M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos.
Mme Laure Darcos. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, visant la prise en charge par l’État de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne.
Je souhaite tout d’abord rendre hommage à l’action déterminante de notre collègue Cédric Vial, auteur de cette proposition de loi qui permet non seulement de tenir compte des réalités de vie des enfants handicapés et de leurs familles, mais aussi de soulager le budget des collectivités territoriales dans le contexte très tendu qui est celui des finances locales.
Je n’oublie pas non plus le remarquable travail de fond effectué par notre rapporteure Anne Ventalon, que je tiens à souligner.
Comme je le précisais il y a quelques jours lors de la réunion de la commission de la culture, ce sujet a largement préoccupé les élus locaux pendant la campagne des dernières élections sénatoriales.
Nos maires attendent qu’une solution soit trouvée au problème du manque de leviers de financement dont ils disposent. Ils sont également très démunis pour répondre à la détresse des familles concernées, même si certaines communes, notamment en Essonne, ont décidé de manière volontariste de prendre en charge financièrement l’accompagnement des élèves en situation de handicap sur le temps de la pause méridienne.
Certains établissements scolaires, ceux de l’enseignement privé sous contrat, ont eux aussi dû faire face à un dilemme : trouver les financements nécessaires ou laisser les familles assumer un coût bien trop lourd pour elles.
En dépit de ces solutions relevant de la seule initiative des collectivités territoriales ou des établissements d’enseignement, de nombreux enfants handicapés se retrouvent aujourd’hui sans éducateur rémunéré pour les accompagner pendant la pause méridienne. Dans l’urgence, les familles ont dû s’organiser, mettre parfois leur vie professionnelle entre parenthèses, investir un budget considérable dans l’éducation de leurs enfants – situation ô combien insupportable !
Cette proposition de loi met donc un terme aux difficultés engendrées par une décision du Conseil d’État, certes fondée en droit, mais humainement inacceptable.
Nos collègues de l’Assemblée nationale ont souhaité apporter quelques modifications au texte adopté en ces murs en première lecture : d’une part, des modifications d’ordre rédactionnel ; d’autre part, l’ajout de deux articles supplémentaires.
Les députés ont notamment prévu la remise d’un nouveau rapport. Il est vrai que nous n’avons pas pour habitude, au Sénat, de soutenir ce genre d’initiative.
Pourtant, comme cela a été largement dit en commission, il n’est pas utile de prolonger la navette parlementaire : nous voulons permettre l’application de cette loi dès la rentrée prochaine. Les familles ont déjà bien trop attendu et les élus nous demandent d’agir instamment.
La proposition de loi a donc été adoptée sans modifications par notre commission, qui a pris ses responsabilités et agi par devoir ; elle devrait l’être également aujourd’hui en séance publique, ce dont nous pouvons nous féliciter.
Nous devons développer l’école inclusive pour tous, partout ; cette proposition de loi y participe de manière concrète.
Mais, comme je le soulignais lors de mon intervention en première lecture, il nous faudra aussi imaginer l’école inclusive de demain et travailler à des avancées concrètes pour les AESH, dont les conditions d’emploi et de travail éprouvantes, pour ne pas dire indignes, doivent faire l’objet d’une réforme structurelle.
Il nous faudra par ailleurs accélérer la prise en charge des élèves qui ne peuvent être scolarisés en milieu ordinaire et prévoir des créations de places dans les établissements médico-sociaux, en particulier les instituts médico-éducatifs (IME).
Vous l’aurez compris, le groupe Les Indépendants – République et Territoires, que j’ai le plaisir de représenter aujourd’hui, votera ce texte avec conviction et enthousiasme. (Applaudissements au banc des commissions. – Mme Mireille Jouve applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Annick Billon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier notre collègue Cédric Vial, auteur de cette proposition de loi, et la rapporteure Anne Ventalon.
Ce texte est très attendu, car il constitue une réponse concrète à un problème réel. Depuis la promulgation de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, il y a dix-huit ans, la question de l’accompagnement des élèves en situation de handicap sur les temps méridien et périscolaire n’a jamais été traitée de façon satisfaisante ; ce sont entre 20 000 et 25 000 élèves qui sont concernés.
En novembre 2020, le Conseil d’État a dispensé l’État de la prise en charge des AESH sur le temps périscolaire. Cette décision a provoqué de nombreuses difficultés pour les élèves, leurs familles et les établissements scolaires. Des dizaines d’enfants ont dû être déscolarisés, faute de moyens. Les parents qui embauchent eux-mêmes un accompagnant pour la pause méridienne doivent débourser 400 euros par mois !
Le 23 janvier 2024, nous avons adopté cette proposition de loi en première lecture. Elle a pour objet de rétablir l’égalité d’accès à l’éducation en instaurant la prise en charge par l’État des AESH sur le temps méridien.
Le 8 avril 2024, l’Assemblée nationale a précisé le texte en instaurant une date d’entrée en vigueur du dispositif, fixée à la rentrée scolaire de 2024, et non au 1er septembre. Cette prise en compte des calendriers scolaires ultramarins était indispensable. La date du 1er septembre aurait fonctionné avec une entrée en vigueur à la rentrée de 2025 ; mais l’auteur de la proposition de loi, Cédric Vial, n’avait probablement pas imaginé, pour sa proposition de loi, une adoption aussi rapide, c’est-à-dire avant la rentrée de 2024 !
Ce texte fait consensus. Si nous nous réjouissons tous de l’avancée qu’il représente, je m’interroge sur sa mise en œuvre.
Madame la ministre, vous avez indiqué que cette mesure, chiffrée à 31 millions d’euros, nécessiterait entre 2 000 et 3 000 recrutements à la rentrée prochaine. Cela représente un véritable défi compte tenu de la pénurie de professionnels : les difficultés de recrutement persistent et persisteront.
Un exemple illustre la détresse des familles : le 29 janvier 2024, des parents d’élèves postaient sur le site leboncoin.fr une petite annonce pour recruter deux AESH.
Ce métier, exercé à 93 % par des femmes, souffre d’un déficit d’attractivité. La loi du 16 décembre 2022 visant à lutter contre la précarité des AESH et des assistants d’éducation (AED), qui leur a ouvert l’accès à la « CDIsation », constitue une première réponse, mais une réponse encore insuffisante. Pénurie de professionnels, crise d’attractivité, formation et rémunération sont autant de freins au recrutement.
Madame la ministre, comment résoudre cette équation ? D’un côté, le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire explose – il est passé de 134 000 à 430 000 en près de vingt ans. De l’autre, nous peinons à recruter de nouveaux personnels.
Autre constat : chaque année, le nombre d’élèves en situation de handicap augmente de 6 %, alors que le nombre de notifications d’accompagnement humain augmente, lui, de 12 %.
Grâce à la loi Vial, accompagner un enfant en situation de handicap signifiera désormais l’accompagner sur les temps scolaire et méridien. Ce texte est une première avancée qui en appelle d’autres. L’accompagnement d’un enfant doit s’entendre sur l’intégralité d’une journée et sur l’intégralité d’une année ; à défaut, il y a rupture d’égalité.
Quid du temps périscolaire ? Quid des voyages scolaires ? Ces temps extrascolaires participent de la vie d’une classe : priver un enfant en situation de handicap de ces temps, c’est le priver de moments privilégiés avec le collectif.
La proposition de loi de notre collègue Cédric Vial constitue un pas supplémentaire sur le chemin de l’école inclusive, et le groupe Union Centriste se réjouit de la voir aboutir ; nous voterons en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe les Républicains. – Mmes Laure Darcos et Mireille Jouve applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Marie-Pierre Monier applaudit également.)
Mme Monique de Marco. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, l’État s’est donné un cap clair d’inclusion des élèves en situation de handicap à l’école. L’école inclusive vise en effet à instaurer un peu d’égalité en offrant à ces enfants, dont le besoin d’accompagnement est particulier, des conditions de scolarisation et de sociabilité plus proches de celles des autres enfants. En cela, l’inscription de l’idée d’école inclusive dans la loi est un progrès.
Elle marque, plus largement, la volonté de l’État de sortir de la marge les personnes en situation de handicap : il s’agit d’inviter les citoyens à accepter les différences, et ce dès le plus jeune âge, et de préparer les enfants à vivre dans une société appréhendée dans toute sa diversité. C’est pourquoi les écologistes ont toujours défendu ce principe de l’école inclusive.
L’examen de la présente proposition de loi est néanmoins l’occasion de rappeler les difficultés de mise en œuvre qui ont fait obstacle à l’application de cette idée sur le terrain depuis 2013.
Il a souvent été question dans cet hémicycle du défi que représente l’inclusion pour les enseignants, non seulement par manque d’une formation suffisante, mais aussi en raison de moyens d’encadrement plus faibles dans les classes françaises que chez certains de nos voisins européens, comme l’Allemagne.
Nous avons également souvent donné l’alerte et proposé des voies d’amélioration concernant le statut des personnes, AESH et AED, accompagnant ces élèves aux besoins particuliers. Leur formation et leur rémunération restent très insuffisantes ; la précarité demeure la norme en raison de temps partiels souvent imposés. Il est tout simplement indigne que l’État prévoie de telles conditions de recrutement.
Face à cette situation, beaucoup de collectivités territoriales se sont organisées pour pallier les limites du cadre imposé par le ministère de l’éducation nationale.
Comptant parmi les zones d’ombre de la législation actuelle, la question de la prise en charge des élèves en situation de handicap durant la pause méridienne a fait l’objet d’un long bras de fer entre les collectivités et les ministères. Dans de nombreuses écoles, les accompagnants n’étaient pas rémunérés pour aider ces élèves au moment du déjeuner. Et je suis fière que de nombreuses collectivités, notamment écologistes, aient anticipé le problème et pris le sujet à bras-le-corps sans attendre de solution législative.
Je remercie notre collègue Cédric Vial de proposer les présentes modifications, qui apporteront des solutions concrètes aux élus de terrain. Bien que des améliorations soient encore souhaitables, nous voulons aujourd’hui une adoption conforme du texte ; c’est pourquoi nous n’avons pas déposé d’amendement. Pourrons-nous collectivement faire preuve d’autant de lucidité et de pragmatisme lorsque nous aborderons la question des inégalités de financement, par exemple, entre l’école publique et les écoles privées ?
Ces difficultés de mise en œuvre doivent nous mettre en garde contre les réformes qui pourraient, à l’avenir, être imposées sans anticipation, sans concertation et sans considération pour les personnes chargées de les appliquer – je pense bien sûr au « choc des savoirs ». Je redoute que, hors cadre légal et sans anticipation des besoins nécessaires à sa mise en œuvre, ce projet ne donne lieu à des complications plus importantes encore que celles qui ont entouré le déploiement de l’école inclusive. Madame la ministre, il est toujours temps d’y renoncer, mais, pour ce qui est du sujet qui nous intéresse aujourd’hui, l’heure est au satisfecit. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER.)
M. Gérard Lahellec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années et, plus particulièrement, depuis la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, le système scolaire français tend à se transformer pour permettre à tous les élèves, notamment à ceux qui sont en situation de handicap, d’accéder à l’école et aux apprentissages.
Dit autrement, l’école française a accepté de se repenser, afin de s’adapter aux besoins de tous les élèves, y compris de ceux qui, jusqu’alors, étaient exclus d’une scolarisation que je qualifierai d’ordinaire.
Cet objectif, qui s’inscrit dans un mouvement global, est louable ; nous devons nous en féliciter. Il justifie un engagement fort et une implication durable dans des pratiques visant l’inclusion des élèves en situation de handicap.
Pourtant, avec cette proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale en première lecture, l’école inclusive est encore devant nous. Après Cédric Vial, que je salue à mon tour, je considère que « tout ne fait que commencer ». En effet, pour parvenir à une bonne pratique de l’inclusion, il faut une école de qualité et de réussite pour toutes et tous. Or force est de constater qu’il y a encore loin de la coupe aux lèvres.
Si l’inclusion des élèves à mobilité réduite ne semble plus faire l’objet de contestations, c’est moins vrai pour les élèves confrontés à une situation de handicap « invisible », par exemple pour ceux qui présentent des troubles intellectuels, vraisemblablement parce que leur comportement risquerait de nuire à la conduite globale de la classe.
Il importe donc que nous portions aussi un regard critique sur l’organisation même de notre système éducatif, balloté sans cesse entre inclusion affirmée, d’un côté, et tendance à la sélection des élèves, de l’autre. Le système éducatif français devrait, par une démocratisation de l’accès aux savoirs, offrir à l’ensemble des élèves les mêmes chances de développer leur potentiel.
La prise en charge par l’État de la rémunération des AESH durant le temps méridien ne résout évidemment pas l’ensemble des problèmes, mais elle tend à régler une partie de la problématique de l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Préciser que cette disposition doit entrer en vigueur dès la rentrée 2024 constitue aussi une précision utile.
Enfin, l’introduction d’un article 4, qui prévoit la remise d’un document éclairant le bilan du dispositif, ne correspond pas à une option habituellement retenue par le Sénat. Pour autant, ce n’est pas un argument suffisant pour s’interdire un vote conforme de ce texte, qui est au fond la condition sine qua non pour qu’il soit mis en œuvre dès la prochaine rentrée scolaire.
Ce sont là autant de raisons qui nous conduisent à voter en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve.
Mme Mireille Jouve. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis une seconde fois en séance publique pour évoquer la prise en charge par l’État de l’accompagnement des élèves en situation de handicap durant le temps méridien.
Vous remarquerez, mes chers collègues, que j’ai sciemment employé le terme « seconde » et n’ai pas parlé de « deuxième lecture ». Ce n’est pas une erreur, bien au contraire : j’espère sincèrement que cette lecture sera bel et bien la dernière, grâce à un vote conforme de notre assemblée, comme chacun – je ne crois nullement me tromper – le souhaite dans cet hémicycle. C’est dans ce climat plutôt consensuel que j’ai le plaisir de m’exprimer au nom du groupe du RDSE sur ce texte.
Nous savons tous qu’il y a urgence à rappeler ce que doit la solidarité nationale aux 478 000 élèves en situation de handicap et à leurs familles, ainsi qu’aux 132 000 personnels qui les accompagnent. Permettez-moi d’ailleurs de saluer l’action courageuse de ces contractuels, femmes et hommes, qui travaillent auprès des enfants et de leurs parents.
Cher Cédric Vial, je vous remercie sincèrement de votre heureuse initiative. Elle renoue avec l’esprit de la loi de 2005, qui consacrait l’égalité des chances et entérinait le passage d’une obligation éducative à une obligation scolaire dont l’État devait supporter la charge sur le plan tant financier qu’humain.
Depuis le fameux arrêt du Conseil d’État du 20 novembre 2020, nous avons pu observer que cette mission, ô combien indispensable, pouvait pâtir d’une application inégale sur le territoire national.
Avec cette proposition de loi, indispensable au regard de la nécessaire solidarité que nous devons aux enfants en situation de handicap, trois éléments fondamentaux de la prise en charge de ces derniers vont changer.
Exit, tout d’abord, la charge financière supplémentaire qui était imposée aux collectivités territoriales, alors que les budgets de celles-ci sont de plus en plus contraints.
Exit, ensuite, la dégradation des conditions de travail des accompagnants d’élèves en situation de handicap due à la réorganisation de leurs emplois du temps et aux multiples contrats liés à ce choix.
Exit, enfin, les situations honteuses dans lesquelles certains élèves se sont retrouvés en raison d’une absence d’accompagnement lors de la pause méridienne.
Cela étant, ne nous voilons pas la face. Si ce texte répond à la problématique du financement des AESH pendant la pause méridienne, certaines questions, et non des moindres, demeurent en suspens.
Je pense notamment au décalage persistant entre l’augmentation des moyens humains et financiers et le nombre croissant d’enfants en situation de handicap demandant à être scolarisés. Je pense également à la question, tout aussi prégnante, du manque d’attractivité d’un métier passionnant, délaissé en raison d’un statut précaire et des faibles rémunérations qui le caractérisent.
Ces sujets n’entrent pas dans le périmètre de cette proposition de loi, je le sais pertinemment. Néanmoins, nous ne devons pas les négliger, et il nous appartient de les aborder sereinement, dans un esprit constructif et volontariste. C’est notre devoir d’élus de la République que d’y réfléchir, afin que, ensemble, nous fassions de l’inclusion une réalité, et non plus un vœu pieux.
En guise de conclusion, madame la ministre, j’aimerais pouvoir vous dire : Chiche ! Déposons une seconde proposition de loi visant à créer un véritable statut pour les AESH, afin que ce métier soit enfin pleinement reconnu et que des personnes formées puissent en vivre décemment.
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi visant la prise en charge par l’État de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne, que nous examinons de nouveau aujourd’hui, est la traduction législative de l’une des recommandations du rapport d’information de notre collègue Cédric Vial sur les modalités de gestion des AESH, pour une école inclusive.
La démarche des auteurs de ce texte s’inscrit par ailleurs dans la logique d’une volonté commune du Président de la République et du Premier ministre de voir l’État financer l’accompagnement des enfants en situation de handicap pendant leur pause déjeuner.
La proposition de loi comporte des dispositions importantes pour trois types d’acteurs : les élèves en situation de handicap, leurs accompagnants et les collectivités territoriales.
En effet, dès lors que la prise en charge des AESH durant le temps méridien n’est plus assurée ou qu’un élève est accompagné par un AESH différent au cours des temps scolaire et méridien, il y a rupture dans la continuité de l’accompagnement de ces enfants, qui est pourtant essentielle pour leur bien-être.
Dans certains cas, sans prise en charge durant le temps méridien, il revient aux parents de prendre le relais, ce qui peut entraîner les conséquences désastreuses que l’on imagine. Il arrive même que des parents embauchent directement des AESH, qui, en plus de représenter une dépense significative pour ces familles, et sans remettre en cause leurs compétences, ne sont pas soumis aux contrôles habituellement réalisés par l’éducation nationale.
Cette proposition de loi contribuera en outre à la simplification du statut des AESH, l’État devenant l’unique employeur, ainsi qu’au lissage de leurs emplois du temps, puisque la possibilité leur sera désormais offerte de continuer à travailler pour l’éducation nationale durant le temps de la pause méridienne.
Nous ne connaissons que trop bien les situations de précarité auxquels ces personnels peuvent faire face. Elles ne seront malheureusement pas toutes résolues par le texte, mais nous saluons cette avancée.
L’objet premier de cette proposition de loi est de revenir à une prise en charge totale par l’État des accompagnants des élèves à besoins éducatifs particuliers, comme c’était le cas jusqu’à l’arrêt du Conseil d’État du 20 novembre 2020, dans lequel celui-ci a jugé que la compétence de l’État en matière de prise en charge des situations de handicap ne devait porter que sur le temps scolaire.
Depuis lors, la responsabilité qui incombait jusqu’alors à l’État s’est reportée sur les collectivités locales. Or ce transfert a pu causer une rupture d’égalité entre les élèves en situation de handicap, les prises en charge variant selon les communes.
Il est également important de noter que, comme les communes n’exercent habituellement aucune compétence en matière de handicap, cette nouvelle charge pouvait être, pour certaines d’entre elles, difficile à assumer.
À l’occasion de son examen à l’Assemblée nationale, plusieurs mesures sont venues enrichir le texte. Ces précisions sont bienvenues et témoignent de l’excellent travail du Parlement sur le sujet.
Pour conclure, je tiens une nouvelle fois à saluer le travail de mes collègues Cédric Vial et Anne Ventalon, respectivement auteur et rapporteure de ce texte, qui a permis d’aboutir aux avancées que nous saluons. Il permettra de rétablir une forme de solidarité nationale, afin d’accompagner au mieux les élèves en situation de handicap au sein de notre école.
Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI votera en faveur de cette proposition de loi.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme la rapporteure applaudit également.)
Mme Marie-Do Aeschlimann. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je me réjouis que ce texte vienne clarifier et, je l’espère, améliorer la prise en charge financière des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) durant le temps méridien. Enfin !
On sait combien cette clarification était nécessaire depuis l’arrêt du Conseil d’État du 20 novembre 2020, qui avait plongé les communes dans un grand embarras. Pour avoir été pendant vingt ans adjointe au maire déléguée à l’éducation dans ma commune d’Asnières-sur-Seine, j’ai pu mesurer, à chaque rentrée scolaire, l’ineptie d’une organisation conduisant les AESH à avoir deux employeurs, l’éducation nationale et la collectivité territoriale, une source de complexité kafkaïenne contribuant au manque d’attractivité du métier.
Pourtant, ce métier est essentiel à l’inclusion scolaire. La présence des AESH conditionne la scolarisation en milieu ordinaire des enfants ayant des besoins spécifiques, alors que notre pays accuse un retard important en matière de structures scolaires spécialisées.
Face à cette situation, combien d’élus sont désemparés par la détresse de familles qui attendent, à juste titre, que les pouvoirs publics offrent une vraie prise en charge de leur enfant ? Combien d’enseignants ont des problèmes avec leur classe, parce qu’un enfant en difficulté n’est pas accompagné ? Combien de parents, la plupart du temps des mères, arrêtent de travailler pour mieux gérer le handicap de leur enfant ?
Je dis donc « bravo ! » à notre collègue Cédric Vial, auteur de la proposition de loi, ainsi qu’à Anne Ventalon, rapporteure du texte, pour leur excellent travail. Il y avait urgence à agir au regard de la concomitance entre la croissance exponentielle du nombre des élèves en situation de handicap et la stagnation du nombre des AESH.
Dans mon département des Hauts-de-Seine, à la rentrée 2023, quelque 9 146 élèves bénéficiaient d’un projet personnalisé de scolarisation (PPS).
Cela étant, si la prise en charge par l’État de l’accompagnement des élèves en situation de handicap durant le temps méridien est une bonne chose, la rémunération statutaire des AESH doit encore être améliorée. La professionnalisation amorcée par le décret du 13 juillet 2023, avec la possibilité d’accéder à un CDI après un CDD de trois ans et la revalorisation de la grille indiciaire, n’a pas mis fin aux recrutements à temps incomplet. En favorisant des temps pleins, ce texte renforcera l’attractivité de ces métiers en tension.
L’adoption de ce texte réglera aussi les difficultés pratiques et financières rencontrées par les établissements privés sous contrat pour accueillir tous les élèves ayant des besoins spécifiques. Je sais qu’ils y sont attachés.
Espérons aussi qu’elle mettra un terme à la pratique de la mutualisation des AESH par les pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial) et à leur affectation en fonction de l’offre disponible et non, toujours, des besoins de l’enfant.
En dépit d’avancées que l’on ne peut que saluer, cette proposition de loi ne va pas au bout de la logique d’inclusion, qui consiste à prendre en charge, non seulement le temps méridien, comme le prévoit ce texte, mais aussi l’ensemble des temps extrascolaires et périscolaires, autrement dit l’accueil du matin, le temps méridien proprement dit, l’accueil du soir, qui comprend les études surveillées, et les activités culturelles et sportives. Il faudra y remédier.
Pour finir, je me réjouis que, en cas d’adoption conforme, cette mesure soit applicable dès la rentrée 2024. Beaucoup reste à faire pour une école vraiment inclusive, et je compte bien continuer à y prendre ma part, ici, au Sénat, où le projet d’une société plus inclusive a toujours été une priorité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions. – Mme Laure Darcos applaudit également.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant la prise en charge par l’état de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne
Article 1er
(Non modifié)
L’article L. 211-8 du code de l’éducation est complété par un 8° ainsi rédigé :
« 8° De la rémunération du personnel affecté à l’accompagnement des élèves en situation de handicap durant le temps scolaire et le temps de pause méridienne.