PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Mises au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon.

Mme Annick Billon. Lors du scrutin n° 154 sur l’ensemble de la proposition de loi visant à lutter contre les discriminations par la pratique de tests individuels et statistiques, ma collègue Nathalie Goulet a été enregistrée comme votant pour, alors qu’elle souhaitait voter contre. Ma collègue Christine Herzog a aussi été enregistrée comme votant pour, alors qu’elle souhaitait s’abstenir.

M. le président. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.

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Dossier législatif : proposition de loi visant à soutenir l'engagement bénévole et à simplifier la vie associative
Discussion générale (suite)

Engagement bénévole et vie associative

Adoption en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative (proposition n° 309, texte de la commission n° 387, rapport n° 386).

Discussion générale

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à soutenir l'engagement bénévole et à simplifier la vie associative
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 19 rectifié bis

Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, vous qui représentez les collectivités territoriales de la République, vous savez combien les associations de notre pays – on en dénombre 1,5 million –, qu’elles soient établies dans l’Hexagone ou en outre-mer, contribuent à la vitalité, à la cohésion et à l’unité de notre société. Vous connaissez aussi l’importance de l’engagement des 15 millions de Français qui, chacun à leur manière et à leur échelle, s’impliquent dans une association.

La vie associative est bien davantage que la somme des engagements individuels qui la composent. Elle est l’une des formes de réalisation les plus concrètes du pacte républicain : parce qu’elle forme une grande communauté nationale où chacune et chacun peut trouver sa place, son rôle et sa voix ; parce qu’elle offre un espace de liberté où les idées, les initiatives et les innovations peuvent germer, grandir et porter leurs fruits ; parce qu’elle fait vivre les valeurs collectives de solidarité, d’entraide et de souci des autres, notamment des plus vulnérables, qui sont au fondement même de notre nation.

À l’heure où nous devons poursuivre nos efforts pour empêcher que la solitude et l’isolement ne gagnent du terrain, et tout faire pour éviter que l’individualisme et le repli sur soi ne menacent notre cohésion nationale, la vie associative apparaît comme un véritable rempart républicain.

Oui, les associations nous rappellent, de la manière la plus tangible et incontestable qui soit, la force du refus de l’indifférence, de l’injustice et de la résignation.

Le Président de la République et le Premier ministre m’ont fait l’honneur, il y a quelques jours, d’étendre mes attributions à la vie associative, afin que je puisse poursuivre l’engagement qui était le mien dans mes fonctions précédentes. Mais c’est aussi en tant que ministre déléguée chargée du renouveau démocratique que je m’exprime devant vous aujourd’hui.

La vitalité de nos associations constitue bel et bien un pilier démocratique de notre pays. L’engagement des bénévoles est l’une des plus belles formes d’engagement citoyen. L’action de nos associations, partout sur le territoire, traduit chaque jour en actes la promesse républicaine de liberté, d’égalité et de fraternité. À tous ces égards, le soutien apporté par l’État à la vie associative de notre pays est le juste reflet du rôle essentiel que joue cette dernière.

Depuis 2017, la majorité et le Gouvernement ont ainsi eu à cœur de soutenir et d’accompagner les acteurs associatifs sur tous les plans.

L’État les accompagne ainsi sur le plan financier. Le budget alloué au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) dans le projet de loi de finances pour 2024 a été augmenté de 30 %. Il est ainsi passé de 50 millions d’euros à 70 millions d’euros. Ce Fonds bénéficie donc de 20 millions d’euros supplémentaires pour soutenir les associations dans la formation de leurs bénévoles, dans leur fonctionnement et dans leurs projets innovants.

L’an passé, le FDVA a profité à pas moins de 16 000 structures. Parmi celles-ci, on dénombre une grande majorité de petites associations, actives dans l’ensemble de nos territoires et pour lesquelles ce concours financier de l’État est déterminant, pour ne pas dire vital.

La contribution de l’État au financement du monde associatif, chacun en conviendra, est tout sauf négligeable. Elle témoigne de notre volonté d’apporter un soutien massif et ciblé à nos associations et à celles et à ceux qui les font vivre au quotidien.

S’il est souvent indispensable pour leur permettre de fonctionner et de se développer, l’engagement de l’État aux côtés des associations ne se limite pas pour autant au volet financier. Il se traduit également par des mesures concrètes permettant de faciliter, de renforcer et de pérenniser la vie associative.

Ainsi, depuis 2017, avec le soutien du Parlement, nous avons consolidé la protection juridique des dirigeants d’associations. Nous avons élaboré, aux côtés des acteurs du monde associatif, des outils permettant de simplifier leur quotidien. Je pense au guichet unique Le Compte Asso ou au Guid’Asso, dont les crédits ont été augmentés dans le dernier projet de loi de finances.

Nous avons amélioré la prise en compte de l’acquisition de compétences par les bénévoles et instauré une certification professionnelle attestant de la maîtrise d’un bloc de compétences, ainsi qu’une plateforme de validation des acquis.

L’ensemble de ces avancées majeures pour le monde associatif, nous les devons avant tout à un travail que nous avons tenu à mener en constant dialogue avec les acteurs concernés. Pour aboutir à des mesures concrètes, efficaces et répondant de manière pertinente à leurs besoins, nous avons écouté les acteurs associatifs eux-mêmes.

C’est avec eux, dans un souci d’être à l’écoute des réalités du terrain, que le Gouvernement a lancé au début de l’année dernière une grande consultation nationale relative à la simplification de la vie associative.

Cette consultation a permis de mettre en lumière les besoins auxquels la proposition de loi dont nous allons discuter aujourd’hui apporte une partie des réponses concrètes.

Je tiens tout d’abord à saluer le caractère transpartisan de ce texte. J’y vois la preuve que les sujets qui touchent à la vie de nos associations dépassent les clivages et les oppositions et que la représentation nationale est capable d’unité lorsqu’il s’agit d’acter de nouvelles avancées pour les Françaises et les Français qui s’engagent au quotidien. Je suis certaine que ce texte parviendra à susciter la même cohésion dans cet hémicycle ce soir.

Permettez-moi également de saluer chaleureusement le travail remarquable accompli par le Haut Conseil à la vie associative (HCVA) et Quentin Bataillon, le rapporteur du texte à l’Assemblée nationale.

Ce texte vise notamment à permettre l’ouverture des conditions pour bénéficier d’un abondement au compte personnel de formation (CPF), via le compte d’engagement citoyen (CEC) ; l’assouplissement des conditions de recours au congé d’engagement associatif ; l’ouverture du mécénat de compétences aux entreprises de moins de 5 000 salariés et l’extension de son expérimentation dans la fonction publique. Il permet également la facilitation des prêts entre associations et l’inscription dans la loi de Guid’Asso.

Cette proposition de loi, si elle est adoptée, actera donc plusieurs grandes avancées pour nos associations. Elle permettra plus particulièrement de renforcer l’engagement, notamment en faisant en sorte que celui-ci soit davantage et mieux reconnu. Ce sont les bénévoles qui font vivre nos associations : avec ce texte, nous leur faciliterons grandement la vie, nous renforcerons l’accompagnement de leur travail et nous favoriserons, de façon assez simple, leur engagement.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est très favorable à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Yan Chantrel, rapporteur de la commission de la culture, de léducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, associations de locataires, comités de jumelage, ensembles vocaux, cercles de cinéphiles, sociétés d’histoire locale, ateliers d’art, tiers-lieux, banques alimentaires, réseaux de solidarité, unions locales de retraités, clubs de tennis ou de karaté : les associations sont le cœur battant de nos villes et de nos territoires, en métropole et outre-mer.

C’est aussi le cas – je peux en témoigner – chez les Français de l’étranger, où des associations telles que Français du Monde, la Fédération internationale des accueils français et francophones d’expatriés (Fiafe), ou les écoles du dispositif Flam (Français langue maternelle) – forment un tissu vital de solidarité et de soutien pour les communautés françaises établies hors de France.

On comptait près de 1,5 million d’associations actives en 2023. Elles permettent quotidiennement aux Françaises et aux Français de s’adonner à des loisirs, à leurs passions ou à des œuvres sociales qui contribuent à donner du sens à notre existence et qui sont le sel de la vie. Chaque année, près de 70 000 nouvelles associations sont créées, témoignant de la grande vitalité de notre société civile.

Ce sont en effet plus de 13 millions de bénévoles qui donnent de leur temps et de leur énergie, sans rien attendre en retour et sans être toujours reconnus à leur juste valeur. Ces femmes et ces hommes qui s’engagent au quotidien incarnent la vertu sur laquelle repose notre modèle de citoyenneté et tissent ce lien social dont notre pays a tant besoin.

Pour autant, nos associations sont aujourd’hui triplement sous tension.

Elles sont d’abord fragilisées par le contexte inflationniste, qui entrave leur fonctionnement et affaiblit leur trésorerie. En tant que rapporteur pour avis du programme 163, je dois dire que l’annonce de coupes budgétaires de 180 millions d’euros – soit 10 % – des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » n’est pas de nature à nous rassurer !

Je pense aussi aux acteurs de la solidarité, qui sont doublement frappés parce que leurs bénévoles vivent eux-mêmes souvent dans la précarité et que leur engagement est mis à mal par la hausse du coût de la vie et des transports.

Nos associations souffrent également de la complexité croissante des démarches administratives et de la multiplication des appels à projets, notamment les plus petites d’entre elles.

Enfin, elles font face à une recomposition profonde des pratiques bénévoles : on constate un engagement croissant, mais plus ponctuel, des moins de 35 ans et une diminution du nombre des bénévoles de plus de 65 ans, piliers traditionnels du bénévolat.

Les Assises de la simplification associative, organisées de décembre 2022 à janvier 2023, leur ont permis de faire remonter leurs difficultés au travers de 15 000 contributions. Je vous encourage, d’ailleurs, madame la ministre, à rendre accessibles ces 15 000 doléances. Elles seront une ressource essentielle pour les élus et les chercheurs.

La proposition de loi que nous examinons se veut une réponse, très partielle, mais utile, à un certain nombre des préoccupations et à plusieurs demandes exprimées par le monde associatif pour soutenir l’engagement bénévole et simplifier la vie associative. La commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport l’a adoptée, sans manquer toutefois de l’enrichir.

Le texte facilite la formation des bénévoles et vise à mieux faire connaître les outils à leur disposition. Il assouplit les conditions d’éligibilité d’accès au compte d’engagement citoyen pour permettre aux bénévoles de se former plus facilement, car l’acquisition de compétences et la prise de responsabilités participent de l’attractivité du bénévolat, notamment pour les plus jeunes, qui hésitent parfois à occuper des fonctions de dirigeant ou d’encadrant.

Lors de nos travaux, nous avons aussi eu à cœur de rester fidèles à l’esprit de cette proposition de loi et de ne pas alourdir les contraintes qui pèsent sur les associations.

Par ailleurs, dans un souci de promotion de l’engagement associatif des salariés et des agents publics, la proposition de loi facilite le mécénat de compétences en l’ouvrant aux entreprises de moins de 5 000 salariés pour le prêt de main-d’œuvre aux associations.

Elle abaisse également le seuil d’existence des associations pour que leurs bénévoles dirigeants ou encadrants soient éligibles au congé d’engagement associatif et au congé de citoyenneté. Il s’agit d’une demande des acteurs du monde associatif : les associations nouvellement créées ont besoin, dès les premières années, d’une disponibilité renforcée de leurs bénévoles pour se développer.

Avec le soutien de la commission, j’ai aussi proposé d’ouvrir la possibilité pour un salarié de donner, sous forme monétisée, ses jours de congé et de repos non pris, au-delà, bien sûr, des vingt-quatre jours ouvrables, qui sont un acquis social. L’organisme bénéficiaire du don est choisi d’un commun accord entre le salarié et l’entreprise.

Le texte prévoit enfin la possibilité d’une mise à disposition de fonctionnaires hospitaliers et de contractuels de la fonction publique d’État, territoriale et hospitalière auprès d’associations. La commission s’est interrogée sur l’opportunité d’élargir le dispositif aux contractuels : le fait d’embaucher un contractuel pour le mettre ensuite à disposition lui paraissait aller à l’encontre du statut de la fonction publique. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors de nos échanges.

Pour aider les associations à faire face aux difficultés financières auxquelles elles sont confrontées, notamment l’inflation et les effets toujours perceptibles des vagues épidémiques successives, le texte actualise tout d’abord, pour les tombolas, lotos et loteries – outils particulièrement efficaces et populaires de levée de fonds – les causes de bienfaisance pour lesquelles les associations peuvent y recourir.

Le texte prévoit également plusieurs dispositifs pour renforcer et sécuriser la trésorerie des associations, qu’il s’agisse de la simplification des conditions de prêts entre associations, ou de la possibilité, pour les associations membres d’un même groupe associatif, de procéder à des opérations de trésorerie entre elles. Là encore, il s’agit d’une demande forte des associations, comme l’a souligné le Haut Conseil à la vie associative.

Consciente du contexte économique préjudiciable pour notre tissu associatif, la commission a également adopté un article additionnel visant à rendre des organismes à but non lucratif éligibles au régime du groupe TVA, dès lors qu’ils sont en mesure d’établir par des liens financiers qu’ils sont bien constitués comme groupe. Ce dispositif s’inscrit dans la droite ligne de l’ambition simplificatrice des auteurs de ce texte.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, ce texte n’est pas révolutionnaire, mais il permet d’encourager l’engagement bénévole et de simplifier la vie associative par des mesures concrètes et bienvenues dans le contexte actuel.

C’est dans un souci de soutenir nos petites associations, en métropole, outre-mer et hors de France, et d’accompagner leurs bénévoles que je vous propose d’adopter cette proposition de loi.

Je forme le vœu que son adoption permette aussi de mieux faire connaître les dispositifs de soutien déjà existants et d’encourager le Gouvernement à aller plus loin à l’avenir, notamment pour soutenir les bénévoles, souvent précaires, qui font vivre les associations de solidarité, principales victimes des crises qui se sont succédé ces dernières années. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – M. Gérard Lahellec applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)

Mme Mathilde Ollivier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative, adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale.

L’engagement et la solidarité bénévoles sont une richesse unique dans notre pays. En ville, dans une zone rurale ou à l’étranger pour les Français qui y sont établis, la vie associative peut contribuer à l’épanouissement personnel, au vivre ensemble et à ce besoin de lien que nos concitoyens ressentent tant de nos jours.

En quête de sens et désireux d’apporter leur contribution à la collectivité, 13 millions de Français se sont engagés en 2023 dans le monde associatif. Après plusieurs années de participation en recul, les Françaises et les Français se tournent de nouveau vers les associations, le taux de bénévolat étant en hausse, particulièrement chez les plus jeunes. Cette dynamique vient bouleverser les habitudes, puisque les jeunes, souvent en activité professionnelle, s’investissent différemment, en choisissant en priorité des missions plus courtes et moins lourdes en termes de temps.

Ce constat représente tout de même un espoir. Alors que le Gouvernement essaie de nous dépeindre une jeunesse qui ne s’engagerait pas et cherche à remédier à cet état de fait à coups de service national universel (SNU), la réalité est tout autre, puisque c’est justement l’engagement de la jeunesse qui est en hausse et qui doit aujourd’hui être soutenu et facilité. Nous faisons des propositions en ce sens : nous avons besoin aujourd’hui de soutenir le tissu associatif local et les services civiques.

Mais le Gouvernement, lui, a choisi de réduire de 129 millions d’euros le budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Mme la ministre déléguée sexclame.) Pourtant, le contexte est alarmant, comme l’a mis en lumière l’appel du président des Restos du Cœur en septembre dernier.

Tel est le contexte dans lequel nous examinons cette proposition de loi. Ce texte permet certes quelques avancées, mais il n’est pas à la hauteur des enjeux.

Je salue certains de ses points, notamment l’article 7 bis introduit par mon collègue député écologiste Jean-Claude Raux, qui permet l’inscription dans la loi du dispositif de coordination, de structuration et d’accompagnement des associations Guid’Asso.

Lors de la réunion de la commission ce matin, la proposition de suppression de cet article a été votée. Je souhaite y revenir, en espérant, mes chers collègues, vous faire changer d’avis d’ici au vote, alors que l’amendement tendant à inscrire ce dispositif dans le texte avait été voté à l’unanimité à l’Assemblée nationale.

Il m’a été opposé en commission qu’il ne serait pas nécessaire d’inscrire Guid’Asso dans la loi, que les dispositions concernant ce réseau relèveraient du niveau réglementaire. Or Guid’Asso est déjà inscrit au niveau réglementaire ; notre objectif est bien qu’il soit désormais inscrit dans la loi et que sa mise en œuvre soit ainsi renforcée.

Chaque année, les crédits de ce réseau sont augmentés pour accélérer son déploiement. Il faut donc le soutenir alors que son nom n’apparaît ni dans les lois de finances ni dans aucune autre loi.

Je souhaitais faire un point sur ce sujet dans la discussion générale afin de vous laisser le temps, mes chers collègues, d’en rediscuter. (M. le président de la commission et M. le rapporteur sourient.)

D’autres dispositions du texte doivent absolument nous appeler à la vigilance.

Je pense notamment à l’article 3 bis, qui prévoit l’expérimentation de la mise à disposition de fonctionnaires hospitaliers dans des fondations ou associations reconnues d’utilité publique. Une telle possibilité risquerait fortement de provoquer un transfert de compétences du public vers le privé, compte tenu du manque chronique de financement des hôpitaux publics.

À titre personnel, je suis aussi très partagée sur l’encouragement du mécénat de compétences. En effet, ce dispositif donne lieu à plusieurs dérives et risque de nous conduire à l’instauration d’un système de solidarité à l’américaine. Dans un rapport, la Cour des comptes fait un constat sévère sur le mécénat, dont elle dit qu’il favorise le parrainage publicitaire masqué et la surévaluation de certaines prestations pour bénéficier d’avantages fiscaux, le tout – dois-je le rappeler ? – en grande partie sur fonds publics.

Alors, veillons à ne pas faire de cette proposition de loi l’arbre qui cache la forêt. Le principal obstacle à l’engagement bénévole n’est pas évoqué dans ce texte, pourtant il est bien mesuré : c’est le temps.

Ayons le courage, mes chers collègues, de penser l’aménagement du temps de travail. À cet égard, je vous invite à voter mon amendement, que j’ai retravaillé après son examen en commission, visant à autoriser cet aménagement pour les membres bénévoles de bureaux d’associations et de fondations.

Il nous faut nous poser la question du temps disponible pour s’engager en faveur du bien commun et de l’épanouissement de chacun.

Enfin, j’évoquerai un dernier point d’alerte. Cette proposition de loi émane d’un élu de la majorité présidentielle. Elle est soutenue par un gouvernement qui, par ailleurs, met aujourd’hui en danger les associations et les collectifs qui se mobilisent pour la défense du vivant, pour le bien commun, pour notre avenir à toutes et à tous.

Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le rapporteur spécial de l’ONU, qui demande « des mesures immédiates » pour protéger les activistes, pour protéger les « écureuils » qui campent en haut des arbres pour empêcher le projet de l’A69. Il s’inquiète d’une « nette augmentation de la répression et de la criminalisation » des actions pacifiques de désobéissance civile partout en Europe.

Pour défendre les associations aujourd’hui, il faudrait les écouter et les protéger alors qu’elles alertent sur les plus grands défis du XXIe siècle, le changement climatique, l’effondrement de la biodiversité et le dépassement global des limites planétaires, dont six sur neuf sont déjà dépassées. Ce n’est clairement pas ce que fait le gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre.

Sous réserve de nos discussions ce soir, nous voterons ce texte visant à simplifier la vie des associations qui maillent les territoires et les font vivre, même s’il nous semble qu’il aurait pu être plus ambitieux. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)

M. Gérard Lahellec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à l’évocation des associations et des bénévoles, nos esprits doivent être en éveil, pour une raison simple : ils contribuent grandement à maintenir notre société debout.

Il n’y a pas un pan de notre société qui leur soit étranger. Dans ma circonscription, l’association Ubaka 22 lutte contre le harcèlement scolaire, Solidarité paysans accompagne les agriculteurs en difficulté, l’Adalea gère les appels d’urgence au 115 dans les Côtes-d’Armor. D’autres associations encore agissent en faveur de la démocratisation du sport, de la culture et de l’art.

Cette forme d’engagement, qui tient de l’altruisme et du don de soi, contribue à faire société, à faire du commun. L’enjeu est donc civilisationnel autant que matériel.

La société tout entière doit s’interroger sur les conditions qui permettraient de conforter cet engagement irremplaçable. Il nous faut donc être lucides sur ce dont le monde associatif a besoin, sur les contraintes administratives qui entravent son action, sur les moyens humains et financiers qui lui sont nécessaires pour fonctionner convenablement.

Or le contexte invite à une vigilance particulière.

Ainsi, il ne faudrait pas que le recul de l’âge de départ à la retraite ait un effet destructeur sur l’engagement solidaire des seniors.

De même, il nous faut être attentifs à ce que le dogme de la baisse de la dépense publique et ses conséquences sur les finances des collectivités territoriales ne compromettent pas l’activité associative, qui aurait beaucoup de mal à exister sans leur concours.

Enfin, je me permets de rappeler que la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune a également privé les associations de financements pour le bien public.

Il nous faut donc être vigilants, car, bien que leur engagement soit tenace, généreusement ancré en eux, ce contexte nourrit une forme de ras-le-bol chez nos bénévoles, qui pourrait, au fil du temps, nuire à l’investissement individuel en faveur de la cause commune.

Comme d’autres ici, je souhaitais une loi ambitieuse, capable de redonner à l’engagement associatif sa juste et légitime valeur.

Cependant, la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui a le mérite d’exister et nous devons la prendre pour ce qu’elle est. Elle n’a pas la prétention de résoudre l’ensemble des problèmes du monde associatif ; elle a, plus modestement, pour objectif de lui rendre la vie un peu plus simple.

Ainsi, ce texte vise à faciliter la formation des bénévoles, à encourager le recours au contrat d’engagement citoyen et au congé bénévole, à faire la promotion du mécénat de compétences, qui peut jouer un rôle important dans nos communes. Enfin, il vise à conforter le statut des associations à l’échelon réglementaire.

Nous voterons les amendements qui confortent ces aspects, ainsi que l’ensemble du texte. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER.)

M. le président. La parole est à Mme Annick Girardin.

Mme Annick Girardin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous légiférons ce soir sur un sujet important pour l’ensemble de notre société. Très souvent – trop souvent ! –, la vie associative et le bénévolat sont relégués au rang de divertissement, de passe-temps.

Bien entendu, ces considérations n’ont certainement pas pour but de dénigrer ni les associations ni les bénévoles. Cependant, elles ne rendent pas hommage à leur engagement, dont on ne prend pas la pleine mesure, pas plus qu’elles ne confèrent leurs lettres de noblesse à leurs actions, ô combien indispensables dans notre démocratie.

La vie associative occupe une place remarquable dans notre pays, que ce soit dans le domaine du sport, de la culture, des loisirs, dans la défense de causes, dans l’action sociale ou encore dans le développement local.

Au total, quelque 12,5 millions de nos concitoyens s’investissent chaque jour au profit de l’ensemble de la population française dans 1,5 million d’associations.

Mais il faut aussi dire que les associations, comme les bénévoles, compensent souvent le recul et les manques de nos institutions publiques. Cette présence inestimable sur le terrain nous impose de coconstruire nos politiques publiques avec elles.

Les associations inventent, expérimentent, mettent en œuvre et accompagnent des solutions pour répondre aux défis de nos différents territoires et de leurs populations. Leur force est d’avoir su mobiliser à leurs côtés des femmes et des hommes qui s’impliquent aux bénéfices des autres. Être bénévole, c’est la recherche d’un enrichissement personnel, l’envie d’être utile, mais c’est surtout le choix de donner de son temps.

Leurs actions quotidiennes créent du lien social, de la solidarité : les associations sont les artisans de la cohésion de nos territoires, hexagonaux et ultramarins, et nous ne devons jamais cesser de les accompagner.

Aujourd’hui, elles nous alertent, notamment les plus petites d’entre elles, sur leur incapacité à faire face aux contraintes administratives et financières que nous ne cessons de leur imposer.

Elles nous disent aussi que nous devons mieux valoriser et reconnaître cette richesse humaine qu’est le bénévolat en France. Les difficultés des bénévoles, sur lesquels repose une grande partie des associations, pourraient en effet provoquer une véritable crise si nous n’y prenions garde et avoir des conséquences sur notre société.

C’est justement pour remédier à ces difficultés que cette proposition de loi a été déposée : pour reconnaître que le monde associatif et les bénévoles n’échappent pas à la complexité administrative qui asphyxie et contraint leur action, leur investissement et leur développement, accentuant de fait leur découragement.

Mes chers collègues, cette réponse législative est attendue. Bien entendu, cela a été dit, elle ne permet pas de faire face à tous les problèmes, mais elle a le mérite d’être débattue aujourd’hui.

Ce texte vise à reconnaître l’engagement bénévole et à le valoriser en ouvrant des droits à la formation, en expliquant les avantages du bénévolat ou encore en sécurisant la mise à disposition gratuite des personnels des entreprises de moins de 5 000 salariés ou des fonctions publiques auprès d’associations d’intérêt général.

Ce texte a également pour objectif de réduire le travail et le stress des associations en simplifiant la vie associative, en permettant les prêts entre associations, mais surtout en pérennisant le Guid’Asso, pour mieux reconnaître et faire connaître ce dispositif, tant dans l’Hexagone qu’en outre-mer.

Mes chers collègues, vous le savez, le groupe RDSE et, plus généralement, les radicaux sont très attachés à nos valeurs républicaines, citoyennes et laïques, ainsi qu’à la notion d’engagement. Je ne diffère pas de mes camarades et j’irai même plus loin, le bénévolat et la vie associative ayant construit la personne et l’élue que je suis aujourd’hui.

J’ai effectué, comme beaucoup d’entre vous, mes premières armes dans le monde associatif avant d’intégrer la fonction publique et d’agir dans le champ si précieux de la jeunesse, du sport et de la culture pendant plus de quinze ans. À 5 000 kilomètres de Paris, comme dans beaucoup d’endroits dans l’Hexagone, dans la plus petite circonscription française, dans un contexte insulaire qui accentue souvent le sentiment d’isolement, la vie associative et le bénévolat sont des exutoires indispensables.

À Saint-Pierre-et-Miquelon, on compte pas moins de 300 associations pour 6 000 habitants. Je vous laisse apprécier le ratio ! Comme la valorisation de l’engagement passe en premier lieu par un merci, je profite de cet instant pour les saluer et les féliciter du formidable travail qu’elles ont réalisé et qu’elles effectuent encore.

Mes chers collègues, face au repli sur soi, face au recul de l’engagement, face aux attentes toujours croissantes de nos concitoyens restées parfois sans réponse, nous avons raison de parier sur l’énergie, le dynamisme et les compétences de la vie associative aux côtés de l’État et des collectivités pour le vivre ensemble dans notre société.

À travers cette ode à l’engagement, au secteur associatif et au bénévolat, je vous confirme que le groupe RDSE votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)