M. Olivier Henno. La situation des territoires en souffrance au regard de la problématique médicale est communément admise. L’inégal accès à la santé a des répercussions sur l’installation et le maintien des habitants dans les zones sous-dotées, en particulier pour les communes enclavées.
Les médecins propharmaciens ont la possibilité de délivrer les médicaments qu’ils prescrivent à leurs patients. Or un certain nombre de médicaments et dispositifs médicaux innovants leur sont refusés, notamment en termes d’approvisionnement, par les fournisseurs pour le motif qu’ils ne sont pas inscrits en tant que propharmaciens sur la liste des officines habilitées.
Cet amendement a donc pour objet d’inscrire les propharmaciens sur les listes établies par les ARS, afin qu’ils puissent participer au mieux au développement de l’offre de soins et à l’effort sanitaire, notamment en cas de crise sanitaire comme la crise du covid-19.
M. le président. Je m’aperçois que vous n’étiez pas signataire de l’amendement, mon cher collègue…
Mme Frédérique Puissat. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à assouplir les conditions d’autorisation d’exercice des médecins propharmaciens exerçant dans une commune dépourvue d’officine autorisée à délivrer directement des médicaments.
La commission est très favorable à ce statut, qui rend d’ailleurs de nombreux services sur les territoires. Toutefois, considérant que l’assouplissement prévu est trop important, elle a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 424 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 878 rectifié bis, présenté par M. Duffourg, Mme Vermeillet, MM. Laugier et Henno, Mme Perrot, MM. Delcros et J.M. Arnaud, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Gremillet, Guerriau et Longeot, Mme Aeschlimann et MM. Bleunven et Maurey, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5123-8 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 5123-8. – La délivrance de certains médicaments en officine, lorsque leur forme pharmaceutique le permet, peut se faire à l’unité.
« La délivrance de dispositifs médicaux et autres petits équipements ne peut excéder les besoins effectifs en termes de soins.
« Un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale fixe la liste des médicaments et dispositifs qui relèvent du présent article. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités particulières de conditionnement, d’étiquetage et d’information de l’assuré ainsi que de traçabilité. »
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Afin de réduire le gaspillage de médicaments, mais aussi de petits matériels médicaux, il est proposé de modifier l’article du code de la santé publique concerné.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 423 rectifié bis est présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet, Guérini et Guiol, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° 1024 rectifié ter est présenté par Mme Havet, MM. Fouassin, Iacovelli, Buis et Rambaud, Mmes Schillinger et Phinera-Horth, M. Rohfritsch, Mmes Cazebonne et Nadille et MM. Lemoyne, Canévet, Buval, Haye et Patient.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5123-8 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « De la même manière, la délivrance de dispositifs médicaux et autres petits équipements ne peut excéder les besoins effectifs en termes de soins. » ;
2° Le second alinéa est ainsi modifié :
a) après les mots : « des médicaments », sont insérés les mots : « et des dispositifs » ;
b) les mots : « pour ces médicaments » sont supprimés ;
La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 423 rectifié bis.
M. Bernard Fialaire. La loi de 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire permet la délivrance à l’unité de certains médicaments, afin de limiter le gaspillage dans ce domaine.
Nous proposons d’étendre cette possibilité aux dispositifs médicaux, souvent conditionnés en grande quantité. Ils ont une durée de conservation limitée, en raison justement de leur conditionnement, ce qui engendre un important gaspillage. Chaque année, des milliers de dispositifs médicaux inutilisés finissent ainsi à la poubelle.
Un conditionnement unitaire de certains dispositifs médicaux permettrait de stopper cette gabegie.
M. le président. La parole est à Mme Solanges Nadille, pour présenter l’amendement n° 1024 rectifié ter.
Mme Solanges Nadille. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être présenté.
Depuis des années, on déplore le gaspillage de médicaments, notamment dans le cadre des soins à domicile. Le coût de la consommation moyenne de médicaments des Français est 40 % plus élevé que celui de ses voisins européens. Ils jettent en moyenne, par an, 1,5 kilo de médicaments non utilisés.
Dans un contexte de sobriété et de maîtrise de nos dépenses, cet amendement vise à mettre en place des mesures en faveur d’une consommation plus adaptée.
M. le président. L’amendement n° 10 rectifié ter n’est pas soutenu.
L’amendement n° 588 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Guerriau et Chevalier, Mme L. Darcos, M. A. Marc, Mme Bourcier, M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Brault et Malhuret, Mme Lermytte, M. Wattebled, Mme O. Richard et MM. Delcros et H. Leroy, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5211-5 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils fixent également les conditions dans lesquelles la délivrance des dispositifs mentionnés au même article L. 5211-1 ne peut excéder les besoins effectifs du patient en termes de soins. »
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Afin d’éviter le gaspillage des médicaments, l’article L. 5123-8 du code de la santé publique offre la possibilité de délivrer certains médicaments à l’unité. Je suppose qu’une telle mesure n’est guère prisée des pharmaciens.
On constate qu’un gaspillage très important existe également avec les dispositifs médicaux, souvent délivrés au-delà des besoins effectifs du patient.
Le présent amendement vise donc à garantir que la délivrance de dispositifs médicaux ne peut excéder les besoins effectifs du patient en termes de soins. Je pense aux patients, auxquels on prescrit, après une intervention, des dispositifs médicaux très importants.
Je le rappelle, les infirmiers peuvent prescrire des compléments de dispositifs médicaux, et il n’est pas nécessaire d’avoir une ordonnance du médecin dans ce cas.
Si le fait de délivrer des médicaments à l’unité ne me paraît pas valable, il me semble qu’on peut avancer dans cette voie pour lutter contre le gaspillage des dispositifs médicaux.
M. le président. L’amendement n° 992 rectifié, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 5121-33 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 5121-33-… ainsi rédigé :
« Art. L 5121-33-…. – Pour tous les antibiotiques où la forme galénique rend possible leur délivrance à l’unité, celle-ci devient obligatoire pour la pharmacie d’officine et la pharmacie à usage intérieur, tout en respectant les protocoles spécifiques visant à garantir l’asepsie, la précision de la dose, la sécurité du patient ainsi que la traçabilité. »
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Permettez-moi de rappeler un chiffre alarmant : 33 000 personnes décèdent des suites d’une résistance aux antibiotiques. En 2050, dans le contexte actuel, si rien ne change, 240 000 décès seront liés à cela.
C’est pourquoi nous présentons cet amendement, qui représente à nos yeux un enjeu de santé publique et de bien-être individuel. Nous défendons l’obligation, pour la pharmacie d’officine et la pharmacie à usage intérieur, de délivrer les antibiotiques à l’unité. Cette distribution à l’unité permet de réduire le risque d’erreur médicamenteuse, la confusion ou l’oubli de doses par les patients. Elle favorise la bonne prise et l’efficacité des thérapeutiques.
C’est aussi un enjeu environnemental et économique, la distribution à l’unité permettant d’éviter le gaspillage. Cet amendement offre sécurité et efficacité à nos concitoyens et permet d’éviter la pénurie, en corrélant prescription du médecin et délivrance du médicament.
M. le président. L’amendement n° 883 rectifié bis, présenté par Mme Blatrix Contat, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Afin d’éviter le gaspillage des médicaments, lorsque leur forme pharmaceutique le permet, la délivrance de certains médicaments en officine se fait à l’unité. De la même manière, la délivrance de dispositifs médicaux et autres petits équipements ne peut excéder les besoins effectifs en termes de soins.
Un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale fixe la liste des médicaments et dispositifs qui relèvent du présent article. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités particulières de conditionnement, d’étiquetage et d’information de l’assuré ainsi que de traçabilité.
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.
Mme Florence Blatrix Contat. Comme pour les précédents amendements, il s’agit d’éviter le gaspillage des médicaments, lorsque leur forme pharmaceutique le permet.
Je souhaite attirer votre attention sur les conclusions de deux rapports récents. D’abord, le rapport de notre ancienne collègue Laurence Cohen sur la pénurie de médicaments et les choix de l’industrie pharmaceutique française nous alerte sur l’augmentation des signalements de ruptures par les pharmaciens. Ensuite, l’OCDE, dans son rapport relatif à la gestion des déchets pharmaceutiques des ménages, évalue la quantité de médicaments jetés en France à 17 600 tonnes par an.
Ces conclusions mettent en exergue une double problématique concernant notre mode de consommation des médicaments, celle de la pénurie, d’une part, celle de leur gaspillage, d’autre part. Ainsi, endiguer l’une impose d’agir sur l’autre, et inversement. Ce constat est confirmé et complété par les professionnels.
Cet amendement entend répondre à ce double objectif. Il s’inscrit dans une dynamique globale de réduction des déchets et de sobriété de la consommation, en permettant de lutter efficacement contre le gaspillage des médicaments.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 992 rectifié vise à rendre obligatoire la délivrance de médicaments à l’unité, chaque fois que leur forme galénique le permet. La commission s’est opposée à une telle mesure, qu’elle juge largement inopérante pour lutter contre les ruptures de stock dans la mesure où elle n’est pas possible pour les formes galéniques les plus fréquemment en situation de pénurie.
Par ailleurs, la dispensation à l’unité est chronophage pour les pharmaciens et n’empêche pas le patient de conserver des médicaments en cas d’inobservance de la prescription.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Quant aux amendements nos 878 rectifié bis, 423 rectifié bis, 1024 rectifié ter, 588 rectifié bis et 883 rectifié bis, ils visent à prévoir que la délivrance de dispositifs médicaux et autres petits équipements ne peut excéder les besoins effectifs du patient en termes de soins.
La catégorie des dispositifs médicaux regroupe plus de 80 000 classes de produits extrêmement divers. Ils peuvent être dispensés non seulement par des professionnels de santé tels que les pharmaciens, les opticiens ou les audioprothésistes, mais également par d’autres professionnels tels que les prestataires de services et distributeurs de matériel.
C’est pourquoi il paraît délicat d’imposer ainsi une obligation générale, même si l’on comprend bien les enjeux d’économie pour l’assurance maladie.
Dans ces circonstances, face à ces difficultés techniques, je voudrais connaître l’avis du Gouvernement.
J’en profite pour vous poser une question, monsieur le ministre, sur la maîtrise de la délivrance des dispositifs médicaux dans les prochaines années. Dans quelle mesure ceux-ci seront-ils intégrés à la charte de bonnes pratiques prévue pour endiguer la pénurie des produits de santé ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. Je n’hésite pas à émettre un avis défavorable sur l’amendement n° 992 rectifié, qui me paraît à la fois peu opérant et peu conforme à la réalité. Pour ceux qui s’y connaissent, en pharmacie, la dispensation à l’unité est un défi logistique et de sécurité sanitaire. Basculer de la possibilité à l’obligation me paraît donc prématuré.
Je suis quelque peu tourmenté au sujet des autres amendements, car je suis convaincu sur le fond.
Je serais tenté d’émettre un avis favorable et de m’en remettre à un décret visant à préciser les conditions de sécurité sanitaire, notamment parce que les industriels n’ont pas forcément prévu le conditionnement permettant de faire les découpages pour dispenser leurs produits à l’unité. Il s’agirait ainsi d’une disposition législative d’appel nécessitant ensuite un cadrage extrêmement strict en termes de sécurité, d’autant, cela vient d’être dit, que les pharmaciens ne sont pas les seuls à dispenser des produits médicaux.
J’émets donc un avis favorable, mais en précisant explicitement devant le Sénat que nous devrons mettre en place, par décret, après avis de la HAS, les conditions de délivrance. Quoi qu’il en soit, il est important d’envoyer un signal pour mettre un terme au gaspillage en la matière. Nos armoires à pharmacie sont quelquefois trop remplies de choses dont nous n’avons pas forcément besoin.
Monsieur le président de la commission, vous m’avez posé une question sur les dispositifs médicaux. Sont-ils dans la charte ? J’ai reçu la semaine dernière tous les industriels et les acteurs de la chaîne du médicament. Cette année, nous ne sommes pas, comme l’an dernier, dans une gestion de la pénurie. Je pense aux médicaments génériques, qui ne sont pas innovants. Nous avons sur le territoire national les stocks nécessaires.
En revanche, nous constatons une dérégulation totale du système de distribution du médicament, avec notamment, des pharmaciens – disant cela, je ne leur jette pas la pierre, car leur comportement est parfaitement rationnel – qui essaient d’obtenir directement auprès des industriels les doses, en particulier d’amoxicilline. S’ils les stockent, ce n’est pas pour le plaisir, mais parce qu’ils souhaitent pouvoir répondre à la demande. Dans ce cadre, les industriels privilégient souvent, quant à eux, les plus grosses officines au détriment des pharmacies rurales, qui se retrouvent alors en pénurie.
J’ai demandé la semaine dernière à la présidente de l’ordre des pharmaciens de me remettre sous dix jours une charte. Je souhaite en revenir au rôle structurant du grossiste répartiteur : c’est à lui de passer les commandes à l’industriel. Je propose donc grosso modo le retour à une répartition à 80/20 ou à 70/30, à savoir que 80 % de médicaments sont commandés par le grossiste répartiteur auprès de l’industriel, le reste étant commandé en direct. Les grossistes répartiteurs ont fait la preuve de leur efficacité.
J’inclus dans cette procédure les molécules sensibles, mais aussi certains dispositifs médicaux. Nous rencontrons en effet aujourd’hui sur certains produits, comme les médicaments pédiatriques, conditionnés souvent en flacons en verre ou en pipettes, un problème d’approvisionnement. Nous mettons donc aussi ces médicaments sous surveillance. Tous les acteurs de la chaîne ont compris, il me semble, leurs responsabilités.
En tout état de cause, je vous présenterai un dispositif visant à renforcer les compétences de police sanitaire de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), notamment pour prendre la main en cas de dérégulation. Aujourd’hui, cette possibilité n’existe pas. Notre seule solution, à l’heure actuelle, est de faire du name and shame – tous les industriels et tous les acteurs l’ont compris. Si la charte n’est pas « mordante », je donnerai à voir aux Français l’état de la situation, en pointant les responsabilités de chacun…
Je suis donc favorable à ces amendements, à l’exception de l’amendement n° 992 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Vous venez d’évoquer, monsieur le ministre, des questions qui seront abordées dans la suite du texte.
Je veux insister sur le rôle que vous pourriez avoir pour contrôler les industriels et les packagings. Nous connaissons tous des patients qui, après s’être fait poser trois points de suture dans leur établissement de santé de proximité – clinique ou autre –, ressortent avec des prescriptions pour cinquante boîtes de compresses, des champs stériles, des pinces, des ciseaux, etc. Avec cela, ils pourraient tenir un siège pendant vingt ans !
Les industriels devraient être mis à contribution. Le pharmacien est souvent obligé de délivrer un sac entier de compresses, ce qui est sidérant quand il s’agit de plaies très bénignes – sans parler de la note pour la sécurité sociale !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. J’ai également été saisie de cette question. Quand un malade sort de l’hôpital, il a parfois affaire directement à un prestataire qui lui fournira une quantité très importante de compresses ou autres, au détriment de la pharmacie locale qui pourrait très bien distribuer les produits dont le malade a besoin en quantité plus raisonnable et dans un flux plus continu.
Tout cela porte préjudice aux petites pharmacies, en particulier en milieu rural.
Des cabinets de conseil à l’intérieur des hôpitaux orientent ainsi les patients vers des prestataires, au détriment des pharmacies en milieu rural.
Il y a là un problème à la fois déontologique, mais aussi financier. Notre collègue vient de parler de la gabegie sur un certain nombre de produits. Il serait utile de demander aux personnels des hôpitaux de se renseigner pour savoir si, quand un malade sort, il a ou non une pharmacie de proximité. Dans l’affirmative, il serait beaucoup plus facile de passer par elle pour délivrer le stock de médicaments de façon régulière, au fur et à mesure des besoins, plutôt que de faire sortir le patient de l’hôpital avec des caisses entières de produits dont on ne sait pas du tout s’ils seront utilisés ou s’ils se périmeront avant usage.
Il s’agit d’un problème récurrent qu’il importe de prendre en considération.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. Je partage totalement votre point de vue. Bien sûr, il n’y a pas là 500 millions d’euros d’économies à réaliser. Pour autant, si j’ai souhaité demander dans ce PLFSS un effort d’économies aux hôpitaux sur les achats, c’est notamment en ayant ce point à l’esprit.
À l’heure actuelle, certains patients quittent l’hôpital ou sortent de leur pharmacie avec une valise entière de produits. Nous avons d’importants gains à faire. L’hôpital n’a pas pour mission de délivrer la totalité des médicaments postopératoires. Je rejoins donc votre avis, c’est l’un des éléments que je suivrai de près en termes d’efficience de la dépense hospitalière.
Les mesures et les ambitions d’économies ne sont pas uniquement strictement comptables. Il s’agit là d’abord d’un état de fait insoutenable.
Par ailleurs, je rejoins la préoccupation du sénateur Daniel Chasseing, qui est également celle de l’ensemble du Sénat, sur notre réseau de pharmacies – la France en compte environ 21 000 aujourd’hui. Je rappelle que des expérimentations sont en cours sur les antennes officinales, dont nous ne connaissons pas encore les résultats.
C’est un vrai débat. Quand, dans une petite ville, une pharmacie ferme, l’agrément ne peut pas forcément être repris, notamment si l’on passe en dessous des seuils. J’ai demandé que ce point soit examiné. C’est un sujet sur lequel la compétence des ARS est totalement liée.
La question du maintien du tissu officinal est donc un sujet majeur. Il n’y a pas de désert officinal à l’heure actuelle dans notre pays ; nous devons nous battre pour que cela continue. À défaut, nous entrerions dans une nouvelle ère de difficultés.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je suis d’accord avec les remarques de Mme Goulet. Certaines personnes sortent de l’hôpital avec de très grosses boîtes de compresses qui ne serviront que quelques jours, car elles souffrent seulement de petites plaies nécessitant uniquement des soins infirmiers. Il y a là des économies à faire.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 25, et les amendements nos 423 rectifié bis, 1024 rectifié ter, 588 rectifié bis, 883 rectifié bis et 992 rectifié n’ont plus d’objet.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 35 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Burgoa, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 5125-23 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi modifié :
- au premier alinéa, après les mots : « d’une spécialité figurant dans un groupe générique », sont insérés les mots : « , biosimilaire mentionné au 15° de l’article L. 5121-1 » ;
- au deuxième alinéa, après les mots : « une spécialité du même groupe générique », sont insérés les mots : « , du même groupe biosimilaire » ;
- après le troisième alinéa, est inséré un quatrième alinéa ainsi rédigé :
« Un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale précise, après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, les situations médicales dans lesquelles la substitution ne peut pas être effectuée par le pharmacien au sein d’un groupe biosimilaire. » ;
b) Au premier alinéa du III, après les mots : « une spécialité du même groupe générique », sont insérés les mots : «, du même groupe biosimilaire » ;
2° L’article L. 5125-23-2 est abrogé.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Les médicaments biologiques similaires constituent une alternative sûre et efficiente aux médicaments biologiques de référence, comme en témoigne la position de l’Agence européenne du médicament (EMA) d’avril 2023 en faveur d’une automaticité de l’interchangeabilité entre les médicaments biologiques de référence et leur biosimilaire dès l’obtention de leur autorisation de mise sur le marché.
L’expérience de la substitution engagée l’année passée sur deux molécules démontre également que la solution de remplacement que sont les médicaments biologiques similaires représente une vraie source d’économie pour la sécurité sociale.
Ainsi, ce marché représente 1,03 milliard d’euros de dépenses remboursées au premier semestre 2023, soit plus de 8 % des dépenses remboursées de l’ensemble des médicaments en ville sur la même période.
Il convient donc dès maintenant de prévoir une possibilité de substitution de tous les biosimilaires.
En effet, la possibilité pour le pharmacien de substituer un médicament biologique de référence prescrit par un médecin par son biosimilaire, lorsque certaines conditions sont remplies, apparaît comme un levier efficace pour contribuer à accroître la pénétration des biosimilaires.
Une telle mesure permettrait également de gagner en lisibilité tant pour les professionnels de santé que pour les patients, en mettant en place un dispositif de substitution clair et simple.
M. le président. L’amendement n° 1300 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 2° de l’article L. 5125-23-2 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À défaut, deux ans après la publication de l’arrêté d’inscription sur la liste prévue au premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale du premier médicament biologique similaire, un arrêté des ministres chargé de la santé et de la sécurité sociale autorise le pharmacien à délivrer par substitution au médicament biologique de référence un médicament biologique similaire appartenant à ce groupe sauf avis contraire de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé publié avant la fin de cette période. L’avis de l’Agence peut comprendre le cas échéant des conditions de substitution et d’information et des mises en garde de nature à assurer la continuité du traitement en vue de la substitution par le pharmacien. »
II. – Pour la mise en œuvre du 2° de l’article L. 5125-23-2 du code de la santé publique concernant les médicaments biologiques similaires déjà inscrits sur la liste prévue au premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale avant la publication de la présente loi, l’avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale doit intervenir avant le 31 décembre 2024.
La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. L’amendement du Gouvernement, monsieur Milon, va dans le même sens que le vôtre. Je souhaite d’ailleurs que vous vous ralliiez à sa rédaction, car – nous ne l’avons pas écrit de manière explicite – les associations de patients se sont montrées très dubitatives sur cette mesure lors de la concertation et ont manifesté beaucoup de prévention et de craintes.
Nous sommes arrivés à un point d’équilibre, en proposant d’abord deux ans de commercialisation avant de mettre en place une automaticité. Je ne pensais pas qu’il y aurait autant de réticences. Elles sont bien réelles, j’en veux pour preuve les réactions de certains, encore aujourd’hui, par rapport aux génériques. Je préfère que nous respections l’accord informel auquel nous sommes parvenus avec les associations de patients. C’est tout le sens de l’amendement du Gouvernement.