M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 804 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 723 rectifié bis, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 7 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section ainsi rédigée :
« Section …
« Contribution de solidarité sur la fortune
« Art. L. 137-…. – I. – Il est institué une contribution de solidarité sur la fortune au taux de 2 % lorsque la valeur des biens des personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France, à raison de leurs biens situés en France ou hors de France, est supérieure à 1 000 000 000 €.
« II. – Le produit de cette contribution additionnelle est affecté sans rang de priorité aux branches mentionnées à l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. « Taxez les ultrariches et faites-le maintenant. C’est de l’économie simple et de bon sens. C’est un investissement dans notre bien commun et un avenir meilleur […]. »
Ces mots, qui pourraient être les miens, sont ceux de plus de deux cents millionnaires qui demandent à être plus fortement taxés.
Mme Sophie Primas. Ils n’ont qu’à donner leur argent !
Mme Anne Souyris. En France, d’après Oxfam, la fortune des milliardaires a augmenté depuis 2020 de plus de 200 milliards d’euros, soit une hausse de 58 %. Selon Forbes, en dix ans, leur nombre a été multiplié par trois et leur fortune a été multipliée par quatre.
Cet amendement du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires vise à créer une contribution de solidarité sur la fortune des milliardaires français.
En effet, le dernier rapport d’Oxfam indique que 2 % seulement de ladite fortune suffiraient à financer le déficit attendu des retraites et ainsi à couvrir presque entièrement le déficit annuel de 12 milliards d’euros attendu en 2027 selon le Conseil d’orientation des retraites.
Reculer l’âge légal de départ à la retraite et augmenter la durée de cotisation était un choix politique ; de nombreuses autres possibilités de financement ne reposant pas sur les plus précaires existaient, mais elles ont été balayées d’un revers de main, comme toutes les autres taxes sur les superprofits.
En revanche, la réforme des retraites a été votée, contre la majorité des Françaises et des Français, qui la rejetaient fortement : les véritables idéologues ne se trouvent pas de notre côté de l’hémicycle !
Pour le Président de la République et pour le Gouvernement, ne pas toucher à l’imposition des plus riches est devenu un principe quasi sacré et néanmoins insensé ; nous le constatons encore ce soir.
Les taxes et les impôts ne doivent pas être un tabou : il s’agit d’un outil dont le Gouvernement n’a aucune raison de se priver, sinon par idéologie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 723 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 898 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le livre II du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 5° du I de l’article L. 213-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Le recouvrement de la contribution mentionnée à l’article L. 245-13 du présent code ; »
2° La section 4 du chapitre 5 du titre IV du livre II est ainsi rétablie :
« Section 4
« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières
« Art. L. 245-13. – I. – Les revenus financiers des prestataires de service mentionnés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisation salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.
« Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés en application de l’article L. 123-1 du code de commerce, à l’exclusion des prestataires mentionnés au premier alinéa du présent article, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisation salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.
« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.
« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d’assurance vieillesse.
« II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Le comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital de France Stratégie vient de publier son quatrième rapport ; il y est mis en évidence qu’un tiers des revenus financiers supérieurs à 1 million d’euros sont réservés à 4 000 foyers fiscaux, soit 0,01 % d’entre eux.
Convaincus qu’il faut aussi modifier les recettes et en proposer de nouvelles, nous souhaitons assujettir les revenus financiers des sociétés à une contribution pour l’assurance vieillesse.
Établie au même taux que les cotisations patronales et salariales du secteur privé, cette contribution de justice sociale procurerait 30 milliards d’euros de recettes nouvelles, ce qui permettrait largement de financer les retraites et même de revenir sur la mauvaise réforme que vous avez imposée aux Français, lesquels, je vous le rappelle, y étaient massivement opposés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 945 rectifié, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 242-… ainsi rédigé :
« Art. L. 242-…. – Les entreprises, d’au moins vingt salariés dont le nombre de salariés à temps partiel, de moins de vingt-quatre heures, est égal ou supérieur à 20 % du nombre total de salariés de l’entreprise, sont soumises à une majoration de 10 % des cotisations dues par l’employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l’ensemble de leurs salariés à temps partiel de moins de vingt-quatre heures. »
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1174 rectifié ter, présenté par Mme Canalès, M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Ouizille et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud, Cardon et Cozic, Mme Blatrix Contat, M. Stanzione, Mme Linkenheld, MM. Montaugé, Gillé et Mérillou, Mme Artigalas, MM. Marie, Tissot et Chaillou, Mmes Monier, Conway-Mouret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est créé une cotisation sur les dividendes des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes privés lucratifs. Le taux de cette contribution est fixé à 15 %. Elle est reversée intégralement à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
La contribution est assise sur l’ensemble des dividendes réalisés dans les entreprises mentionnées au premier alinéa, réalisés en France ainsi que de ceux dont l’imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.
Un décret fixe la date et les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Marion Canalès.
Mme Marion Canalès. Il est de nouveau question, avec cet amendement, de la cotisation de 15 % sur les dividendes des Ehpad privés à but lucratif.
Tous les acteurs de cette économie doivent prendre leur part dans le développement d’une réponse juste et efficace au défi de la dépendance et de la perte d’autonomie. Comme mes collègues l’ont souligné, il manque actuellement 9 milliards d’euros pour financer ces besoins.
Je ne reviens pas sur les dérives liées aux pratiques des grands groupes pour réduire les coûts, remplir les chambres, rationner les repas, etc. : elles sont connues. L’objet de cet amendement est de limiter en ce domaine la recherche du profit, mais surtout du superprofit. Que les entreprises gérant des Ehpad privés à but lucratif fassent des profits, pourquoi pas ? Qu’elles fassent des superprofits, nous y sommes fermement opposés ! En tout état de cause, elles doivent contribuer à l’effort national.
Leur fonctionnement repose en effet sur un actif public : l’autorisation délivrée par l’acteur public est un bénéfice pour l’acteur privé, qui en tire un profit. En conséquence, il est tout à fait légitime que cet actif fasse l’objet d’une rémunération, comme le relevait notre collègue députée Christine Pires Beaune dans le cadre de sa récente mission sur le sujet.
À ce jour, il n’existe aucune valorisation de l’autorisation publique accordée aux acteurs privés pour assurer cette mission. Est-ce normal ? Non.
Vous l’avez dit vous-même, monsieur le ministre, les enjeux sont immenses ; il est essentiel de lutter contre la financiarisation de la santé. L’occasion vous est donc donnée de traduire en actes ces propos.
De l’argent, il en faut : 3,5 milliards d’euros d’économies sont prévus sur les dépenses de santé et vous attendez encore 1,3 milliard d’euros de la responsabilisation de chacun.
Le moment est venu de mettre à contribution les groupes privés à but lucratif, qui sont des groupes internationaux – la Cour des comptes souligne d’ailleurs qu’il existe en la matière une véritable exception française. Rappelons que l’un de ces groupes a été acheté en 2014 au prix de 650 millions d’euros avant d’être revendu pour la somme de 2,3 milliards d’euros, puis vendu de nouveau 4,3 milliards d’euros. Qu’y a-t-il là, sinon un cas typique de financiarisation ? C’est en tout cas impressionnant.
Avec le doublement des franchises, on acte la hausse du reste à charge pour les malades, alors que d’autres recettes pourraient être envisagées afin d’éviter de faire des économies qui seront préjudiciables aux Français.
M. le président. L’amendement n° 949 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Une cotisation spécifique est prélevée sur les revenus générés par les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes privés à but lucratif, dont le taux et l’assiette sont définis par décret. Les recettes sont directement affectées à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Le livre de Victor Castanet intitulé Les Fossoyeurs a mis en lumière la situation de maltraitance systémique qui régnait au sein du groupe Orpea, mais aussi le dysfonctionnement généralisé qui caractérise la gestion des Ehpad privés à but lucratif.
Depuis la parution de ce livre, d’autres situations ont été mises en évidence. Ce qui se passe, par exemple, au sein de certaines crèches privées à but lucratif doit mobiliser toute notre attention et toute notre vigilance.
Nous ne saurions rester sourds à ces témoignages : nous le devons aux résidents, mais aussi à leurs familles. Or, malgré un certain nombre de rapports, d’enquêtes, d’indignations parfois ponctuelles, les profits des grands groupes privés à but lucratif restent très florissants, voire atteignent des niveaux stratosphériques.
Il est tout de même incroyable que le domaine de l’hébergement des personnes âgées en situation de dépendance soit un secteur d’activité des plus lucratifs, alors que, en parallèle, les établissements publics sont en déficit.
Les contrôles doivent sans doute être améliorés. Je sais qu’un certain nombre d’opérations en ce sens ont déjà été décidées par le Gouvernement, mais il nous semble qu’il serait efficace de mettre à contribution les revenus tirés des dividendes distribués par ces groupes afin de financer un renforcement des contrôles et ainsi de mettre fin aux pratiques indécentes qui sont observées.
Vous nous répondrez que l’on ne saurait s’appuyer pour cela sur des ressources qui ne seraient pas pérennes, car ces groupes adopteront peut-être un jour une attitude vertueuse et feront, le cas échéant, beaucoup moins de profits, nous laissant le bec dans l’eau…
Mme Émilienne Poumirol. Ce n’est pas demain la veille !
Mme Céline Brulin. Si au moins nous réussissons à orienter ensemble les choix de ces groupes en faveur d’un accompagnement humain de nos anciens et d’une prise en compte authentique de leurs besoins, nous aurons fait œuvre utile ! C’est là, me semble-t-il, tout le rôle de la puissance publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’entends bien vos propositions, mes chères collègues.
Comme vous l’avez dit, l’affaire Orpea a dévoilé un certain nombre de dysfonctionnements et la parution du livre que vous avez cité a été pour ces établissements un véritable moment de rupture, les obligeant à se pencher sur le bien-être de leurs résidents, mais également sur la qualité de vie au travail de leurs salariés, sujet fort du livre, et sur leur propre structure financière.
Des mesures ont été prises par le Gouvernement. Loin de moi l’idée de faire sa publicité, mais il était nécessaire de renforcer les contrôles, et c’est la première action qu’il a entreprise.
Dans le PLFSS examiné l’année dernière, nous avons donné à la Cour des comptes la faculté de procéder à des contrôles dans ces établissements ; nous en attendons les résultats.
Pour autant, il convient aussi de prendre un peu de recul par rapport à ce livre : il faudra prendre un peu de temps pour voir comment les choses évoluent et déterminer si les établissements concernés parviennent à se recentrer sur leur mission, qui est de prendre soin des résidents et d’accompagner les familles.
Il me semble en tout état de cause délicat de taxer davantage ces établissements à but lucratif, qui ne se sont pas tous mal comportés et dont certains ont vécu cette période avec difficulté. La situation a en particulier été très difficile à vivre pour les personnels des Ehpad, car tous ne versent pas dans la maltraitance. Actuellement, certains groupes rament un peu pour faire revenir des résidents dans leurs établissements ; nous ne sommes pas là pour les accabler financièrement encore davantage…
Il paraît donc prudent de veiller à ce que chacun se remette en question et prenne de bonnes résolutions.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Si nous partageons l’objectif des auteurs de ces amendements, nous divergeons quant à la solution à adopter.
Après le scandale Orpea, comme cela a été rappelé, nous avons considérablement renforcé l’arsenal des obligations comptables et de la transparence financière ainsi que la capacité de contrôle dont disposent les agences régionales de santé (ARS), via le recrutement de 120 contrôleurs supplémentaires.
À mon sens, il convient de porter le fer sur la régulation et le contrôle plutôt que de recourir systématiquement à une nouvelle taxe à chaque difficulté rencontrée. Taxer n’est pas toujours la bonne solution.
Mme Céline Brulin. Elle me convient, pourtant !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. En l’espèce, je crois plutôt à un renforcement du dispositif de contrôle.
Nous aurons l’occasion de faire le bilan de toutes ces mesures et de répondre ensemble à la question de savoir si elles suffisent à garantir le bon accueil de tous les résidents des Ehpad privés et le plein respect des engagements pris par ces établissements, dont nous avons besoin.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Nous sommes tous d’accord sur un point : nous assistons de plus en plus à une financiarisation du monde de la santé, qui concerne en particulier les âges les plus vulnérables de la vie.
Ma collègue a parlé de la maltraitance dans les crèches, sujet qu’a pointé l’Igas dans un rapport récent, dans lequel, d’ailleurs, un lien et une comparaison sont faits avec la situation des Ehpad.
Le deuxième âge vulnérable correspond bien sûr au grand âge et à la perte d’autonomie – je ne reparle pas de l’affaire Orpea, qui a déjà été longuement commentée.
Monsieur le ministre, vous venez d’affirmer que la taxation n’était pas toujours la bonne solution. En ce qui concerne les grands groupes, qui n’ont d’autre dogme que l’argent, d’autre raison d’être que le profit, toucher à leurs bénéfices peut emporter des conséquences favorables.
Je suis profondément convaincue que les mesures ici proposées, parce qu’elles les touchent au portefeuille, parce qu’elles mettent à mal leurs profits, ne peuvent être qu’intéressantes. Il faut donc adopter ces amendements !
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. Je verse à notre débat un autre argument : la proportion de personnes éligibles à l’aide sociale à l’hébergement (ASH) s’élève à 12 % dans les Ehpad privés à but lucratif, contre 98 % dans les établissements publics. Cela fait peser sur les maires, sur les présidents d’intercommunalité et sur les hôpitaux, qui président les Ehpad publics, une grande responsabilité.
Le contribuable est par ailleurs une victime secondaire du système qui règne au sein des Ehpad privés à but lucratif, dans la mesure où certains groupes n’hésitent pas à recourir à des stratégies d’optimisation fiscale.
Nos anciens collègues sénateurs Bernard Bonne et Michelle Meunier, dans leur rapport d’information sur le sujet, soulignaient à juste titre qu’il est urgent de réguler l’appétit des acteurs du secteur lucratif, dans lequel on trouve certes quelques indépendants, mais surtout beaucoup de groupes multigestionnaires dont le développement se fait à l’échelle internationale. En ce domaine, mes chers collègues, il faut vraiment passer la seconde !
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Madame la rapporteure générale, je vous trouve clémente ! Vous avez parlé de dysfonctionnements à propos du scandale Orpea, mais il s’agissait de fautes lourdes.
Je ne sais pas si vous avez lu le livre jusqu’au bout, mais les révélations qui y sont faites sont particulièrement graves et solidement documentées ; de surcroît, elles sont loin de concerner un seul établissement. Il s’agit bien de fautes lourdes.
Et il faudrait maintenant que nous évitions de trop « taper » sur ces groupes, au motif qu’ils ne remplissent pas leurs établissements ? Compte tenu des masses financières qu’ils ont brassées au détriment des personnes dont ils avaient la charge,…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Monique Lubin. … avec tout le respect que je vous dois, je ne peux pas partager vos propos.
Il ne s’agit pas uniquement d’Orpea, car nous connaissons tous des exemples similaires. La maltraitance commence quand, dans un Ehpad, un résident qui paie 3 000 euros par mois doit compter sur un membre de sa famille pour le nourrir le soir, faute de personnel en nombre suffisant pour s’occuper de lui. De tels exemples ne concernent pas seulement des groupes dont les noms sont connus.
C’est pourquoi je souhaite que l’on taxe, que l’on surveille, que l’on soit intraitable avec ces gens-là ! (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.
M. Christian Redon-Sarrazy. Une précision quant à l’amendement de ma collègue Marion Canalès : il a pour objet de taxer les dividendes, c’est-à-dire les bénéfices réalisés. Nous ne cherchons pas à réduire les moyens de fonctionnement de ces établissements.
Cette mesure interviendrait une fois l’exercice comptable clos et le bénéfice réalisé : nous en prendrions une petite partie.
Considérant ce qui vient d’être rappelé au sujet d’Orpea et d’autres groupes dont la situation est similaire, une taxation au taux de 15 % n’est pas confiscatoire : nous ne les priverions pas de la totalité de leurs revenus et des dividendes qu’ils distribuent. Il s’agit d’une contribution, d’une cotisation spécifique.
Les excédents dégagés proviennent peut-être, en effet, d’économies de fonctionnement ; peut-être ces entreprises ont-elles pris de bonnes décisions, après la révélation des problèmes que nous évoquions, et parviennent-elles malgré tout à faire des bénéfices tout en offrant une meilleure prise en charge aux personnes hébergées ? Le cas échéant, une partie de ces bénéfices pourrait utilement être affectée au financement de la branche autonomie.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1174 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 444 rectifié ter, présenté par Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet et Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet, Guérini, Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Une cotisation spécifique est prélevée sur les dividendes des établissements de santé privés à but lucratif, dont le taux et l’assiette sont définis par décret.
Les recettes sont directement affectées à la Caisse nationale de l’assurance maladie.
La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Historiquement, les établissements de santé privés étaient pour les professionnels de santé des outils de travail leur permettant d’exercer au mieux leurs fonctions.
Progressivement, au fil du temps, ils ont été rachetés par de grands groupes financiers. On aurait pu espérer que ceux-ci apportent innovation et meilleure gestion, mais, très vite, il est devenu évident que leur seule motivation était la recherche du profit.
Cette dérive va croissant dans les Ehpad, dans les cliniques privées et, désormais, dans les centres de santé. Dans ces derniers, on salarie les professionnels, les pratiques de surprescription deviennent de plus en plus fréquentes et la manière dont est géré le personnel l’incite à exercer la médecine d’une manière qui n’est pas toujours la plus économe du point de vue de la santé publique…
Au regard des besoins en matière de santé et de prise en charge des personnes les plus dépendantes, il est choquant qu’une partie des dépenses de santé soit consacrée à la distribution de dividendes.
Par cet amendement d’appel, je souhaite insister sur la nécessité de mettre un terme à ces dérives par lesquelles l’argent de la santé rémunère parfois de manière excessive les investissements de groupes qui, au départ, n’ont rien à voir avec la santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Émilienne Poumirol. Comme ça, c’est simple !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 444 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 907, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
L’article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les entreprises n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer un risque avéré de maladie professionnelle.
« La détermination de l’effort de l’employeur en matière de prévention et de lutte contre les maladies professionnelles se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l’entreprise, défini aux articles L. 2312-28 à L. 2312-33 du code du travail. »
La parole est à Mme Silvana Silvani.