Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. Je souhaite rétablir la chronologie des faits.
Certes, la gauche n’a pas procédé à une telle interdiction lorsqu’elle était au pouvoir. Mais, ici, au Sénat, notre position est constante parce que nous pensons que ce sujet est très important. Nous étions déjà favorables à une telle interdiction lors de l’examen de la loi Collomb. Quelques précurseurs l’avaient même défendue dès 2015. Cette interdiction est donc une très bonne nouvelle.
Mme la présidente. La parole est à M. Ian Brossat, pour explication de vote.
M. Ian Brossat. Cela fait à présent des années que des associations se battent à juste titre pour qu’il n’y ait plus d’enfants dans les centres de rétention administrative.
Je prends note de l’engagement que vous venez de prendre, monsieur le ministre. Nous sommes heureux que l’on puisse enfin mettre un terme à la rétention d’enfants, et dans les CRA et dans les LRA. Ce serait une bonne nouvelle, digne de notre pays.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 182.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 34 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 138 |
Contre | 203 |
Le Sénat n’a pas adopté. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Patrick Kanner. N’en soyez pas fiers !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 39 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 138 |
Contre | 204 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 298 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 36 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 138 |
Contre | 204 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Rappel au règlement
M. Patrick Kanner. Madame la présidente, je sollicite officiellement une suspension de séance pour permettre à nos collègues de la droite sénatoriale de rassembler leurs forces et de montrer qu’ils sont majoritaires au sein de cette assemblée, ce qui n’est physiquement pas le cas aujourd’hui, alors que nous débattons de sujets importants.
Que M. Retailleau et M. Marseille, qui n’est plus là depuis longtemps, rappellent les leurs, afin que nous puissions délibérer tranquillement. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K, GEST et RDSE.)
Mme la présidente. Mon cher collègue, il nous reste de très nombreux amendements à examiner. Nous allons donc poursuivre la séance. (Vives protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Vous avez accepté d’autres suspensions de séance, mais nous, nous ne vous intéressons pas ! Quelle démocratie…
Article 12 (suite)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 7 rectifié bis.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 37 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 138 |
Contre | 202 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 297 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
I – Alinéa 3
Supprimer les mots :
de seize ans
II – Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement est un amendement de repli.
Notre amendement précédent visait, outre les mineurs, plusieurs catégories de personnes dont nous ne souhaitons pas le placement en CRA. Peut-être est-ce d’ailleurs pour cette raison que la « majorité » de cette assemblée ne l’a pas voté…
J’ai bien écouté le ministre, et je partage son avis.
L’amendement n° 297 rectifié vise à prévoir l’interdiction de placement en CRA aux seuls mineurs âgés de 16 ans à 18 ans. Ainsi la droite sénatoriale pourra-t-elle y adhérer.
Permettez-moi à présent de vous livrer deux réflexions.
Lors de l’examen de précédents textes, notre groupe avait demandé au Gouvernement d’inscrire dans la loi l’interdiction de placer des mineurs en CRA. Il nous a été répondu qu’une simple circulaire suffisait.
Nous voyons bien aujourd’hui qu’une simple circulaire ne suffit pas. C’est la raison pour laquelle nous sommes en train d’essayer de faire voter un amendement. Je suis d’ailleurs très heureux que le Gouvernement ait émis un avis favorable, ce dont je le remercie.
En 2021, si l’on excepte le territoire de Mayotte, soixante-treize mineurs de moins de 16 ans ont fait l’objet d’un placement en rétention.
Le présent article vise donc à mettre fin à la possibilité de placement des mineurs de moins de 16 ans en centre de rétention administrative. Cette disposition fait suite aux diverses condamnations de la France par la CEDH du fait de l’enfermement des mineurs au cours des procédures de reconduite à la frontière.
La France a été condamnée pour la neuvième fois par la CEDH dans un arrêt du 31 mars 2022, qui a condamné l’administration française pour sa politique d’enfermement des enfants.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Nous proposons de circonscrire l’interdiction aux mineurs de moins de 16 ans sans que cela soit justifié. Pour rappel, la convention relative aux droits de l’enfant de New York, ratifiée par la France, s’applique pour les mineurs jusqu’à leurs 18 ans.
Quel que soit son âge, un enfant ou un adolescent subit les conséquences dramatiques de l’enfermement sur sa santé : repli sur soi, refus de s’alimenter, insomnies et angoisses. À cela s’ajoutent des facteurs de vulnérabilité, comme la situation familiale, les parcours migratoires chaotiques, le stress post-traumatique.
Il nous semble donc impératif de généraliser – je ne comprendrais pas que certains d’entre nous s’y opposent – l’interdiction du placement en CRA pour l’ensemble des mineurs, de 0 à 18 ans.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 183, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mmes Brossel et Conway-Mouret, M. Chantrel, Mme G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
être placé en centre de rétention administrative
par les mots :
faire l’objet d’une décision de placement en rétention
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Mme Hélène Conway-Mouret. Il s’agit d’un amendement de repli. À défaut d’avoir obtenu l’interdiction du placement en rétention des mineurs de 18 ans, nous proposons que l’interdiction de rétention des mineurs de 16 ans s’applique pour les CRA, mais également pour les LRA.
Si nous interdisons le placement en CRA des mineurs de 16 ans sans interdire également le placement en LRA, nous nous serons donné bonne conscience, mais nous nous serons surtout prêtés à un jeu de dupes !
En pratique, le placement en LRA se substituera au placement en CRA. Non seulement nous n’aurons pas progressé, mais nous aurons sans doute même reculé, puisque les LRA sont nettement moins encadrées et présentent des garanties nettement inférieures à celles des CRA.
À titre d’exemple, dans les locaux de rétention administrative, il n’est notamment pas prévu qu’une association pour l’aide à l’exercice effectif des droits puisse intervenir.
Il n’y a pas non plus d’unité médicale, ce qui est particulièrement problématique au regard de la vulnérabilité des familles avec des enfants enfermés.
Mme la présidente. L’amendement n° 299 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et Poncet Monge, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi qu’en local de rétention administrative, aux abords des frontières et dans les zones d’attente
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement est similaire à celui qui vient d’être défendu.
L’article 12 ne concerne que l’interdiction de placement en centre de rétention administrative et exclut explicitement les LRA aux abords des frontières et dans les zones d’attente.
Dans les LRA, les associations d’aide à l’accès aux droits et le personnel médical ne sont pas présents, contrairement aux CRA.
En cas de refus d’entrée aux frontières françaises, les familles avec enfant, ainsi que les mineurs non accompagnés peuvent être placés dans les zones d’attente, pour des durées allant jusqu’à vingt jours : zone d’attente de l’Ocean Viking, zone d’attente d’Orly ou de Marignane… J’en ai visité plusieurs.
En 2021, d’après les statistiques de la police aux frontières, au moins 372 enfants ont été placés en zone d’attente.
Les conditions de maintien dans ces zones d’attente ne sont pas plus favorables qu’en CRA ; l’enfant n’y est pas correctement pris en charge et n’est pas en sécurité. Au quotidien, dans ces lieux d’enfermement, les enfants sont confrontés à des événements traumatisants et évoluent dans un environnement d’une extrême violence.
D’après mon expérience personnelle à Nice, dans un lieu de mise à l’abri à la frontière italienne, je précise qu’il en est de même dans les LRA, qui sont également de véritables lieux de rétention.
Le placement des mineurs non accompagnés est particulièrement visé par le Comité des droits de l’enfant. Ce dernier recommande à la France d’« adopter les mesures nécessaires pour éviter le placement d’enfants en rétention dans les zones d’attente, en redoublant d’efforts pour trouver des solutions adéquates de substitution à la privation de liberté et pour assurer aux enfants un hébergement adapté, et de respecter pleinement les obligations de non-refoulement ».
Il est ainsi impératif que le Gouvernement prenne des mesures de substitution à l’égard des familles accompagnantes de mineurs, ainsi qu’à l’égard des mineurs non accompagnés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Avis défavorable, pour les motifs évoqués précédemment.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 183, en cohérence avec la position qu’il a adoptée tout à l’heure.
En revanche, je suis défavorable à l’amendement n° 299 rectifié, non par principe, mais parce qu’il vise à inclure les zones d’attente. Il ne s’agit en effet pas du même type de rétention. Il faut bien qu’il existe des endroits où vérifier les identités et effectuer certains examens.
Imaginons que le bateau d’une ONG arrive sur une côte méditerranéenne. Il faut bien créer une zone d’attente, qui n’aurait rien à voir avec un centre de rétention administratif. Ce qui gêne, dans le centre de rétention administrative, ce n’est pas le fait que l’on y vérifie les identités et que l’on puisse décider d’éloigner les gens ; c’est le fait qu’il s’agit d’un endroit carcéral, contrairement à la zone d’attente. Certes, nous pourrions améliorer certaines procédures, notamment dans de vieilles structures aéroportuaires ou portuaires. Mais les zones d’attente n’ont rien à voir avec le CRA du Mesnil-Amelot ou de Vincennes.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 183.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 38 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 138 |
Contre | 204 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 299 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 39 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 137 |
Contre | 204 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 596, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Les chapitres I et II du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont ainsi modifiés :
1° Le second alinéa de l’article L. 741-1 est complété par les mots : « ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente » ;
2° Au 1° de l’article L. 742-4, les mots : « d’une particulière gravité » sont supprimés ;
3° L’article L. 742-5 est ainsi modifié :
a) Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. » ;
b) Au dernier alinéa, après les mot et référence : « ou 3° », sont insérés les mots : « ou au septième alinéa ».
La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Depuis que j’ai l’honneur d’être ministre de l’intérieur, j’ai décidé de ne plus placer de mineurs dans les CRA, exception faite de Mayotte, où le fonctionnement est différent.
En effet, nous y mettons désormais – c’est la politique que je mène au ministère de l’intérieur – les personnes qui sont, soit radicalisées et fichées S, soit dangereuses, c’est-à-dire des personnes condamnées à des peines de prison très lourdes ou accusées de faits graves par la police elle-même.
La sociologie des personnes dans les centres de rétention administrative a donc changé. Nous n’y plaçons plus désormais d’enfants. Il s’y trouve également très peu de femmes, moins de 3 %. La quasi-intégralité des personnes placées dans ces centres sont donc dangereuses.
Cette politique porte ses fruits. Je viens de recevoir les chiffres de la délinquance. Durant les dix premiers mois de l’année, la part des étrangers mis en cause dans des faits délictuels et criminels s’élève à 37,56 %, soit quasiment 4 points de mois par rapport à 2022 où ce taux était de 41,43 %. Cette baisse est particulièrement vraie à Paris où le recul est de 7 points, pour atteindre 41 %, contre 48 % en 2022. Je précise que Paris et l’Île-de-France représentent quasiment 50 % de la délinquance de l’ensemble du territoire national.
Le fait de concentrer notre action contre les délinquants étrangers et de les placer systématiquement dans les centres de rétention administrative fonctionne. Cela permet d’avoir une sociologie différente dans les CRA et fait chuter les chiffres de la délinquance ; ce sont souvent les mêmes qui récidivent, comme chacun le sait…
Cela étant, nous souhaitons désormais inscrire parmi les critères pour autoriser l’administration à placer une personne dans un CRA la dangerosité des individus. C’est un point à prendre en considération en cas d’éventuels recours. Aujourd’hui, ce critère n’existe pas, ce qui pose des difficultés lorsque le ressortissant est relâché. Ce n’est en effet pas la même chose de relâcher quelqu’un que l’on ne peut pas éloigner s’il est très dangereux ; chacun ici le comprendra.
L’amendement que je vous présente me semble donc relativement équilibré, puisque je propose également d’interdire le placement des mineurs dans les CRA au vu de ce nouveau critère de dangerosité que je vous demande d’introduire.
Il s’agit donc d’un amendement très important pour le fonctionnement des centres de rétention administrative. Je pense notamment aux policiers de la police aux frontières, qui réalisent un travail difficile : quand on change la sociologie des personnes placées dans les CRA, les policiers ont évidemment plus de difficultés à les tenir. Ces zones ne sont pas drôles pour les personnes détenues, mais elles ne sont pas drôles non plus pour les fonctionnaires de police qui y travaillent.
Mme la présidente. L’amendement n° 333 rectifié bis, présenté par MM. Dossus et Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - L’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.
La parole est à M. Thomas Dossus.
M. Thomas Dossus. Monsieur le ministre, j’ai été attentif à vos propos, et je ne partage pas vos raccourcis sur la baisse de la délinquance, les délinquants étrangers, etc.
M. Thomas Dossus. Ce n’est pas parce que la délinquance baisse et que vous enfermez des étrangers qu’il y a un lien évident entre les deux ! (M. le ministre le conteste.)
En ce qui concerne la rétention administrative, ce régime de privation de liberté mériterait une réforme plus globale que celle que vous êtes en train de nous proposer, un peu à la hussarde, en modifiant la sociologie à l’intérieur des centres de rétention et en y changeant l’ambiance. On y constate en effet une montée de la violence. Or les agents de la police aux frontières, auxquels vous avez fait référence, ne sont pas forcément formés comme ceux de la pénitentiaire, et ils ne sont donc peut-être pas aptes à gérer les populations qui s’y trouvent enfermées et privées de liberté.
Par ailleurs, la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, dite loi Collomb, a allongé les délais de rétention.
Cet allongement n’a jamais vraiment été évalué alors que le taux d’éloignement est toujours en dessous de 50 % dans les centres de rétention. Le niveau de violence a monté, les rapports du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) s’accumulent, soulignant que les conditions de vie dans les centres sont de plus en plus indignes, y compris dans les nouveaux centres de rétention. Le nouveau centre de Lyon, par exemple, qui doit servir de modèle aux futurs centres, est pointé du doigt dans le dernier rapport comme étant particulièrement indigne.
Je vous propose donc d’en revenir au régime de rétention qui prévalait avant la loi Collomb, c’est-à-dire de supprimer la deuxième période de trente jours et de ramener la durée maximale de rétention à soixante jours au lieu de quatre-vingt-dix aujourd’hui.
Mme la présidente. L’amendement n° 187 rectifié, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - Le chapitre II du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa de l’article L. 742-4, le mot : « trente » est remplacé par le mot : « quinze » et le mot : « soixante » est remplacé par le mot : « quarante-cinq » ;
2° L’article L. 742-5 est abrogé ;
3° À l’article L. 742-7, les mots : « , dans les conditions prévues à l’article L. 742-5 » sont supprimés.
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. La loi du 10 septembre 2018 a porté le délai maximal de rétention de quarante-cinq à quatre-vingt-dix jours. L’argument qui sous-tendait cette mesure était de dire que cela laisserait le temps nécessaire pour obtenir les laissez-passer consulaires et donc permettrait d’éloigner en proportion un plus grand nombre d’étrangers retenus.
Bilan : en 2016-2017, le taux moyen d’OQTF exécutées est de 14 % ; en 2019, le taux chute à 12,2 % ; suivent les deux années du covid-19, où le taux chute à 5 % ou à 6 %.
Le taux d’éloignement à l’issue d’un placement en CRA est également en baisse depuis 2019, donc depuis que la durée de rétention à quatre-vingt-dix jours est possible : de 50 % en 2019, il est passé à 43,2 % en 2022.
Si 43,2 % des étrangers qui sont retenus sont au final effectivement éloignés à l’issue de leur placement en CRA, cela signifie que plus de la moitié des étrangers retenus en CRA ne sont pas éloignés et sont finalement libérés. En d’autres termes, des individus ont été enfermés en pure perte, puisque la seule raison qui pouvait motiver leur enfermement, à savoir l’éloignement, n’a pas été accomplie.
Dans son rapport d’information de mai 2022 sur la question migratoire, le président Buffet admettait : « Dans la pratique, les effets de cette prolongation sur les éloignements sont réels, mais modestes. Sur l’année 2019, dernière année de référence avant la pandémie, 826 étrangers en situation irrégulière ont été éloignés au-delà du quarante-cinquième jour de rétention, ce qui représente une proportion de 8,28 % des éloignés. »
Si le Gouvernement avait remis au Parlement le rapport annuel sur l’immigration, comme la loi lui en fait obligation, nous disposerions sans doute de chiffres actualisés.
En tout état de cause, le délai maximal de rétention serait utile, puisqu’il permettrait d’éloigner des étrangers au-delà de quarante-cinq jours.
Qu’est-ce qui permet d’affirmer que c’est la rétention qui a permis l’éloignement de ces étrangers ? Si 800 étrangers ont été éloignés au-delà de quarante-cinq jours, quelle part représentent-ils parmi les étrangers qui ont été retenus au-delà de quarante-cinq jours ?
Il y a donc plus de 70 % des étrangers retenus entre quarante-cinq et quatre-vingt-dix jours qui l’auront été « pour rien », puisqu’ils n’auront pas été éloignés.
Mme la présidente. L’amendement n° 547 rectifié ter n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?