position française sur l’élargissement pose question, monsieur le ministre.

C’est également le cas pour nos politiques migratoires. Alors que de nombreux États se prononcent dangereusement pour une externalisation de la gestion des migrants, oubliant les risques de clientélisme et d’atteintes aux droits humains dans des pays tiers, la France a été active pour faire aboutir un pacte européen sur l’immigration et l’asile qui ne convient finalement à personne.

Ainsi, à l’aube de cette nouvelle législature, la France se trouve dans une position particulière, isolée sur de nombreux sujets.

En effet, la relation tendue du couple franco-allemand depuis de nombreux mois ne nous permet plus d’être le moteur de l’Europe, et les nombreux différends entre les deux pays ont mené plus à une compétition qu’à la politique de dialogue conduite lors des législatures précédentes. La défense européenne paraît, à ce titre, au cœur du dissensus franco-allemand.

Alors que le principe du soutien de la France à l’Ukraine ne peut pas être critiqué, l’insuffisance des livraisons d’armes et de munitions, les incohérences des discours, notamment sur l’envoi de troupes, ou des décisions stratégiques, à l’image du bouclier antimissile européen, sont particulièrement dommageables dans cette période de fortes tensions pour l’Europe.

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Didier Marie. Cette perte de capacité de la France à être au cœur des compromis, même lors de la présidence française de l’Union européenne, semble nous pousser essentiellement vers la défense de nos intérêts nationaux.

Alors que les enjeux géopolitiques et climatiques appellent à poursuivre l’effort engagé depuis 2020, notre pays doit se repositionner au cœur des compromis et retrouver son orientation progressiste pour permettre l’émergence de textes européens ambitieux. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Je vous remercie, monsieur le sénateur, de donner au Gouvernement l’occasion de faire le bilan de cette législature au moment où celle-ci s’achève, afin que nous puissions nous projeter sur la suivante.

Vous avez évoqué de grands et beaux discours de la France qui n’auraient pas été suivis d’effets. Je vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, de reprendre les termes du discours que le Président de la République prononça dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne en 2017. Nous constaterons ainsi, ensemble, que ses propositions, qui à l’époque embrassaient des sujets face auxquels l’Union européenne semblait totalement impuissante, se sont traduites par des solutions. (M. Patrick Kanner ironise.)

Le Président de la République disait, dans ce discours : « Il y a une souveraineté européenne à construire, et il y a la nécessité de la construire. » Or l’adoption par tous les Européens de ce principe de la souveraineté européenne est une victoire idéologique majeure pour la France depuis sept ans. Alors que ce concept avait été accueilli à l’époque avec une certaine tiédeur, tous – le Conseil européen, la Commission européenne, la coalition allemande – se le sont approprié.

Le Président de la République disait aussi : « Nous devrions définir un salaire minimum adapté à la réalité économique de chaque pays. » Or, depuis 2022, nous avons une législation qui établit des critères pour la fixation dans chaque État membre du bon niveau de salaire minimum.

Le Président de la République disait encore : « Aujourd’hui, l’Europe ne protège pas face au dumping social. […] C’est le sens du combat que je mène aujourd’hui pour réviser la directive sur le travail détaché. » Là encore, l’objectif est tenu : le travail détaché a été régulé en Europe sur le fondement du principe « à travail égal, salaire égal ».

Le Président de la République indiquait également : « Je propose aussi la mise en place d’un programme industriel européen de soutien aux véhicules propres. » Sept ans plus tard, nous avons quatre méga-usines de batteries électriques, et ont été mis en place un programme d’investissement européen sur les batteries ainsi qu’un plan de formation de 150 000 personnes en France par l’Académie européenne de la batterie.

Le Président de la République disait en outre : « Ce continent du numérique n’a pas de normes ou, plus exactement, il a une loi : la loi du plus fort. C’est à l’Europe d’en définir le cadre de régulation. » Sept ans plus tard, nous disposons des lois visant à réguler les géants du numérique les plus ambitieuses et les plus exigeantes du monde.

Le Président de la République disait aussi : « Il nous faut une taxe aux frontières de l’Europe sur le carbone. » Cette idée, qui était initialement celle de Jacques Chirac, personne n’avait réussi à la concrétiser : le 1er octobre 2023 a été mise en place la taxe carbone aux frontières, ce mécanisme d’ajustement qui s’applique aux produits étrangers à haute intensité en carbone.

Le Président de la République disait par ailleurs : « Nous avons besoin d’une réciprocité [dans les échanges commerciaux] en créant un procureur commercial européen chargé de vérifier le respect des règles par nos concurrents et de sanctionner sans délai toute pratique déloyale. » Nous disposons désormais d’un procureur commercial européen, et la Commission européenne s’est dotée d’instruments qu’elle utilise pour lancer à l’encontre de nos partenaires ou rivaux, comme la Chine, des enquêtes pour subventions excessives.

Le Président de la République ajoutait : « L’Europe devra ainsi être dotée d’une force commune d’intervention, d’un budget de défense commun et d’une doctrine commune pour agir. » Quelque temps plus tard, avant même le début de la guerre d’agression russe en Ukraine, ont été établis les bases d’une initiative européenne d’intervention et des outils pour structurer l’industrie européenne de défense.

Le Président de la République indiquait : « Nous n’avons qu’un choix, qu’une alternative : le repli sur nos frontières, qui serait à la fois illusoire et inefficace, ou la construction d’un espace commun des frontières de l’asile et de l’immigration. » Sept ans plus tard, il y a quelques semaines, nous avons adopté le pacte européen sur la migration et l’asile, qui consacre le double principe de la responsabilité et du contrôle effectif des frontières et nous permet de disposer enfin d’une politique raisonnable et responsable de maîtrise migratoire.

Le Président de la République disait enfin : « Je propose la création d’universités européennes […]. Nous devons nous fixer d’ici à 2024 [l’objectif d’]en construire au moins une vingtaine. » Objectif tenu ! Nous avons créé en sept ans 41 alliances d’établissements d’enseignement supérieur européens, et l’Europe a adopté l’objectif de 60 universités européennes d’ici à 2025.

Vous dites, monsieur le sénateur, que nous avons souvent été en décalage par rapport à nos partenaires. Bien sûr ! Nous étions précisément en décalage pour les rallier à nos idées et les faire progresser !

C’était le cas sur les sujets du travail détaché et du salaire minimum : il a fallu contourner les réserves, d’abord des Britanniques, puis des pays scandinaves.

C’était aussi le cas sur le nucléaire et la neutralité technologique, une idée qui fait à peu près consensus en France, mais qui n’était pas approuvée par une majorité en Europe. Grâce à l’Alliance européenne du nucléaire, que nous avons constituée, nous sommes parvenus à défendre cette technologie.

C’est le cas, par ailleurs, pour le pacte européen sur la migration et l’asile : il fallait convaincre, à la fois, les pays de première entrée, qui se refusaient à faire le moindre effort en matière de contrôle des frontières extérieures de l’Union européenne, et les pays d’Europe centrale et orientale qui se refusaient à toute forme de partage des responsabilités dans l’accueil des migrants. Nous avons dû trouver les voies d’une convergence entre ces deux Europe, qui jusqu’alors ne s’accordaient pas.

Nous étions également en décalage avec nos partenaires pour faire échec à certaines propositions qui portaient atteinte aux intérêts de la France. Si, à l’heure où nous parlons, le traité avec le Mercosur n’a pas été signé par la présidente de la Commission européenne, c’est parce que sa main a été retenue par un fil, lui-même tenu par le Président de la République ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)

M. Didier Marie. Et le Ceta ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Vous avez évoqué l’intelligence artificielle. La France s’est opposée, avec l’Allemagne et l’Italie, à ce que la régulation en la matière compromette la capacité européenne à développer cette technologie. Nous avons en effet la conviction que celui qui conçoit l’outil a toujours plus d’influence sur son utilisation que celui qui le régule.

Vous avez mentionné le bilan de cette législature en matière environnementale. Il est assez considérable, à tel point que l’on nous reproche bien souvent d’avoir été trop loin avec le Green Deal. Nous assumons les objectifs climatiques que l’Europe s’est fixés, et regrettons que certaines forces de gauche française ne s’y soient pas ralliées.

Vous parlez d’austérité budgétaire. Or, pour la première fois dans son histoire, l’Union européenne a réussi à s’accorder sur le principe d’un emprunt commun. Cet accord, passé au cœur de l’été 2020 en réponse à la crise de la covid-19, a permis de doubler la capacité budgétaire de l’UE.

Vous avez conclu votre intervention en émettant quelques doutes sur la force et la portée de l’amitié franco-allemande. Je rentre justement, mesdames, messieurs les sénateurs, de la visite d’État historique du Président de la République en Allemagne, la première depuis vingt-quatre ans. C’était aussi la première fois qu’un Président de la République française se rendait en Allemagne de l’Est au cours d’une visite d’État. Je ne sais quels mots employer, dans cet auguste hémicycle, pour traduire la chaleur avec laquelle il a été accueilli, tout au long de son parcours, par le peuple et le président allemands… Comment vous décrire l’émotion qui a saisi la ville de Dresde, où 10 000 personnes s’étaient rassemblées à l’occasion de la Fête de l’Europe, pour écouter le Président de la République présenter ses orientations sur l’avenir de l’Union européenne ?

M. Didier Marie. Et tout cela donne 14 % dans les sondages…

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. S’il y a bien un élément fondamental, entraînant l’Europe, qui est ressorti de cette visite acclamée par la presse et le peuple allemands, c’est bien l’amitié franco-allemande, qui a de très beaux jours devant elle ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Débat interactif

Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au débat interactif.

Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.

Le Gouvernement dispose pour répondre d’une durée équivalente. Il aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.

Dans le débat interactif, la parole est à M. Pierre Médevielle.

M. Pierre Médevielle. Monsieur le ministre, la France, moteur de la création de l’Union européenne, a toujours nourri de grandes ambitions pour l’unité de notre vieux continent. Après la Seconde Guerre mondiale, le défi était de taille et l’un des objectifs principaux était de ramener une paix durable pour les générations futures. On peut parler de réussite puisque notre pays a connu, depuis 1945, la plus longue période de paix de son histoire.

L’Europe, qui n’a, hélas ! pas échappé à l’inflation normative et à la complexification administrative, vient d’essuyer deux tempêtes : la crise du covid-19 et l’invasion de l’Ukraine nous ont rappelé sévèrement les progrès qui restent à accomplir dans les domaines de la souveraineté énergétique, de la souveraineté alimentaire et de la défense.

Plus que jamais, nous devons sortir de notre dépendance aux énergies fossiles. La relance du nucléaire et l’amélioration de notre mix énergétique doivent être une priorité nationale. Il faut néanmoins trouver des terrains d’entente avec les autres pays, comme l’Allemagne, qui ont fait d’autres choix.

La crise agricole de ce début d’année nous a forcés à remettre en place une politique européenne plus équilibrée et plus réaliste. Encore une fois, il y a une place pour toutes les agricultures et la productivité n’est pas incompatible avec des objectifs environnementaux. Gardons les pieds sur terre : vider la trousse à pharmacie en 2050 relève du pur fantasme.

Quant à l’invasion de l’Ukraine, elle a remis au goût du jour, certes de façon brutale, notre besoin impérieux de défense européenne.

Monsieur le ministre, beaucoup de nos adversaires et détracteurs pensaient que l’Union européenne ne survivrait pas à ces deux crises ; elle en sort renforcée et c’est tant mieux ! Pensez-vous que, malgré ces épreuves, nous pourrons maintenir un rythme d’investissement suffisant dans les industries d’avenir, notamment l’intelligence artificielle, comme nous continuons à le faire dans le domaine aéronautique et spatial ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.