Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Madame la sénatrice Billon, je vous remercie de votre question.
Les spécialités pharmaceutiques que vous évoquez concernent le traitement du cancer de la moelle osseuse, aussi appelé myélome multiple. Ces spécialités ont bénéficié d’autorisations de mise sur le marché conditionnelles délivrées par la Commission européenne à un stade précoce de leur développement.
Sur la base de la reconnaissance d’une présomption d’innovation et en l’absence de traitements appropriés, la HAS a délivré une autorisation d’accès précoce à ces trois spécialités.
Cette procédure dérogatoire exceptionnelle a permis à des patients français, en impasse thérapeutique, de bénéficier de ces traitements de façon anticipée.
Toutefois, dans le cadre de l’évaluation de ces traitements par la HAS, cette dernière n’a pas été en mesure, faute de données cliniques suffisantes du fait du stade précoce de leur développement, de reconnaître qu’ils permettaient une amélioration du service médical rendu (ASMR). Or, comme vous le savez, c’est l’obtention de cette ASMR qui justifie la prise en charge d’un traitement par l’assurance maladie.
Pour mieux répondre aux enjeux d’accès des médicaments au marché à un stade précoce de leur développement, la HAS a fait évoluer sa doctrine en février 2023. La nouvelle approche proposée repose sur un équilibre entre développement clinique accéléré et maîtrise du niveau d’incertitudes, au bénéfice des patients.
À cet égard, la spécialité Abecma a fait l’objet en juin 2023 d’une réévaluation par la HAS, qui a émis un avis favorable sur le remboursement de cette spécialité pour le traitement des patients adultes atteints d’un myélome multiple en rechute et réfractaire ayant reçu au moins trois traitements antérieurs.
Concernant la spécialité Carvykti, le laboratoire a fait le choix de retirer sa demande de prise en charge dans le cadre d’un remboursement par l’assurance maladie.
Enfin, s’agissant de la spécialité Tecvayli, l’autorisation d’accès précoce est toujours en cours.
Par ailleurs, dans le cadre du plan France 2030, le volet « Biothérapies et Bioproduction de thérapies innovantes » des programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR) répond enfin à l’enjeu de développement de ce type de thérapie.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. Merci pour ces réponses, madame la secrétaire d’État. Comme je l’ai rappelé dans ma question, l’Agence européenne des médicaments a délivré de nombreuses autorisations ; j’ose penser que ses protocoles sont extrêmement poussés, tout comme ceux de la HAS. Dès lors que de nombreux pays européens autorisent ces traitements, je souhaite – pour les malades, pour leur survie, pour l’espoir que cela a déclenché chez eux – que la France, qui a des hématologues et des spécialistes du myélome extrêmement brillants et professionnels, puisse avancer beaucoup plus rapidement, au moins à la vitesse de l’Europe : ce serait une première bonne nouvelle.
Je vous remercie donc pour l’attention que vous porterez à cette question et pour l’accélération de ces dossiers, qui profitera à tous les malades concernés.
désignation obligatoire d’un référent déontologue pour les élus locaux
Mme la présidente. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 818, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Elsa Schalck. Madame la secrétaire d’État, au sein de cet hémicycle, nous rappelons souvent l’importance du principe de libre administration des collectivités territoriales, ainsi que la nécessité d’accompagner les élus locaux dans l’exercice de leur mandat, alors qu’ils font face à des responsabilités toujours plus nombreuses, complexes et exigeantes.
La loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS, a offert à chaque élu la possibilité de consulter un référent déontologue, ce qui constitue une avancée pour que les élus puissent mieux appréhender les enjeux déontologiques, recueillir des conseils et se prémunir des risques juridiques, en particulier de ceux qui sont liés aux conflits d’intérêts.
Toutefois, la mise en application de ce dispositif est particulièrement complexe, en raison notamment d’un décret d’application qui a imposé cette désignation et fixé une date à compter de laquelle les collectivités devaient se mettre en conformité.
En résumé, là où le législateur avait instauré une possibilité pour les élus, le décret d’application a transformé cette faculté en obligation, donc en contrainte.
Madame la secrétaire d’État, comment expliquer qu’un décret d’application, en durcissant la loi, s’écarte ainsi de l’esprit du législateur ?
Nous avons là un nouvel exemple d’une évolution que je crois dangereuse ; je tiens ici, dans le cadre de notre mission de contrôle, à la souligner et à la dénoncer. Nous gardons tous en tête les récents décrets d’application relatifs au ZAN, le « zéro artificialisation nette », qui sont venus contredire la loi ; l’un d’entre eux vient d’ailleurs d’être partiellement annulé par le Conseil d’État. (M. Rémy Pointereau renchérit.) Cette situation n’est vraiment plus possible !
Je regrette que, sur un sujet aussi important que la déontologie, vous fassiez le choix d’imposer un dispositif aux communes, en faisant fi de leur taille, de leurs particularités et des difficultés inhérentes à la mise en place de ces référents, notamment la question du coût, dont on sait combien elle est importante pour les collectivités et risque de poser problème.
Madame la secrétaire d’État, comment comptez-vous clarifier ce dispositif ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Madame la sénatrice Schalck, l’institution d’un référent déontologue de l’élu local résulte de l’adoption d’un amendement parlementaire lors de la discussion de la loi 3DS. Le décret du 6 décembre 2022 est venu préciser les modalités d’application de cet article.
Lors de l’examen de ce texte, le Conseil d’État a été particulièrement attentif aux garanties d’indépendance et d’impartialité des personnes physiques pouvant être désignées pour assurer ces fonctions.
Le décret dispose que l’organe délibérant de chaque collectivité territoriale, groupement de collectivités territoriales ou syndicat mixte désigne le référent déontologue : soit une ou plusieurs personnes, soit un collège. Le texte permet également la désignation d’un même référent déontologue de l’élu local par plusieurs collectivités, groupements de collectivités ou syndicats mixtes, par délibérations concordantes.
Il n’existe pas de possibilité de mutualisation, mais il est possible de désigner le même référent ou collège ; par exemple, un conseil départemental, une communauté de communes et des communes non-membres de cette communauté de communes peuvent désigner le même référent.
Le Gouvernement a ainsi prévu des dispositions souples qui permettent aux collectivités de désigner un même référent. Le décret prévoit que ces dispositions entreront en vigueur six mois après sa publication, ce qui paraît un délai suffisant pour que les collectivités qui ne disposent pas d’un tel référent puissent se mettre en conformité. Un guide sur le sujet est également en cours de préparation.
accès aux soins pédopsychiatriques en mayenne
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, auteur de la question n° 811, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
M. Guillaume Chevrollier. La récente campagne électorale m’a fait rencontrer les élus des 240 communes de mon beau département de la Mayenne. Ils m’ont alerté à de nombreuses reprises sur les questions de santé, sur la situation très difficile que traversent les urgences hospitalières et, de manière générale, sur les inégalités d’accès à l’offre de soins.
Encore récemment, le départ imprévu d’un médecin est venu fragiliser l’unité de soins intensifs et spécialisés pour enfants et adolescents (Usisea) du centre hospitalier de Laval, alors même que son équipe de pédopsychiatrie doit gérer l’ensemble des consultations sur le territoire mayennais, dans cette unité comme dans les centres médico-psychologiques et dans le service de suivi à domicile. Notons que cette unité de soins intensifs permet l’hospitalisation complète des enfants ayant des troubles psychiatriques lourds. Or, aujourd’hui, ce service ne compte plus que quatre lits, contre dix auparavant. De jeunes patients en grande souffrance occupent donc des lits qui ne leur sont pas destinés ; d’autres attendent leur hospitalisation, parfois pendant plus de dix-huit mois.
Dans ce contexte, les familles sont extrêmement inquiètes pour leurs enfants ; les soignants de l’hôpital le sont également. Ceux-ci, ainsi que les élus, sont mobilisés sur cette question et attendent l’arbitrage de l’agence régionale de santé (ARS) pour créer un nouveau poste, si nécessaire, pour la pérennité de l’Usisea.
L’ARS a annoncé hier un plan global d’urgence : une enveloppe de 1 million d’euros, dont plus de 600 000 euros pour la pédopsychiatrie, aurait été débloquée. Ces crédits doivent permettre de recruter une dizaine de soignants afin de renforcer les équipes. C’est une bonne nouvelle, mais il reste encore beaucoup à faire.
Aussi, madame la secrétaire d’État, alors que la santé mentale et psychique des jeunes représente un enjeu particulièrement important après la crise sanitaire, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement pour maintenir un accès aux soins pédopsychiatriques durable et équitable en Mayenne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Chevrollier, en effet, la pédopsychiatrie mayennaise connaît actuellement des difficultés, liées au départ d’un médecin.
Conscients de l’urgence de la situation, nous nous sommes engagés dès le début du mois aux côtés des équipes médicales pour proposer un plan global d’urgence. Son objectif est de sécuriser la prise en charge des patients, d’augmenter la capacité à répondre aux demandes de consultations dans les centres médico-psychologiques et de redonner des perspectives aux acteurs de terrain.
Les mesures élaborées en travaillant avec les professionnels de santé du centre hospitalier de Laval permettront des évolutions importantes, parmi lesquelles je mentionnerai, premièrement, la mise en place d’une équipe post-urgence de pédopsychiatrie permettant une évaluation clinique avant la mise en place d’un suivi ambulatoire intensif en aval des urgences sur une période de quelques semaines ; deuxièmement, la création d’un hôpital de jour pour les adolescents de 15 ans à 18 ans sur le site du centre hospitalier de Laval, avec une capacité de cinq places dès 2023 et une cible de dix places en 2025 ; troisièmement, le renforcement de l’offre ambulatoire de pédopsychiatrie dans le département, dans les centres médico-psychologiques actuels, mais aussi par un élargissement du dispositif Escapad sur le département.
En lien avec l’ARS des Pays de la Loire, nous avons mobilisé une enveloppe de 1 million d’euros, dont 600 000 euros pour la pédopsychiatrie, enveloppe qui sera consacrée à l’accompagnement de l’ensemble de ces mesures. Ces crédits permettront notamment le recrutement sans délai de plus de dix soignants pour venir renforcer l’ensemble des équipes sur le territoire.
intervention urgente des autorités sanitaires face à l’abandon dont est victime la nièvre
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 050, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. Patrice Joly. Après plusieurs semaines passées à sillonner la Nièvre, je peux témoigner que l’insécurité sanitaire des Nivernais était la première question évoquée par les centaines d’élus locaux que j’ai rencontrés, qui se montrent très inquiets des manquements du système de santé sur notre territoire.
On ne compte plus les fermetures de services dans nos établissements, de celle du service de médecine à l’hôpital de La Charité-sur-Loire à celle du centre périnatal de proximité de Cosne-sur-Loire, en plus de celle de la maternité d’Autun. S’y ajoutent les services qui fonctionnent en mode dégradé : je pense à la fermeture temporaire du service de médecine et du service de soins de suite et de réadaptation à Château-Chinon, ou encore aux difficultés que rencontre le centre hospitalier de Nevers à assurer les urgences, au point de devoir délocaliser l’hélicoptère du service mobile d’urgence et de réanimation (Smur). L’hôpital de Decize est pour sa part contraint de limiter ses horaires d’ouverture, voire de fermer complètement.
Au centre hospitalier de Nevers, le seul service de soins palliatifs de la Nièvre est sous menace de fermeture ; la seule maternité du département est sous menace quasi permanente de fermeture temporaire ; enfin, l’hôpital lui-même vient d’être placé sous administration provisoire à la suite des alertes de la Haute Autorité de santé.
Certains bassins de vie, tels que Château-Chinon et Varzy, n’ont même plus de médecins généralistes, et plus de 20 000 Nivernais n’ont plus de médecin référent.
D’autres secteurs sont également en grande tension : la psychiatrie, la dermatologie ou l’allergologie, sans parler des dentistes.
Malgré les alertes des élus, les mois passent, les années filent, sans qu’aucun dispositif à la hauteur des besoins soit offert par le Gouvernement.
Madame la secrétaire d’État, devant un tel constat, qui conduit inévitablement à des drames sur notre territoire, pourquoi n’envisagez-vous pas de réguler l’installation des médecins, généralistes et spécialistes, et de donner les moyens à nos hôpitaux de pouvoir fonctionner ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Joly, sans nier les difficultés réelles que vous évoquez, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour renforcer l’accès aux soins dans la Nièvre. Ce département n’est pas laissé à l’abandon, comme vous le suggérez !
Au contraire, nous mobilisons tous les leviers pour accroître l’attractivité de ce territoire, en lien avec l’ensemble des parties prenantes.
Pour maintenir une offre de soins sur le secteur de Château-Chinon, nous avons travaillé, en lien avec les pouvoirs publics locaux, à la mise en place de consultations de soins non programmés ; elles sont effectives depuis le 4 septembre.
Dans le cadre du Ségur de la santé, nous soutenons également la reconstruction de l’hôpital de Cosne-sur-Loire, qui permettra d’offrir aux professionnels de santé un outil de travail moderne attractif pour de nouveaux médecins.
Dans les centres hospitaliers du département, la réserve sanitaire a été activement mobilisée pour accompagner les établissements, avec une soixantaine de missions réalisées, et éviter les fermetures de lits.
En outre, nous travaillons activement à l’élaboration d’un plan pluriannuel territorial qui s’emploiera à soutenir toute forme de dispositifs allant de la formation à l’emploi et à la fidélisation des professionnels de santé.
Par ailleurs, nous mobilisons une enveloppe de 2 millions d’euros supplémentaires pour financer les projets en faveur de l’attractivité dans la région Bourgogne-Franche-Comté et plus particulièrement dans la Nièvre.
Enfin, il faut citer le pacte territoire-santé de la Nièvre, en cours de finalisation, qui concrétise un engagement pour le développement d’une vingtaine d’actions partagées avec le conseil départemental afin de répondre aux thématiques de l’accès aux soins, du bien vieillir et de la santé mentale des jeunes.
Vous le voyez, le Gouvernement est pleinement mobilisé.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, pour la réplique.
M. Patrice Joly. Madame la secrétaire d’État, la réponse que vous nous faites est très loin des besoins, notamment en professionnels de santé. Aujourd’hui, les Nivernais, dont l’espérance de vie est inférieure de deux ans à la moyenne nationale, sont lassés des discours, des concertations et des schémas : ils vous demandent d’agir réellement !
Mme Nathalie Goulet. Nous aussi !
soutien d’une nécessaire production française de matériels sanitaires afin d’anticiper les prochaines crises
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, auteure de la question n° 455, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.
Mme Nicole Bonnefoy. Le retour saisonnier de la covid-19 augmente mécaniquement nos besoins en masques.
Lors de la crise sanitaire, des entrepreneurs se sont mobilisés pour réindustrialiser notre pays ; ils ont mis sur pied des lignes de production française de masques sanitaires. À la fin de 2020, la France était autosuffisante, avec une capacité de production de cent millions de masques par semaine.
Le problème est que cet effort collectif est aujourd’hui battu en brèche par la commande publique elle-même. Nombre d’établissements publics ont en effet changé de braquet ; ils reproduisent les erreurs du passé en important ces produits stratégiques, laissant nos industriels sans débouchés.
À Nersac, dans mon département de la Charente, la ligne de production de l’usine Next Safe est à l’arrêt.
Malgré la circulaire de mars 2023 réformant les critères de sélection des appels d’offres, les ministères et les établissements publics s’approvisionnent à l’étranger, se focalisant sur le critère unique du prix au détriment de la qualité technique et logistique, ou encore de la prise en compte des normes de responsabilité sociale des entreprises (RSE). Il est étonnant de voir l’État ne pas faire respecter ses propres critères, mettant ainsi à mal toute une filière industrielle et, par extension, notre souveraineté. L’Allemagne, de son côté, ne s’embarrasse pas et organise quand il le faut son approvisionnement sur des critères nationaux.
Aussi, monsieur le ministre, qu’attendez-vous pour faire respecter les critères de la circulaire de mars 2023 ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice, le Gouvernement est pleinement engagé pour renforcer la souveraineté industrielle et sanitaire de la France.
Vous évoquez le sujet de la commande publique et évoquez l’article 35 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui rend systématique la prise en compte de considérations environnementales parmi les critères de sélection des offres des marchés publics.
Compte tenu du fort changement de pratiques qu’implique l’application de cette mesure, son entrée en vigueur a été différée, jusqu’à cinq ans après la promulgation de cette loi, soit au 22 août 2026. Notons pourtant que le projet de loi relatif à l’industrie verte en accélère la mise en œuvre obligatoire, en la fixant en 2024 au lieu de 2026 pour des produits clés de la décarbonation.
Sur le sujet spécifique des produits de santé, des actions fortes sont d’ores et déjà menées pour renforcer les débouchés, en officine et sur les marchés publics hospitaliers, des entreprises qui fabriquent en Europe des médicaments et dispositifs médicaux stratégiques.
Ainsi, l’instruction n° 149 de la direction générale de l’offre de soins (DGOS) du 24 mai 2022 incite les acheteurs hospitaliers à intégrer les enjeux de sécurité d’approvisionnement à leur politique d’achat de produits de santé stratégiques, étant entendu qu’une production localisée en Europe est la meilleure garantie de la sécurité d’approvisionnement de nos hôpitaux.
L’instruction du 24 mars 2023 de la DGOS va dans le même sens, en demandant explicitement une adaptation du processus d’achat des fournitures, produits de santé et équipements critiques, dont font partie les masques. L’objectif est de valoriser les éléments différenciant positivement les industriels français et européens, dans le respect du droit de la commande publique. Cette instruction retient le principe de la compensation financière, pour les établissements de santé concernés, des surcoûts entre les sources d’approvisionnement européennes sécurisantes et les autres sources.
De plus, lorsque la sécurisation des approvisionnements est un enjeu majeur, et sous certaines conditions, l’implantation européenne des moyens de production peut être demandée en application de l’article L. 2112-4 du code de la commande publique.
Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le ministre, les fabricants de masques français sont en colère. Ils ont assumé leur mission en un temps record, mais les promesses ne sont pas tenues. Vous le savez, l’État est incapable de faire appliquer ses propres instructions ou recommandations, y compris au sein de ses ministères. Il faut que les acheteurs publics se tournent réellement vers les productions françaises, que les instructions soient enfin appliquées et les sanctions prises en cas de manquement ; sinon, il n’y aura bientôt plus de filière de masque en France, et ce seront alors des centaines de millions d’euros, y compris d’argent public, qui auront été dépensés, et des milliers d’emplois créés, pour rien !
situation de l’instruction au tribunal judiciaire et à la cour d’appel de rennes
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, auteure de la question n° 717, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Sylvie Robert. Monsieur le ministre, depuis plusieurs années, la situation de l’instruction au tribunal judiciaire ainsi qu’à la cour d’appel de Rennes est particulièrement dégradée. Un chiffre témoigne de l’urgence à étoffer les effectifs : au tribunal judiciaire, le nombre de dossiers d’information par cabinet de droit commun est de 124, quand le seuil d’alerte est fixé à 72. Le seuil est également amplement dépassé dans les cabinets chargés de la grande criminalité.
Bien que le département d’Ille-et-Vilaine connaisse une croissance démographique soutenue et continue depuis 2008, le nombre moyen de juges d’instruction dans le ressort de la cour d’appel de Rennes n’est que de 5,1 pour 1 million d’habitants, quand le ratio national s’élève à 8,4. C’est le plus bas de France… Traduit concrètement, cet écart signifie qu’il manque quinze juges d’instruction.
Malgré l’investissement des magistrats, les conséquences de cette insuffisance sont réelles. Le stock de dossiers augmente, les délais d’achèvement des procédures sont allongés, le risque de prescription s’accroît. Aujourd’hui, l’ensemble de la chaîne pénale est « embolisée », à l’instar des services d’enquête et des experts auxquels la justice a besoin de recourir. En d’autres termes, la situation de la justice pénale à Rennes a atteint un point critique.
Sept magistrats ont pris leur fonction au tribunal judiciaire de Rennes lors de sa rentrée solennelle : c’est un bon début. En revanche, la situation de l’instruction reste très tendue. Dans ces conditions, de nouveaux renforts sont-ils prévus pour soulager les magistrats instructeurs et améliorer le service rendu par la justice ? Si oui, combien, et selon quelle ventilation entre le tribunal judiciaire et à la cour d’appel ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice, la situation de la cour d’appel et du tribunal judiciaire de Rennes fait l’objet d’une attention particulière de la part du ministère de la justice.
À la cour d’appel, les effectifs ne connaissent aucune vacance.
Au sein du tribunal judiciaire de Rennes, les effectifs du service de l’instruction sont également au complet : les trois postes de juge ainsi que les trois postes de vice-président sont pourvus. Par ailleurs, les effectifs globaux du tribunal judiciaire de Rennes connaissent un surnombre de juge non spécialisé. Seul un poste de juge des enfants est vacant, mais il est numériquement compensé par un second surnombre de juge non spécialisé.
Cependant, dans la mesure où, malgré cet état de fait, certains services peuvent connaître des situations de forte activité, une réflexion d’ensemble est menée sur les besoins des juridictions dans le contexte d’une augmentation inédite du budget et de recrutements historiques qui ont été adoptés définitivement par le Parlement, notamment hier au Sénat.
C’est pourquoi je vous indique que la cour d’appel de Rennes bénéficiera à ce titre d’une augmentation sensible de ses effectifs à l’horizon de 2027.
Ce sont en effet au moins 58 magistrats, 61 greffiers et 54 attachés de justice supplémentaires qui viendront renforcer les juridictions du ressort de cette cour.
Entre 2017 et 2027, ce seront donc plus de 101 magistrats supplémentaires qui seront venus renforcer le ressort de la cour d’appel de Rennes !
Je veux être clair : tous ces renforts prévus dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 se font en plus des remplacements des départs à la retraite.
Dans le cadre de la politique fixée par la Chancellerie – celle de la confiance dans les acteurs de terrain –, il appartient désormais aux chefs de la cour d’appel de Rennes de proposer la répartition de ces effectifs au sein des différentes juridictions de leur ressort en fonction d’une analyse locale, au plus près des besoins.
Je vous confirme que ces renforts permettront, le cas échéant, de renforcer les effectifs de juges d’instruction du ressort du tribunal judiciaire de Rennes.