Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled.

M. Dany Wattebled. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dématérialisation de l’état civil est un enjeu essentiel de simplification. En permettant l’envoi des documents numérisés, l’expérimentation menée depuis 2019 par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères supprime l’obligation de se rendre physiquement dans les bureaux gouvernementaux.

Cette expérimentation de la dématérialisation et de la délivrance des actes d’état civil a d’ores et déjà porté ses fruits. Les usagers en témoignent : les démarches sont plus simples et surtout plus rapides. Le passage à la numérisation garantit une traçabilité optimale, tout en réduisant drastiquement les délais de délivrance des documents.

C’est un enjeu majeur, tant certains services peinent à répondre de manière optimale à la cadence élevée des demandes. Ce gain en accessibilité est précieux. Nos institutions doivent s’adapter aux évolutions de notre époque, dont la flexibilité, la fiabilité et la simplicité sont les maîtres-mots.

Il ne s’agit pas non plus de révolutionner ce service. Comme cela a été rappelé en commission, la délivrance numérisée des documents est une simple possibilité, et non une obligation. C’est important de le souligner pour nos concitoyens les plus éloignés des outils ou des pratiques numériques : je pense notamment aux personnes âgées, qui souhaiteraient ne pas changer leurs habitudes et conserver leur possibilité d’accéder aux guichets. La solution apportée par ce texte complète le bouquet de services disponibles.

Plus généralement, la proposition de loi que nous étudions aujourd’hui représente une manière de mettre la technologie au service de nos concitoyens, afin de simplifier leur quotidien et de réduire les lourdeurs administratives.

Reste un sujet essentiel : la sécurisation des données personnelles. Nous savons combien il est préoccupant tant les attaques contre des institutions publiques ont été récurrentes ces derniers mois. Nous faisons toute confiance au système actuel puisque l’expérimentation est déjà très encadrée pour éviter les falsifications.

Le système de signature électronique bénéficie d’une sécurité hautement élevée empêchant toute contrefaçon. Aucun dysfonctionnement important n’a été identifié ces dernières années. La pérennisation éventuelle de l’ensemble du dispositif devra faire l’objet d’une étude rigoureuse pour sécuriser l’ensemble des processus de dématérialisation et de conservation des données.

La commission des lois a apporté quelques modifications au texte pour l’adapter, de façon précise, aux besoins de nos concitoyens et aux réalités des services. Je salue notamment l’amendement du rapporteur visant à la présentation annuelle devant l’Assemblée des Français de l’étranger du bilan d’étape de l’expérimentation. Je tiens aussi à féliciter l’autrice de ce texte, qui soulignait que l’expérimentation aurait déjà permis à l’administration d’économiser 1,3 million d’euros par an.

Ces différentes mesures s’inscrivent dans la lignée du choc de simplification que nous appelons de nos vœux, destiné à rationaliser le temps et l’argent consacrés à la transmission de ces documents du quotidien. Il faut y avoir une avancée tant pour nos concitoyens, en particulier les Français de l’étranger, que pour les agents du ministère.

Ce texte nous permet d’avancer collectivement dans la bonne direction. Pour ces différentes raisons, le groupe Les Indépendants, que j’ai le plaisir de représenter, votera en sa faveur. Il apporte des mesures utiles pour nos concitoyens, qui en verront les bienfaits dans leurs démarches administratives : nous pouvons nous en féliciter ! (Applaudissements sur les travées du groupe RPDI. – M. Pascal Martin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Olivia Richard. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Olivia Richard. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec une grande joie que je m’adresse à vous pour la première fois sur une proposition de loi qui concerne nos compatriotes établis hors de France. C’est sur l’initiative de notre collègue Samantha Cazebonne que nous nous penchons sur l’une des spécificités qui marquent la vie des Français de l’étranger.

Laboratoire de bon nombre d’actions de modernisation de l’État, la France à l’étranger est résolument numérique. En effet, dès 2003, les Français établis hors de France ont franchi le Rubicon de la dématérialisation avec la première expérimentation de ce que l’on appelait alors le « vote par correspondance électronique ».

Permettez-moi de saluer avec affection et émotion l’auteur de la proposition de loi qui en était à l’origine, Robert del Picchia, sénateur des Français établis hors de France, qui siégea ici de 1998 à 2021, et avec qui j’ai eu l’honneur de travailler pendant vingt ans.

Père du vote par internet, Robert del Picchia avait l’habitude de souligner la distance, souvent rédhibitoire, qui sépare l’électeur de l’urne française installée dans une ambassade, un consulat, un lycée ou un institut français. Son idée était donc de rapprocher l’urne de l’électeur, dans le but de rapprocher l’électeur de la France. Les réticences envers sa démarche étaient alors fortes, et elles le sont toujours.

C’est bien une volonté politique sans faille, celle du Président Chirac, qui a permis l’adoption de la loi tendant à autoriser le vote par correspondance électronique, grâce au vote unanime des deux chambres de notre Parlement. Elle fut promulguée le 28 mars 2003.

Espérons que la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui connaisse le même sort. Son adoption rapide permettra au service central d’état civil de Nantes de continuer à délivrer aux Françaises et aux Français nés ou établis à l’étranger les copies ou extraits d’actes d’état civil de façon totalement dématérialisée.

Comme l’a expliqué notre excellent rapporteur, dont je salue le travail éclairant,…

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Je suis un phare dans la nuit. (Sourires.)

Mme Olivia Richard. … le Parlement a prorogé en 2022 l’expérimentation lancée par le MEAE en 2019.

Marqué par des retards – notons que seule la délivrance des actes est actuellement dématérialisée, à l’exclusion de leur établissement, de leur mise à jour et de leur conservation –, ce chantier de modernisation et de simplification administrative satisfait les usagers. Ainsi, seulement 0,3 % des 1,3 million d’actes demandés ont été accompagnés d’une demande d’impression.

Selon les rapports évoqués par notre rapporteur, les usagers y voient une simplification bienvenue des démarches. Dorénavant, plus aucune présentation physique dans un consulat n’est nécessaire. C’est un chantier plein de bon sens, d’autant que, dans certains pays, le service postal est tout simplement inexistant.

Certains souligneront que les économies de papier sécurisé et de frais d’acheminement ne parviendront pas à compenser des coûts plus importants que prévu. C’est vrai : l’inspection générale des affaires étrangères évalue le coût total à 11,35 millions d’euros. Néanmoins, les économies générées se répéteront tous les ans. Cette dématérialisation est donc un investissement pour l’avenir.

Mes chers collègues, plusieurs d’entre nous peuvent redouter que les efforts généralisés de dématérialisation, qui obéissent au double impératif de réduction des dépenses publiques et de simplification administrative, ne conduisent à écarter les personnes démunies face au numérique.

Personnes âgées ou déconnectées, beaucoup manient mal ou ne manient pas du tout les outils modernes qui sont aujourd’hui à notre service. Pour s’en convaincre, il suffit d’écouter les retraités qui ne parviennent pas à fournir un certificat d’existence, la démarche en ligne étant bloquée par l’impossibilité de s’identifier sur FranceConnect, comme c’est encore le cas dans de nombreux pays.

Rappelons que les Français de l’étranger sont nombreux à ne pas avoir de compte sur ameli.fr ou le site des impôts. Quant au service d’identité numérique de La Poste, il est très, voire trop souvent défaillant : même des personnes chevronnées échouent à s’identifier. Par ailleurs, même lorsqu’il fonctionne, le service est ouvert à un nombre trop faible de pays.

La dématérialisation doit avoir pour corollaire l’accessibilité pour toutes et tous, sans quoi elle rime avec l’exclusion, ce qui n’est pas acceptable.

L’administration consulaire est fière de ce chantier, et à juste titre. Celui-ci participe à son rôle essentiel : incarner les services de l’État à l’étranger qui œuvrent au quotidien pour nos compatriotes – c’est son ADN même.

En outre, ces chantiers pilotes de l’administration consulaire renvoient une image novatrice et dynamique de la France à l’étranger. Je partage donc la fierté de l’administration.

Depuis 2019, à chaque session de l’AFE, le ministre chargé des Français de l’étranger – qu’il s’agisse de Jean-Baptiste Lemoyne, que je salue, d’Olivier Becht, ou, aujourd’hui, de Franck Riester – ne manque jamais de rappeler la volonté d’offrir à nos concitoyens établis hors de France un service public moderne et simplifié.

Le rapporteur de la commission des lois a souhaité que l’AFE soit destinataire d’une information sur cette expérimentation de dématérialisation des actes d’état civil. J’ai soutenu sa proposition, car tout ce qui va dans le sens d’un renforcement du rôle des élus doit être défendu.

Je note toutefois que les sessions plénières de l’AFE, qui se déroulent deux fois par an pendant cinq jours, à Paris, sont toujours l’occasion de faire un point sur ce chantier, lequel relève de la compétence de la commission des lois de cette institution.

Informer l’AFE est une bonne chose, mais est-ce suffisant ?

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. La réponse est dans la question…

Mme Olivia Richard. Je déplore que l’AFE ne réunisse que 20 % des conseillères et des conseillers des Français de l’étranger. À charge pour ses membres de relayer les informations reçues, me direz-vous ! Soit, mais rappelons que, contrairement aux élus locaux de nos territoires, les conseillères et les conseillers des Français de l’étranger ne disposent d’aucun moyen d’assistance dans l’exécution de leur mandat. Ainsi, ce débat me donne l’occasion d’exprimer une nouvelle fois un vif regret : que tous les élus locaux des Français établis hors de France ne soient pas membres à part entière de l’AFE.

Mes chers collègues, cette expérimentation prend davantage de temps qu’escompté. Certes, mais l’enjeu est d’importance, car elle ouvre la voie à la dématérialisation des actes d’état civil également en France.

Permettez-moi de remercier le ministre délégué chargé des Français de l’étranger, Franck Riester, Mme Pauline Carmona, directrice des Français à l’étranger et de l’administration consulaire à l’administration centrale du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, et l’ensemble des agents affectés à cette tâche.

En moins d’un an, les grands chantiers de la modernisation de l’administration consulaire ont été repris avec un grand pragmatisme. Le service France Consulaire, plateforme téléphonique permettant un contact direct et une réponse rapide, est un bon remède : il évite de laisser sur le bord de la route les « fracturés » numériques. En quelques mois, une expérimentation pour le renouvellement dématérialisé des passeports a également été lancée. Je salue ces avancées et en attends les résultats avec impatience.

Vous l’aurez compris, le groupe Union Centriste votera cette proposition de loi de notre collègue Samantha Cazebonne. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Mme Mélanie Vogel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier ma collègue Samantha Cazebonne d’être à l’initiative de ce texte, ainsi que Christophe-André Frassa, pour son travail en tant que rapporteur de la commission des lois.

Je n’apprendrai rien à personne : lorsque vous vivez à l’étranger, le contact avec les autorités françaises peut être très compliqué, mais il n’en est pas moins indispensable. On pense par exemple aux déclarations de naissance après un accouchement, qui doivent s’effectuer au consulat. Si vous habitez à Manakara, une ville de la côte est de Madagascar, vous devez prendre rendez-vous au consulat à Antananarivo : l’aller représente une journée entière de trajet, lequel s’effectue de toute évidence dans des conditions difficiles.

On comprend donc bien comment et pourquoi la dématérialisation des démarches peut faciliter très concrètement la vie des Françaises et des Français établis hors de France.

Alors que les rendez-vous au consulat où l’envoi d’une lettre restent aujourd’hui souvent indispensables, malgré les longues distances et des services postaux aléatoires dans certaines régions du monde, cette dématérialisation pourrait à terme rendre possibles certaines démarches en ligne directement. Malheureusement, nous n’y sommes pas encore.

En revanche, l’expérimentation a montré que l’envoi des actes d’état civil, par exemple, pouvait se faire en ligne – cela concerne les demandes des Françaises et des Français de l’étranger, des citoyennes et des citoyens naturalisés, ainsi que les demandes relatives aux actes établis dans les anciennes colonies.

Ma collègue Mathilde Ollivier et moi-même saluons cette nouvelle possibilité qui, de manière très concrète, facilite le quotidien de nos compatriotes. C’est pourquoi nous soutenons pleinement la pérennisation de cette avancée par la présente proposition de loi.

Malheureusement, c’est le seul volet de l’expérimentation qui a vu le jour, alors qu’elle a été lancée il y a quatre ans. Ni la déclaration en ligne des événements d’état civil survenus à l’étranger ni la dématérialisation complète du traitement des actes n’ont été expérimentées à ce jour. Comme l’expérimentation prendra fin le 10 juillet prochain, ces volets ne seront jamais expérimentés si nous ne votons pas la prolongation prévue par ce texte.

Or abandonner l’expérimentation maintenant reviendrait à fermer la porte à une avancée potentiellement importante pour les Français de l’étranger, alors même que d’autres pays nous montrent que la dématérialisation est tout à fait réaliste et possible : c’est le cas de la Belgique et de l’Italie, entre autres, où les demandes et l’envoi des actes peuvent être accomplis entièrement en ligne.

Il nous faut absolument éviter l’abandon automatique de l’expérimentation dans cinquante-sept jours : voilà pourquoi nous devons soutenir sa prolongation en votant cette proposition de loi.

Nous devons toutefois nous poser une question essentielle : pourquoi la dématérialisation a-t-elle pris autant de retard, celui-là même qui nous oblige à voter une prolongation aujourd’hui ? De mon point de vue, cela s’explique par le manque de moyens indispensables alloués à cette expérimentation, ce qu’a d’ailleurs démontré le rapport d’évaluation remis au Parlement au mois de mars.

Non seulement le développement informatique a pris du retard, mais, en plus, les informaticiens ont été réaffectés à d’autres tâches au sein du ministère, si bien qu’ils n’ont pas pu continuer à travailler sur l’expérimentation. Dans ces conditions, il était impossible de faire avancer de manière satisfaisante la dématérialisation.

Il aurait fallu procéder à des embauches dès l’apparition de ce retard. Or, à la place, le Gouvernement a annulé des crédits budgétaires par décret : au contraire, il faut augmenter les moyens ! Nous craignons que cette dématérialisation ne puisse servir de prétexte pour réduire les moyens du MEAE et, in fine, supprimer des postes.

Comme Mathilde Ollivier et moi-même l’avions demandé lors de l’examen de la loi de finances, il faut investir dans l’accompagnement individuel des Françaises et des Français de l’étranger. De plus, il faut absolument veiller à l’accessibilité, à la fiabilité et à la sécurité de l’état civil du ministère : nous défendrons divers amendements en ce sens.

Enfin, je me réjouis que le rôle de l’AFE ait été conforté, notamment grâce au travail du rapporteur.

Grâce à cette expérimentation, nos compatriotes de l’étranger pourraient être, une fois de plus, à l’avant-garde des mutations de l’action publique qui, à terme, profiteront à toutes les Françaises et à tous les Français, y compris à ceux qui vivent en France métropolitaine. C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ian Brossat.

M. Ian Brossat. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui appelés à délibérer sur la question de la dématérialisation des actes d’état civil pour nos compatriotes vivant à l’étranger, soit une réforme phare du MEAE.

Plus précisément, il nous est demandé de nous prononcer sur la pérennisation définitive du dispositif mis en place pour gérer l’octroi des copies et extraits d’actes d’état civil, ainsi que sur la prolongation de l’expérimentation de la dématérialisation du traitement de l’état civil des Français de l’étranger, c’est-à-dire l’établissement, la mise à jour et la conservation des actes.

Le retour d’expérience sur l’expérimentation en vigueur depuis 2019 nous donne l’occasion d’apprécier les atouts, mais aussi les limites de cette démarche de dématérialisation, grâce à sa pratique par les services du ministère et les usagers de ce service public.

Nous reconnaissons bien volontiers les mérites de la dématérialisation : à l’évidence, elle apporte une solution concrète à nos compatriotes éparpillés aux quatre coins du monde ; elle facilite l’accès aux services d’état civil, alors que certains de nos concitoyens doivent parcourir de longues distances pour obtenir des documents essentiels.

Pour autant, nous ne pouvons ignorer ce qu’implique la dématérialisation d’un tel service public. Comme le souligne fréquemment la Défenseure des droits, la dématérialisation n’est pas anodine et ne peut s’effectuer sans prendre en compte ses conséquences pour tous les usagers.

Le service public doit être accessible à tous. Or, de manière générale, la dématérialisation du service public a pour écueil d’accroître des inégalités et d’isoler les personnes les plus éloignées du service public. Ainsi, la dématérialisation ne saurait s’accomplir au détriment de l’accessibilité.

À cet égard, il convient de souligner que s’ajoutent d’autres inégalités face à la dématérialisation : des régions entières du globe ont un accès limité à internet et des gouvernements étrangers restreignent l’accès à des sites essentiels, y compris ceux de nos ministères. Ces barrières ne peuvent être négligées.

Un autre enseignement doit être tiré de l’expérimentation en place depuis 2019 : les services publics, même numériques, doivent être de qualité. Or le logiciel utilisé par les services d’état civil du MEAE depuis plusieurs années a connu des défaillances importantes à plusieurs reprises, allant jusqu’à la disparition de certains actes d’état civil du système. Lors de la panne du portail de l’État en octobre 2023, les services ont rencontré une difficulté technique interrompant les demandes d’extrait ou de copie d’actes en ligne pendant plusieurs jours. En conséquence, le délai de traitement des demandes non urgentes a fortement augmenté et le nombre d’appels et de courriels a explosé.

Pour autant, rien n’a été mis en œuvre pour remédier à ces difficultés et éviter qu’elles ne se reproduisent, et le même logiciel continue à être utilisé.

Enfin, cette réforme permet de faire des économies sur les frais d’affranchissement, et c’est tant mieux. Toutefois, elles ne sauraient être réalisées sur le dos du personnel du ministère. Pourtant, depuis septembre 2021, onze équivalents temps plein ont été supprimés et le ministère a prévu d’en supprimer vingt de plus. Nous ne saurions nous en réjouir.

Or, si, à la suite de la dématérialisation, certains postes sont moins sollicités, d’autres, à l’inverse, doivent être créés pour accompagner les usagers et les agents face à ces évolutions technologiques.

Ainsi, si la dématérialisation de l’état civil du MEAE répond indéniablement à une demande et à un besoin des usagers, elle ne peut se faire au détriment de l’accessibilité et de la qualité du service public.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Girardin. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Annick Girardin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, beaucoup a déjà été dit sur cette proposition de loi visant à poursuivre la dématérialisation de l’état civil du ministère de l’Europe et des affaires étrangères ; M. le ministre a lui-même dressé le bilan de l’expérimentation mise en place.

Depuis 2019, les Français de l’étranger bénéficient d’une dématérialisation, qui se veut complète, de leurs actes d’état civil. Cette expérimentation, qui donne le droit au MEAE d’expédier une version électronique plutôt qu’une version papier d’une copie d’acte d’état civil, est bénéfique sur les plans à la fois écologique, administratif et financier.

Naturellement, l’expérimentation rencontre un franc succès. Depuis mars 2021, le service central d’état civil a délivré plus de 2,5 millions de documents d’état civil dématérialisés : que de temps gagné, d’économies réalisées, de tracasseries épargnées et d’arbres sauvés !

L’administration a évalué les dépenses évitées à plus de 1,2 million d’euros chaque année. Pour l’usager, cette avancée a permis une simplification des démarches et un raccourcissement des délais de délivrance des copies. Par ailleurs, les différents rapports remis au Sénat soulignent une adhésion progressive au projet et une évolution positive.

Forte de son succès, l’expérimentation mise en place en 2019 a été reconduite jusqu’en juillet 2024. La reconduire une nouvelle fois apparaît nécessaire pour finaliser les différentes phases de la démarche de transformation engagée.

Cette proposition de loi est donc la bienvenue : elle permet de pérenniser la dématérialisation de la délivrance des copies et de proroger, jusqu’en juillet 2027, la dématérialisation du traitement de l’état civil.

Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen salue l’ancrage de cette expérimentation, qui s’inscrit dans la continuité de la position que nous avions exprimée lors de l’examen de la loi Essoc. Nous approuvons également les travaux menés en commission par le rapporteur.

Il est absolument indispensable que cette expérimentation soit la dernière et que le MEAE soit tout de suite au rendez-vous de la finalisation du déploiement, rapide, de tous les outils prévus, afin de ne pas accroître les préjudices déjà causés par les multiples reports des dispositions initiales de la loi Essoc. Ces retards se déportent en premier lieu sur les usagers.

Par ailleurs, nous sommes favorables à associer l’AFE à l’évaluation de cette mesure. Le format reste à définir, mais le souhait du rapporteur de voir émerger un débat suivi d’un vote consultatif sur sa mise en œuvre nous semble être une voie judicieuse vers davantage de transparence.

Ce texte montre le chemin vers une administration exemplaire en matière d’écologie et d’économies, soucieuse de proposer dans le même temps à ses administrés des démarches de plus en plus simplifiées.

Pour autant, cette évolution ne doit pas faire oublier l’indispensable sécurisation des démarches et l’amélioration de l’accueil des usagers lorsque leur présence physique reste nécessaire. De manière générale, le RDSE soutient les objectifs de modernisation, de simplification et de réduction des coûts dans tous les services publics français. Toutefois, ils ne peuvent légitimer l’éloignement constaté entre l’administration et le public.

À cet égard, je rappellerai que, l’année dernière, notre groupe a fait adopter à l’unanimité une proposition de résolution visant à préserver l’accès pour tous aux services publics. C’est donc à cette condition que le RDSE votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ludovic Haye.

M. Ludovic Haye. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi avant toute chose de remercier ma collègue Samantha Cazebonne pour le travail réalisé sur ce texte, ainsi que pour son exposé très clair sur les enjeux qui y sont liés.

La dématérialisation de l’état civil est un sujet clé pour les Français de l’étranger. En effet, malgré sa très grande qualité, le réseau consulaire français ne peut être présent partout. Cette expérimentation vise ainsi à rapprocher les Français de l’étranger de l’État. Il s’agit surtout d’une réforme de bon sens, animée par la volonté de faciliter la vie des Français de l’étranger : c’est une dimension essentielle de la proposition de loi, qui ne saurait être oubliée.

L’expérimentation menée depuis la loi Essoc – je remercie M. le ministre d’en avoir retracé l’historique – est un succès indéniable. En 2023, ce sont près de 1,3 million de copies ou d’extraits d’actes d’état civil qui ont été délivrés. Cela représente des économies budgétaires et de personnels pour le ministère, ainsi qu’une simplification des démarches pour l’usager.

L’observatoire de la qualité des démarches en ligne, devenu Vos démarches essentielles, note à 8,7 sur 10 le taux de satisfaction des usagers au sujet de la dématérialisation. Ainsi, l’article 1er du présent texte pérennise dans le code civil la dématérialisation de la délivrance des copies intégrales et des extraits d’actes : il inscrit donc dans la loi un dispositif qui fonctionne.

Il est vrai que le reste des dispositions prévues en 2018 tardent à venir. Quelque part, ce retard est normal puisque l’administration entreprend un chantier important, sous-tendant un vaste changement de paradigme. Toutefois, des réserves ont été exprimées en commission par certains de mes collègues. Je pense notamment à l’amendement tendant à ce qu’un effort accru de transparence soit fait, ce qui me semble aller dans la bonne direction.

De façon constructive et positive, il intègre l’AFE à l’évaluation des progrès de l’expérimentation. Les conseillers des Français de l’étranger seront indubitablement les meilleurs juges de la mise en place de cette réforme puisqu’ils sont directement en contact avec les bénéficiaires de cette dernière.

La prolongation de l’expérimentation jusqu’en 2027 est nécessaire afin de mettre en place la dématérialisation de l’établissement, de la mise à jour et de la conservation des actes d’état civil. En 2027, le MEAE possédera un état civil complet, fonctionnel et facile d’accès – le ministère a déjà tant investi dans ce projet qu’il serait illogique d’y mettre fin maintenant !

Lors de la présentation du texte, notre collègue Cazebonne a évoqué deux sujets collatéraux particulièrement importants, à savoir la fracture numérique et la cybersécurité.

Le maintien à Nantes d’un service permettant de contacter le ministère par téléphone et de recevoir une copie d’acte par courrier constitue une ligne rouge. Sur ce sujet, le Gouvernement s’est voulu rassurant en rappelant son intention de ne pas créer de rupture d’égalité dans l’accès aux services publics. Je l’en remercie.

Se pose aussi la question de la cybersécurité. La dématérialisation fait peser une charge supplémentaire sur les systèmes d’information et de communication du ministère. Toutefois, l’analyse des risques réalisée a montré la solidité de nos infrastructures et n’a pas révélé de risque supplémentaire.

Ce texte est cohérent avec l’effort de simplification voulu par les Français et le Gouvernement. La dématérialisation est une pierre angulaire de la clarification des démarches d’état civil.

À l’heure du numérique, c’est à nous qu’il revient de mettre fin à une administration bureaucratique croulant sur les formulaires papier et les signatures manuscrites. Cette expérimentation et son succès préfigurent des chantiers qui seront ensuite appliqués plus largement. Le temps, les moyens et l’énergie investis depuis 2019 sont autant d’économies réalisées pour la suite.

Vous l’aurez compris, le groupe RDPI votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)