M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour explication de vote.
M. Philippe Grosvalet. Monsieur le ministre, je ne suis pas sûr qu’il faille avoir été maire pour pouvoir parler des mariages. En tout cas, moi qui ai exercé la fonction de président de département pendant de nombreuses années, je puis vous affirmer et vous confirmer que la situation actuelle conduit à un véritable gâchis.
M. Jérôme Durain. Très bien !
M. Philippe Grosvalet. Les préfets, madame la rapporteure, peuvent agir différemment selon les territoires. Ceux qui se succèdent dans un département peuvent même agir les uns des autres ! Moi qui ai eu à connaître quatre ou cinq d’entre eux, je puis vous dire qu’ils ne traitaient pas ces dossiers de la même façon.
Le plus souvent, les jeunes étaient accompagnés par l’ensemble de nos travailleurs sociaux, des organismes de formation et des employeurs, y compris par la chambre de métiers. Cette dernière, au travers de ses formations, soutenait nos actions. Nous devions déployer une énergie folle pour défendre les dossiers au cas par cas alors que nous avions investi pendant parfois trois à cinq ans des deniers publics dans la formation pour accompagner ces jeunes, comme la loi nous y contraint.
Parfois, nous étions bien seuls. En effet, à une époque, certains de nos voisins – n’est-ce pas, mon cher Bruno Retailleau – contestaient la circulaire Taubira du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des jeunes isolés étrangers. De fait, nous nous sommes retrouvés bien seuls pour prendre en charge non seulement les mineurs non accompagnés de notre département, mais aussi ceux des départements voisins.
J’en appelle donc au bon sens plutôt qu’au dogmatisme. La réalité de l’expérience de terrain, de notre expérience, montre à l’évidence que ces jeunes gens apportent beaucoup à notre pays (M. Stéphane Ravier s’exclame.) et qu’ils méritent de s’y intégrer pleinement après les efforts financiers considérables que nous avons fournis pour les accompagner, efforts considérés comme trop importants par certains dans cet hémicycle.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. J’ai lu cette semaine dans un article que, rencontrant Marilyne Poulain, qui vient d’être nommée préfète déléguée pour l’égalité des chances, M. le ministre l’avait interrogée sur les obstacles rencontrés dans la gestion des cas de travailleurs sans-papiers. Elle lui a répondu : l’appréciation discrétionnaire des préfets. Tout est dit ! Cet arbitraire, qui vient d’être illustré de manière très claire par mon collègue, ne devrait pas laisser insensible la droite.
Voilà quelques instants, vous vous préoccupiez, et c’est bien légitime, de la situation des maires. Mais entendez aussi tous ces patrons. Si 90 % des cas sont réglés comme on nous le dit, allons jusqu’au bout : nous ne sommes pas à 10 % près !
Le problème, c’est que ces cas ne sont pas réellement réglés : pour les régler, il faut qu’un patron rameute le ban et l’arrière-ban, qu’il mobilise tout le monde, y compris les parlementaires – dont vous-mêmes (L’orateur s’adresse à ses collègues siégeant sur la partie droite de l’hémicycle.) –, qui écrivent au préfet pour dénoncer le caractère insupportable de ces situations et le gâchis qu’elles représentent. Les choses ne peuvent fonctionner ainsi.
On vous parle de régularisation et vous répondez appel d’air et circulaire – j’aurais d’ailleurs bien aimé que cet appel d’air soit qualifié. Quant à la circulaire, ce n’est pas la solution : elle organise la concurrence entre territoires et maintient des gens dans des situations de no man’s land juridique.
Nous évoquons les gamins passés par l’ASE, mais combien d’autres cas avons-nous à traiter dans nos départements ? En ce moment, je m’occupe de trois dossiers, dont celui d’une personne qui travaille dans un garage. Sa patronne, inquiète de sa situation, me dit qu’elle ne peut se passer d’elle. Il en est de même dans les autres exemples que j’ai en tête. Que va-t-on faire de ces gens ?
Il y va pourtant de notre intérêt : c’est une question d’humanité, certes, mais c’est aussi une question d’économie. Vous avez su entendre les maires, entendez aussi les patrons, les artisans. Je vous assure que régler ces situations n’entraînera aucun appel d’air ; cela ne pourra que profiter à notre économie et rendra service à tout le monde. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. On a évoqué le cas de Laye Fodé Traoré, dont la presse nationale s’était fait l’écho pour illustrer la situation des mineurs sans-papiers pris en charge par l’ASE.
Je voudrais évoquer un autre exemple, celui de Ronaldo Mbumba, qui était en apprentissage dans un Ehpad d’Aurillac avant de tomber sous le coup d’une OQTF. Ce sont Vincent Descoeur et Stéphane Sautarel, respectivement député et sénateur Les Républicains, qui ont porté ce dossier à votre connaissance, monsieur le ministre.
Comme l’a indiqué notre collègue Durain, cela montre bien qu’en réalité, au-delà de votre posture dans cet hémicycle, vous trouvez ces situations tout aussi insupportables que nous, parce que vous êtes tout aussi humains que nous. Pour en sortir, adoptons nos amendements !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour explication de vote.
M. Stéphane Ravier. Merci, monsieur le président, de me permettre d’essayer d’en finir avec cette fable des mineurs non accompagnés.
Voilà plusieurs mois, voire plusieurs années, il a été souligné dans cet hémicycle qu’au moins 70 % – ce chiffre a sans doute augmenté depuis lors – de ces mineurs étaient des majeurs très accompagnés, voire accompagnés en tout. (Marques d’agacement sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. Philippe Grosvalet. C’est faux !
M. Stéphane Ravier. À prendre pour argent comptant les déclarations de ces jeunes gens, on a aidé à la constitution d’une filière d’immigration clandestine : en 2015, le département des Bouches-du-Rhône dénombrait 200 prétendus mineurs non accompagnés ; aujourd’hui, c’est 2 000 dossiers pour un coût de 80 millions d’euros aux frais du contribuable.
Je cherche encore où est la richesse économique qu’évoquent nos collègues de gauche !
M. Jérôme Durain. Demandez aux patrons !
M. Stéphane Ravier. On compte aujourd’hui 40 000 prétendus mineurs non accompagnés pour un coût de 50 000 euros par dossier, soit un total de 2 milliards d’euros par an ! Si 70 % de ces jeunes sont bien en réalité des majeurs, nous pourrions économiser 1,2 milliard d’euros. Et vous osez prétendre que cela nous rapporte ?
M. Jérôme Durain. Faites tourner le pays sans eux !
M. Stéphane Ravier. Il va bien falloir prendre la seule mesure efficace pour combattre cette filière d’immigration clandestine : obliger ces jeunes à accepter le test osseux, qui n’est ni douloureux ni invasif et qui nous permettrait de savoir s’ils sont mineurs ou non. Si tel est le cas, les départements les prendront en charge pour un temps plus ou moins court, je l’espère ; s’ils sont majeurs, il faudra les expulser.
Voilà quelle est la réalité de ces prétendus mineurs non accompagnés !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Beaucoup de fantasmes entourent le sujet des mineurs non accompagnés dès qu’on évoque les difficultés de l’ASE.
Ces difficultés sont réelles, parce que les familles françaises dysfonctionnent de plus en plus, parce que la pauvreté touche toujours plus de familles, parce que les violences existent… Si les départements ont des difficultés, on en tient pour responsables les mineurs non accompagnés ; si l’on évoque l’immigration, le sujet des mineurs non accompagnés ressort immédiatement !
Je ne sais pas d’où Mme Jourda sort ce chiffre de 90 % ni ce qu’il représente. C’est un chiffre totalement improbable. Vous voulez dire que 90 % des demandes de régularisation de mineurs non accompagnés aboutissent ? Et quid de toutes celles qui ne sont pas formulées, puisque les personnes concernées hésitent à aller devant les services de la préfecture ?
L’amendement de Jérôme Durain me paraît raisonnable. Voilà des années que cette discussion perdure. Je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit, notamment sur l’investissement des collectivités. Si vous prenez la peine de rencontrer les services de la protection de l’enfance ou les personnels des maisons d’enfants à caractère social (Mecs), vous apprendrez que la quasi-totalité des mineurs non accompagnés pris en charge sont des jeunes gens sérieux.
Le problème, en réalité, ce sont les mineurs non pris en charge, ceux que l’on n’arrive pas à attraper, ceux qu’adorerait M. Ravier, parce qu’ils ne coûtent rien au pays, ceux que l’on n’arrive à tenir dans aucun dispositif ni dans aucune structure. Oui, nous avons un problème avec ces gamins-là, avec ces très jeunes enfants – car ce sont le plus souvent des mineurs de 13 ou 14 ans.
M. Stéphane Ravier. Ce sont plutôt leurs enfants qui ont 13 ou 14 ans !
Mme Laurence Rossignol. On les voit arriver dans les services d’urgence psychiatrique, soit parce qu’ils sont prostitués soit parce qu’ils ont fait des tentatives de suicide.
Monsieur Ravier, les mineurs non accompagnés prostitués, victimes de réseaux de traite, sont certes étrangers, mais leurs clients, eux, sont tous Français ! (M. Stéphane Ravier s’exclame de nouveau.)
M. le président. Monsieur Ravier, seule Mme Rossignol a la parole !
Mme Laurence Rossignol. Ne vous excitez pas, monsieur Ravier ! Peut-être faudrait-il que vous déplaciez quelque peu votre angle de vue, de temps en temps !
Les chiffres ne sont pas bons, cette question perdure depuis des années et il n’est pas possible de la laisser entre les mains des seuls préfets. J’ai une solution à vous proposer, monsieur le ministre, qui pourrait vous rassurer.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Laurence Rossignol. Seriez-vous d’accord pour déposer un sous-amendement visant à permettre aux préfets de refuser la régularisation lorsque le mineur concerné est fiché S, par exemple, ou qu’il est connu de la direction nationale du renseignement territorial ?
M. le président. Il faut conclure ! Vous aurez l’occasion de vous exprimer plus tard.
Mme Laurence Rossignol. Cela permettrait de laisser une marge de manœuvre aux préfets.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je voudrais revenir sur la réalité, sur ce que nous vivons au quotidien.
Selon vous, 90 % des dossiers seraient traités et il n’y aurait donc pas de souci ? Pourtant, nous entendons parler tous les jours dans nos permanences de cas qui ne sont pas réglés. Et cela concerne aussi bien les parlementaires de gauche que ceux de droite, puisque nous sommes souvent amenés à signer des courriers conjoints pour que ces jeunes puissent achever leur cursus, leur apprentissage, pour enfin trouver leur place dans l’entreprise qui les a accueillis.
Suivant l’attitude du préfet, l’importance de la mobilisation ou l’influence de l’entrepreneur, les résultats de nos démarches diffèrent. On ne peut continuer avec un tel système.
Il me semble que l’amendement n° 307 rectifié de mon collègue Guy Benarroche permet d’encadrer les choses sans aller trop loin, puisque vous avez toujours ce fantasme de l’appel d’air. Il est tout de même indispensable de sortir de cette absurdité : on prend en charge des mineurs – c’est notre devoir d’humanité et de fraternité –, que l’on forme et que l’on accompagne dans leur cursus d’apprentissage, grâce à l’argent public, mais, à 18 ans, on arrête tout et on leur délivre une OQTF ! Quel intérêt ? Quel sens donner à tout cela ?
Je fais appel à votre pragmatisme, monsieur le ministre : on a dépensé de l’argent public pour que ces jeunes, souvent très bien formés, apprennent un métier – restauration, plomberie, etc. Les entrepreneurs, de leur côté, ne demandent qu’une chose : continuer de travailler avec ces jeunes avec lesquels ils ont tissé des liens. C’est aussi une question d’humanité.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. On peut continuer de débattre de sujets qui ne sont pas en lien direct avec le texte – d’autant plus qu’il reste 286 amendements à examiner et que le Sénat veut terminer son examen vendredi. Vous parliez de cavaliers législatifs, madame de La Gontrie, et c’est bien de cela qu’il s’agit ici.
Le projet de loi que j’avais déposé sur le bureau de la commission des lois du Sénat ne comportait en effet aucune disposition sur les mineurs : d’une part, parce que le sujet des mineurs dits « isolés », qui relèvent de l’ASE, mérite un texte spécifique ; d’autre part, parce que ces mineurs sont de la compétence non pas des services du ministère de l’intérieur, mais de l’autorité judiciaire.
À ce dernier titre, vous débattez sans doute de dispositions qui seront censurées par le Conseil constitutionnel.
J’ajouterai enfin que le débat me semble un peu vif avec M. Ravier ; imaginez ce que ce sera à l’Assemblée nationale. Au fond, peut-être s’agit-il non pas tant de résoudre un problème de fond que d’embêter quelque peu le Gouvernement lors de la discussion à venir…
Cela étant dit, je ne déposerai pas de sous-amendement. Les mineurs dits « isolés » sont de plus en plus nombreux sur le sol européen, singulièrement en France, et il est souvent difficile de distinguer les mineurs des majeurs, à quelques exceptions près.
En outre, j’ai déjà précisé, par une instruction ministérielle de septembre 2020, qu’il convenait d’examiner la régularité du séjour bien en amont du passage des 18 ans.
Mme la rapporteure a raison : dans 93 % des cas, les titres demandés sont validés ; les 7 % de refus correspondent à des fraudes documentaires.
Lorsque vous intervenez auprès du ministre de l’intérieur, vous comme d’autres, monsieur Jadot, sachez que les préfets ont refusé d’accéder aux demandes non pour des raisons politiques – cette attaque contre les préfets de la République me paraît quelque peu déplacée, et ce d’autant plus, monsieur Grosvalet, que les présidents de département peuvent avoir des visions de l’enfance extrêmement différentes et que certains ne mettent pas en place le fichier appui à l’évaluation de la minorité (AEM) réclamé par le Gouvernement –, mais parce qu’il est normal de ne pas régulariser des personnes qui ont triché.
Il peut arriver, malgré cela, que l’on régularise des personnes au nom de la dignité humaine, mais sûrement pas à la demande des patrons. Ces derniers ont bon dos, monsieur Durain. Sans doute pensiez-vous que cet argument suffirait à convaincre la partie droite de cet hémicycle… Nous n’allons pas légaliser la fraude documentaire, ce serait contraire aux intérêts de la République.
Il faut incontestablement réfléchir à un texte consacré à la question des mineurs. Je peux entendre votre proposition, madame Eustache-Brinio, mais elle ne relève pas de ce projet de loi. Je vous le dis très franchement. Cette question concerne l’autorité judiciaire, car il revient aux seuls magistrats, et non aux préfets, de renvoyer les mineurs dans leur pays d’origine.
La question n’est pas de savoir si les mineurs isolés sont accompagnés ou non par les entreprises – ils le sont la plupart du temps dans un souci de bon apprentissage. Le problème est que les services départementaux de l’ASE, engorgés par de jeunes étrangers qui ne sont pas tous mineurs, ne peuvent faire face à l’afflux de vrais mineurs, français ou étrangers, qui mériteraient la protection de la République.
C’était le cas dans mon département, lorsque j’étais conseiller départemental : on n’arrive pas à placer certains enfants dans les structures d’accueil pour cette raison – c’est un fait que personne ne peut contester.
Quelles que soient les réponses à apporter à la question des moyens, du séjour ou de l’âge, elles ne peuvent se trouver dans un texte sur l’immigration qui vise à modifier le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 41 rectifié et 307 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7.
L’amendement n° 238, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mme Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 8 du chapitre III du titre II de livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifiée :
1° Avant l’article L. 423-23, il est inséré un article L. 423-23-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 423-23-1. – L’étranger parent d’un enfant mineur étranger scolarisé depuis au moins trois ans, qui justifie par tout moyen d’une résidence ininterrompue, régulière ou non, d’au moins cinq années en France, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” d’une durée d’un an.
« En cas de rupture du lien conjugal ou la rupture de la vie commune, l’étranger doit justifier contribuer effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant dans les conditions prévues par l’article 371-2 du code civil.
« Les dispositions de l’article L. 412-1 du présent code ne sont pas applicables pour la délivrance de cette carte.
« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
2° À l’article L. 423-23, les mots : « et L. 423-22 » sont remplacés par les mots : « à L. 422-23-1 »
La parole est à M. Jérôme Durain.
M. Jérôme Durain. Les auteurs de cet amendement souhaitent consacrer dans la loi les dispositions de la circulaire Valls relatives à la délivrance de la carte de séjour « vie privée et familiale » pour les étrangers sans titre parents d’enfants scolarisés.
Reprenant les critères fixés dans cette circulaire, un étranger sans titre qui justifie d’une résidence ininterrompue d’au moins cinq années en France et qui est parent d’un enfant mineur scolarisé depuis au moins trois ans se verra délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire d’une durée d’un an.
Conformément au droit en vigueur, ces dispositions ne sont pas applicables si la présence de l’étranger en France constitue une menace pour l’ordre public ou s’il vit en France en état de polygamie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je rappelle que le droit à la régularisation n’existe pas. Ce n’est pas la norme : l’admission exceptionnelle au séjour est même l’exact opposé.
Laissons le droit en l’état : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Le Gouvernement fait des émules jusque dans les rangs du groupe socialiste : l’expression « se voit délivrer de plein droit » est exactement reprise de feu l’article 3 du projet gouvernemental !
Voilà ce par quoi on a commencé ce débat et ce par quoi on le prolonge : on veut créer un droit à la régularisation pour tous, et nous nous y opposons ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 408 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Gontard, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 581-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « , le cas échéant, » sont supprimés.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à être gentil avec les très, très gentils… Il devrait donc vous plaire !
Le dispositif proposé est assez simple : en 2001, l’Union européenne a adopté une directive sur la protection temporaire. Celle-ci a été mise en œuvre pour la première fois l’an dernier pour faire face à l’afflux en France de réfugiés ukrainiens.
Cette directive permet d’autoriser les personnes bénéficiant de cette protection temporaire à travailler dans le pays d’accueil. Il se trouve que la France a transposé la directive de manière quelque peu fragile : la loi n’accorde pas automatiquement d’autorisation de travail en même temps que la protection, ce que notre amendement vise précisément à corriger.
Je vise bien, par cet amendement, les réfugiés arrivés sur notre territoire en raison d’un conflit et qui se sont vu accorder une protection temporaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Tout le monde partage, au moins sur le principe, les propos de Mme Vogel.
Toutefois, il me semble que cet amendement est déjà satisfait par la partie réglementaire du Ceseda. À moins que le ministre ne nous en livre une interprétation différente, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, madame Vogel ; à défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis : cet amendement est déjà satisfait par le droit en vigueur.
M. le président. L’amendement n° 577 rectifié, présenté par Mme de Marco, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 1° de l’article L. 3142-54-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 1°… À tout salarié exerçant une activité bénévole auprès d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 s’étant donnée pour mission d’accompagner juridiquement ou socialement, ou de former linguistiquement les personnes étrangères sur le sol français. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Dans la même logique qu’un précédent amendement de Mme de Marco qui visait les fonctionnaires, il s’agit ici d’étendre le droit au congé pour engagement associatif prévu à l’article L. 3142-54-1 du code du travail aux salariés exerçant une activité bénévole auprès d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 s’étant donné pour mission d’accompagner juridiquement ou socialement ou de former linguistiquement les personnes étrangères sur le sol français.
Notre amendement concernant les fonctionnaires engagés dans ces activités associatives a été déclaré irrecevable, mais pas celui-ci. L’activité de bénévoles, notamment d’étudiants ou de retraités, permet de pallier les lacunes de la politique française d’accueil.
Il est essentiel de reconnaître l’importance de l’engagement de ces associations au bénéfice de toute la société française en créant un régime de congé de droit au profit des bénévoles de ces associations.
Le droit en vigueur prévoit déjà un droit au congé de trois jours pour les dirigeants de structure associative. Nous proposons de l’étendre aux salariés des associations dédiées à l’accueil des personnes étrangères, qui remplissent des missions de service public qui devraient être à la charge de l’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Vos propos sont pétris de bons sentiments, monsieur Benarroche. Vous soulignez, sans doute à raison, que cette mission de service public devrait être prise en charge par l’État.
Toutefois, si votre amendement était adopté, ce sont les employeurs qui prendraient en charge les six jours ouvrables de congé que vous proposez d’étendre à ces bénévoles, ce qui ne me semble pas correspondre exactement à ce que vous défendez : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 577 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre III
(Division supprimée)
Article 8
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 565 est présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.
L’amendement n° 588 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Le chapitre III du titre V du livre II de la huitième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Amende administrative » ;
2° L’article L. 8253-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 8253-1. – Le ministre chargé de l’immigration prononce, au vu des procès-verbaux et des rapports qui lui sont transmis en application de l’article L. 8271-17, une amende administrative contre l’auteur d’un manquement aux dispositions des articles L. 8251-1 et L. 8251-2, sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre.
« Lorsqu’il prononce l’amende, le ministre chargé de l’immigration prend en compte, pour déterminer le montant de cette dernière, les capacités financières de l’auteur d’un manquement, le degré d’intentionnalité et le degré de gravité de la négligence commise.
« Le montant de l’amende est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l’article L. 3231-12. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux.
« L’amende est appliquée autant de fois qu’il y a d’étrangers concernés.
« Lorsque sont prononcées, à l’encontre de la même personne, une amende administrative en application du présent article et une sanction pénale en application des articles L. 8256-2, L. 8256-7 et L. 8256-8 à raison des mêmes faits, le montant global des amendes prononcées ne dépasse pas le maximum légal le plus élevé des sanctions encourues.
« L’État est ordonnateur de l’amende. À ce titre, il liquide et émet le titre de perception.
« Le comptable public compétent assure le recouvrement de cette amende comme en matière de créances étrangères à l’impôt et aux domaines.
« Les conditions d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
3° Dans la partie législative du code du travail, les mots : « la contribution spéciale » sont remplacés par les mots : « l’amende administrative ».
II. – Le chapitre IV du titre V du livre II de la huitième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° Le 4° de l’article L. 8254-2 est abrogé ;
2° Au troisième alinéa de l’article L. 8254-2-1, les mots : « , contributions et frais » sont remplacés par les mots : « et des frais » ;
3° À l’article L. 8254-2-2, la référence : « 4° » est remplacée par la référence : « 3° » ;
4° À l’article L. 8254-4, les mots : « ainsi que la répartition de la charge de la contribution en cas de pluralité de cocontractants » sont supprimés.
III. – Le chapitre VI du titre V du livre II de la huitième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 8256-2, les mots : « du premier alinéa » sont supprimés et les mots : « 15 000 » sont remplacés par les mots « 30 000 » ;
2° Au troisième alinéa de l’article L. 8256-2, les mots : « 100 000 » sont remplacés par les mots : « 200 000 ».
IV. – Le deuxième alinéa de l’article L. 8271-17 du code du travail est ainsi rédigé :
« Afin de permettre la liquidation de l’amende administrative mentionnée à l’article L. 8253-1 du présent code, le ministre chargé de l’immigration reçoit des agents mentionnés au premier alinéa du présent article une copie des rapports et des procès-verbaux relatifs à ces infractions ».
V. – L’article L. 5221-7 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les agents de contrôle visés à l’article L. 8271-17 peuvent obtenir tous renseignements et documents relatifs aux autorisations de travail. L’autorité administrative chargée d’instruire et de délivrer les autorisations de travail peut solliciter ces agents afin d’obtenir tous renseignements et documents nécessaires à l’instruction des demandes relatives à ces autorisations dans des conditions définies par décret. »
VI. – La section 2 du chapitre II du titre II du livre VIII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogée.
La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour présenter l’amendement n° 565.