M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 196 rectifié.
Mme Véronique Guillotin. En ce qui concerne la qualification des personnes en recherche d’emploi, il serait souhaitable que les conventions fassent l’objet d’une négociation plutôt que d’une concertation. La différence peut paraître ténue, mais les mots ont leur importance.
De fait, sur un enjeu majeur comme celui de la qualification des personnes en recherche d’emploi, une négociation nous paraît bien plus adaptée qu’une concertation au rôle que peut jouer la région.
M. le président. La parole est à M. Alain Duffourg, pour présenter l’amendement n° 235 rectifié bis.
M. Alain Duffourg. Sur enjeu aussi important que la qualification des personnes en recherche d’emploi, une simple concertation ne paraît pas suffisante.
En 2018, les échanges entre l’État et les régions qui ont présidé à la première génération des pactes régionaux d’investissement dans les compétences ont du reste relevé d’une véritable négociation.
Il convient donc de substituer le mot « négociation » au mot « concertation » dans le présent article.
M. le président. La parole est à M. Alain Cadec, pour présenter l’amendement n° 343 rectifié ter.
M. Alain Cadec. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 411 rectifié.
Mme Corinne Féret. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 563.
Mme Raymonde Poncet Monge. Depuis quelque temps, le législateur a tendance à remplacer les renvois à la négociation par des renvois à des concertations. Il s’agit désormais d’une tendance lourde.
La rédaction proposée permet certes une avancée, puisque dans sa rédaction actuelle, le code du travail ne prévoit ni concertation ni négociation formelle, ce qui constitue en soi une anomalie, mais si l’objectif de cette modification est de respecter les compétences des régions en matière de formation, il semble logique de permettre une réelle négociation afin que ces dernières puissent exercer la compétence qui est la leur avec l’État.
En outre, en 2018, à l’occasion de la première génération des pactes régionaux d’investissement dans les compétences, les discussions entre l’État et les régions ont relevé d’une véritable négociation.
L’enjeu étant important, il convient de bien nommer les choses, mes chers collègues. Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons nous aussi ce changement de vocabulaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. La commission partage le souci de respecter les prérogatives des régions dans le domaine de la formation professionnelle.
Cependant, au regard du droit et de la jurisprudence en la matière, le choix du mot « négociation » à la place du mot « concertation » n’emporte pas en l’état de conséquences juridiques. De ce fait, la disposition proposée ne permet pas de résoudre la difficulté soulevée par les auteurs de ces amendements identiques.
En effet, si la négociation renvoie au dialogue avec les représentants syndicaux des salariés et des employeurs, dans le domaine des relations entre l’État et les collectivités, c’est la concertation qui s’impose. De ce fait – j’y insiste –, ce changement de mot ne renforcerait pas la compétence des régions en la matière.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Comme Mme la rapporteure l’a indiqué, un changement de mot ne changerait rien au droit. En revanche, cela pourrait induire une forme de confusion, en donnant à croire, à tort, que le mot « négociation » emporterait un renforcement des prérogatives des régions.
Dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences, l’État apporte un financement additionnel aux régions pour l’exercice de leur compétence, comme il l’a fait pour la première génération de Pric.
L’immense majorité des régions ont alors conclu une convention avec l’État, à l’exception de deux d’entre elles. Dans ces deux régions, l’État a fait le choix de mettre en œuvre le plan d’investissement dans les compétences en parallèle de l’exercice des compétences régionales, en s’appuyant sur Pôle emploi.
Afin de ne pas introduire de confusion, je demande le retrait de ces amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 33, 196 rectifié, 235 rectifié bis, 343 rectifié ter, 411 rectifié et 563.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 597, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- Après les mots : « besoins de compétences », sont insérés les mots : « , ainsi que des formations réalisées exclusivement à distance » ;
La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. La commission a fait le choix de supprimer une disposition qui permettait de sécuriser la pratique de Pôle emploi depuis quelques années consistant à acheter des formations ouvertes à distance (FOAD).
Celles-ci sont gratuites et ouvertes, c’est-à-dire qu’elles sont proposées à tous les demandeurs d’emploi dans le cadre d’un projet professionnel et elles sont suivies uniquement à distance par les demandeurs d’emploi volontaires.
Ce dispositif, instauré par Pôle Emploi lors de la crise sanitaire, mérite d’être sécurisé juridiquement. Il n’enlève rien aux compétences des régions, qui, dans le cadre de leurs propres politiques de formation, peuvent elles aussi proposer des formations ouvertes à distance.
Tel est l’objet de cet amendement de rétablissement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. La création d’un marché national de formations ouvertes à distance risque de conduire à négliger la spécificité des besoins de chaque territoire et, ainsi, de contribuer à une moindre cohérence de l’offre de formation à l’échelle de la région.
Par ailleurs, elle peut conduire à une mauvaise prise en compte de l’offre de formation à distance qui préexiste dans les régions et aboutir à des doublons préjudiciables pour les finances publiques.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, nous avons à cœur de partir des besoins du terrain, ce qui n’empêche pas, bien au contraire, d’opérer des mutualisations dans un second temps.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. Je précise que ces formations à distance ne se substitueraient pas aux programmes mis en place par les régions, en fonction des priorités régionales et en adéquation avec les besoins de leur territoire. Certaines régions font le choix de décentraliser la décision jusqu’au niveau des comités de bassin d’emploi, d’autres prennent ces décisions à l’échelle régionale.
Ces formations ouvertes à distance constituent une offre complémentaire, en sus de ce que propose chacune des régions, accessible à tous les demandeurs d’emploi.
J’ajoute que la sécurisation d’un marché national de Pôle emploi permettrait le développement d’une offre de formations souveraine. Les formations proposées par les organismes agréés par Pôle emploi présentent en outre des garanties de qualité, ce qui constitue une sécurité pour les demandeurs d’emploi qui s’y inscrivent.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 524, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à supprimer les modifications introduites aux alinéas 5 et 6 du présent article pour l’article L. 6122-1 du code du travail, qui oriente les politiques de formation, en particulier au profit « de jeunes sortis du système scolaire sans qualification », « des personnes à la recherche d’emploi disposant d’un niveau de qualification inférieur ou égal au baccalauréat » et des « personnes en situation d’illettrisme ».
Ces orientations relativement vertueuses témoignaient d’un souci d’améliorer la qualification des personnes ayant un faible niveau de diplôme afin de leur permettre d’accéder à des emplois plus qualifiés et de sortir de la trappe à faible qualification et à précarité que l’accroissement du nombre d’emplois précaires et peu qualifiés contribue à créer.
Or ces orientations sont remplacées par une philosophie adéquationniste, en phase avec les préoccupations du Gouvernement concernant l’appariement des travailleurs et des emplois vacants dans les secteurs en tension.
L’article 7 modifie ainsi les orientations de la politique de formation sans s’attaquer aux véritables problèmes que constituent la dégradation des conditions de travail et le faible niveau de qualification.
En n’incitant pas les employeurs à améliorer les conditions de travail et le niveau de qualification, nous n’augmentons pas, d’un point de vue macroéconomique, la productivité de la France.
Afin de revenir à des orientations plus opportunes, nous proposons donc de rétablir l’article L. 6122-1 dans sa version initiale.
M. le président. L’amendement n° 490, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer les mots :
en tenant compte des besoins des entreprises notamment de celles qui rencontrent des difficultés particulières de recrutement
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Dans la continuité des propos de ma collègue Raymonde Poncet Monge, je souhaite à mon tour dénoncer la conception adéquationniste du Gouvernement, conception qu’illustre notamment l’alinéa 6 du présent article.
Vous souhaitez en effet, monsieur le ministre, modifier la rédaction de l’article L. 6122-1 du code du travail, pour préciser que la mise en œuvre du programme national de formation professionnelle doit tenir compte des besoins des entreprises.
Votre priorité est non pas d’accompagner les personnes les plus éloignées de l’emploi, mais de fournir de la main-d’œuvre au patronat.
Toutes les sanctions sont conçues dans l’unique objectif de contraindre des personnes sans emploi à accepter les propositions du Mouvement des entreprises de France (Medef).
Vous vous préoccupez moins de la précarisation de la société que de la disponibilité d’un vivier de personnels susceptible de satisfaire les besoins des entreprises.
Tout cela ne nous surprend pas et s’inscrit pleinement dans la logique que vous développez depuis le début de l’examen de ce projet de loi, monsieur le ministre.
Cette logique fait par ailleurs écho à celle qui préside à la réforme du lycée professionnel, qui prévoit la suppression des filières jugées non rentables et l’ouverture de nouvelles filières dans les secteurs voulus par le patronat.
Comment, par ailleurs, ne pas faire le parallèle avec le futur projet de loi relatif à l’immigration, qui permettra la régularisation des sans-papiers uniquement dans les secteurs en tension ?
Vous accolez dans une même phrase les besoins additionnels de qualification des personnes en recherche d’emploi à ceux des entreprises.
Jamais vous ne vous interrogez sur les causes des pénuries de main-d’œuvre, à savoir les conditions de travail et de rémunération. Jamais vous ne vous interrogez sur les besoins des salariés. Le besoin d’un haut niveau de qualification dans la société n’est clairement pas votre objectif.
Parce que nous refusons votre vision minimaliste et court-termiste, nous espérons que notre amendement sera voté.
M. le président. L’amendement n° 127 rectifié, présenté par MM. Chasseing et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Menonville, A. Marc, Grand et Wattebled et Mme Paoli-Gagin, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa avec les mots :
après concertation avec les organisations de salariés et les organisations d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Je propose, pour ma part, non pas de supprimer l’alinéa 6, mais de le compléter.
Chaque année entre 2018 et 2022, 1,5 milliard d’euros ont été fléchés par voie réglementaire vers le financement du plan d’investissement dans les compétences et ses déclinaisons régionales. Ce sont autant de ressources en moins pour la formation continue des salariés, sur le déploiement desquelles les autres parties prenantes, les partenaires sociaux en premier lieu, n’ont pas pu donner leur avis.
Alors que tous les secteurs d’activité sont confrontés à de fortes tensions de recrutement et que le budget de France compétences est en déficit structurel, il est primordial d’associer toutes les parties prenantes.
Il est légitime que les organisations syndicales et patronales représentatives à l’échelon national et interprofessionnel puissent donner leur avis sur des orientations stratégiques qui les concernent, ainsi que leurs adhérents, au premier chef. Elles connaissent les besoins en compétences des entreprises et les attentes des actifs, et sont donc en mesure d’éclairer les décisions des pouvoirs publics et de prendre une part active au déploiement et à l’évaluation de toutes les politiques publiques en matière de formation professionnelle, qu’elle soit initiale ou continue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 524 et 490. La modification du droit existant permet de recentrer l’offre de formation proposée aux demandeurs d’emploi sur les compétences recherchées par les entreprises, en particulier celles qui connaissent des difficultés de recrutement – je crois que nous en connaissons tous, mes chers collègues.
La mention des besoins des entreprises est de nature à renforcer l’efficience de la dépense publique, à faciliter l’insertion des demandeurs d’emploi sur le marché du travail et à soutenir le développement des entreprises des secteurs en tension.
Par ailleurs, l’extension des conventions État-région à l’ensemble des demandeurs d’emploi, alors que celles-ci portent actuellement sur les seuls demandeurs d’emploi disposant d’un diplôme inférieur ou égal au baccalauréat, prend en compte les mutations du marché du travail. Elle permet notamment de répondre aux transitions de certains secteurs et aux difficultés d’insertion des personnes dont les diplômes sont peu ou mal reconnus sur le marché du travail.
La commission émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 127 rectifié.
S’il est essentiel que les conventions État-région prennent en compte les besoins des entreprises en matière de formation des demandeurs d’emploi, comme le prévoit le projet de loi, la concertation avec les organisations représentatives ne paraît pas nécessaire.
En effet, la région, dans le cadre de sa compétence en matière de formation professionnelle, se concerte déjà avec les différentes branches au sein des Crefop.
Il ne paraît donc pas souhaitable de complexifier et de rigidifier la mise en place de ces conventions, dans la mesure où le travail effectué par les Crefop est unanimement salué.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Daniel Chasseing. Je retire l’amendement n° 127 rectifié, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 127 rectifié est retiré.
L’amendement n° 44 rectifié quater, présenté par M. Babary, Mmes Berthet et Blatrix Contat, MM. Canévet et Bouchet, Mme Chain-Larché, MM. Le Nay, Segouin et Meurant, Mme Billon, MM. Chasseing, Duffourg, Klinger, D. Laurent, Moga, Rietmann, Bouloux, Sautarel et Burgoa, Mmes Chauvin, F. Gerbaud et Lavarde, MM. Tabarot et Lefèvre, Mme Thomas, M. Perrin, Mme Dumont, M. Mandelli, Mmes Imbert et Lassarade, MM. Genet, Brisson, Belin, B. Fournier, Sol, Chaize et Pellevat, Mme Garriaud-Maylam, MM. J.B. Blanc et Cuypers, Mme Muller-Bronn, MM. Charon, Chevrollier et Reichardt, Mme Raimond-Pavero, M. Chatillon, Mmes Lopez, Belrhiti et Boulay-Espéronnier, M. Somon, Mme Di Folco et M. Rapin, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le b du 3° de l’article L. 6123-5 est complété par les mots : « , dans la limite d’un montant fixé chaque année par le conseil d’administration de France compétences » ;
La parole est à Mme Martine Berthet.
Mme Martine Berthet. Le premier plan d’investissement dans les compétences est désormais arrivé à son terme. Doté de 14 milliards d’euros, il a permis d’expérimenter, en lien avec les régions, de nouvelles actions et de nouveaux dispositifs de formation au profit des demandeurs d’emploi et des personnes éloignées de l’emploi. Bien que son bilan soit mitigé, un second plan d’investissement dans les compétences est annoncé par le Gouvernement.
Pour boucler le financement du premier plan, le Gouvernement a fait le choix de ponctionner les fonds transitant par France compétences et issus des contributions perçues auprès des entreprises via des fonds mutualisés.
Or ces fonds financent des actions absolument essentielles pour la formation initiale et continue des Français, en particulier l’apprentissage et les plans de développement des compétences au sein des entreprises.
Mise sous tension budgétaire et fortement endettée, France compétences est aujourd’hui en difficulté, le robinet de l’emprunt commençant à se tarir et les rallonges de l’État, à hauteur de 14 milliards d’euros depuis 2020, n’offrant plus de solution pérenne.
Le présent amendement vise donc à garantir que la mise en œuvre d’un second PIC ne contribuera pas à dégrader encore le modèle de financement de la formation professionnelle.
Il tend ainsi à prévoir que le prélèvement sur les ressources de France compétences au profit du PIC ne pourra désormais pas dépasser un plafond fixé annuellement par le conseil d’administration de France compétences.
La formation des demandeurs d’emploi ne doit pas être financée au détriment de l’apprentissage ou de la formation continue.
Cet amendement est issu des travaux de la délégation sénatoriale aux entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Cet amendement vise à concrétiser une proposition formulée dans un rapport d’information, adopté par la commission des affaires sociales du Sénat en juin 2022, intitulé France compétences face à une crise de croissance.
Les dispositions qu’il tend à introduire permettent de distinguer les dispositifs apportant des réponses concrètes aux besoins de compétences des entreprises, que peuvent financer les contributions des employeurs, et les priorités d’ordre national relevant de la responsabilité de l’État, qui devraient être financées par l’impôt.
Si le plein emploi suppose de rapprocher du travail les personnes qui en sont éloignées, le maintien dans l’emploi est essentiel afin de ne pas voir le taux de chômage augmenter à la faveur d’un retournement de la conjoncture économique ou des évolutions des différents secteurs.
Pour que l’action menée en faveur de ces deux parties de la population active soit équilibrée, la formation professionnelle des demandeurs d’emploi ne doit pas avoir un effet d’éviction du financement au détriment de la formation continue et de l’apprentissage.
Afin d’assurer que cette répartition demeure équilibrée, il est donc proposé, par le présent amendement, que le conseil d’administration de France compétences, qui inclut l’État, les régions, les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives et des personnalités qualifiées, puisse fixer annuellement le plafond des fonds affectés à l’État pour la formation des demandeurs d’emploi.
À la suite des travaux de la délégation sénatoriale aux entreprises, nombreux sur cette question, vous avez défendu plusieurs amendements tout aussi importants, ma chère collègue, mais dont l’adoption dans ce projet de loi n’était pas toujours opportune.
J’estime en revanche que la présente proposition est essentielle pour garantir un équilibre entre la formation des demandeurs d’emploi, dont les entreprises ont besoin, et la formation continue et l’apprentissage, qui permettent le maintien dans l’emploi. Nous en avons besoin alors que nous avons connu beaucoup de plans sociaux.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Dans le cadre des derniers projets de loi de finances, le Gouvernement a devancé la demande de la délégation aux entreprises. Le montant du fonds de concours que vous évoquez, madame la sénatrice, qui s’élevait à 1,6 milliard d’euros par an, a en effet été ramené à 800 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2023. Cette division par deux atteste de la volonté du Gouvernement de plafonner et de rebudgétiser les crédits consacrés à la formation.
Ensuite, ce fonds de concours n’a pas empêché le développement de l’apprentissage. Les moyens qui y sont consacrés sont extrêmement importants : ils s’élèvent à plus de 16 milliards d’euros par an. Le Gouvernement a d’ailleurs proposé au Parlement, qui l’a accepté, de voter une subvention d’équilibre de l’État à France compétences.
Il serait du reste quelque peu paradoxal qu’un organisme financé à la fois par des prélèvements fiscaux – la contribution unique à la formation professionnelle et à l’apprentissage (Cupfa) – et par une dotation versée par l’État sous forme de subvention soit en capacité de limiter le fonds de concours dont bénéficie l’État.
La maquette du financement de la formation, notamment la détermination du niveau du fonds de concours, relève enfin de la loi de finances – le budget pour 2023 en est l’illustration. Or je n’imagine pas que la délibération d’un conseil d’administration, au sein duquel siège l’État, ainsi que d’autres acteurs, puisse s’imposer à la loi de finances votée par le Parlement. Je m’interroge donc sur la portée effective des dispositions proposées.
Pour ces trois raisons, l’avis est défavorable.
M. le président. L’amendement n° 608, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer les mots :
contrat d’engagement
par les mots :
contrat d’engagement réciproque
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise, une nouvelle fois, à réintroduire le mot « réciproque » après les mots « contrat d’engagement ». Cet abandon sémantique n’a en effet rien d’anodin.
Nous pensons que le langage doit rendre justice à la complexité du réel. En conséquence, nous défendons l’instauration d’un contrat « réciproque » – si cela n’est pas justifié, pourquoi ce contrat était-il réciproque jusqu’à aujourd’hui ? –, car la situation sociale de l’allocataire du revenu de solidarité active (RSA) est le fruit d’une structure économique et sociale dont la société est pour partie responsable et doit rendre compte.
Le choix retenu – faire peser implicitement l’ensemble du contrat sur les allocataires – participe d’un mouvement sémantique de plus en plus prononcé vers la culpabilisation des plus précaires. Ces derniers seraient un peu, et même largement, responsables de leur situation, alors qu’ils subissent souvent les conséquences du maintien de structures économiques et sociales profondément inégalitaires. Sinon, comment expliquer qu’en France l’on reste pauvre sur plusieurs générations ? À l’évidence, il ne s’agit pas d’une simple affaire individuelle.
Cette évolution contribue à diviser les populations : le pauvre n’est pas perçu comme une personne qu’il faut soutenir. Il conviendrait au contraire de le mobiliser, de l’actionner ou de l’activer. Le collectif, qui devrait pourtant lui venir en aide, n’est pas convoqué.
Ce glissement sémantique s’inscrit dans un mouvement de fond, qui renverse les responsabilités. À notre sens, le terme « réciproque » doit être conservé.
Il faut le dire : en maintenant la réciprocité, l’on maintient la solidarité. Face à la pauvreté, nous devons engager une lutte collective, non une chasse à l’individu « paresseux », voire « fraudeur ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Je l’ai déjà indiqué plusieurs fois à notre collègue : implicitement, le contrat est bien sûr réciproque. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 413 rectifié est présenté par Mmes Féret, Poumirol, Le Houerou, Meunier et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mme Rossignol, MM. Gillé, Redon-Sarrazy et Devinaz, Mmes Artigalas et Monier, M. Houllegatte, Mme Harribey, MM. Tissot, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, M. Filleul et Van Heghe, M. Pla et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 525 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 10 à 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 413 rectifié.
Mme Corinne Féret. Nous proposons de conserver dans sa rédaction actuelle la dernière phrase de l’article L. 6326-1 du code du travail.
Cette phrase prévoit que le contrat de travail que l’employeur et le demandeur d’emploi peuvent conclure à l’issue de la formation, dans le cadre d’une préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI), est un « un contrat à durée indéterminée, un contrat de professionnalisation d’une durée minimale de douze mois, un contrat d’apprentissage ou un contrat à durée déterminée d’une durée minimale de douze mois. »
Il n’y a pas lieu de renvoyer à un décret pour préciser la nature et la durée des contrats pouvant être conclus à l’issue de la formation, surtout si cette méthode conduit à une baisse de la qualité des contrats proposés.