M. Henri Cabanel. Les recours contentieux sont l’une des principales sources de retard dans le développement des projets industriels et des projets d’énergies renouvelables. Si des mesures législatives et réglementaires peuvent permettre de réduire les délais de traitement des contentieux, il est également nécessaire de limiter à leur source les recours contentieux.

Nous proposons donc de sanctionner les recours abusifs, en nous inspirant de l’article 80 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, concernant les contentieux en urbanisme.

En effet, dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis de construire, la loi Élan permet à ce dernier de demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l’auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts.

Cette mesure constituait l’une des propositions formulées par les pilotes pour le présent projet de loi. Ainsi, leur rapport note : « Certains porteurs de projets sont très inquiets des délais de contentieux possibles, dont la durée se compte en années et dépasse largement les durées de procédure, au point de renoncer purement et simplement aux projets qui font l’objet d’un contentieux sans en attendre l’issue. La durée des contentieux devient un critère déterminant pour les choix de pays d’implantation. » Ils insistent par conséquent sur la nécessité de prendre des « mesures permettant de rendre plus prévisible l’évolution des contentieux et d’en réduire partiellement la durée » afin de permettre à plus de projets d’industrie verte de s’installer en France.

M. le président. L’amendement n° 169 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 198 rectifié ter.

Mme Annick Billon. Ce nouvel amendement de M. Marseille a également pour objet de renforcer l’attractivité et la compétitivité de notre pays, ainsi que d’apporter une réponse aux enjeux climatiques.

Au-delà des délais liés aux contentieux, il convient également de limiter le risque de recours abusifs liés aux autorisations environnementales. La reconnaissance et la sanction des recours abusifs figurent déjà dans le code de l’urbanisme, à son article L. 600-7. Le bénéficiaire d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir peut ainsi demander au juge administratif de condamner l’auteur d’un recours pour excès de pouvoir mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif à lui allouer des dommages et intérêts.

Par le présent amendement, nous souhaitons étendre ce dispositif aux autorisations environnementales nécessaires à la réalisation d’un projet industriel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Peut-être conviendrait-il, à cet instant de notre discussion, de relire Paul Éluard, selon lequel « il faut toujours abuser de sa liberté ». (Exclamations élogieuses sur les travées du groupe Les Républicains.)

Sans aller jusque-là, nous pourrions sans doute nous retrouver autour des arguments développés en justification de ces amendements. En effet, un certain nombre d’entreprises connaissent de telles préoccupations et souhaiteraient donc que soient limités les délais contentieux liés à des recours abusifs. D’ailleurs, nous avons déjà rappelé dans la discussion générale qu’une action pourrait être menée en la matière par le Gouvernement par son pouvoir réglementaire.

Néanmoins, la rédaction proposée nous semble difficile à mettre en œuvre. Certes, vous avez rappelé que cette possibilité existe en droit de l’urbanisme, à l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme. Force est de constater pourtant que cette disposition est peu efficace : les condamnations sont particulièrement rares. Le caractère abusif du recours ainsi que l’existence d’un préjudice doivent être prouvés par le requérant ; en outre, le juge concilie cette disposition avec le principe constitutionnel du droit au recours effectif. Cette disposition semble par ailleurs ne pas avoir d’effet dissuasif sur les éventuels requérants abusifs. Une association qui dispose de moyens juridiques pour effectuer ce type de recours dispose aussi de moyens suffisants pour constater que le caractère abusif du recours est très difficile à prouver.

Dès lors, il ne me paraît pas judicieux de transposer dans le droit de l’environnement une disposition qui apparaît déjà inefficace dans le droit de l’urbanisme.

Je le répète, en matière de procédures contentieuses, il y a matière à se pencher sur les délais contentieux, dans le cadre des possibilités offertes au Gouvernement dans l’exercice de son pouvoir réglementaire.

Au vu de ces observations, la commission demande le retrait de l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. J’entends les arguments de M. le rapporteur pour avis. Je ne me permettrais pas de citer un poète, mais j’évoquerai un cinéaste, Billy Wilder, auteur de Sept Ans de réflexion. Sept ans, c’est la durée maximale qu’atteignent, trop souvent, ces recours dits « abusifs ».

Il faut reconnaître que les juges sont parfois frileux quand on leur demande de reconnaître le caractère abusif de ces recours. Il n’en reste pas moins que le Gouvernement est favorable à l’extension de ce dispositif. Ce serait un signal envoyé aux investisseurs, mais aussi, peut-être, à celles et à ceux qui ont parfois tendance à utiliser les possibilités de recours de manière abusive.

Enfin, ce serait aussi un signal adressé à l’administration pour qu’elle agisse un peu plus vite et un peu mieux. Nous pouvons évidemment examiner, avec le ministère de la justice, notre capacité collective à accélérer le traitement de ces contentieux.

Toujours est-il qu’il me paraît important que ces dispositions puissent figurer dans la loi. L’avis du Gouvernement sur ces amendements est donc favorable.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.

M. Stéphane Sautarel. N’ayant pas pu présenter l’amendement n° 58 rectifié bis, je veux exposer quelques arguments en sa faveur, tout en me réjouissant de la position favorable de M. le ministre à son égard.

Cette mesure, qui viendrait transcrire dans le droit de l’environnement ce que la loi Élan a inscrit dans le code de l’urbanisme, permettrait d’envoyer un signe aux investisseurs et de les rassurer. Certes, il conviendra d’être prudent dans son application et de s’assurer de sa bonne mise en œuvre, mais je veux m’adresser à notre rapporteur pour avis pour qu’il veuille bien nous permettre d’entreprendre cette expérimentation. Ainsi, un autre poète, René Char, nous invite à imposer notre chance… (Sourires.)

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Et à aller vers notre risque ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. Sans vouloir abuser de notre liberté, nous entendons tout de même user de notre liberté d’amendement : au vu de l’avis favorable du Gouvernement, nous maintenons notre amendement.

M. le président. Voilà bien des citations poétiques sur un sujet qui ne l’est pas vraiment… (Sourires.)

Je mets aux voix l’amendement n° 58 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 124 rectifié et 198 rectifié ter.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 242, présenté par Mmes Cukierman et Varaillas, MM. Gay, Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 51

Après le mot :

environnementale

insérer les mots :

pour des projets situés sur des espaces en friche commerciale, industrielle ou militaire, au sens de l’article L. 111-26 du code de l’urbanisme,

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à réserver les facilitations prévues à l’article 2 pour les procédures d’instruction aux friches, dans leur ensemble.

On recense 8 300 friches, qui représentent entre 90 000 et 150 000 hectares – la différence est presque du simple au double. Il convient donc d’achever leur recensement, mais aussi de proposer des mesures concrètes et incitatives, de manière à les résorber, dans une trajectoire fixée selon des objectifs de réussite.

Nous proposons d’y contribuer par cet amendement : cibler des sites industriels, militaires ou commerciaux est un moyen de favoriser une procédure plus rapide pour des projets qui s’installeraient dans des espaces déjà familiarisés avec des sites de production, où l’acceptation des riverains serait plus facile, voire majoritairement acquise, et où les enjeux environnementaux ont déjà été intégrés par les implantations précédentes.

Dans un texte censé être relatif à l’industrie verte, les aménagements apportés à la législation gagneraient à être plus vertueux et à mieux tenir compte de l’environnement. La relocalisation est indispensable pour retrouver une souveraineté, mais aussi, d’un point de vue écologique, pour réduire les transports, rapprocher les producteurs des consommateurs et – pourquoi pas ? – recycler des friches plutôt que de donner la prime à l’artificialisation. C’est ce que nous proposons de faire au travers de procédures d’instruction accélérées pour les projets situés sur des friches.

M. le président. L’amendement n° 241, présenté par Mmes Cukierman et Varaillas, MM. Gay, Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 51

Après le mot :

environnementale

insérer les mots :

pour des projets situés sur des espaces en friche commerciale, industrielle ou militaire, au sens de l’article L. 111-26 du code de l’urbanisme, depuis plus de dix ans,

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Par cet amendement, qui pourrait être considéré comme un amendement de repli par rapport au précédent, nous proposons de concentrer les efforts sur les friches les plus anciennes.

Un enjeu nous occupe tous et nous occupera jusqu’à la fin de la session extraordinaire qui va s’ouvrir dans quelques jours : l’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN) des sols. À nos yeux, nous manquons d’ailleurs toujours de soutien de la part du Gouvernement dans notre effort pour ne pas pénaliser les collectivités et redonner un sens positif à la transition écologique pour tous les territoires, quelles que soient leur strate, leur localisation et leur population.

Si nous voulons redynamiser nos territoires sans artificialiser davantage dans les dix ou vingt prochaines années, nous aurons besoin de nous appuyer sur l’utilisation des friches, en particulier des friches anciennes.

Nous proposons donc, dans cet amendement, de réserver les procédures accélérées aux projets qui s’implanteraient sur des friches anciennes. On offrirait ainsi un soutien intéressant aux porteurs, qui pourraient arbitrer le choix de leur implantation en tenant compte des coûts économisés par un démarrage plus rapide de leur activité rendu possible par le réemploi d’une friche et les délais d’instruction raccourcis.

Pour la collectivité, c’est également une économie de foncier supplémentaire, alors que celui-ci va se raréfier. Ce sera surtout un atout pour soutenir le développement économique de ces territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Nous sommes d’accord – vous le savez très bien, ma chère collègue – quant à l’importance de la reconquête des friches industrielles. Pour autant, limiter l’application de l’article 2 à ces friches, ou aux plus anciennes d’entre elles, apparaît contraire à l’objectif plus global d’accélération de la réindustrialisation, qui exige de mobiliser l’ensemble des terrains disponibles et non pas seulement les friches.

Par ailleurs, les friches, en particulier les plus anciennes, sont souvent concentrées géographiquement autour des villes, ce qui peut susciter diverses difficultés, notamment logistiques, pour l’accueil de nouvelles industries.

Vos propositions, ma chère collègue, ne nous paraissent donc pas de nature à permettre l’accélération de la reconquête des friches, tout en limitant par trop le champ d’application de l’article 2.

C’est pourquoi, à regret, j’émets au nom de la commission un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis.

Madame la sénatrice, si l’on favorise les zones qui disposent de friches industrielles, on pénalise celles qui en sont dépourvues, ce qui serait contraire à l’égalité des territoires devant l’industrialisation.

Vous avez raison, il faut favoriser l’utilisation des friches. La Banque des territoires consacrera ainsi 1 milliard d’euros à la mise à niveau de 2 000 hectares de friches. En revanche, les délais d’instruction des procédures doivent être les mêmes pour tout le monde. Nous souhaitons accélérer la réindustrialisation de tous les territoires, qu’ils aient des friches ou non.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le ministre, je crois que nous n’avons pas la même définition de l’égalité des territoires ! Un territoire ne s’aménage pas en un an, ni loi après loi ! Si l’on permet à tous les projets de bénéficier de l’accélération des procédures, on va faciliter la réindustrialisation de certains territoires, mais on laissera en l’état des friches et des verrues à d’autres endroits, et pas seulement en zone urbaine.

Pendant plus de dix ans, j’ai participé à la gestion des fonds européens dans le Massif central : les vingt-deux départements qui le composent ne sont, si l’on omet les grandes préfectures, guère urbanisés ; or ils abritent de nombreux terrains en friche ou laissés à l’abandon, pour de multiples raisons – décès du propriétaire, spéculation, pollution, etc. Ces vieux territoires industriels, qui ont fait la grandeur de la France, risquent, si nous ne faisons rien, d’être les grands oubliés de la réindustrialisation.

Il convient de définir des trajectoires, et non simplement de fixer des objectifs quantifiés à l’horizon d’un an ou deux. Il est urgent de réindustrialiser, mais veillons à ne pas aggraver les différences entre les territoires.

Je ne souhaiterais pas que le département de la Loire soit le cocu de cette réforme – pardonnez-moi d’utiliser cette expression, mais je m’exprime avec passion. Ce département doit faire face aux difficultés liées à son passé industriel et n’est pas en mesure d’accueillir, du moins pas autant que d’autres territoires, des industries immédiatement dans le cadre du plan en faveur de l’industrie verte. La question des friches doit être résolue, sinon ce département finira par se replier sur lui-même, subissant les effets de la désindustrialisation, tout en étant, en application du ZAN, dans l’incapacité de procéder à des aménagements.

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Je suis très sensible au discours de Cécile Cukierman. Nous avons tous des friches dans nos territoires.

Comme me le faisait remarquer mon collègue Louis-Jean de Nicolaÿ, il est plus coûteux, pour une entreprise, de s’installer dans une friche qu’ailleurs. Il ne serait donc pas illégitime que, pour compenser, l’implantation puisse être plus rapide.

L’État aide beaucoup les collectivités par le biais du fonds friches, qui dépend du fonds vert. Je suis inquiète, car ce dernier a été amputé cette année de 1 milliard d’euros, sur les 2 milliards d’euros dont il disposait, pour compenser le manque à gagner des départements dû à la suppression de la moitié la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Cette dernière doit disparaître intégralement en 2024. Si vous procédez à une nouvelle ponction de 1 milliard l’année prochaine, le fonds vert sera asséché et ne pourra plus financer le fonds friches.

Enfin, j’ai bien entendu l’explication de notre rapporteur sur l’amendement n° 242. La rédaction proposée est réductrice et aboutit à restreindre le champ d’application de l’article 2. Pour y remédier, je vous propose de le rectifier pour que les dérogations prévues par l’article 2 puissent valoir pour tous les projets d’implantation industrielle sur des friches, qu’il s’agisse d’industrie verte ou non.

Je propose ainsi de rectifier l’amendement n° 242 pour insérer, à l’alinéa 51, après le mot : « environnementale », les mots : « et pour tous les projets situés sur des espaces en friche commerciale, industrielle ou militaire, au sens de l’article L. 111-26 du code de l’urbanisme, ».

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire. Nous sommes d’accord sur l’importance de reconquérir les friches industrielles, d’autant plus qu’elles représentent une source de foncier disponible dans le cadre de la mise en œuvre du ZAN – mais ne rouvrons pas le débat sur ce point.

L’amendement n° 242 porte sur l’alinéa 51. Celui-ci est ainsi rédigé : « Le présent article s’applique aux demandes d’autorisation environnementale déposées à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard un an après la publication de la présente loi. » Cela signifie que l’article 2 s’applique à l’ensemble des projets. Il est donc superfétatoire de préciser qu’il concerne les friches. Tout projet d’implantation sur une friche bénéficiera de la nouvelle procédure, peu importe la nature de l’industrie. (Mme Sophie Primas acquiesce.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Je suis, moi aussi, très sensible à vos arguments, madame Cukierman. Nous devons « mettre le paquet » pour réindustrialiser les vieux départements industriels. Le changement de mentalité auquel j’appelais dans mon intervention en discussion générale a déjà eu lieu dans ces territoires. J’y insiste, nous sommes très attachés à la revitalisation des friches, mais votre proposition n’est pas la meilleure manière d’y arriver.

Madame Primas, le fonds friches fait partie du fonds vert, mais les fonds consacrés aux friches doivent rester destinés à la revitalisation de celles-ci.

La Banque des territoires a pour mission de mettre en valeur le foncier, en lien avec les collectivités territoriales. Elle souhaite consacrer 1 milliard d’euros à la revitalisation des friches. Votre priorité, madame la sénatrice, est donc aussi la nôtre. Simplement, ces amendements ne sont pas la meilleure manière pour atteindre l’objectif.

Quant à la rectification proposée par Mme Primas, elle est déjà satisfaite par la rédaction de l’article 2. Restons-en à la rédaction initiale. Il est important de tout faire pour revitaliser les friches. Je note d’ailleurs que, avec la mise en œuvre du fameux ZAN, elles auront plus de valeur que jamais aux yeux des porteurs de projets.

Mme Cécile Cukierman. Je retire mes amendements, monsieur le président !

M. le président. Les amendements nos 242 et 241 sont retirés.

La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote sur l’article.

M. Daniel Salmon. Mon groupe votera contre cet article.

La procédure d’instruction d’une demande d’autorisation environnementale en vigueur actuellement obéit à une certaine logique et n’est pas le fruit du hasard : l’instruction administrative précède la consultation du public, de telle sorte que ce dernier se prononce de manière éclairée. Si l’on adopte la « parallélisation » de ces phases, le public sera consulté alors que l’instruction sera en cours. C’est un problème.

En outre, faute d’une définition précise de la notion d’« industrie verte », le champ de l’article est beaucoup trop large, puisqu’il inclut tous les projets industriels, verts ou non. C’est donc contraire à l’objet du texte.

Quant à la durée des procédures, elle peut résulter des contentieux, évidemment, mais elle est aussi due souvent au manque de moyens des services de l’État pour procéder à l’instruction des dossiers, mais nous reviendrons sur ce point lors de l’examen du projet de loi de finances…

M. le président. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.)

PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny

vice-président

Mme le président. La séance est reprise.

Dans la discussion du texte de la commission, nous sommes parvenus à l’article 2 bis.

Article 2 (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'industrie verte
Article additionnel après l'article 2 bis - Amendement n° 357 rectifié

Article 2 bis (nouveau)

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° L’article L. 181-9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les projets d’installations de production d’énergies renouvelables, au sens de l’article L. 211-2 du code de l’énergie, et dans la stricte limite des zones d’accélération pour l’implantation d’installations terrestres de production d’énergies renouvelables prévues à l’article L. 141-5-3 du même code, la durée maximale d’instruction de la demande d’autorisation environnementale est de douze mois à compter de la date d’accusé de réception du dossier. » ;

2° Après le deuxième alinéa de l’article L. 181-14, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les projets d’installations de production d’énergies renouvelables situées en zones d’accélération au sens de l’article L. 141-5-3 du code de l’énergie, la durée maximale de l’instruction de la demande de renouvellement est de six mois à compter de la date d’accusé de réception du dossier. »

Mme le président. L’amendement n° 305, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

date

Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

de dépôt du dossier complet et régulier. Elle peut être prorogée de six mois sur décision motivée de l’autorité compétente. » ;

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Cet amendement vise à rétablir la philosophie du texte initial. L’article 2 bis, qui a été introduit en commission, apporte des précisions sur les délais d’instruction des dossiers d’autorisation environnementale pour les énergies renouvelables.

Cette question relève du domaine réglementaire et nous préférerions conserver cet état du droit.

Néanmoins, si vous souhaitez que le dispositif figure dans la loi, il nous semble essentiel que le délai maximal que vous fixez aux procédures commence non pas à partir du moment où le dossier est déposé, mais à partir du moment où le dossier est complet. Les dossiers incomplets donnent parfois lieu à des allers-retours avec les porteurs de projet, occasionnant des retards qui ne sont pas imputables à l’administration.

De plus, puisque nous « transposons », si je puis dire, par anticipation la future directive sur les énergies renouvelables, dite RED III (Renewable Energy Directive), il nous semble essentiel de conserver, par sécurité, une flexibilité de six mois supplémentaires concernant le délai maximal d’instruction.

Sinon, la rédaction de cet article pourrait s’avérer contre-productive. Le silence valant rejet, si la procédure n’est pas terminée au terme du délai de six mois, le projet sera considéré comme rejeté, sachant qu’un délai supplémentaire ne peut être octroyé, conformément à la directive RED III.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Cet amendement a deux objectifs.

D’une part, il vise à introduire une dérogation au délai limite d’instruction des demandes d’autorisation pour les projets d’énergie renouvelable en zone d’accélération, en prévoyant qu’une prorogation de six mois pourrait être octroyée par une décision motivée de l’autorité compétente. Certes, la proposition de directive RED III prévoit, dans la version qui a fait l’objet d’un accord, une telle dérogation, mais sous des conditions beaucoup plus strictes, uniquement en cas de circonstances exceptionnelles. L’amendement ne peut donc pas être adopté en l’état.

D’autre part, il fixe le début du délai, non pas à la date d’accusé de réception du dossier, mais à la date de dépôt du dossier complet, conformément en cela à la dernière version de la directive RED III.

La commission pourrait accepter de modifier le fait générateur du délai de douze mois, mais la prorogation dérogatoire de six mois proposée par le Gouvernement ne peut pas être acceptée : elle viderait la mesure de son intérêt et serait, après l’adoption de la directive, contraire au droit de l’Union européenne.

C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Je vous propose de rectifier l’amendement pour prévoir que la prorogation de six mois ne peut être octroyée qu’en cas de circonstances exceptionnelles.

Mme le président. Je suis donc saisie d’un amendement n° 305 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

date

Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

de dépôt du dossier complet et régulier. En cas de circonstances exceptionnelles, elle peut être prorogée de six mois sur décision motivée de l’autorité compétente.» ;

Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Naturellement la commission n’a pas pu se prononcer sur cette rectification, mais, à titre personnel, j’émets un avis favorable, car la modification proposée va dans le sens de l’avis que j’ai présenté.

Mme le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-François Longeot, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Je souscris aux propos du rapporteur. La commission n’a pas pu se prononcer et il ne semble pas nécessaire de la réunir pour examiner cette rectification, mais j’émets également un avis favorable.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 305 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme le président. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 306, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 4 et 5

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Cet amendement est complémentaire du précédent. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a plafonné à six mois le délai pour l’instruction des demandes de renouvellement des parcs éoliens en zone d’accélération.

Si la demande de renouvellement n’est assortie d’aucune modification du parc, la procédure est très rapide et ne dure que quelques semaines. Il n’est en effet pas nécessaire de procéder à une enquête publique. Dans ce cas, la rédaction actuelle de l’article nous convient. Il en va de même en cas de modifications mineures.

Toutefois, un problème se pose lorsqu’une modification majeure du projet est prévue, par exemple une augmentation du nombre d’éoliennes en mer. Il faut alors reprendre la procédure complète et, dans ce cas, tenir le délai de six mois peut constituer un défi de taille.

Cet amendement vise donc à supprimer les alinéas 4 et 5, même si je suis prêt, fort de l’expérience acquise précédemment, à envisager une rectification pour éviter une suppression sèche de ces alinéas.