M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour la réplique.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, mais vous avouerez que tout cela est d’une complexité aberrante et je ne sais pas si les policiers s’y retrouvent ! Vous savez bien que la maison police est en train de se fissurer : ne la laissons pas s’effondrer !
recours aux professionnels de santé diplômés hors union européenne
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, auteur de la question n° 1070, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
M. Bruno Belin. Cela fait maintenant dix-huit ans que j’écris et que je parle sur la question des déserts médicaux et, malgré toutes les annonces de bonne volonté que l’on peut entendre quasiment chaque semaine, on sait très bien que la décennie qui est devant nous sera très difficile pour les patients.
C’est pourquoi je souhaite interroger le Gouvernement sur la possibilité de recourir aux professionnels de santé diplômés hors de l’Union européenne. Nous devons évidemment veiller à ne pas « vider » – pardonnez-moi ce mot, mais il est très parlant – les pays de formation de ces professionnels, et nous devons prendre en compte les parcours de vie – je pense à une jeune médecin cubaine que l’on n’a pas autorisée à s’installer il y a quinze ans en France et qui fait maintenant le bonheur d’une célèbre agence onusienne sise à Genève.
Madame la ministre déléguée, le Gouvernement entend-il faire appel aux professionnels de santé diplômés hors Union européenne pour pallier les carences de notre système et essayer d’apporter des réponses dans les déserts médicaux ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles. Monsieur le sénateur Belin, votre combat contre les déserts médicaux est ancien et reconnu par tous.
Comme vous le savez, les professionnels de santé qui ne sont pas titulaires d’un diplôme français peuvent être autorisés à exercer en France sous certaines conditions, différentes selon que leur diplôme a été obtenu dans un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen ou dans un État tiers.
L’autorisation d’exercice pour les praticiens à diplôme étranger est non seulement un enjeu individuel, mais aussi, dans l’attente des pleins effets de l’augmentation des effectifs de praticiens formés en France, une mesure permettant de garantir, dans de nombreux territoires, le maintien de l’offre de soins.
En France, la voie d’accès à l’obtention du plein exercice pour les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) est le concours des épreuves de vérification des connaissances, qui a lieu chaque année.
Une refonte de cette procédure est actuellement envisagée pour faciliter le parcours de demande d’autorisation d’exercice de ces praticiens. Ces évolutions seront mises en œuvre pour partie à compter de la session 2024.
En attendant, la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels a permis une première réforme structurelle du dispositif.
Elle a notamment permis la création d’une attestation d’exercice temporaire : le praticien étranger présent sur le territoire français se verra attribuer, à la suite de l’examen de son dossier par une commission d’autorisation d’exercice, une telle attestation pour treize mois en amont de sa réussite aux épreuves de vérification des connaissances. Cette attestation est renouvelable une fois en cas de premier échec, notamment pour permettre à ces praticiens de mieux se préparer aux épreuves.
À compter de 2025, d’autres aménagements du concours et de la nature des épreuves seront mis en œuvre.
Monsieur le sénateur, vous pouvez compter sur la mobilisation du Gouvernement pour lutter, à vos côtés, contre les déserts médicaux.
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour la réplique.
M. Bruno Belin. Je vous remercie de ces précisions, madame la ministre déléguée. Il nous faut tenter toutes les solutions et recourir à tous les savoir-faire.
Au-delà des déserts médicaux, que nous connaissons déjà, je voudrais élargir la question aux déserts pharmaceutiques vers lesquels nous nous dirigeons d’ici à la fin de la décennie. Il faut aussi y penser et je ne cesse de lancer des alertes sur ce sujet, parce que, dans six ou sept ans, seulement 15 % à 20 % des pharmaciens seront remplacés. Nous nous dirigeons tout droit vers un vrai séisme, notamment dans les territoires ruraux.
Je parle aussi autant que possible, à toutes les autorités que je croise, de la question de la pénurie de médicaments. Nous y sommes confrontés et cela entraîne déjà des défauts de soins.
J’ai quitté mon officine ce matin avec près d’une quinzaine de patients diabétiques sans Trulicity et sans visibilité sur les délais d’approvisionnement. C’est un comportement inadmissible de la part des laboratoires et de toute la chaîne de fabrication. Cela fait deux ans que nous alertons sur ce sujet et de nombreux patients subissent aujourd’hui des retards de soins, ce qui est dramatique.
situation alarmante de la santé mentale en france
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, auteure de la question n° 1072, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Mme Annick Billon. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je souhaite apporter mon soutien au brancardier violemment agressé ce week-end à l’hôpital de Challans. Nous devons protection à nos soignants !
J’en viens à ma question. Le rapport d’information sénatorial sur la situation de la psychiatrie des mineurs en France, paru en 2017, comportait cinquante-deux recommandations pour « sauver la pédopsychiatrie ». En 2021, un autre rapport appelait à réinvestir la santé mentale après le choc de la crise sanitaire.
Les maladies mentales et troubles psychiques concerneraient 13 millions de Français, soit un sur cinq. Leur prise en charge est le premier poste de dépenses de l’assurance maladie, devant celle des cancers, pour un coût annuel de 23 milliards d’euros. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime le coût économique et social des troubles psychiques à 109 milliards d’euros par an.
Les rapports s’accumulent, les gouvernements se succèdent et la situation de la santé mentale en France ne fait qu’empirer, car les moyens, bien qu’importants, ne s’élèvent pas à la hauteur des besoins.
Sur le terrain, cela se concrétise par des postes à pourvoir qui demeurent vacants, des fermetures de lits, des conditions de travail dégradées, des violences envers les soignants, des délais toujours plus longs de prise en charge, de la maltraitance ou encore des défauts de prévention qui ont pour conséquence que toujours plus de jeunes tentent et parviennent à mettre fin à leurs jours.
L’inventaire des maux ne permet pas de guérir, mais il témoigne de l’urgence à considérer la santé mentale comme une priorité gouvernementale. De surcroît, la carence de moyens ajoute au manque d’attractivité de la spécialité. Les professionnels de la psychiatrie considèrent que nous sommes assis sur des bombes à retardement !
Quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en place à court et moyen termes pour attirer des personnels soignants et doter la santé mentale de moyens suffisants ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles. Madame la sénatrice Billon, vous avez raison : il faut commencer par briser le tabou de la santé mentale. Des familles traversent de grandes difficultés et ressortent parfois anéanties. J’ajoute que la santé mentale des enfants et des adolescents s’est particulièrement dégradée depuis la crise de la covid-19.
Les recours aux soins d’urgence pour troubles de l’humeur, les idées et gestes suicidaires ont fortement augmenté en 2021, puis en 2022, et se maintiennent depuis à un niveau très élevé. Cette dégradation de la santé mentale des Français, plus spécifiquement des jeunes, appelle une réponse forte de notre part – je sais qu’il s’agit de l’un de vos combats depuis longtemps.
En septembre 2021, les Assises de la santé mentale ont permis de structurer une nouvelle feuille de route pour la santé mentale et la psychiatrie pour la période 2021-2026, enrichie de nouvelles mesures – treize par rapport à la feuille de route 2018-2021. Sa mise en œuvre est régulièrement évaluée : le prochain comité stratégique de suivi aura d’ailleurs lieu à la fin du mois.
Concrètement, cette stratégie s’est traduite par des mesures fortes en matière de prévention, comme la formation de secouristes en santé mentale ou la mise en place du 3114, numéro national de prévention du suicide, un renforcement de l’offre de soins grâce à une augmentation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie correspondant aux activités de psychiatrie qui atteint désormais plus de 12 milliards d’euros.
Plus spécifiquement, un appel à projets relatif au fonds d’innovation organisationnelle en psychiatrie a été lancé en 2019, à la demande des professionnels, afin de répondre aux enjeux organisationnels. Ce sont 216 millions d’euros qui ont été alloués sur l’ensemble de la période, en soutien à des projets territoriaux portés par des collectifs de soins.
Par ailleurs, nous avons pris des mesures pour renforcer l’attractivité de la discipline. Celles-ci ont permis de faire passer le pourcentage des postes non choisis par les étudiants en psychiatrie de 17,5 % en 2019 à 6 % en 2022.
La santé mentale et la psychiatrie sont donc plus que jamais une priorité du Gouvernement. Le Conseil national de la refondation (CNR) santé mentale, qui débutera en mai, nous permettra de proposer de nouvelles réponses.
Enfin, conformément aux annonces du Premier ministre, une rénovation complète du dispositif Mon soutien psy sera engagée pour le rendre plus attractif pour les psychologues et plus facile d’accès pour les Français.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. La région Pays de la Loire arrive en dernière position en termes de financements. L’établissement public de santé mentale (EPSM) Georges Mazurelle de La Roche-sur-Yon dispose même du plus faible budget des hôpitaux psychiatriques de métropole.
Madame la ministre déléguée, la psychiatrie souffre de non-assistance à spécialité en danger !
augmentation des tarifs des mutuelles santé
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, auteure de la question n° 1146, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Mme Michelle Gréaume. Alors que le désengagement de l’assurance maladie dans la prise en charge des dépenses de santé s’accentue chaque année, inexorablement, quelque 70 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales sont décidés, fragilisant un peu plus l’équilibre financier du système de santé et du budget de la sécurité sociale.
Cette situation accroît de fait la part de la prise en charge des complémentaires santé, et naturellement leurs tarifs, les rendant aujourd’hui indispensables pour pouvoir se soigner. En effet, déremboursements par la sécurité sociale et hausses des primes des complémentaires vont de pair. C’est un véritable effet d’aubaine, dont certaines n’hésitent pas à profiter en pratiquant des augmentations hors de toute réalité.
Ajoutons également l’impact non négligeable du niveau de taxation : 14,1 % pour les contrats solidaires, 21,1 % pour les contrats individuels. Cela contribue à alourdir encore un peu plus la note.
Conséquence, les tarifs des mutuelles ont grimpé en ce début d’année : entre +8,1 % et +10 % en moyenne ; +25 %, voire +30 % pour les catégories de personnes qui ne bénéficient pas de contrats collectifs, comme les retraités, les étudiants ou les indépendants.
Cumulées à l’inflation et à la baisse du pouvoir d’achat, ces hausses de tarifs sont insupportables, faisant grandir le risque de non-souscription à une complémentaire et, à terme, malheureusement, le risque de renonciation aux soins.
Au niveau national, ce sont aujourd’hui 4 millions de personnes qui vivent sans complémentaire santé, 925 000 dans le seul département du Nord.
Les récentes annonces du Gouvernement, comme le doublement des franchises médicales pour ne citer que cet exemple, tout comme l’explosion des dépassements d’honoraires chez certains praticiens, ne vont certainement pas arranger les choses.
Madame la ministre déléguée, je reste convaincue que l’égal accès à la santé pour toutes et tous réside dans la prise en charge intégrale des soins par l’assurance maladie. Mais, dans l’immédiat, il y a urgence à agir pour endiguer ces hausses tarifaires injustifiées et réduire les inégalités induites.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Michelle Gréaume. Quelles mesures concrètes, y compris en termes de sanctions, le Gouvernement compte-t-il prendre en la matière ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles. Madame la sénatrice, le Gouvernement partage pleinement vos inquiétudes quant à la forte augmentation des tarifs pratiqués par les complémentaires santé ces dernières années.
Le Sénat mène actuellement une mission d’information sur les complémentaires santé, dont le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, qui est particulièrement vigilant sur cette question, lira les conclusions avec une grande attention.
Le montant des cotisations prévues par les complémentaires santé pour couvrir les garanties qu’elles proposent à leurs clients relève toutefois de la liberté contractuelle et je ne peux pas prendre d’engagement direct sur ce sujet.
Néanmoins, afin de limiter l’augmentation des cotisations des complémentaires, plusieurs dispositifs ont été mis en place par le Gouvernement.
Je pense à la portabilité de la couverture santé pendant un an après la fin du contrat de travail ou encore la possibilité pour les branches de prévoir la prise en charge de tout ou partie de la couverture des anciens salariés.
Par ailleurs, depuis 2020 et en application de la loi du 14 juillet 2019, l’assuré peut mobiliser la résiliation infra-annuelle, sans frais ni pénalité, de son contrat complémentaire. L’assuré peut également renégocier son contrat, en adaptant ou supprimant des garanties inutilisées, mais je sais que cela reste difficile en pratique, en particulier pour des personnes isolées.
Je tiens également à souligner que, pour les Français les plus modestes, nous avons mis en place la complémentaire santé solidaire (C2S). Grâce à elle, leurs dépenses de santé sont remboursées entièrement dans la limite des tarifs de la sécurité sociale.
Enfin, il est faux de dire que l’assurance maladie obligatoire se désengage de la prise en charge des frais de santé. En réalité, la part des dépenses dans la consommation de soins et de biens médicaux prise en charge par l’assurance maladie n’a cessé d’augmenter au cours des quinze dernières années.
Deux facteurs expliquent cette évolution : d’une part, l’augmentation du nombre d’assurés en affection de longue durée, dont les frais de santé sont pris en charge intégralement ; d’autre part, le fait que l’assurance maladie obligatoire s’engage en faveur de prises en charge innovantes et souvent plus coûteuses, notamment en matière de médicaments.
Je rappelle à ce titre que la part de l’assurance maladie obligatoire dans les dépenses de santé s’élève à près de 80 % et que cette part a augmenté de plus de trois points depuis 2010, et de deux points depuis 2019.
situation des infirmières dites « asalée »
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 1161, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
M. Patrice Joly. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la situation des infirmières intégrées au dispositif d’action de santé libérale en équipe, dit « Asalée ».
Ce dispositif de coopération entre médecins généralistes et infirmiers a pour objectif d’améliorer la prise en charge de patients souffrant de pathologies chroniques. Il s’agit incontestablement d’une réussite, puisqu’il a permis de faciliter le parcours de soins du patient en valorisant de nouvelles compétences paramédicales tout en faisant gagner du temps aux médecins.
C’est un magnifique exemple de délégation de tâches et cette réussite est reconnue de tous. La prise en charge des patients est excellente avec une écoute et une proximité beaucoup plus importantes, ce qui permet le dépistage plus précoce de certaines pathologies.
Pourtant, la Caisse nationale de l’assurance maladie a acté la fin du financement des loyers pour l’hébergement des professionnels Asalée au 31 décembre 2023. Cette décision brutale, sans concertation, provoque un émoi important et une inquiétude légitime des professionnels mobilisés et des élus locaux.
À cela s’ajoutent des situations surprenantes. Ainsi, dans la Nièvre, au mois de février 2024, les neuf infirmières Asalée ont perçu leur salaire avec retard, ce qui les a mises en difficulté. Il est anormal qu’à ce jour les dates de paiement de leurs prochains salaires soient inconnues.
L’ensemble de ces problèmes financiers met à mal le travail de toutes les équipes – infirmiers, médecins, patients – et provoque beaucoup de stress, notamment sur la pérennité du dispositif, en particulier dans mon département.
Alors que nous sommes dans une situation de pénurie de professionnels de santé et que ce dispositif répond aux difficultés d’accès aux soins, le Gouvernement entend-il prendre le risque de voir disparaître l’association Asalée ? Dans le cas contraire, quelles mesures envisage-t-il de prendre, de manière urgente, pour régler cette situation ?
Enfin, le 20 mars dernier, le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention annonçait ici même qu’une nouvelle convention serait signée très vite : qu’en est-il aujourd’hui ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles. Monsieur le sénateur Joly, le Gouvernement est convaincu de l’intérêt majeur du dispositif Asalée et de la réponse efficace qu’il apporte dans l’accès aux soins, en particulier pour les patients atteints de maladies chroniques.
C’est un dispositif qui a fait ses preuves en matière de santé publique et il n’est, à aucun moment, question de le remettre en cause.
Les pouvoirs publics ont d’ailleurs accompagné ce projet depuis sa création et dans sa phase de croissance. L’assurance maladie participe ainsi depuis fin 2022 au financement de la formation et du déploiement de 1 200 infirmiers, bien au-delà de l’objectif initial de 700 infirmiers fixé par la convention de 2019. Ce sont plus de 80 millions d’euros qui sont versés chaque année à l’association.
Les montants investis par les pouvoirs publics sont alloués aux soins ; en revanche, la convention actuelle entre l’association et l’assurance maladie ne prévoit pas de prise en charge des loyers comme le souhaite l’association – c’est en effet un sujet de débat.
Pour l’instant, les nombreux échanges n’ont pas permis d’aboutir à une nouvelle convention. Notre priorité est de garantir la bonne utilisation de l’argent public.
L’assurance maladie n’a néanmoins ni retardé ni suspendu ses financements à l’association, qui reçoit des financements à hauteur de 6 millions d’euros par mois.
Les représentants de l’association Asalée ont été reçus le 8 mars au ministère de la santé. Les échanges vont désormais se poursuivre en vue d’établir la convention de l’année 2024 et de trouver des solutions pérennes.
Monsieur le sénateur, Asalée est un acteur important de l’évolution des soins primaires dans notre pays. Le Gouvernement soutient et continuera à soutenir ce dispositif.
dysfonctionnements de l’office national d’indemnisation des accidents médicaux
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, auteur de la question n° 1191, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention.
M. Christian Klinger. Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention sur les difficultés d’accès à l’indemnisation pour les victimes de la Dépakine.
Le législateur voulait un dispositif simple, objectif et rapide. En 2017, la Cour des comptes jugeait que le système de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) était « onéreux, inadapté et inefficace ».
En octobre 2022, à mon tour, je pointais ces lacunes dans un rapport parlementaire.
Deux ans après, de nombreuses victimes de la Dépakine, pourtant reconnues officiellement par l’Oniam, ne sont toujours pas indemnisées trente mois après cette reconnaissance. Pour une fois, ce n’est pas un problème de budget : l’Oniam ne redistribue qu’une petite partie des crédits qui lui sont alloués chaque année pour indemniser les victimes.
Madame la ministre déléguée, qu’envisagez-vous de faire pour que ce dispositif d’indemnisation soit efficace et que les victimes soient indemnisées dans de meilleurs délais ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles. La Dépakine est un traitement antiépileptique, également prescrit contre les troubles bipolaires, commercialisé depuis 1967. Ses effets tératogènes sont connus depuis les années 1980, provoquant notamment des malformations et des troubles du neurodéveloppement chez l’enfant exposé in utero.
À la suite d’une mission de l’inspection générale des affaires sociales, un dispositif d’indemnisation pour les victimes a été créé. Il est entré en vigueur en 2017 et sa gestion a été confiée à l’Oniam.
Si le dispositif a rencontré des difficultés au moment de sa création, une réforme de ses instances en 2019 a permis de raccourcir les délais d’instruction – même si ce n’est pas encore suffisant, ce qui n’est pas acceptable.
Les deux instances préexistantes ont fusionné afin de confier à un seul collège d’experts l’évaluation des responsabilités, de l’imputabilité et de l’étendue des dommages.
Le nouveau collège a dû procéder, en plus de l’instruction des nouveaux dossiers, au réexamen d’un nombre important d’avis rendus précédemment. Ses travaux ont aussi été perturbés par la crise sanitaire.
Cependant, après un travail important, le collège a désormais réduit drastiquement ses délais d’instruction. L’ensemble des dossiers déposés en 2023 ont fait l’objet d’un avis cette même année, ce qui va dans le bon sens.
Par ailleurs, lors du renouvellement du collège en juillet 2023, ses membres ont, dans leur grande majorité, souhaité poursuivre leur mandat, ce qui témoigne de leur grande implication et a contribué à renforcer l’efficacité du dispositif.
Ainsi, au 31 mars 2024, 1 946 victimes, dont 454 victimes directes, ont reçu une offre d’indemnisation pour un montant total de 85,8 millions d’euros. Parmi elles, 1 219 ont accepté l’offre d’indemnisation pour un montant total versé de 61,2 millions d’euros.
Malgré cette amélioration, l’efficacité du dispositif continue de faire l’objet d’une attention particulière de la part du ministre délégué chargé de la santé et de la prévention ; les discussions sur le prochain contrat d’objectifs et de performance avec l’Oniam, qui auront lieu dans le courant de l’année 2024, permettront d’aborder cette question. Tant que la situation ne sera pas satisfaisante, nous continuerons à faire évoluer les choses !
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, pour la réplique.
M. Christian Klinger. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre déléguée. Il est vrai que la reconnaissance des handicaps causés par la Dépakine est une première victoire pour les victimes, mais l’indemnisation financière est un vrai besoin pour leur quotidien. Pour les familles, les délais induits par l’inefficacité d’un organisme ne sont pas acceptables.
Je vous le répète, l’objectif était d’être simple, objectif et rapide. D’ailleurs, initialement, la loi fixait un délai d’indemnisation de six mois ; certes, cela paraissait un peu court compte tenu de l’ampleur des éléments à fournir pour constituer les dossiers.
Je sais que l’Oniam fournit des efforts, mais il faudra peut-être, madame la ministre déléguée, exercer une pression amicale sur ses responsables pour qu’ils s’accentuent…
pénurie de médicaments
M. le président. La parole est à M. Hugues Saury, auteur de la question n° 1193, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention.
M. Hugues Saury. Depuis 2018, les signalements de pénuries de médicaments essentiels ont décuplé, suscitant l’inquiétude et la colère des professionnels de santé. Récemment, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) indiquait avoir enregistré près de 5 000 signalements de ruptures de stocks et de risques de rupture en 2023, soit une hausse de 30,9 % par rapport à 2022 et de 128 % par rapport à 2021 !
Toutes les classes thérapeutiques sont touchées et ces pénuries en constante augmentation posent des questions quant à la garantie de notre sécurité sanitaire. La situation actuelle est non seulement aberrante pour les professionnels de santé sous pression, qui perdent du temps en recherches auprès des grossistes-répartiteurs ou des confrères, mais elle est aussi, et surtout, dangereuse pour les patients, puisqu’elle menace à terme la prise en charge effective des personnes malades, avec un réel risque de perte de chances pour certains.
Face à cette situation, une nouvelle feuille de route visant à garantir la disponibilité des médicaments a été présentée en février 2024. Mais l’augmentation constante de ces pénuries depuis 2017 suffit pour faire le bilan – sans effets ! – de ces plans à répétition.
Je ne disconviens pas que la dernière en date présente un certain nombre d’actions susceptibles d’améliorer l’information et – je l’espère – d’apporter des solutions. Encore faut-il qu’elles soient réellement appliquées !
Il faut notamment donner la possibilité aux pharmaciens d’officine de remplacer les médicaments en rupture par un médicament disponible sans solliciter le prescripteur qui est rarement joignable facilement.
Il faut également assouplir les règles de fabrication à l’officine d’un certain nombre de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Les pharmaciens reçoivent une formation initiale et continue pour cela.
Le Gouvernement dispose des recommandations de la commission d’enquête du Sénat sur les pénuries de médicaments et les choix de l’industrie pharmaceutique française, qui a su travailler avec pragmatisme et écouter les acteurs, dans toute leur diversité, pour proposer des mesures de bon sens.
Madame la ministre déléguée, ma question est simple : quels sont les objectifs du Gouvernement pour enrayer ces pénuries de médicaments ? Quel calendrier envisagez-vous ?