Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sylviane Noël, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ce qui concerne les crédits relatifs au commerce, à la consommation et à l’artisanat, nous partions de loin. Des évolutions sont donc à saluer cette année, même si beaucoup reste à faire.
S’agissant de la consommation, les alertes répétées du Sénat ont porté leurs fruits : les moyens de la DGCCRF connaîtront de nouveau une hausse en 2024, avec 34 ETPT recréés, après 15 en 2023. Cela fait suite à une décennie de réduction d’effectifs : la DGCCRF avait perdu 400 ETPT net depuis 2007. Dans le même temps, ses missions n’avaient pas cessé d’augmenter. Or comment protéger les consommateurs avec moins d’enquêteurs pour effectuer les contrôles ? De plus, la DGCCRF a besoin de ces moyens supplémentaires pour poursuivre sa transformation, notamment numérique, en lien avec l’évolution des modes de consommation et, malheureusement, l’évolution des modes de fraude. Elle a déjà développé des outils numériques comme Polygraphe, qui détecte les faux avis sur internet. D’autres chantiers sont en cours et il faut qu’elle puisse les poursuivre.
Dans un tel contexte, la hausse des crédits de cette direction est justifiée. Son rôle en période inflationniste est crucial pour protéger le pouvoir d’achat des ménages, mais aussi la trésorerie des entreprises. Elle constate d’ailleurs actuellement une recrudescence des retards de paiement, les grandes entreprises profitant de l’inflation au détriment de nos TPE-PME. Ce sont des pratiques inacceptables ! La DGCCRF les sanctionne déjà lourdement, mais ce n’est sans doute pas assez dissuasif : c’est pour cette raison que la commission des affaires économiques estime qu’une réflexion doit avoir lieu sur l’efficacité de ces sanctions.
Concernant le commerce, la mission ne comporte quasiment plus de crédits de soutien au commerce depuis la disparition du fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (Fisac) en 2019. Je note une seule évolution positive : la création d’un fonds territorial d’accessibilité, doté de 300 millions d’euros d’ici à 2028. Axé sur les TPE-PME, il financera des travaux de mise en accessibilité de nos restaurants, bars ou hôtels, mais il est loin d’être transversal, comme l’était le Fisac, qui permettait le développement et la modernisation des commerces.
Sur l’artisanat, une stratégie nationale pour les métiers d’art a enfin été lancée en mai dernier. C’est un secteur qui œuvre à la transmission de savoir-faire qui font l’excellence et le rayonnement de la France. C’est donc pour moi une avancée que d’avoir, pour la première fois, une politique publique unifiée, avec une stratégie interministérielle regroupant l’économie et la culture. En revanche, il ne faut pas être dupe sur les effets d’affichage : cette stratégie ne comporte que 2,4 millions d’euros de mesures nouvelles, ce qui est très peu.
En conclusion, je dirai que la mission « Économie » est porteuse d’avancées, même si elles sont inégales, pour les crédits « commerce, consommation, artisanat ». Pour ces raisons, la commission des affaires économiques a souhaité donner un avis favorable à leur adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Économie » est très éclectique. Elle concerne aussi bien des organismes rattachés à Bercy que des mécanismes d’aide aux entreprises.
Je ne reviens pas en détail sur l’augmentation des crédits de l’Agence nationale des fréquences à l’occasion des jeux Olympiques et Paralympiques ni sur la hausse de la rémunération de Bpifrance Assurance Export ou sur le renforcement des effectifs de la direction générale du Trésor.
Nous tenons à accorder un bon point au Gouvernement pour avoir significativement augmenté les effectifs de la DGCCRF, avec 49 ETPT supplémentaires. Cette direction a notamment désormais pour mission de réguler la publicité faite par les influenceurs. Les affaires passées, et à venir, comme nous pouvons le présager, nous ont démontré les dangers des placements de produits au profit d’entreprises peu regardantes sur les risques engendrés. Renforcer ce « gendarme de la pub » sur internet est un impératif pour protéger nos concitoyens, particulièrement les jeunes.
Toutefois, monsieur le ministre, nous relevons deux mauvais points dans la copie que vous nous présentez.
D’une part, il y a l’échec relatif, pointé par les rapporteurs spéciaux, du guichet d’aide au paiement par les entreprises de leurs factures d’énergie, ouvert à la suite de l’invasion de l’Ukraine. Nous avions accordé 7 milliards d’euros d’aides, qui n’ont été distribués qu’à hauteur de 12 %.
Nos collègues Thierry Cozic et Frédérique Espagnac avancent deux explications dans leur rapport : des critères d’accès trop restrictifs et un calibrage budgétaire trop ambitieux.
D’autre part, en ce qui concerne le déploiement de la fibre optique, le Gouvernement avait tablé sur un objectif ambitieux de couverture du territoire à l’horizon 2025, mais le financement des réseaux d’initiative publique pâtit d’une baisse des crédits demandés pour l’année 2024. Alors que la dynamique massive de raccordement était lancée, elle décroît depuis 2023.
En outre, nous regrettons la raréfaction de crédits en soutien à l’artisanat et au commerce. Une exception notable : le fonds territorial d’accessibilité créé en 2023 pour les ERP est bien lancé. Les 300 millions d’euros prévus jusque 2028 seront principalement fléchés vers nos commerces. Nous nous en félicitons.
Un mot sur le Fisac, pour vous rappeler que le RDSE s’était opposé à sa suppression.
Dans le même esprit, monsieur le ministre, vous n’êtes pas sans savoir que l’économie sociale et solidaire (ESS) est très importante. Dans mon département de Lot-et-Garonne, elle représente ainsi 15 % des emplois.
C’est un levier de développement des territoires, qui me paraît cependant sous-évalué.
En tant que vice-président de la délégation sénatoriale aux entreprises, je profite de cette intervention à la tribune pour demander explicitement au Gouvernement de lancer une réflexion pour réactiver le Fisac, qui assurait un équilibre entre les territoires. La délégation travaille par ailleurs sur les problématiques liées au foncier rencontrées par les entreprises.
En conséquence, je vous invite, mes chers collègues, à voter l’amendement de la présidente Maryse Carrère, qui vise à créer un fonds national de soutien à l’artisanat et au commerce de proximité.
Nous réservons notre vote jusqu’à l’issue de nos échanges, que nous espérons constructifs. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Fouassin. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Stéphane Fouassin. Madame la présidente, monsieur le ministre, la mission « Économie » comprend une grande variété de programmes : « Développement des entreprises et régulations », « Statistiques et études économiques », « Plan France Très Haut Débit », « Stratégies et études économiques », « Stratégiques économies » ainsi que le financement des opérations patrimoniales via le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».
L’objectif de ces programmes est d’améliorer la compétitivité des entreprises, d’instaurer un environnement concurrentiel sain, de protéger les consommateurs et de soutenir une stratégie économique pour une croissance durable, équilibrée et propice aux exportations.
Comme le montrent les propositions émises par le comité interministériel des outre-mer (Ciom), l’État souhaite que nos territoires ultramarins puissent participer au rayonnement de la France dans le monde, à travers un renforcement des échanges dans les zones respectives. Dans le cas de La Réunion, il s’agirait ainsi de développer les échanges avec les pays de la zone de l’océan Indien.
Les crédits de cette mission connaissent une baisse significative de près de 45 % en autorisations d’engagement et de 45,8 % en crédits de paiement. Cette diminution s’explique principalement par la fin du dispositif d’aide temporaire aux entreprises les plus consommatrices en gaz et électricité, ce qui représente une baisse de près de 3,8 milliards d’euros.
Néanmoins, des ajustements sont opérés pour soutenir des secteurs clés. Ainsi, les moyens de Bpifrance augmentent de 100 millions d’euros en 2024 afin de renforcer l’accompagnement des entreprises dans leurs différentes transitions. Une attention particulière est accordée à la transition écologique, avec l’allocation de plus de 2 milliards d’euros en 2024 et 2025 pour soutenir celle des entreprises et la réindustrialisation.
Le plan France Très Haut Débit concentrera également davantage de ressources sur les raccordements complexes et le déploiement des réseaux par les collectivités locales, avec plus de 40 millions d’euros alloués à l’action « Inclusion numérique ».
En outre-mer comme dans de nombreuses zones rurales de l’Hexagone, la fracture numérique crée lentement un fossé entre les populations qui savent utiliser l’outil numérique et les autres. Il n’est pas concevable de laisser quiconque à l’écart de cette grande révolution qui n’a pas fini de modifier nos modes de vie.
Aussi, je me réjouis de l’effort porté sur l’inclusion numérique, qui garantira l’accès de chaque Français à un monde où le numérique est devenu un fondement de la vie économique et sociale.
Chacun pourra saisir l’opportunité du numérique, qui offre des perspectives de développement économique et d’accompagnement de nos entreprises, de nos entrepreneurs, de nos étudiants et de l’ensemble de nos concitoyens.
Notons également la mise en place du fonds territorial d’accessibilité, doté de 50 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 20 millions d’euros en crédits de paiement pour l’année 2024, et qui atteindra 300 millions sur la période 2023-2028. Ce fonds vise à soutenir les petits commerces, restaurants, cafés et bars dans leurs travaux d’accessibilité, sous la supervision des préfets de département.
En matière de protection des consommateurs et de sécurisation des marchés face aux évolutions numériques, un renforcement des contrôles sera opéré notamment par la DGCCRF. Ces mesures incluent le contrôle des pratiques commerciales des influenceurs, la régulation du commerce en ligne et des applications ainsi que des contrôles renforcés des allégations environnementales des produits.
En moyenne, 3 500 colis arrivent à La Réunion et sont distribués chaque jour. Durant la période des fêtes de fin d’année, cette moyenne quotidienne oscille entre 4 500 et 5 000 colis.
Le programme 134, relevant du secrétariat général des ministères économiques et financiers, vise quant à lui à développer la compétitivité des entreprises et à favoriser un environnement économique propice à la croissance et à l’emploi, malgré les défis économiques actuels liés aux crises sanitaire et énergétique.
Pour appuyer cette modernisation économique et la transition énergétique, des leviers tels que le soutien à l’investissement et à l’innovation, le déploiement de mesures de cybersécurité, ainsi que des offres spécifiques pour la transition écologique seront mobilisés.
Le renforcement du développement de nos entreprises reste une priorité, alors que longtemps le manque d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) en France a été pointé comme une faiblesse de notre tissu économique. Le Président de la République et Olivia Grégoire ont annoncé le 21 novembre dernier le lancement du programme ETIncelles. Ce programme vise à accompagner 500 petites et moyennes entreprises à fort potentiel de croissance afin qu’elles deviennent des ETI et qu’elles innovent dans les territoires, partent à la conquête de marchés extérieurs et créent des emplois de toute nature en France.
En conclusion, les crédits de la mission « Économie » sont à la hauteur des objectifs défendus. Cette mission s’articule avec l’ensemble des politiques publiques qui visent à soutenir nos entreprises, mais aussi l’activité dans tous les territoires.
Notre groupe votera donc ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Mérillou. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Serge Mérillou. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission que nous examinons s’inscrit dans un budget placé sous le signe de la volonté de décarbonation de notre industrie et du désendettement de l’État.
Le Gouvernement prévoit donc de réaliser 16 milliards d’économies, mais, dans le même temps, il continue de réduire les impôts tout en favorisant les grandes entreprises.
Baisser les recettes, c’est désarmer l’État et condamner les Français à subir les effets d’une politique d’austérité - réforme des retraites et de l’assurance chômage, coupes budgétaires dans les services publics. La recette est toujours la même et touche toujours les mêmes : les plus fragiles.
Pourtant, nous devons massivement investir pour faire face aux transitions présentes et futures – la transition environnementale, la transition énergétique, et bien d’autres. Nous devons mobiliser les moyens nécessaires et les rendre socialement inclusifs.
Or, si l’on soustrait les crédits exceptionnels de soutien aux entreprises face à la hausse des prix de l’énergie, il reste une mission « Économie » dans la continuité des précédentes, c’est-à-dire insuffisante pour répondre aux enjeux que j’ai cités. Comme le soulignent les rapporteurs, cette mission illustre l’absence de lisibilité de la politique économique du Gouvernement. Elle ne rassemble qu’une part infime des dépenses en faveur de l’activité économique, de plus en plus intégrées dans le plan France 2030.
Face à ce flou, je me réjouis de l’amendement de la commission des affaires économiques que défendra notre collègue Franck Montaugé visant à demander un rapport récapitulant l’ensemble des actions menées par l’État en faveur de la politique industrielle. Nous avons absolument besoin de clarté dans ce domaine.
La mission « Économie » est une mission hétéroclite, dispersée, peu lisible ; aussi, je ne reviendrai que sur certaines des thématiques qu’elle aborde.
En ce qui concerne le budget de La Poste, si je salue le renouvellement des compensations budgétaires pluriannuelles, je partage l’avis des rapporteurs quant à la nécessité de les revoir à la hausse. La Poste assure un rôle de service public indispensable dans tous les territoires. Or la présence postale est aussi menacée qu’elle est nécessaire, en particulier dans les zones rurales.
Dans un tout autre domaine, la baisse des recettes fiscales des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) ne doit pas se faire au détriment des entreprises artisanales. Celles-ci contribuent à l’attractivité et au rayonnement des territoires. Des dispositifs doivent donc permettre de compenser la réduction de 60 millions d’euros du plafond de la taxe pour frais de chambres affectée aux CMA d’ici à 2027.
J’en viens à deux points plus spécifiques de cette mission.
En premier lieu, le renforcement des investissements de l’État dans le plan France Très Haut Débit et l’ouverture d’appels à projets complémentaires en 2021 et 2022 est une excellente chose. Il doit permettre de nous rapprocher de l’objectif ambitieux de déployer le très haut débit pour tous et d’assurer une couverture générale en fibre optique du territoire d’ici à 2025.
La raréfaction des services publics dans la ruralité rend en effet l’accès à internet incontournable. Cependant, relier toutes les habitations n’est pas facile. Jean-François Fallacher, nouveau directeur général d’Orange, a d’ailleurs qualifié de « chimère » cet objectif. Aussi, où en sommes-nous ? Les moyens sont-ils à la hauteur de nos ambitions ?
La dégradation des réseaux de fibre optique doit aussi être traitée. Le Sénat a entamé une utile réflexion sur le sujet. Je pense notamment à la proposition de loi visant à assurer la qualité et la pérennité des raccordements aux réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique de Patrick Chaize.
La filière s’est d’ailleurs engagée dans un plan d’action visant à améliorer les pratiques des agents d’intervention. Pour l’heure, les résultats ne sont pas encore visibles. Notre vigilance est donc de mise.
En second lieu, je veux aborder la question de l’économie sociale et solidaire. L’ESS a démontré sa résilience pendant la crise de la covid-19. Ce secteur joue un rôle primordial dans la transition sociale et écologique. Pourtant, les soutiens qui lui sont accordés dans cette mission sont faibles : ils s’élèvent à seulement 20 millions d’euros contre 120 milliards d’aides recensés pour les entreprises classiques.
L’ESS ne saurait être le parent pauvre de ce budget quand on sait qu’elle représente 10 % du PIB et 14 % des emplois privés. La sous-estimer, c’est la mettre en péril, tout autant que les valeurs qui devraient être au cœur de toutes les entreprises.
Mon groupe et moi-même déplorons la stagnation des budgets des pôles territoriaux de coopération économique, dont le rôle est fondamental.
L’ESS doit donc être dotée de moyens conséquents. Elle est un outil indéniable pour faire face aux crises sanitaire, énergétique et écologique que nous vivons. Résilience et innovation en sont ses maîtres mots.
Ce budget ne répond pas à l’urgence. Les entreprises de l’ESS méritent d’être traitées à l’égal de leurs homologues de l’économie classique. Elles auraient sans doute plus leur place dans le programme 134 « Développement des entreprises et régulations ».
L’an dernier, le groupe socialiste, par l’intermédiaire de Florence Blatrix Contat, avait déposé plusieurs amendements pour conforter ce secteur. Aussi, sous réserve de l’adoption des amendements qui seront examinés, nous voterons les crédits de cette mission « Économie ». (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Chaize. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Patrick Chaize. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Économie » est devenue un ensemble de crédits disparates et ne représente plus les politiques économiques menées dans notre pays.
Ces politiques économiques sont désormais largement financées par des crédits d’autres missions et des mesures extrabudgétaires, ce qui nuit à la clarté des débats et au contrôle parlementaire du budget de l’État.
Parmi cet ensemble de crédits sans grande cohérence, je relève toutefois quelques points d’intérêt en matière de régulation des postes, des télécommunications et de l’économie numérique.
Je souhaite d’abord faire un point d’actualité sur l’application du projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (Sren), qui est toujours en cours d’examen parlementaire.
En tant que corapporteur de ce projet de loi, je peux me satisfaire de l’anticipation du déploiement du filtre antiarnaques, auquel est dédiée une enveloppe de 4,5 millions d’euros : plus tôt ce filtre sera opérationnel, mieux nous nous protégerons des actes de cybermalveillance en ligne, qui sont en forte hausse.
Toutefois, je m’inquiète de l’absence de budget alloué à l’Arcep pour faire face à ses nouvelles obligations en matière de régulation des marchés d’informatique en nuage et de services d’intermédiation des données.
Ces nouvelles missions, très éloignées du cœur de métier historique de l’Arcep, sont pourtant essentielles à l’atteinte de notre souveraineté numérique.
Cet oubli budgétaire est d’autant plus préjudiciable que les autres autorités de régulation chargées d’appliquer les nouveaux règlements européens sur le numérique bénéficient, dans le cadre de ce projet de loi de finances, d’un renforcement de leurs moyens.
Il me semble donc indispensable, dans le souci de la bonne application de la loi que nous votons, de rectifier cet oubli : un gendarme qui dispose seulement de son uniforme pour faire respecter la loi n’ira pas bien loin, vous en conviendrez…
Des oublis, dans le cadre de la mission « Économie », il y en a malheureusement d’autres, qui sont plus ou moins préjudiciables.
Je pense en particulier à la mission d’aménagement du territoire à laquelle contribue La Poste, sous-compensée a minima de 15 millions d’euros – ou de plus 190 millions d’euros selon l’estimation de l’Arcep !
Les effets de la poursuite de la réforme des impôts de production sur le financement de cette mission de service public ne sont pas entièrement pris en compte – et une nouvelle fois, c’est le Sénat qui le remarque…
Cet oubli est d’autant plus dommageable que c’est cette mission de service public qui permet le maintien de 17 000 points de contact sur notre territoire. Si une juste compensation n’est pas assurée, alors c’est directement le budget des commissions départementales de présence postale territoriale qui sera réduit.
Certains d’entre vous siègent peut-être au sein de ces commissions. Elles sont aujourd’hui le principal levier d’action des élus locaux en matière postale. Nous devons préserver leur capacité d’action.
Les collectivités territoriales ne sauraient être la variable d’ajustement de ce budget et de celui des années à venir. Leur capacité d’investissement doit donc être préservée.
C’est pourquoi je m’inquiète, comme nombre d’entre vous, de l’avenir du financement accordé aux conseillers numériques des maisons France Services. Ce dispositif essentiel pour favoriser l’inclusion numérique a été initié à juste titre par l’État, et son soutien financier doit perdurer.
De façon générale, les moyens alloués en faveur de l’inclusion numérique me paraissent largement insuffisants et ne sont pas de nature à permettre une politique ambitieuse et inclusive en la matière.
Enfin, je ne saurais m’exprimer ici sans évoquer la réalisation du plan France Très Haut Débit.
Nous partageons tous ici ce constat : la généralisation de la fibre optique d’ici à la fin de 2025 est encore loin d’être acquise. Nous le constatons chaque semaine dans nos territoires.
Les réseaux de fibre optique se déploient peut-être trop vite, au détriment de leur qualité et de leur pérennité. Il y a quelques mois, le Sénat a voté à l’unanimité ma proposition de loi sur le sujet. Nous ne pouvons que regretter son absence d’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, même si les pratiques des opérateurs sont en train d’évoluer dans le bon sens sur le terrain.
Des parties entières de notre territoire demeurent en marge du plan France Très Haut Débit, en particulier le département de Mayotte. Avec mon collègue Thani Mohamed Soilihi, nous rappelons chaque année que Mayotte a plus que jamais besoin du soutien du Sénat face aux réticences incompréhensibles du Gouvernement à soutenir le déploiement de son réseau d’initiative publique – bien que, si j’en crois les récents échos,…
M. Patrick Chaize. … la situation semble s’améliorer. En tant que sénateurs, notre rôle est également de nous assurer qu’aucun territoire n’est oublié des politiques publiques.
Sur l’ensemble de ces sujets, je vous proposerai donc divers amendements, mes chers collègues, présentés en parfaite cohérence avec les amendements adoptés la semaine dernière par la commission des affaires économiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault.
M. Vincent Louault. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le développement économique recouvre de grands mots comme la croissance, la compétitivité, la consommation, l’inflation, la balance commerciale, des taux, des courbes, des chiffres à ne plus finir - et j’en passe.
Derrière ces grands mots, il y a une réalité : des femmes et des hommes, de la passion, du labeur, du savoir-faire, du travail, de la vitalité et de l’espoir - quand cela va bien. Mais aussi, quand cela va mal, du chômage, de la pauvreté, de l’isolement, des vies malmenées, parfois brisées, des patrons et agriculteurs étouffés - et j’en passe.
C’est le quotidien des Français que mettent en jeu les crédits de cette mission : faire ses courses alimentaires, se chauffer, disposer d’une connexion très haut débit à la maison, ou encore avoir accès, pour les personnes à mobilité réduite, à un simple service public - des enjeux concrets, comme le simple aménagement d’une rampe d’accès aux toilettes.
Nous examinons donc une belle mission qui pave le chemin entre le quotidien des Français et la souveraineté industrielle et numérique de notre pays.
En ces temps d’inflation, tout cela prend une connotation particulière. L’an dernier, les crédits de la mission étaient en forte hausse ; malgré la baisse apparente, qui est conjoncturelle, ils le sont toujours. L’augmentation des crédits correspondait en effet à la lutte contre la crise énergétique qui s’était déclarée quelques mois plus tôt.
Je salue les efforts que le Gouvernement a réalisés durant cette période, ainsi que le travail parlementaire fourni pour protéger autant que possible les ménages français des effets de cette crise. L’accumulation des crises aura des conséquences. Nous devons poursuivre nos efforts pour assainir nos finances et les inscrire dans les différentes transitions.
L’an dernier, nous soulignions la forte hausse des crédits alloués à la compensation carbone des sites et des entreprises électro-intensives. Cette augmentation se poursuit dans ce PLF, et la trajectoire devrait se maintenir dans les années à venir en raison de l’augmentation du prix des quotas carbone. La compensation carbone dépasse désormais le milliard d’euros.
La consommation d’énergie dans certains secteurs clés est importante. La quasi-totalité de nos entreprises a subi les effets du poison du coût de l’énergie en 2023. Nous regrettons donc que le guichet provisoire d’aides n’ait pas atteint ses objectifs, pourtant louables. Des aides différentes ont été évoquées au niveau national et européen. Connaissons-nous l’architecture de ces nouvelles formules ?
Pour conclure, les crédits de la mission « Économie », bien que perfectibles, devraient avoir des conséquences positives pour nos entreprises et les Français. C’est pourquoi le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fargeot. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Daniel Fargeot. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec pour maîtres mots le numérique, l’industrialisation et la compétitivité, cette mission « Économie » se situe au carrefour des enjeux stratégiques pour la France.
Je salue d’abord l’excellent travail réalisé par nos rapporteurs et notamment celui d’Anne-Catherine Loisier sur le numérique, qui représente un sujet fondamental à l’heure du « tout connecté ».
Les efforts budgétaires consentis par le Gouvernement sont perceptibles.
Ils vont dans le bon sens en finançant la montée en puissance du mécanisme de compensation carbone.
Ils vont dans le bon sens en poursuivant la réindustrialisation de notre pays ainsi que le déploiement du plan France Très Haut Débit.
Pour autant, le groupe Union Centriste estime que certaines réformes soutenues par cette mission sont, au mieux, problématiques, au pire, regrettables.
Tous ici sur ces travées, et partout dans nos départements, nous connaissons l’importance des chambres de commerce et d’industrie (CCI) pour la vitalité de nos tissus économiques.
Tous ici, nous connaissons le rôle décisif de ces chambres pour soutenir l’entrepreneuriat et l’innovation.
Tous ici, nous connaissons les missions majeures de service public que mènent les CCI et l’effet de levier de leurs actions de 1 à 5 pour l’économie française.
Le PLF continue pourtant de détricoter nos chambres en proposant une nouvelle fois de réduire la voilure. Rappelons l’important travail de restructuration des chambres accompli ces dix dernières années.
Certes, le navire CCI tangue. Mais nous ne pouvons pas l’accepter.
La proposition d’une baisse du plafond des taxes affectées aux CCI par le Gouvernement n’était à ce titre pas recevable. Sa transformation par l’Assemblée nationale en un prélèvement sur fond de roulement est une première avancée, mais nous ne pouvons nous en satisfaire.
Pourtant, ce prélèvement est encore perfectible et son lissage doit être obtenu par le Sénat avec une garantie de leur trajectoire financière. C’est un enjeu essentiel pour permettre aux CCI de rester à flot, a minima…
Il est fort regrettable de constater que le Gouvernement poursuit sa stratégie de verticalisation, au détriment d’un maillage d’acteurs au plus proche des territoires qui a prouvé son efficacité.
Notre groupe déplore également le manque de financement de Bpifrance, opérateur pourtant décisif pour la compétitivité de nos entreprises. Si nous saluons son intégration au sein du programme 134, qui était demandée de longue date par notre chambre, le compte n’y est pas. Nous devons budgétiser de nouveau le financement des fonds de garantie très rapidement. Ces garanties sur les prêts octroyés principalement par les banques commerciales aux très petites ou moyennes entreprises sont déterminantes pour leur développement. Ne les laissons pas de côté !
Pour conclure, le groupe Union Centriste restera particulièrement vigilant sur ces deux points. Il y va de la compétitivité de nos territoires.
Du fait de l’augmentation des crédits attribués aux programmes de la mission « Économie », nous voterons en faveur de leur adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)