Mme Valérie Boyer. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, en ces jours particulièrement difficiles pour l’Arménie, nous sommes pleinement mobilisés à ses côtés et à ceux du peuple arménien.
Mme la Première ministre a réaffirmé notre engagement constant. Nous le portons auprès de nos partenaires, au Conseil de sécurité des Nations unies et jusqu’à Erevan, où je me suis rendue la semaine dernière. Aucun pays ne fait autant que la France pour l’Arménie.
Mme la Première ministre a rappelé les grandes lignes de notre action pour aider l’Arménie et pour empêcher toute remise en cause de son intégrité territoriale.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous dire que tous les engagements que nous avons pris seront tenus : quelque 12,5 millions d’euros d’aide humanitaire sont en train d’être distribués à des acteurs engagés en Arménie, sur le terrain, auprès des réfugiés et des déplacés.
Nous avons pu évacuer, le week-end dernier, quatre blessés graves, qui sont désormais accueillis dans les structures hospitalières d’Île-de-France. Des discussions sont en cours, Mme la Première ministre l’a confirmé, pour permettre à l’Arménie d’acquérir du matériel militaire à vocation défensive.
À l’échelle européenne, nous avons proposé, avec l’Allemagne, un ambitieux plan de soutien à l’Arménie, qui sera évoqué lors de la prochaine réunion du Conseil européen, le 23 octobre. Notre objectif est notamment de renforcer les moyens et le mandat de la mission d’observation européenne.
Enfin, à l’ONU, après avoir obtenu la réunion du Conseil de sécurité, demandé la libération des personnes arrêtées et rappelé le droit des Arméniens à vivre dans le Haut-Karabakh, nous allons continuer de ramener le Conseil à ses responsabilités, afin de progresser vers un projet de résolution.
Monsieur le sénateur, vous le voyez, nous sommes aux côtés de l’Arménie. Nous ne permettrons pas que son avenir soit déterminé par la force ou par la menace de l’usage de la force.
M. Bruno Retailleau. On verra…
M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Monsieur le ministre chargé du logement, depuis plus de trois ans, j’ai régulièrement interpellé vos prédécesseurs – ils se sont d’ailleurs succédé à un rythme soutenu – sur la situation de la construction neuve dans notre pays, pour réclamer – en vain ! – un plan d’urgence. J’ai même eu un entretien en tête-à-tête d’une vingtaine de minutes avec le Président de la République (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.), au cours duquel j’ai pu mesurer que celui-ci avait complètement sous-estimé le problème !
Cette fois, nous y sommes : la construction de logements s’effondre, et vous avez choisi de regarder ailleurs !
Les chiffres que vous venez de publier sont accablants. Nous observons le pire ratio depuis 1950 entre le nombre des constructions neuves et celui des demandes des ménages. À la fin de l’année prochaine, on comptera 250 000 constructions neuves : c’est la moitié de ce qui serait nécessaire pour loger nos compatriotes ! Autrement dit, il y aura 300 000 chômeurs de plus à la fin de l’année prochaine dans le secteur des bâtiments et travaux publics (BTP).
Tous les secteurs sont en panne, depuis la promotion privée, qui ne vend plus rien, jusqu’au logement social, que vous avez tué par votre funeste réforme des aides personnelles au logement (APL), en passant par l’accession à la propriété, laquelle n’est plus possible pour les primo-accédants. À cela, il faut ajouter que les logements étudiants sont désormais réservés aux enfants de familles aisées !
Cette crise touche à la fois le neuf et l’ancien, en particulier à cause de la bureaucratie issue de la loi de 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui a instauré le diagnostic de performance énergétique et l’objectif de zéro artificialisation nette, dit ZAN. (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)
Cette crise touche à la fois l’offre et la demande, à cause de la montée exponentielle des taux d’intérêt.
Quel que soit le scénario envisagé, la catastrophe est annoncée, je vous le dis !
Monsieur le ministre, après de longs mois de déni, votre ministre de tutelle, M. Béchu, a appelé de ses vœux un « choc de décentralisation ». Mais ce n’est pas en passant la patate chaude aux collectivités locales et sans plan de relance que vous allez résoudre le problème !
L’ancien Premier ministre Édouard Philippe lui-même vient de sonner l’alarme en vous demandant de desserrer l’étau du logement.
Mme Sophie Primas. C’est vrai !
M. Marc-Philippe Daubresse. Aussi, ma question est simple : quand allez-vous vous réveiller pour éviter la « bombe sociale » que prédit Édouard Philippe ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du logement.
M. Patrice Vergriete, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Marc-Philippe Daubresse, la crise du logement actuelle était prévisible, compte tenu de la forte augmentation du prix du foncier, laquelle a entraîné la hausse des prix immobiliers. Cette dernière s’élève à plus de 200 % dans certaines grandes villes. Elle s’explique par le fait que les taux sont restés très bas pendant plus d’une quinzaine d’années.
Ce sont ces taux bas, intégrés au prix du logement, qui ont provoqué l’actuelle crise du logement. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.) À cette cause, il faut ajouter la remontée des taux d’intérêt et l’augmentation du coût des matériaux. (Mme Sophie Primas s’exclame.)
L’objectif du Gouvernement est aujourd’hui de relancer la demande. Aussi, nous avons réfléchi à la question du logement social ; vous le savez sans doute, pour avoir suivi le congrès HLM qui s’est tenu à Nantes la semaine passée. Nous y avons trouvé un accord avec le mouvement HLM, pour atteindre un double objectif : relancer la production de logement social et tenir le calendrier des rénovations énergétiques.
D’une part, le Gouvernement apportera 1,2 milliard d’euros sur trois ans et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) 6 milliards d’euros de prêts pour la rénovation énergétique.
D’autre part, la CDC augmentera de 150 millions d’euros ses prêts participatifs et consacrera 8 milliards d’euros à des taux bonifiés pour la production de logement social.
Cet accord a été jugé très positivement par le mouvement HLM. (Mme Sophie Primas manifeste son scepticisme.) À mon avis, il permettra à la fois de relancer la production et de tenir le calendrier des rénovations.
Nous travaillons actuellement sur le prêt à taux zéro (PTZ) et sur la relance de l’accession à la propriété, en renforçant le dispositif dans les zones tendues, là où le besoin en est le plus fort, et en le maintenant pour l’accession sociale dans les zones non tendues.
Nous réfléchissons également à ouvrir aux acteurs institutionnels le logement locatif intermédiaire. Nous travaillons sur la possibilité d’un choc d’offre foncière, pour libérer davantage de foncier.
En somme, monsieur le sénateur, nous travaillons sur l’ensemble des fondamentaux de la politique du logement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Stéphane Demilly. Madame la ministre des affaires étrangères, je sais bien qu’une actualité chasse l’autre et que nos regards et nos cœurs sont aujourd’hui mobilisés, à quelques exceptions près, pour le peuple israélien, victime d’une impensable barbarie moyenâgeuse.
Je sais bien que le Monopoly mondial est complexe et que l’Union européenne, au regard du contexte ukrainien, avait besoin de diversifier ses importations de gaz, ce qui rapporte des milliards à l’Azerbaïdjan, comme l’ont rappelé nos collègues Retailleau et Devinaz.
Tout cela, nous le savons, mais je souhaite tout de même revenir sur la situation dramatique du Haut-Karabakh. Comme en Ukraine, comme à Gaza, comme dans de nombreux endroits de la planète, la force prévaut sur le droit.
Madame la ministre, faut-il qu’un peuple disparaisse pour savoir qu’il existe ? Près de 80 % de la population arménienne a dû abandonner, du jour au lendemain, la terre qu’elle habite depuis 2 500 ans pour ne pas se faire massacrer, après avoir été encerclée et affamée.
La Russie a renoncé à protéger l’Arménie et nous, Européens, avons poussé le cynisme jusqu’à inviter le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, à négocier avec ses agresseurs. Chacun sait qu’il est facile de négocier avec un couteau sous la gorge ! Chacun sait qu’il est facile de négocier avec un président qui a promis de « vous chasser comme des chiens » !
Charles Aznavour chantait cette véritable incantation :
« Après l’horreur,
« Après la peur,
« Pour toi Arménie, […]
« Le monde s’est levé,
« Le monde est avec toi. »
Madame la ministre, la France est-elle avec l’Arménie ? La France se lève-t-elle pour l’Arménie ?
Au-delà des mots de compassion, au-delà des condamnations diplomatiques de circonstance, qu’envisage de faire la France pour le peuple arménien, qui a connu le premier génocide du XXe siècle et qui vit actuellement, sous nos yeux, le premier nettoyage ethnique du XXIe siècle ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE-K. – M. Bernard Buis applaudit également.)
Mme Catherine Morin-Desailly. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Chacun dans cet hémicycle mesure la gravité de la crise qui se déroule au Proche-Orient, laquelle ne saurait toutefois détourner notre regard de la situation dans le Caucase du Sud, particulièrement en Arménie. Quelle que soit la manière dont il cherche à présenter la situation, l’Azerbaïdjan a planifié et organisé l’exode de plus de 100 000 Arméniens du Haut-Karabakh. Il s’agit d’actes d’une extrême gravité : ce sont des crimes et ils ne peuvent rester sans réaction.
Nous avons organisé un nouveau débat au sein du Conseil de sécurité. Nous demandons aujourd’hui à ses membres de prendre leurs responsabilités, par le biais d’une résolution qui permette de créer les conditions d’un possible retour des populations arméniennes du Haut-Karabakh. Cela passe par des garanties fermes sur le respect de leurs droits historiques et culturels, ainsi que par une présence internationale permanente, qui est l’objet de tous nos efforts.
Mme la Première ministre a rappelé précédemment, et je l’ai fait à sa suite, l’ensemble des actions que nous menons pour aider, comme ne le fait aucun autre pays – je le redis –, l’Arménie.
Nous sommes convaincus, comme l’a dit la Première ministre, que les questions en suspens entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan ne pourront trouver de réponses qu’au travers d’un processus de négociation et d’un chemin de paix juste et durable.
C’est la raison pour laquelle la France soutient les efforts de médiation de l’Union européenne. Il s’agit d’un soutien exigeant, qui ne fera aucune concession sur le nécessaire respect du droit international, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Arménie.
En parallèle, nous devons continuer de soutenir l’Arménie comme nous le faisons et de dissuader l’Azerbaïdjan, en lui passant des messages, comme nous l’avons encore fait aujourd’hui, pour l’engager à ne pas poursuivre dans la voie de la force. Il n’y a pas d’autre choix possible pour assurer la paix, au bénéfice de toutes les populations du Caucase du Sud. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
situation des greffiers
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Monsieur le garde des sceaux, comme vous ne l’ignorez pas, la grande majorité des agents du greffe, partout en France, estiment que leur légitime préoccupation n’est pas prise en compte.
Je sais que vous vous souciez de ce problème, mais, après votre récent déplacement à Grenoble, des divergences demeurent entre les propositions du ministère et les revendications des syndicats des greffiers.
Cette profession, mise à rude épreuve depuis déjà fort longtemps, réclame une réforme indispensable de son statut catégoriel, une revalorisation salariale adaptée en conséquence et une meilleure reconnaissance de sa fonction au sein de l’institution judiciaire.
Ces négociations visent simplement à rééquilibrer le statut des greffiers. En réalité, ils demandent une réforme d’équité, monsieur le garde des sceaux !
Cette situation n’est, au fond, que le reflet des difficultés de recrutement que rencontre la fonction publique, plus particulièrement les ministères régaliens, lesquels n’ont pas su enrayer la démotivation d’un nombre important d’agents. Et ce n’est pas le recours fréquent à des agents contractuels qui leur redonnera confiance…
Monsieur le garde des sceaux, vous savez combien le Sénat est attaché à cette fonction : nous avons œuvré avec force en faveur de la trajectoire de recrutement de 1 800 greffiers. Où en sont réellement ces négociations ? Quand vont-elles enfin aboutir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Pierre Monier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame Bonfanti-Dossat, je veux tout d’abord vous féliciter de façon républicaine et chaleureuse pour votre réélection. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Murmures sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Et nous, on ne nous félicite pas ?…
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. De même, je veux saluer l’ensemble des sénateurs concernés.
Votre question me permet de rappeler, une fois encore, qu’il n’y a pas de justice sans greffiers.
Depuis 2022, un greffier en milieu de carrière a bénéficié d’une augmentation de 294 euros brut mensuels, soit une hausse de 13 % de sa rémunération. Mais cela n’est pas suffisant.
J’avais annoncé à l’automne un certain nombre de mesures nouvelles, avec un calendrier particulier, mais, comme vous le soulignez à juste raison, il existe un certain nombre de divergences entre les greffiers eux-mêmes, qui sont en désaccord sur leurs revendications, comme le montre l’expression de leurs différents syndicats.
Le protocole d’accord prévoira trois axes : la revalorisation statutaire des greffiers de catégorie B+, qui doit intervenir à la fin de l’année 2023 ; la création d’un corps de greffiers de catégorie A – c’est inédit –, qui concerne 25 % du corps ; enfin, un plan de requalification des agents de catégorie C faisant fonction de greffier, qui permettra à 700 agents de cette catégorie de devenir greffiers et de voir ainsi reconnue l’expérience qu’ils ont acquise.
Je vous annonce, madame la sénatrice, que je veux signer ce protocole avec les syndicats d’ici une quinzaine de jours. Je souhaite aussi ardemment que le Sénat adopte, dans quelques instants, le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, ce qui nous permettra d’envoyer dans les juridictions 1 800 greffiers de plus.
M. Bruno Retailleau. Grâce à nous !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. En ce qui concerne Agen, la ville qui vous tient particulièrement à cœur, j’ai demandé au directeur des services judiciaires de s’y rendre demain pour rencontrer les greffiers et leur faire part des évolutions en cours. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Olivia Richard applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour la réplique.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Monsieur le garde des sceaux, je vous remercie de vos paroles encourageantes et j’en accepte l’augure. Puissent-elles rassurer tous les agents du greffe, afin qu’il n’y ait plus d’injustice dans la justice ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
rentrée scolaire
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Colombe Brossel. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, ma question porte sur le bilan de votre rentrée scolaire. En effet, derrière votre plan de communication permanente, il y a des chiffres, des constats et des réalités qui sont cruels, pour vous, mais surtout pour les élèves, leurs enseignants et le personnel éducatif, car ce sont eux qui en paient le prix.
Cette rentrée scolaire a été celle de l’impréparation et des engagements non tenus. À la fin du mois d’août dernier, vous avez annoncé qu’il y aurait un professeur dans chaque classe : il n’en est rien. Dans plusieurs académies, des enseignants ont été nommés et affectés plusieurs jours après la rentrée, quittant du jour au lendemain leurs classes et leurs élèves pour rejoindre leur affectation définitive.
De même, des milliers de lycéens, souvent en voie professionnelle ou technologique, attendent encore, le 11 octobre, qu’un professeur leur soit affecté.
Enfin, alors que 288 000 enfants en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire ont besoin d’un accompagnement, la moitié d’entre eux n’en a aucun ! Le 3 octobre dernier, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) étaient d’ailleurs en grève.
Voilà un tableau bien noir, alors même que les urgences s’accumulent…
Monsieur le ministre, que répondez-vous aux parents et aux élèves qui sont face à la chaise vide de leur enseignant ?
Que dites-vous aux enseignants qui méritent plus que des primes conditionnées à l’exercice de missions supplémentaires ?
Que déclarez-vous aux AESH, qui veulent, enfin, être reconnus pour leur travail indispensable ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mmes Céline Brulin, Antoinette Guhl et Marie-Claude Varaillas applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Gabriel Attal, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice, vous m’interrogez au sujet de la rentrée scolaire.
Pour vous répondre, je voudrais commencer par saluer, car vous n’avez pas jugé bon de le faire, les enseignants, les chefs d’établissement et les agents des rectorats qui ont organisé cette rentrée au service des élèves et des familles. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI – Protestations sur les travées du groupe SER.)
Mme Colombe Brossel. Bla bla bla !
M. Gabriel Attal, ministre. Madame la sénatrice, il y a des difficultés dans notre système scolaire, évidemment. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)
Toutefois, je veux rappeler quelques réalités. Depuis 2017, notre système scolaire compte 300 000 élèves de moins. Si nous nous étions adaptés à cette évolution démographique, nous aurions supprimé environ 20 000 postes… Or nous en avons créé 2 000 ! Voilà la réalité : 300 000 élèves de moins et 2 000 postes de plus.
Par ailleurs, si l’on compte 300 000 élèves de moins depuis 2017, le budget du ministère a augmenté de 30 %, ce qui ne s’est jamais vu dans les précédents quinquennats ! Oui, il y a des difficultés, bien sûr, mais nous investissons comme jamais auparavant pour l’éducation nationale.
Vous avez abordé le sujet de la rémunération des enseignants : leur revalorisation était due, bien sûr. Contrairement à ce que vous avez affirmé, elle n’est pas conditionnée à l’exercice de missions supplémentaires ! Tous les enseignants ont connu une revalorisation sans contrepartie, et c’est encore vrai pour cette rentrée.
Si l’on compare la rentrée de 2022 à celle de 2023, tous les enseignants ont touché entre 125 euros et 250 euros net de plus, sous l’effet de l’augmentation du point d’indice et de la revalorisation-choc qui a eu lieu en cette rentrée.
Vous parlez de l’école inclusive et des AESH. Nous avons doublé le nombre d’élèves accueillis et avons recruté 40 000 AESH, dont le salaire, en cette rentrée, a été revalorisé de 13 %.
M. Hussein Bourgi. Pourquoi sont-ils en grève, alors ?
M. Gabriel Attal, ministre. Évidemment, nous ne sommes pas au bout des problèmes. Nous devons maintenant améliorer la qualité de l’accueil des élèves, et c’est le sens du travail que j’ai engagé, avec mes collègues Fadila Khattabi et Aurore Bergé, pour continuer à avancer.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Tout va bien, alors…
M. Gabriel Attal, ministre. Oui, il y a des difficultés, mais nous investissons comme jamais dans l’éducation nationale.
Je suis absolument convaincu que nous viendrons au bout de ces difficultés, en lien avec les enseignants, les chefs d’établissement, les AESH et les familles, car nous voulons tous, je le crois, la réussite de notre école et de nos élèves. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Olivier Bitz et Daniel Chasseing applaudissent également.)
M. Xavier Iacovelli. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour la réplique.
Mme Colombe Brossel. J’ai trop de respect pour cette assemblée pour céder à la démagogie. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes RDPI et Les Républicains.)
Tom, Jasmine, Abderrahmane et Louise n’ont pu faire leur rentrée cette année, car ce sont des enfants en situation de handicap.
Guillaume, Abdel et Fatoumata sont des lycéens qui n’ont pas pu faire leur rentrée cette année, car ils n’ont pas reçu d’affectation.
Aussi longtemps que le Gouvernement considérera que ce sont des statistiques, nous continuerons à porter la parole de ces enfants et de ces élèves partout, y compris dans cet hémicycle. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)
prélèvements agirc-arrco
M. le président. La parole est à Mme Vivette Lopez, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Vivette Lopez. J’associe à ma question mon collègue Alain Chatillon.
Monsieur le ministre du travail, je suis surprise – depuis le temps, je ne devrais pas l’être… –, ou plutôt scandalisée, de constater que, en France, lorsque l’on est vertueux, prudent et économe, l’État, qui l’est beaucoup moins, n’hésite pas à se servir et récupérer le fruit de notre travail.
Voilà ce que vous vous apprêtez à faire avec les retraites complémentaires de l’Agirc-Arrco ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les réserves accumulées ont été constituées par un effort soutenu des salariés et sont le fruit d’une gestion raisonnable. Elles assurent sur le long terme la retraite des salariés du privé. Faute de conduire des réformes courageuses pour ramener les finances publiques à l’équilibre, vous allez pour la seconde fois piller les caisses de l’Agirc-Arrco. Or ces réserves n’appartiennent pas à votre gouvernement !
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer et nous garantir que les réserves financières de ces régimes complémentaires ne feront pas l’objet d’un prélèvement indu ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur les perspectives financières de la caisse complémentaire Agirc-Arrco.
Tout d’abord, je vous rejoins sur un point, cette caisse est bien gérée, puisqu’elle dégage des excédents. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est d’autant plus vrai que s’applique, depuis 2019, une décote temporaire de 10 %, votée par les partenaires sociaux. Ainsi, plus d’un salarié sur deux qui a cotisé à cette caisse et qui est parti à la retraite depuis 2019 a bénéficié de la décote.
J’ai présenté la réforme des retraites il y a quelques mois avec Mme la Première ministre. À toutes les étapes de la concertation, nous avons dit aux partenaires sociaux que cette réforme était celle du retour à l’équilibre, tous régimes confondus.
Nous savons aujourd’hui que l’Agirc-Arrco continuera à dégager des excédents. Nous savons également que, à l’horizon de 2026, sur le total des excédents – il s’agit non pas des réserves, mais des excédents annuels –, environ 1,2 milliard d’euros seront dus à la réforme des retraites adoptée au printemps dernier.
Oui, nous considérons que ce 1,2 milliard d’euros bénéficieront à l’Agirc-Arrco uniquement en raison de notre réforme. (Protestations sur les travées du groupe SER.) Aussi, il nous semble légitime que la part des excédents qui est due à la réforme participe au financement d’un régime de solidarité. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Absolument pas !
M. Bruno Retailleau. Et le paritarisme ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Les partenaires sociaux, qui se sont réunis pour discuter des règles de gestion de l’Agirc-Arrco, ont fait un choix différent, lequel se traduira, en 2026, par une augmentation des dépenses sociales – donc des dépenses publiques au sens de la loi organique – de 1 milliard d’euros.
Nous sommes donc confrontés à deux défis.
Premièrement, comment rééquilibrer les finances publiques pour absorber 1 milliard d’euros de dépenses supplémentaires, qui ne nous semblent pas totalement responsables ?
Deuxièmement, comment garantir que la réforme que vous avez votée et qui est mise en œuvre permette le retour à l’équilibre du régime de retraite ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Vivette Lopez, pour la réplique.
Mme Vivette Lopez. Monsieur le ministre, sachez que ce prélèvement est perçu comme un racket ! La solidarité financière n’est pas audible : ce n’est pas aux retraités du privé de payer le gaspillage de l’État.
En outre, la ponction demandée par l’État met en danger la pérennité des retraites complémentaires et l’avenir des relations sociales.
Si d’aventure le Gouvernement passait par le projet loi de financement de la sécurité sociale pour en obtenir le versement, nous nous y opposerions et nous engagerons notre responsabilité pour garantir l’avenir des relations sociales et la pérennité des retraites complémentaires. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
politique familiale et évolution du taux de natalité