Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Somon. Je retire l’amendement n° II-150 rectifié bis, madame la présidente.
M. Jean-François Rapin. Je retire l’amendement n° II-352 rectifié quater, madame la présidente.
M. Michel Canévet. Je fais de même avec l’amendement n° II-875.
Mme Cécile Cukierman. Je retire l’amendement n° II-1036, madame la présidente.
Mme la présidente. Les amendements nos II-150 rectifié bis, II-352 rectifié quater, II-875 et II-1036 sont retirés.
L’amendement n° II-1067 rectifié, présenté par Mme Bellurot, MM. J.B. Blanc, D. Laurent et Lefèvre, Mmes P. Martin et Dumont, MM. Sido et Gremillet, Mme M. Mercier, M. H. Leroy, Mme Belrhiti, MM. Pellevat, Bouchet et Klinger, Mme Gosselin et M. Panunzi, est ainsi libellé :
Après l’article 49 undecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 80-10 du 10 janvier 1980 portant aménagement de la fiscalité directe locale est ainsi modifiée :
1° Après le premier alinéa du II de l’article 11, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le produit de cotisation foncière des entreprises mentionné au premier alinéa est majoré par le montant du prélèvement sur recettes prévu au 3 du A du III de l’article 29 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021. » ;
2° Après le premier alinéa du II de l’article 29, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le produit de taxe foncière sur les propriétés bâties mentionné au premier alinéa est majoré par le montant du prélèvement sur recettes prévu au 2 du A du III de l’article 29 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021. »
La parole est à Mme Pauline Martin.
Mme Pauline Martin. Cet amendement vise à corriger la loi du 10 janvier 1980 portant aménagement de la fiscalité directe locale. La suppression d’une grande partie des impositions économiques fragilise un grand nombre de collectivités et d’intercommunalités.
Aussi, cet amendement vise à prendre en compte les allocations compensatrices de cotisation foncière des entreprises (CFE) et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) perçues par les collectivités, en compensation de la réduction de moitié des valeurs locatives cadastrales des établissements industriels depuis 2021, dans les reversements de fiscalité prévus par les articles 11 et 29 de la loi du 10 janvier 1980.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ce sujet est technique ; la commission sollicite donc l’éclairage du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Les termes des conventions de partage de la fiscalité, et donc le mécanisme facultatif de partage, peuvent être adaptés directement par l’organe délibérant, afin de prendre en compte, en sus de la cotisation payée par l’entreprise, la compensation versée par l’État.
Cette compensation à l’euro prêt est garantie par l’État pour un coût de près de 4 milliards d’euros en 2023. Je rappelle par ailleurs que nous avons déjà modifié le mécanisme de compensation de la taxe d’habitation, de telle sorte qu’il soit systématiquement favorable aux collectivités territoriales.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-1067 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-503 rectifié ter, présenté par MM. J.B. Blanc, D. Laurent, Chaize, Brisson et Genet, Mmes Petrus, Demas et Joseph, MM. Bruyen et Saury, Mme Lassarade, MM. Panunzi et Cadec, Mme Estrosi Sassone, MM. H. Leroy, Klinger et Piednoir, Mme Noël, M. Joyandet, Mme Dumont, M. Pellevat, Mme Gosselin, MM. Anglars, de Legge, Gremillet, Milon et Duplomb, Mmes F. Gerbaud, Belrhiti, P. Martin, Drexler, Bonfanti-Dossat et Imbert et M. Sido, est ainsi libellé :
Après l’article 49 undecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport visant à évaluer le nombre de communes françaises confrontées à des pertes importantes de bases fiscales foncières du fait de la fermeture ou de décisions de site d’entreprises sur leur territoire. Il évalue également le coût de la mise en place par l’État d’un mécanisme de compensation dégressif.
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’une demande de rapport, madame la sénatrice, et vous connaissez la jurisprudence du Sénat face à la multiplication de ce type de demande.
Surtout, cet amendement est satisfait sur le fond, puisque le mécanisme de compensation dégressif a été adopté lors de l’examen de la première partie, raison pour laquelle j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Estrosi Sassone. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° II-503 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° II-1063, présenté par M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 49 undecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 30 juin 2024, le Gouvernement remet au Parlement un rapport pour évaluer, d’une part, le coût de la compensation par l’État d’une éventuelle suppression de la contribution au fonds national de garantie individuelle des ressources au bénéfice des plus petites communes et, d’autre part, le coût pour les différentes strates de communes.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Cet amendement concerne le fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR).
Ce fonds permet à chaque collectivité territoriale de disposer d’un niveau de ressources identique à celui qu’elle avait avant la suppression de la taxe professionnelle en 2010. Les collectivités qui auraient été surcompensées par le nouveau panier de ressources sont prélevées au profit des collectivités territoriales qui auraient été sous-compensées.
Depuis treize ans, la vie communale a été émaillée de nombreux événements : suppression de différentes recettes, comme la taxe d’habitation, vote de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, qui a emporté des conséquences sur les dotations d’un certain nombre de collectivités, notamment rurales, etc. Or ces dernières sont justement celles qui ont contribué le plus au FNGIR, puisque celui-ci devait compenser les pertes de taxe professionnelle : celles-ci étaient plus faibles dans les petites communes que dans les communes plus importantes et plus aisées. Deux élections municipales ont eu lieu depuis, en 2014 et 2020, et tous les élus trouvent ce système incompréhensible.
Certes, un ajustement a été réalisé dans la loi de finances pour 2021. Cependant, treize ans se sont écoulés ; eu égard aux difficultés financières que rencontrent les communes rurales, il convient de réfléchir à la suppression de ce fonds.
Nous souhaitons donc que le Gouvernement remette au Parlement un rapport pour mesurer les enjeux d’une telle mesure, pour évaluer le coût de la compensation par l’État pour les communes qui bénéficient d’un reversement du FNGIR ainsi que les conséquences pour les petites communes.
Cet amendement s’inscrit d’une certaine manière dans le prolongement de l’ambition du plan France Ruralités, dont l’objectif est de renforcer l’équité territoriale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Je voterai cet amendement. Voilà des années que l’on évoque la problématique du FNGIR, un dispositif stupide, qui a été figé en 2013.
Certaines communes ne perçoivent plus rien de ce fonds et paient des sommes totalement délirantes. Depuis des années, nous demandons une remise à plat du système. On nous dit que ce n’est pas possible au motif qu’il y aurait des perdants et des gagnants. Toujours est-il qu’aujourd’hui il n’y a que des perdants ! Ce sont toujours les mêmes : les petites communes.
Dans l’Oise, je connais ainsi six ou sept communes qui sont dans une situation financière catastrophique. Heureusement que M. Joly a relancé le sujet. Certes, il y a deux ans, une petite correction est intervenue, qui donne satisfaction à une commune concernée sur quatre…
Nous devrons, un jour ou l’autre, revenir sur le FNGIR : c’est une injustice fiscale totale !
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Pour qui est-ce une injustice, mon cher collègue ?
Je vous rappelle que les grandes collectivités ont eu une compensation unique et bloquée. C’est-à-dire que le montant qu’elles perçoivent du FNGIR ne progresse pas.
Quant aux petites communes, qui sont aujourd’hui contributrices, elles ont reçu en compensation, à l’époque, la part départementale de la taxe d’habitation des départements. Cela signifie que les petites communes connaissent une évolution de leurs recettes, alors que les grandes communes n’en ont plus. Si nous revenions sur ce système, ce serait très douloureux pour elles…
M. Olivier Paccaud. Pas pour celles de l’Oise !
Mme la présidente. L’amendement n° II-1444 rectifié n’est pas soutenu.
Article 49 duodecies (nouveau)
Au a ter du 1° de l’article L. 432-2 du code des assurances, après le mot : « civils », sont insérés les mots : « ou d’équipements utiles à la production et au stockage d’énergie bas-carbone ou d’hydrogène bas-carbone ou à la capture de dioxyde de carbone, ». (Adopté.)
Article 49 terdecies (nouveau)
I. – Le titre II du livre VIII du code général de la fonction publique est ainsi modifié :
1° Le 2° de l’article L. 822-8 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette part du traitement peut être portée à 60 % par décret en Conseil d’État si un accord conclu en application de l’article L. 221-2 le prévoit. » ;
2° La section 1 du chapitre VIII est complétée par un article L. 828-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 828-1-1. – I. – L’enfant ayant droit du fonctionnaire civil de l’État décédé bénéficie du paiement d’une rente temporaire d’éducation dans des conditions fixées par décret, relatives notamment à la position statutaire occupée par le fonctionnaire au moment de son décès, à l’âge de l’enfant ayant droit et à la poursuite de ses études.
« II. – L’enfant en situation de handicap ayant droit de l’agent mentionné au I bénéficie du paiement d’une rente viagère sans condition d’âge ni de poursuite d’études. Cette rente ne peut pas être cumulée avec la rente temporaire d’éducation. »
II. – Le code de la défense est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 4123-17, il est inséré un article L. 4123-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4123-17-1. – I. – L’enfant ayant droit du militaire décédé bénéficie du paiement d’une rente temporaire d’éducation dans des conditions fixées par décret, relatives notamment à la position statutaire occupée par le militaire au moment de son décès, à l’âge de l’enfant ayant droit et à la poursuite de ses études.
« II. – L’enfant en situation de handicap ayant droit du militaire mentionné au I bénéficie du paiement d’une rente viagère sans condition d’âge ni de poursuite de ses études. Cette rente ne peut pas être cumulée avec la rente temporaire d’éducation. » ;
2° À la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 4138-13, le mot : « moitié » est remplacé par le taux : « 40 % ». (Adopté.)
Article 49 quaterdecies (nouveau)
I. – L’article L. 827-3 du code général de la fonction publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au deuxième alinéa du présent article, les conditions prévues au II de l’article L. 862-4 et à l’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas opposables aux contrats collectifs souscrits pour les agents affectés à l’étranger. Toutefois, les cotisations versées par les bénéficiaires de ces contrats ne sont pas fixées en fonction de leur état de santé. »
II. – Le III de l’article L. 4123-3 du code de la défense est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du présent III, les conditions prévues au II de l’article L. 862-4 et à l’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas opposables aux contrats collectifs souscrits pour les militaires affectés à l’étranger. Toutefois, les cotisations versées par les bénéficiaires de ces contrats ne sont pas fixées en fonction de leur état de santé. »
III. – Le I de l’article 4 de l’ordonnance n° 2021-175 du 17 février 2021 relative à la protection sociale complémentaire dans la fonction publique est ainsi modifié :
1° Le 1° est ainsi modifié :
a) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Celle-ci peut être prolongée dans la limite d’une année. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du présent 1°, lorsque le terme de la convention, après prolongation d’une année, est antérieur au 31 décembre 2024, la convention peut être prolongée pour une durée supérieure à un an sans dépasser cette date ; »
2° Au 2°, l’année : « 2024 » est remplacée par l’année : « 2025 ». (Adopté.)
Article 49 quindecies (nouveau)
I. – À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 221-5 du code monétaire et financier, après le mot : « climatique », sont insérés les mots : « , au financement des entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises, de l’industrie de défense française ».
II. – Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2026, un rapport sur l’impact pour les finances publiques de l’exclusion de la base imposable des intérêts des sommes inscrites sur les livrets A prévue au 7° de l’article 157 et au a de l’article 208 ter du code général des impôts. Ce rapport évalue également l’efficacité du dispositif prévu au I du présent article et, le cas échéant, les moyens d’en renforcer l’application.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° II-1214 est présenté par MM. Bocquet et Savoldelli, Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° II-1388 est présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-1394 est présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° II-1214.
M. Pascal Savoldelli. Cet article 49, s’il était adopté, permettrait de financer, par le biais des recettes de l’épargne populaire réglementée, les industries d’armement. Voilà qui laisserait beaucoup de latitude aux banques dans la gestion de cette épargne !
Je rappelle que le 1er juillet 2009, toutes les banques pouvaient distribuer des livrets A au détriment du réseau historique. Cet article implique donc de revenir sur la centralisation des fonds placés à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour des missions d’intérêt général.
Les règles ont fluctué : le taux de centralisation des encours des livrets était d’abord de 65 %, lequel était assorti de règles annexes. Puis il y a eu un lobbying important du secteur bancaire.
La Cour des comptes, dans son rapport annuel de février 2010, évoquait déjà les risques d’un écart croissant entre les ressources et les financements pour le logement social. Elle notait que le niveau de la ressource centralisée vers les fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations dépendait désormais de la politique commerciale des banques et faisait le constat suivant : « L’ouverture de la distribution à l’ensemble des établissements de crédit fait courir le risque que les nouveaux réseaux décident d’orienter leur clientèle, une fois celle-ci fidélisée, vers d’autres produits d’épargne auxquels sont attachés des avantages fiscaux. »
Le 19 juillet 2013, à l’approche de la mise en place des normes de régulation de Bâle III prévue en 2014, la Caisse des dépôts ainsi que le ministère de l’économie et des finances ont annoncé que 30 milliards d’euros supplémentaires issus des livrets réglementés seraient reversés aux banques. Le ministère affirmait alors que ces ressources leur permettraient de prêter davantage pour le financement de l’économie, principalement au bénéfice des petites et moyennes entreprises.
Aujourd’hui, il faudrait autoriser les banques à investir l’argent du livret A, qui était hier au service du logement, notamment dans l’industrie de l’armement.
Il convient de faire attention, car ce secteur a les dents longues et on doit s’attendre à ce qu’il exerce une pression énorme. Il s’agit d’un secteur extrêmement rentable, y compris en temps de guerre. Or Dieu sait combien le contexte international est marqué par la multiplicité des guerres et des conflits – et nous savons que le capital se reconstitue quand il fait des guerres !
Préservons l’épargne de la voracité des industries d’armement.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° II-1388.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement est identique, même s’il ne repose pas sur les mêmes fondamentaux.
La commission des finances propose de supprimer cet article, qui lui semble fragile sur le plan juridique. Il contrevient en effet aux règles de l’article 34 de la Lolf. Le Sénat a aussi pour mission d’être le garant du respect des règles juridiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour présenter l’amendement n° II-1394.
Mme Antoinette Guhl. À l’instar de nos collègues communistes et de M. Husson, notre groupe a déposé un amendement de suppression. Nous sommes vivement opposés au fléchage d’une partie de l’épargne du livret A et du livret de développement durable et solidaire (LDDS) vers l’économie de guerre.
Un sondage récent a montré qu’une majorité de Français sont hostiles à ce que leur épargne finance l’industrie de la défense. Ce n’est pas étonnant. Les Français sont très attachés à la philosophie du livret A, qui permet de financer la construction du logement social et donc d’en faciliter l’accès. Compte tenu de la crise inédite du logement que nous traversons, il nous semble important de préserver ce système.
Les dispositions de cet article sont encore plus contestables pour ce qui concerne le livret de développement durable et solidaire, qui vise à financer à la fois l’économie sociale et solidaire et les rénovations énergétiques, mais en aucun cas l’économie de guerre.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Ce dispositif a été inscrit dans le PLF sur l’initiative de trois députés, qui souhaitaient créer une nouvelle obligation d’emploi de l’épargne réglementée figurant dans le bilan des banques, afin de financer la base industrielle et technologique de défense, et notamment les PME de ce secteur, qui parfois rencontrent des difficultés pour accéder à des sources de financement. Dans un contexte de guerre en Europe, il nous semble important de soutenir cette industrie.
Je tiens à souligner deux points.
Tout d’abord, c’est le Sénat, et en particulier la majorité sénatoriale LR, qui a milité, lors de l’examen de la loi de programmation militaire (LPM), pour l’adoption d’une mesure permettant de mobiliser l’épargne en direction de l’industrie de défense. Avec cet article, le souhait de la majorité sénatoriale est donc satisfait.
Ensuite, j’indique, pour répondre à votre inquiétude, monsieur le sénateur, qu’il n’y aura aucun effet d’éviction sur le logement social. On ne touche pas à la partie centralisée du livret A à la Caisse des dépôts, qui représente 60 % de la collecte et qui restera consacrée au financement du logement social. Il s’agit de mobiliser seulement les 40 % restants, qui sont dans les banques, afin de les flécher vers ce secteur économique.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin, pour explication de vote.
M. Cédric Perrin. Le 24 février 2022 a marqué le retour de la guerre sur le continent européen. Cette réalité brutale nous impose de faire un effort collectif en faveur de nos armées, évidemment, mais également de notre industrie de défense. Il s’agit de l’un des enjeux majeurs que nous avons pris en considération lorsque nous avons examiné la loi de programmation militaire cet été.
Notre base industrielle et technologique de défense n’est pas constituée uniquement de grands groupes ou de grands donneurs d’ordre. Elle comporte aussi, je vous le rappelle, 4 000 petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaire (ETI), qui concourent, directement ou indirectement, à la production des matériels et des équipements de nos forces.
Or ces entreprises rencontrent d’importantes difficultés d’accès au financement bancaire et aux investissements privés. Elles se heurtent souvent à un refus total de l’accès au financement bancaire. Nos collègues Pascal Allizard, Michel Boutant et Yannick Vaugrenard ont alerté les premiers sur ce sujet voilà quelque temps.
Le problème est bien connu : du fait des règles en matière de taxonomie ou de la prise en compte des risques en termes d’image, les investisseurs sont de plus en plus frileux à financer l’industrie de la défense.
Je voudrais rappeler à nos collègues qui siègent sur les travées opposées qu’il n’y aura pas de développement durable, pas de progrès sociaux, pas de stabilité économique sans une défense permettant d’assurer la paix. Or il n’y aura pas de défense si celle-ci n’a pas accès à des financements bancaires.
Pour pallier cette carence, lors de l’examen de la loi de programmation militaire, le Sénat a voté la création d’un livret d’épargne spécifique. En commission mixte paritaire, un accord avait été trouvé avec les députés sur un autre dispositif visant à flécher vers les entreprises de la défense une partie de l’encours des livrets A et du LDDS.
Il est important de préciser, comme l’a indiqué M. le ministre, que cette partie n’est absolument pas destinée au financement du logement social. Le Conseil constitutionnel a cependant censuré cette disposition.
Toutefois, si le Parlement ne peut introduire un tel dispositif ni dans la loi de programmation militaire ni dans la loi de finances, on est en droit d’y voir une entrave sérieuse à l’initiative parlementaire…
Je rappelle enfin que l’épargne réglementée bénéficie d’une exonération fiscale et sociale. Cette disposition emporte donc des conséquences sur les finances publiques. Aussi, mes chers collègues, il est inutile de nous autocensurer en anticipant la décision du Conseil constitutionnel.
Je vous invite à ne pas adopter ces amendements de suppression, même si je comprends parfaitement l’idée du rapporteur général.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. Je voudrais une précision. Le ministre nous a expliqué que cet amendement était utile, parce qu’il permettrait notamment de financer les PME.
J’ai du mal à comprendre en quoi le droit actuel ne permet pas déjà un tel financement. De mémoire, il me semble que les encours qui ne sont pas fléchés vers le logement social servent à financer les petites entreprises, la transition énergétique et l’économie sociale et solidaire.
Je ne comprends donc pas où se situe la difficulté. À moins que le vrai problème ne soit celui de la taxonomie, mais cela dépasse largement le cadre de notre discussion : les banques n’ont pas toujours la capacité de financer certaines entreprises, dans la mesure où elles redoutent d’avoir à rendre des comptes sur l’exposition de leurs portefeuilles quand elles procèdent à des remontées auprès de la Banque centrale européenne (BCE).
Il s’agit donc d’un tout autre problème. Pourquoi faudrait-il adopter cet article, alors que le droit actuel comporte déjà des mécanismes adaptés ?
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je partage – une fois n’est pas coutume – le questionnement de Mme Lavarde.
L’argument relatif au financement des PME vaut dans l’industrie de l’armement comme dans n’importe quelle activité économique. Les très petites entreprises (TPE) et les PME sont victimes d’un phénomène de sous-soumission aux marchés. Nous pourrions évoquer aussi le cas de la sous-traitance, etc. Je vous rappelle aussi que les très grandes entreprises sont débitrices à l’égard des plus petites entreprises. Ce n’est pas l’objet de notre discussion, mais c’est un vrai sujet.
La question est de savoir quels sont les blocages qui font que les TPE-PME de l’armement sont prétendument mises à l’écart des financements.
Il faut aussi définir clairement de quoi il est question. Qui dit industrie d’armement, dit production et fabrication d’armes. Il convient de distinguer ce qui relève de notre défense et de l’exercice de notre souveraineté – dimension qui est très importante et à laquelle nous sommes tous, je crois, attachés – et la production d’armements militaires destinés à la vente. C’est là que j’ai d’énormes doutes : à qui seront-ils vendus ? Pour quels usages ?
On dit que l’argent n’a pas d’odeur, mais lorsque l’on songe aux conflits qui font rage dans le monde et que l’on voit qui fournit des armes aux belligérants, on se dit que les armes qui tuent n’ont pas forcément d’odeur non plus !