M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je m’autorise à adresser un salut particulier à une femme à laquelle vous avez rendu hommage. J’ai eu le plaisir de siéger, ici, à ses côtés et même de faire liste commune avec elle, ce qui montre à quel point les convergences sont parfois possibles dans ce monde… (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. David Assouline. Et le mariage pour tous ?
M. Christophe Béchu, ministre. Madame la sénatrice Préville, vous avez évoqué le jugement du tribunal administratif de Paris du 29 juin. Vous en avez cité certains aspects, mais j’aurais aimé que vous alliez jusqu’au bout.
Que dit le tribunal administratif de Paris ? Il dénonce le fait que, malgré les engagements pris en 2009, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, les pesticides n’ont pas diminué en quantité.
Entre 2009 et 2013, ce que l’on appelle le « nombre de doses unités », qui est la méthode de calcul du nombre d’hectares couverts par des pesticides, a augmenté de 13 %.
Dans la période comprise entre 2013 à 2018, il a de nouveau augmenté, de sorte que, depuis 2009, l’usage des pesticides est non pas en baisse, mais en hausse, de 20 % en moyenne.
Le tribunal dit également que la baisse enclenchée depuis 2018 et qui s’est poursuivie jusqu’à aujourd’hui n’a pas été suffisante pour corriger le préjudice écologique.
L’honnêteté aurait voulu que vous indiquiez que cette bascule a commencé. Elle a commencé en nombre, avec un recul de 10 % des pesticides vendus depuis 2018 ; elle a commencé en risque, puisque les CMR 1, qui sont les pesticides les plus cancérigènes, ont enregistré une baisse de 93 % depuis 2018.
Qu’allons-nous faire ? Nous allons poursuivre cette accélération. Nous n’allons pas nous contenter, en particulier dans le cadre du plan Écophyto, tel qu’il a été défini par la Première ministre, d’attendre des rapports d’experts. Nous allons regarder par anticipation les molécules susceptibles de basculer dans le champ de l’interdiction, pour lancer les programmes de recherche, à partir d’un triptyque simple : pas d’interdiction sans solution, pas de solution sans financement, sans efforts pour trouver ces solutions. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
image de la france à l’étranger après les émeutes
M. le président. La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Ronan Le Gleut. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les images de la France qui brûle ont fait le tour du monde. Partout, sur la planète, dans tous les journaux télévisés diffusés à travers le monde, on a vu ces images d’immeubles incendiés, de mairies ou de commissariats attaqués aux mortiers, de nos centres-villes saccagés.
Tous s’interrogent : mais qu’en est-il de la France ? Nos 3 millions de compatriotes qui vivent à l’étranger ont été interrogés dans les pays où ils vivent : la France est-elle toujours la France ? De la même manière, les chefs d’État et les gouvernements étrangers interrogent nos ambassadeurs : que devient ce pays ?
M. David Assouline. C’est Bolloré !
M. Ronan Le Gleut. Ma question est la suivante, madame la ministre : quelles sont les directives, quels sont les messages que vous envoyez à nos ambassadeurs à travers le monde pour répondre à ces gouvernements étrangers ? Leur dites-vous de reprendre la formule du Président de la République : « On va y réfléchir » ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’Europe.
Mme Laurence Boone, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée de l’Europe. Monsieur le sénateur Ronan Le Gleut, je vous prie d’abord d’excuser Catherine Colonna, qui participe au sommet de l’Otan avec le Président de la République.
Permettez-moi d’abord de rappeler que les violences qui ont suivi la mort dramatique de Nahel sont absolument inacceptables : il est inacceptable de détruire des écoles, il est inacceptable de détruire des mairies, des médiathèques, des biens publics.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme. Et des commerces !
Mme Laurence Boone, secrétaire d’État. Et des commerces, oui !
Les forces de l’ordre ont réussi à ramener le calme très rapidement, dans le strict respect de la loi et en limitant le nombre de blessés.
L’ensemble du Gouvernement a beaucoup communiqué, y compris à l’étranger, sur les mesures qui ont été prises pour rétablir l’ordre public sur notre territoire.
Nos ambassades ont été informées. Elles ont rassuré. Elles ont beaucoup parlé, si bien que, comme l’a rappelé la ministre chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, il n’y a pas eu d’annulations ou de modifications de séjours. Il n’y a pas de baisse de la fréquentation.
En revanche, il ne faut absolument pas être dupe du cynisme et des mauvaises intentions de certains pays, qui n’hésitent jamais à pratiquer l’instrumentalisation ou la désinformation. (Marques d’approbation sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Olivier Cadic. Absolument !
M. David Assouline. La Russie !
Mme Laurence Boone, secrétaire d’État. Je veux être très claire : dans certains pays, les images des événements sont utilisées au profit de la propagande des régimes, autant en interne que contre notre pays. Nous avons systématiquement répondu à ces malveillances, notamment aux propos qui ont pu être tenus par certains responsables azerbaïdjanais, turcs ou iraniens.
Je suis sûr que vous en conviendrez : les leçons de ces pays prêteraient à sourire si les droits de l’homme n’étaient pas aussi malmenés en leur sein.
Enfin, il me paraît nécessaire de préciser que l’on a rencontré le même problème dans beaucoup de démocraties qui, comme le Royaume-Uni, en 2011 – soit, là aussi, un an avant les jeux Olympiques –, la Suède ou le Danemark, ont vécu de tels événements. Ces pays sont extrêmement compréhensifs et partageurs des solutions qu’ils ont alors mises en place. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)
M. Olivier Cadic. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour la réplique.
M. Ronan Le Gleut. Madame la secrétaire d’État, au lieu de regarder la réalité en face, vous vous défaussez. Dans un an, le monde entier va avoir les yeux rivés sur la France.
M. David Assouline. Bolloré !
M. Ronan Le Gleut. Alors, cessez de réfléchir et passez à l’action maintenant ! Il est temps de restaurer l’autorité de l’État dans notre beau pays pour que, l’an prochain, quand le monde entier aura donc les yeux rivés sur la France, nous puissions être fiers tous ensemble de l’image que nous renverrons à l’étranger. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Avant de lui passer la parole, je souhaite saluer notre collègue Françoise Férat, qui est sénateur de la Marne depuis 2001. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.) Elle s’est notamment investie sur les enjeux ruraux et agricoles au sein de la commission des affaires économiques.
Je citerai le rapport d’information qu’elle a fait avec Henri Cabanel, intitulé Suicides en agriculture : mieux prévenir, identifier et accompagner les situations de détresse. Ce rapport nous a amenés à réfléchir collectivement à la situation d’une partie de notre population, laquelle a parfois le sentiment que l’on ne se rend pas suffisamment compte de ce qu’elle représente pour notre pays.
Je la remercie de son engagement dans notre assemblée. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la Première ministre et Mmes et MM. les ministres, se lèvent et applaudissent.)
développement d’une culture scientifique pour tous
M. le président. La parole est à Mme François Férat, pour le groupe Union Centriste.
Mme Françoise Férat. Des constats persistants témoignent de la baisse des compétences des élèves français en mathématiques et d’une désaffection pour les cursus scientifiques. Sachez qu’en Grande-Bretagne et en Allemagne 80 % des enfants ont des activités scientifiques en dehors de l’école, contre 8 % en France !
La culture scientifique est pour tous les citoyens, pas seulement pour les scolaires. Les Français reconnaissent avoir confiance en la science. Les sujets scientifiques – réchauffement climatique, nucléaire, pandémie, vaccins – alimentent non seulement la réflexion et le débat, mais aussi la controverse et la suspicion. Quelle place pour la science dans nos sociétés abreuvées d’informations vingt-quatre heures sur vingt-quatre ?
Les enjeux mondiaux à venir sont interdépendants avec la science et les avancées technologiques. L’ensemble de la population doit disposer des codes et des clés pour comprendre ces enjeux fondamentaux qui vont changer nos habitudes et nos certitudes. De plus, la confusion entre l’opinion et les faits scientifiques constitue une menace pour la démocratie et pour nos sociétés.
Un rapport de l’Unesco sur la science précise que « les sciences, la technologie et l’innovation ont la capacité de changer la donne pour relever pratiquement tous les défis mondiaux les plus urgents ». Méditez cette phrase, mes chers collègues ! Ainsi, la puissance industrielle, que nous appelons de nos vœux, de la France progressera avec ces connaissances.
C’est pourquoi la culture scientifique doit se développer à l’école, mais également dans les médias, afin de former les citoyens. Les sciences et les mathématiques doivent être non pas réservées à une élite, mais partagées avec le plus grand nombre pour développer notre pays, forger l’esprit critique, le raisonnement factuel et appréhender les infox et théories complotistes.
Monsieur le ministre, qu’envisagez-vous pour développer la culture scientifique en France ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Pap Ndiaye, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Françoise Férat, je m’associe à l’hommage qui vient de vous être chaleureusement rendu. Je vous remercie pour votre proposition de résolution, dont je me réjouis qu’elle ait pu rassembler des sénateurs de toutes les travées sur une question d’évidence cruciale pour notre pays.
Nous sommes engagés dans une stratégie qui vise à promouvoir la culture scientifique auprès des enfants dès le plus jeune âge afin, d’une part, de renforcer les compétences scientifiques des élèves et, d’autre part, de créer le goût pour les mathématiques et les sciences exactes – une des priorités étant de mobiliser les filles dans ces matières.
Cette stratégie n’aboutira que si nous déconstruisons des représentations que peuvent avoir les élèves des mathématiques, lesquelles apparaissent souvent comme difficiles ou trop élitistes. Comme le souligne très justement votre proposition de résolution, l’excellence scientifique française doit concerner un plus grand nombre d’élèves afin de construire leur esprit scientifique et de lutter contre les infox. Elle doit aussi permettre à notre économie de compter sur des compétences scientifiques de très haut niveau qui répondront aux enjeux de demain – je pense en particulier à la transition écologique et à la révolution numérique.
Je voudrais mentionner deux points qui sont susceptibles d’attirer votre attention.
D’abord, la création de clubs de mathématiques dans les collèges – la multiplication de ces clubs favorise une pratique collégiale et souvent ludique des mathématiques –, sous l’égide du mathématicien Hugo Duminil-Copin, qui a reçu la médaille Fields.
Ensuite, l’introduction d’une heure et demie de mathématiques dans le tronc commun des élèves de première.
Concernant l’orientation des filles, l’objectif est qu’elles représentent 50 % des effectifs dans les principales spécialités scientifiques de la voie générale à l’horizon du quinquennat. Je suis donc plus que favorable à votre proposition de résolution, qui permettra de renforcer encore la dynamique dans laquelle nous sommes engagés. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)
Salutations à un sénateur
M. le président. Avant de lui donner la parole, je souhaite saluer notre collègue Charles Guené. Sénateur de la Haute-Marne depuis 2001, il s’est pleinement investi sur les enjeux des collectivités territoriales, et notamment de fiscalité locale. Dans l’histoire de la commission des finances, on se souvient du terrible binôme formé par Charles Guené et Claude Raynal ! (Sourires.)
Charles Guené a été vice-président de notre institution. Je souligne son engagement au sein de la commission des finances et de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Enfin, je rappelle qu’il est le président de l’Amicale gaulliste du Sénat.
Je tiens à le remercier pour tout ce qu’il a apporté à notre assemblée. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la Première ministre et Mmes et MM. les ministres, se lèvent et applaudissent longuement.)
données sur le classement des services hospitaliers français
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour le groupe Les Républicains.
M. Charles Guené. Je vous remercie, monsieur le président.
Vous me pardonnerez de m’écarter aujourd’hui de mon tropisme pour les collectivités locales – sujet à propos duquel je vous ai envoyé mon testament, si j’ose dire, hier soir ! – pour m’intéresser, à l’instar du président Requier qui se préoccupe des retraites, à l’état des maisons de santé, ce qui ne vous étonnera pas ! (Sourires.)
Monsieur le ministre, un grand hebdomadaire publie chaque année depuis vingt ans le classement et le palmarès des établissements de santé français grâce aux données que lui fournissait jusqu’à présent votre ministère. Or ce journal vient de se voir refuser l’accès à ces données après l’avis d’un organisme dont vous maîtrisez les nominations.
Pourquoi une telle remise en cause à un moment où l’organisation de la santé et des hôpitaux sur le territoire prête à critique et où se pose la question de la transparence ? Pourquoi se priver d’un avis sur l’état de la santé sur le plan national ? À l’ère du développement de l’open data, que pensez-vous de cette situation au regard des difficultés d’accès à l’information que rencontrent à la fois la presse, mais aussi, dans certaines circonstances, le Parlement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Monsieur le sénateur Charles Guené, je vous remercie de me donner l’occasion de rétablir la vérité à propos de cette polémique qui, finalement, n’en est pas une. Car répéter ad nauseam un fait inexact n’en fait pas pour autant – vous serez d’accord avec moi – une vérité.
Alors, quelle est cette vérité ? La loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, dite loi OTSS, qui a été votée par le Parlement, a créé un organisme indépendant – j’insiste sur ce dernier terme – de contrôle des données de santé, le Comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé (Cesrees).
Pourquoi avoir mis en place un organisme spécifique pour les données de santé ? Parce que – vous le savez comme moi – ces données sont particulièrement sensibles et ne peuvent pas être utilisées n’importe comment.
Le Cesrees a émis le 2 juin dernier un avis défavorable sur la méthodologie utilisée par ce journal pour traiter les données de santé, précisant même que celles-ci risquaient de déboucher sur des informations inexactes, lesquelles, comme on l’a vu pendant la crise sanitaire de multiples façons, pourraient avoir des conséquences sur la santé de nos concitoyens.
Cet avis a été confirmé par un avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) – je sais que cet organisme de contrôle est particulièrement cher à votre assemblée. J’ai tout naturellement suivi l’avis des experts, comme je le fais chaque fois qu’une question est soulevée, en particulier si elle relève du domaine sanitaire.
Dès le lendemain de cet avis, sollicité par ce journal, j’ai écrit au rédacteur en chef pour lui proposer l’aide des services du ministère afin d’aménager sa méthodologie et de lui permettre de répondre aux exigences légitimes du Cesrees et de la Cnil. À ce jour, je n’ai pas eu de réponse à ce courrier qui date maintenant d’il y a à peu près un an…
La vérité est là, les faits sont les faits et ils sont, oserais-je dire dans cette assemblée, têtus. Ils montrent que personne dans cette affaire n’endosse le rôle de censeur. Au contraire, dès lors que les données sont utilisées de façon pertinente, elles sont à la disposition de ceux qui veulent les traiter. (M. Alain Richard applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour la réplique.
M. Charles Guené. Monsieur le ministre, vos explications, bien que commodes, ne sont pas convaincantes. L’esprit du texte que nous avons voté en 2019 n’était pas nécessairement celui que vous faites prévaloir aujourd’hui. Nous verrons comment cette instance évolue.
Sur le plan de la méthode et de la philosophie, nous ne pouvons pas être satisfaits. Certains y verraient une énième expression d’un pouvoir vertical, qui ne souhaite pas être contesté, qui veut contrôler l’information, quand il ne crée pas lui-même des comités Théodule dont il pilote les conclusions. Cela dénote quand même – avouez-le – une absence de respect de la démocratie, de la pluralité de l’information…
M. le président. Il faut conclure.
M. Charles Guené. … et de la liberté de la presse. Dans notre démocratie, tout le monde sait que nos hôpitaux sont malades. Les Français ne veulent pas qu’on brise le thermomètre,…
M. le président. Concluez !
M. Charles Guené. … ils préfèrent qu’on applique des thérapies ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
fonds marianne
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rémi Féraud. Coup politique suivi d’une grande désinvolture, sélection des dossiers bâclée et opaque, précipitation dans l’élaboration du cahier des charges comme de l’appel à candidatures, fait du prince concernant l’attribution ou la non-attribution de subventions, et finalement un fiasco !
La commission d’enquête sénatoriale sur le fonds Marianne, sous l’égide de son président Claude Raynal et de son rapporteur Jean-François Husson, a établi un rapport accablant, auquel s’ajoutent les conclusions de l’inspection générale de l’administration, tout aussi sévères.
Les dysfonctionnements constatés sont d’autant plus graves qu’ils concernent une politique publique indispensable : celle de la lutte contre la propagande islamiste. Ce n’est pas cet objectif qui doit être remis en cause ; c’est son détournement qui est inacceptable et qui doit être dénoncé.
Alors, madame la secrétaire d’État, comptez-vous mettre en œuvre les recommandations formulées par la commission d’enquête sénatoriale pour éviter que de telles dérives ne se reproduisent ? Surtout, quelles conséquences politiques le Gouvernement compte-t-il en tirer ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Mme Monique de Marco applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Féraud, il me tient à cœur que nous restions factuels dans cette affaire. Je veux d’abord rappeler que le Gouvernement a fait preuve à la fois de réactivité et de transparence dès les premières interrogations dans ce dossier.
De réactivité, avec la demande qui a été faite à l’inspection générale de l’administration dès les premières alertes et le signalement sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale à la procureure de la République de Paris sur les mêmes faits.
De transparence, avec la transmission, comme vous le savez, au plus vite, de tous les documents qui ont été demandés par la commission d’enquête du Sénat, l’inspection générale de l’administration et désormais le parquet national financier, lequel a commencé une enquête qu’il ne m’appartient pas de commenter.
Désormais, il nous faut, et vous l’avez dit, tirer les conséquences de ce qui s’est passé dans ce dossier et des manquements graves qui ont été constatés à la fois par la commission d’enquête du Sénat et par l’inspection générale de l’administration.
Ces faits sont inacceptables, et il nous appartient maintenant de faire tout ce qu’il faut pour sécuriser nos procédures et mettre en œuvre l’ensemble des préconisations de l’inspection générale de l’administration et les recommandations de la commission d’enquête du Sénat.
Mais il nous appartient aussi, ainsi que vous l’avez souligné, de sécuriser la politique publique de lutte contre les séparatismes.
Je voudrais également rappeler que sur les dix-sept associations qui ont été lauréates du fonds Marianne, quinze ont fait un travail absolument remarquable contre ceux qui s’attaquent à nos valeurs, contre ceux qui considèrent que les lois de la religion sont supérieures à celles de la République.
Pour que ces associations puissent continuer à nous accompagner dans le combat, nous devons les soutenir et faire la part des choses entre les manquements, aussi graves soient-ils, qui ont été constatés et notre engagement sur le sujet. Je suis convaincue que vous partagez cet engagement ; nous devons lutter ensemble contre ces ennemis de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. David Assouline. Et Marlène Schiappa ?
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour la réplique.
M. Rémi Féraud. Madame la secrétaire d’État, nous partageons les objectifs de lutte contre la propagande islamiste, mais votre réponse n’est pas convaincante. Vous parlez de réactivité et de transparence, mais quelles conséquences politiques tirez-vous de cette affaire ?
Après la révélation du scandale du fonds Marianne, la Première ministre avait jugé qu’il n’était « pas nécessaire » de se séparer de la ministre concernée. Pourtant, disons-le, dans n’importe quel autre pays européen, Mme Schiappa aurait déjà démissionné du Gouvernement.
M. François Bonhomme. Où est-elle, d’ailleurs ?
M. Rémi Féraud. Il y a eu dans cette affaire beaucoup d’irresponsabilité. Il est temps de faire prévaloir le principe de responsabilité politique : c’est une exigence démocratique et républicaine ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
moyens aériens des services départementaux d’incendie et de secours
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Cuypers. Madame la ministre, en place en Seine-et-Marne, un hélicoptère Dragon de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises a été déplacé. Il faisait l’objet d’une expérimentation de délocalisation de la flotte parisienne depuis 2018. Déployé dans un rayon de cent kilomètres, il assurait pour la région d’Île-de-France et les départements limitrophes la sécurité de plus de quinze millions de nos concitoyens.
Quelle est la politique du Gouvernement pour assurer la continuité d’un service de secours rapide et efficace, en Seine-et-Marne et sur l’ensemble du territoire national ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Cuypers, les moyens nationaux sont déployés ou prépositionnés dans les secteurs où ils sont le plus utiles, à savoir les milieux où la présence d’un hélicoptère apporte une réelle plus-value, soit par des gains de délai d’intervention, soit en raison de l’inaccessibilité des lieux d’intervention par des moyens routiers ou terrestres.
Les milieux montagneux et côtiers sont donc privilégiés. Les variations saisonnières de population dans les secteurs touristiques ont également influé sur les implantations. Nous sommes toutefois conscients de la nécessité de faire évoluer notre dispositif en permanence pour mieux l’adapter aux risques et sans doute mieux le coordonner avec les autres moyens aériens dont nous disposons, de la gendarmerie ou du service d’aide médicale urgente (Samu).
La Première ministre a demandé au député Pierre Morel-À-L’Huissier de lui rendre un rapport d’ici à la fin de décembre 2023 sur les conditions d’engagement et d’intervention des moyens héliportés. Nous nous appuierons sur ce rapport pour faire évoluer ces implantations de la manière la plus pertinente et la plus consensuelle possible.
En ce qui concerne plus précisément l’hélicoptère qui avait été placé sur la base de Melun dans le cadre d’une expérimentation, le choix a été fait de le retirer compte tenu des contraintes de disponibilité auxquelles est soumise la flotte nationale dans son ensemble, pour le placer momentanément à un autre endroit.
Les moyens supplémentaires que vous avez adoptés dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi) vont toutefois nous permettre d’augmenter la disponibilité de ces engins, puisque nous allons renouveler intégralement la flotte. Dès que nous aurons retrouvé notre capacité, sans doute au début de l’année prochaine, un hélicoptère sera réaffecté à la base de Melun, l’expérimentation, comme vous l’avez dit, monsieur le sénateur, ayant été concluante.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.
M. Pierre Cuypers. Sincèrement, madame la ministre, vous semblez ignorer la situation telle qu’elle est. Certes, le parc global des hélicoptères de la sécurité civile en France est légèrement supérieur à trente-six appareils, mais cinq se sont crashés depuis 2003 et aucun n’a été remplacé. Douze autres sont cloués au sol par manque de pièces détachées. Notez aussi la défaillance du contrat de maintien des conditions opérationnelles : la durée des visites de maintenance est passée de douze à vingt-deux semaines.
De plus, la découverte de fissures sur la queue de cinq appareils les rend indisponibles pour l’été 2023. La dégradation du maintien opérationnel de la flotte engendre depuis plus de deux ans des fermetures régulières de base.
Enfin, l’externalisation de l’entretien n’a fait l’objet d’aucune anticipation afin de tenir compte des éléments que je viens d’évoquer.
Alors, voilà la réalité, madame la ministre : la sécurité civile n’est pas, et ne sera pas au rendez-vous de la saison estivale 2023, et vous en porterez toute la responsabilité au détriment de la sécurité de l’ensemble de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Salutations à un sénateur