Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Excellent !
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Baptiste Blanc. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi relatif à l’industrie verte, déposé en première lecture au Sénat, vise à réindustrialiser la France tout en favorisant la transition écologique.
Si son objectif est assurément ambitieux et honorable, les moyens d’y parvenir posent question, singulièrement pour ce qui concerne le foncier économique disponible – nous l’avons déjà dit, mais cela vaut la peine de le répéter.
En effet, le foncier est la première aménité que recherchent les industriels. Si nous ne le leur fournissons pas, toutes les autres mesures que nous prendrons pour encourager les implantations d’usine en France seront vaines. Je rappelle que, selon une enquête menée l’an dernier, deux tiers des intercommunalités ont refusé des projets d’implantation économique ou subi des déménagements d’entreprise par manque de foncier économique.
L’urgence, pour atteindre les objectifs de ce projet de loi, est de desserrer la contrainte sur le foncier, c’est-à-dire d’exclure de l’objectif du zéro artificialisation nette les implantations industrielles liées à la transition écologique. De surcroît, l’exclusion du ZAN ne devrait pas, à mon sens, se limiter aux industries de l’éolien, des pompes à chaleur, des batteries électriques, de l’hydrogène vert et du photovoltaïque ; elle devrait inclure l’ensemble des projets industriels qui favorisent la transition écologique.
Monsieur le ministre Le Maire, vous avez exprimé, lors de votre audition au Sénat le 31 mai dernier, votre souhait, à titre personnel, d’exempter les grands projets industriels de l’objectif du ZAN, en affirmant laisser « à la sagesse des parlementaires le soin de savoir si on exempte du ZAN uniquement les projets portant sur l’industrie verte répondant à la définition des actes européens […] ou si nous élargissons à d’autres projets industriels dont nous estimons qu’ils favorisent aussi la transition écologique ».
Dans sa sagesse, la commission des affaires économiques et son rapporteur Laurent Somon – dont je salue le travail – ont tranché : le nouvel article 9 bis exclut l’ensemble des installations industrielles « concourant à la transition écologique ou à la souveraineté nationale » du décompte du ZAN – qu’il s’agisse du décompte à l’échelon local, régional ou national.
Néanmoins, force est de constater la grande incohérence dont fait preuve le Gouvernement sur ce sujet. Lors de l’examen au Sénat en mars dernier de la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de zéro artificialisation nette au cœur des territoires, votre collègue Christophe Béchu a déclaré que l’enveloppe des projets d’intérêt national ne devrait pas être soustraite à l’enveloppe globale des droits à artificialiser.
Or une autre vision semble s’exprimer à l’Assemblée nationale, où la commission des affaires économiques a adopté la semaine dernière un amendement à notre proposition de loi visant à mutualiser entre régions l’artificialisation des grands projets industriels, au lieu de l’exclure totalement du décompte.
Pis encore, le texte issu de la commission prévoit que ce seront non pas tous les projets industriels d’intérêt national qui seront exclus du décompte régional du ZAN, mais seulement ceux d’entre eux qui seront désignés par décret – soit de nouvelles fourches caudines…
Selon cette rédaction, la conférence du ZAN n’aurait le droit de se prononcer que sur une exemption du ZAN des quelques projets d’intérêt national majeur décidés uniquement par le Gouvernement. Ce n’est pas ce que nous souhaitons dans cet hémicycle.
C’est pourquoi, en tant que rapporteur de la commission spéciale sur la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs du zéro artificialisation nette au cœur des territoires, dont vous avez salué le travail – ce dont je vous remercie –, je soutiens les modifications qui ont été introduites à l’article 9 sur le mode de désignation des projets d’intérêt national majeur pour permettre aux collectivités de prendre l’initiative.
Ces modifications sont cohérentes avec le texte voté par le Sénat, qui prévoyait que les collectivités locales, sous la houlette des régions, puissent se prononcer sur les grands projets industriels. C’est le seul moyen pour que celles-ci aient leur mot à dire sur les projets qui profiteront de l’exemption de ZAN, qui les concerne tout de même au premier chef !
La commission n’a donc fait que donner aux collectivités les garanties que le ministre Béchu s’était engagé, dans cet hémicycle, à leur donner sur les projets industriels.
Pour conclure, j’insisterai sur un point : lever la contrainte du ZAN vise certes à favoriser la reprise économique, à créer de l’emploi, etc., mais aussi à nous préparer à donner une réponse à la hauteur de l’enjeu au défi environnemental. C’est non pas la décroissance qui sauvera l’environnement, mais la maîtrise des technologies vertes – le tout par les territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. Monsieur le président, je ne prolongerai pas inutilement cette discussion générale. Après avoir écouté attentivement, avec le ministre Roland Lescure, l’ensemble des interventions, je résumerai ces dernières de la sorte : « Allez plus loin, mesdames et messieurs du Gouvernement ! »
Je propose donc que nous entrions d’emblée dans le vif du sujet pour déterminer comment nous pouvons, sur la base des propositions des sénatrices et des sénateurs, aller plus loin ensemble sur ce texte relatif à l’industrie verte.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi relatif à l’industrie verte
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle qu’a été ordonné précédemment l’examen en priorité, au début de la discussion des articles, de l’ensemble du titre II, c’est-à-dire de l’amendement portant sur l’intitulé du titre II, des articles 12 à 14, ainsi que des amendements portant article additionnel qui s’y rapportent.
TITRE II (priorité)
ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX DE LA COMMANDE PUBLIQUE
M. le président. L’amendement n° 126 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin, est ainsi libellé :
Compléter cet intitulé par les mots :
et des procédures de mise en concurrence
La parole est à M. Éric Gold.
M. Éric Gold. Cet amendement de Nathalie Delattre est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Jean-Yves Roux, rapporteur pour avis. Les procédures de mise en concurrence sont sémantiquement incluses dans la notion de commande publique.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 126 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 12 (priorité)
Le I de l’article 12 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « présente loi », sont insérés les mots : « pour les mesures mentionnées aux 1°, 2° et 3° du présent I, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à l’industrie verte pour celles mentionnées au 3° bis du présent I et dans un délai de quatre mois à compter de la promulgation de ladite loi pour celles mentionnées au 4° du présent I » ;
2° Après le 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis D’introduire dans le code de la commande publique un dispositif d’exclusion à l’appréciation de l’acheteur des procédures de passation des marchés publics, dont les marchés de défense et de sécurité, et des contrats de concession pour les opérateurs économiques qui ne satisfont pas aux obligations de publication d’informations résultant des mesures de transposition mentionnées au 1° du présent I ; »
3° (Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 39 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Guerriau, Mme Mélot et MM. A. Marc, Lagourgue, Grand, Chasseing, Malhuret, Decool et Menonville, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce dispositif s’applique aux soumissionnaires ainsi qu’à leurs fournisseurs intervenant dans la réalisation du marché ;
La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement vise à étendre le champ d’application du dispositif aux fournisseurs qui interviennent dans la réalisation des marchés, pour encourager les soumissionnaires à sélectionner des fournisseurs qui aient également satisfait aux obligations mentionnées à l’article 12.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Jean-Yves Roux, rapporteur pour avis. Ma chère collègue, comme en commission la semaine dernière, l’avis est défavorable, pour deux raisons principales.
D’une part, l’adoption de cet amendement créerait une distorsion par rapport aux autres motifs d’exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession, dans la mesure où ceux-ci ne s’appliquent pas, en l’état, aux fournisseurs.
D’autre part, les auditions ont démontré que les acheteurs publics avaient déjà beaucoup de difficulté à s’approprier la faculté que leur ouvre le code de la commande publique d’exclure des candidats. Les contrôles sont succincts et la plupart des acheteurs publics n’ont pas les ressources suffisantes pour procéder à des vérifications en profondeur.
Le contrôle des fournisseurs risquerait donc, au mieux, de ne pas être fait, au pire, de constituer une charge administrative très lourde pour les acheteurs publics.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Vanina Paoli-Gagin. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 39 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 12.
(L’article 12 est adopté.)
Après l’article 12 (priorité)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 167 rectifié bis est présenté par Mme Gosselin, MM. Anglars, Burgoa, Piednoir et Brisson, Mmes Belrhiti, Dumont et Di Folco, MM. Mandelli, Cambon, Tabarot, Belin et Savary, Mmes Garriaud-Maylam, Del Fabro et Bellurot et MM. Perrin, Rietmann, Lefèvre, Bouloux, Charon, Bouchet, Mouiller, Bacci, Gremillet et Rapin.
L’amendement n° 182 rectifié ter est présenté par Mme Havet, M. Buis, Mme Schillinger, M. Rohfritsch, Mmes Duranton et Phinera-Horth et M. Mohamed Soilihi.
L’amendement n° 373 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.
L’amendement n° 388 rectifié est présenté par M. Cardon.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2112-4 du code de la commande publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions et les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Béatrice Gosselin, pour présenter l’amendement n° 167 rectifié bis.
Mme Béatrice Gosselin. L’article L. 2112-4 du code de la commande publique a introduit la préférence européenne dans les achats afin, notamment, de prendre en compte les considérations environnementales ou sociales ou d’assurer la sécurité des informations et des approvisionnements.
Cette disposition, qui pourrait constituer un puissant levier au service de la réindustrialisation verte et de la souveraineté économique de l’Europe, est très peu utilisée par les acheteurs, à qui n’ont jamais été clairement précisés les cas dans lesquels ils pourraient concrètement y recourir.
Seul cas connu, la direction générale de l’offre de soins (DGOS) en a recommandé l’usage pour l’achat d’équipements de protection individuels en décembre 2021.
Cet amendement vise donc à ce que les services de l’État puissent préciser aux acheteurs les conditions d’application de cet article, et notamment indiquer si ces dispositions peuvent s’appliquer à d’autres secteurs, par exemple en matière de production d’énergie renouvelable comme les éoliennes et les panneaux photovoltaïques.
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 182 rectifié ter.
Mme Nadège Havet. Comme l’a dit Mme Gosselin, cet amendement vise à ce que le périmètre d’application de l’article L. 2112-4 du code de la commande publique soit précisé.
M. le président. La parole est à M. Éric Gold, pour présenter l’amendement n° 373 rectifié bis.
M. Éric Gold. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour présenter l’amendement n° 388 rectifié.
M. Rémi Cardon. Cet amendement est identique aux trois précédents et vise à appuyer, pour lui donner du sens, la notion de « souveraineté économique » – cela ne doit pas être simplement le titre d’un ministre…
C’est la raison pour laquelle il faut clarifier les choses sur la commande publique pour que la souveraineté économique européenne soit indirectement bénéfique pour la souveraineté économique de la France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Jean-Yves Roux, rapporteur pour avis. Les auteurs de ces amendements identiques pointent une problématique récurrente au sein du droit de la commande publique, à savoir l’inapplication de nombreuses dispositions du code de la commande publique, lesquelles relèvent davantage d’une volonté d’affichage que d’un souci réel d’opérationnalité et d’appropriation par les acheteurs publics.
À ce titre, tant en commission la semaine dernière que lors de la discussion générale voilà quelques instants, j’ai exprimé mes doutes sur l’absence d’effectivité des motifs d’exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession.
L’objet de ces amendements identiques me paraît donc intéressant. Il nous lie cependant à l’avis du Gouvernement, puisqu’il renvoie directement à un décret qui pourrait théoriquement être vidé de sa substance. M. le ministre peut-il nous préciser, le cas échéant, s’il compte se saisir de ce décret pour enfin inciter les acheteurs publics à utiliser cette faculté offerte par le code de la commande publique ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. Je confirme que le Gouvernement compte bien utiliser cette opportunité. Je l’ai d’ailleurs précisé au cours de la discussion générale.
C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission des lois ?
M. Jean-Yves Roux, rapporteur pour avis. La commission des lois suit l’avis du Gouvernement.
M. le président. Madame Gosselin, l’amendement n° 167 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Béatrice Gosselin. Non, après les explications de M. le ministre, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 167 rectifié bis est retiré.
Madame Havet, l’amendement n° 182 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Nadège Havet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 182 rectifié ter est retiré.
Monsieur Gold, l’amendement n° 373 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Éric Gold. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 373 rectifié bis est retiré.
Monsieur Cardon, l’amendement n° 388 rectifié est-il maintenu ?
M. Rémi Cardon. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 331 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2° de l’article L. 2113-11 du code de la commande publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Outre les cas mentionnés aux 1° et 2° du présent article, les entités adjudicatrices peuvent décider de ne pas allotir un marché lorsque la dévolution en lots séparés risque de conduire à une procédure infructueuse. »
La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. Cet amendement vise à prévoir une procédure d’exception au principe d’obligation d’allotissement des marchés dans les appels d’offres pour un certain nombre d’opérateurs publics, en particulier Réseau de transport d’électricité (RTE).
En effet, pour un certain nombre de marchés, par exemple les lignes à haute tension, du fait de la rareté de l’offre, il est plus pratique pour RTE d’émettre un seul lot plutôt que de faire de l’allotissement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Jean-Yves Roux, rapporteur pour avis. Cet amendement et les amendements nos 330 rectifié et 329 rectifié ont tous trois pour objectif commun de déroger à certains grands principes de la commande publique pour les entités adjudicatrices, c’est-à-dire les acheteurs qui exercent une activité d’opérateur de réseau dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux.
L’adoption de l’amendement n° 331 rectifié reviendrait sur le principe d’allotissement lorsque la dévolution en lots séparés par l’entité adjudicatrice risquerait de conduire à une procédure infructueuse.
L’adoption de l’amendement n° 330 rectifié permettrait à ces mêmes autorités adjudicatrices de déroger à la durée de droit commun des accords-cadres.
Enfin, l’adoption de l’amendement n° 329 rectifié permettrait aux autorités adjudicatrices de procéder à des appels d’offres lors desquels la présentation de variantes serait autorisée, ce qui va totalement à l’encontre de l’article L. 2151-1 du code de la commande publique.
Je rappelle que les règles spécifiques aux marchés de réseau ont une raison d’être que le Sénat a toujours défendue, à savoir garantir l’accès des petites et moyennes entreprises aux marchés publics. Les dérogations que souhaite instaurer le Gouvernement auront mécaniquement pour conséquence de favoriser les plus grandes entreprises, qui sont mieux à même de présenter des variantes ou des offres globales lorsque le marché n’est pas alloti.
Nous sommes donc face à deux objectifs qui ont chacun leur légitimité. Par conséquent, sur l’amendement n° 331 rectifié, comme sur les amendements nos 330 rectifié et 329 rectifié, la commission des lois s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
MM. Julien Bargeton et Alain Richard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Cette explication de vote pourrait s’apparenter à un rappel au règlement.
L’amendement n° 331 rectifié, comme les amendements nos 330 rectifié et 329 rectifié, sont intéressants. Toutefois, il est regrettable que nous ne disposions pas d’une étude d’impact et que nous n’ayons pu organiser les auditions qui nous auraient éclairés.
Pour ma part, j’ai du mal à mesurer l’ampleur et l’importance des mesures proposées à l’amendement n° 331 rectifié comme aux deux suivants, alors qu’elles paraissent intéressantes en première analyse.
Il est regrettable de travailler dans de telles conditions. Il aurait fallu que ces dispositions figurent dans le texte initial pour que nous puissions les examiner attentivement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. Je regrette que l’on n’ait pas apporté toutes les précisions au moment voulu – en cela, je partage ce que vient de dire M. le sénateur Montaugé.
Reste que l’enjeu est absolument majeur. S’il n’y a pas de possibilité de dérogation ni sur la durée ni sur le principe d’allotissement, il y a fort à parier que certaines grandes entreprises soumettront leurs projets ailleurs qu’en France. Je pense notamment à la durée maximale de huit ans des accords-cadres : dans la mesure où d’autres pays, par exemple l’Allemagne, peuvent proposer des durées beaucoup plus longues, les fournisseurs de câbles préféreront se tourner vers lesdits pays plutôt que vers la France et nous perdrons le marché.
C’est pour cela que le Gouvernement a prévu des exceptions. Je regrette moi aussi que nous n’ayons pu avoir ce débat lors de la présentation du texte en commission.
Pour le dire simplement, les amendements nos 331 rectifié, 330 rectifié et 329 rectifié sont essentiels pour garantir le raccordement des industries vertes dans des délais rapides.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.
L’amendement n° 330 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La seconde phrase du 1° de l’article L. 2125-1 du code de la commande publique est complétée par les mots : « ou par un risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse dans le cadre de la procédure de passation d’un accord-cadre engagée par une entité adjudicatrice ».
La parole est à M. le ministre.
M. le président. Je rappelle que la commission des lois s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.
Je mets aux voix l’amendement n° 330 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.
L’amendement n° 329 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 2151-1 du code de la commande publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, pour les marchés répondant à un besoin dont la valeur estimée est égale ou supérieure à un seuil fixé par voie réglementaire, les entités adjudicatrices peuvent autoriser les opérateurs économiques à présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus. »
II. – Au deuxième alinéa de l’article L. 2152-7 du code de la commande publique, après les mots : « lot par lot », sont insérés les mots : « sauf lorsque les entités adjudicatrices ont autorisé les opérateurs économiques à présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus en application du deuxième alinéa de l’article L. 2151-1 ».
La parole est à M. le ministre.
M. le président. Je rappelle que la commission des lois s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.
Je mets aux voix l’amendement n° 329 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.
L’amendement n° 42 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Guerriau et A. Marc, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Grand, Chasseing, Wattebled, Malhuret, Decool et Menonville, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2172-5 du code de la commande publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les montants applicables, définis par voie réglementaire, pour les travaux, fournitures ou services qui intègrent des procédés industriels sont au moins trois fois supérieurs à ceux applicables travaux, fournitures ou services qui n’en intègrent pas. »
La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement tend à reprendre l’une des recommandations du rapport de la mission sénatoriale d’information intitulé Transformer l’essai de l’innovation : un impératif pour réindustrialiser la France.
Il s’agit ainsi de multiplier par trois le plafond du régime de l’achat innovant pour toute commande publique, qui est aujourd’hui fixé à 100 000 euros et qui ne correspond pas du tout aux montants envisageables dans le domaine industriel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Jean-Yves Roux, rapporteur pour avis. La commission des lois a déjà rejeté un amendement à l’objet identique la semaine dernière, dans la mesure où celui-ci pose plusieurs difficultés.
Tout d’abord, son insertion au sein du code de la commande publique n’est pas opportune, puisqu’il est question de compléter un article relatif aux constructions temporaires, ce qui n’a rien à voir avec l’objet de l’amendement. Qui plus est, le chevauchement de deux dispositifs qui ne sont pas liés instaure une ambiguïté quant aux finalités et à l’application de cet article du code de la commande publique.
En outre, la rédaction de cet amendement semble beaucoup trop large, puisque la notion de « procédé industriel » n’est définie nulle part dans le code de la commande publique. Notre collègue souhaite notamment viser les marchés de « fournitures […] qui intègrent des procédés industriels », ce qui, à l’exception peut-être de l’achat de denrées alimentaires, comprend quasiment la totalité des marchés de fournitures !
C’est pourquoi la commission des lois émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. L’idée est bonne, mais le risque juridique est trop élevé.
Le Gouvernement a déjà porté le plafond de 40 000 euros à 100 000 euros, mais j’ai peur qu’en poussant le bouchon un peu plus loin, même si je comprends parfaitement la logique qui prévaut, on ne fragilise ce qui a été obtenu par le relèvement du seuil qui a déjà été opéré.
Je le répète, je partage l’objectif et les orientations de cet amendement et je comprends parfaitement la volonté qui le sous-tend, mais je persiste à croire que le risque juridique serait trop élevé. Les textes européens sont à cet égard explicites : le seuil maximal s’élève à 140 000 euros. En adoptant cet amendement, nous les enfreindrions ouvertement.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.