Mme la présidente. L’amendement n° 38 rectifié, présenté par M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1er
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le I de l’article 10-1 est complété par les mots : « dans le respect du principe d’impartialité qui s’impose aux membres du corps judiciaire » ;
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.
M. Philippe Bonnecarrère. L’indépendance et l’impartialité sont deux sujets importants au cœur de l’œuvre de justice. Ces deux qualités sont consubstantielles à l’action d’un magistrat, cela ne fait l’objet d’aucune interrogation.
La question qui demeure concerne l’action syndicale, que nous ne remettons toutefois en cause ni de près ni de loin. Nous considérons que tous les syndicats, y compris les syndicats de magistrats, jouissent d’une liberté d’expression totale, laquelle est parfaitement conforme au principe d’indépendance des magistrats.
Cependant, la notion d’impartialité, si importante, demeure et nous semble devoir irriguer non seulement les actions personnelles, mais également l’action collective des magistrats. En d’autres termes, nous ne concevons pas que la notion d’impartialité puisse apparaître comme une entrave à la liberté d’expression collective des magistrats.
Impartialité signifie ne pas porter atteinte à un justiciable ou à une catégorie de justiciables. Il me semble que l’on peut très bien porter la voix collective d’une profession, et a fortiori d’une profession aussi importante que celle des magistrats, sans adopter une expression dénotant une forme de partialité.
Par ailleurs, les magistrats ne peuvent pas douter de leur importance dans la société française, non plus que de la crédibilité qui doit être attachée à leur parole. Toute expression collective contenant des éléments de partialité affaiblirait, à mon sens, la portée de cette voix.
C’est dans cet esprit que nous présentons cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement rappelle utilement que le droit syndical des magistrats doit être compatible avec l’impartialité inhérente aux devoirs tirés de leur état.
Il est vrai que, comme nous l’avons constaté à la lumière d’événements récents, l’articulation entre l’exercice du droit syndical et le maintien de l’impartialité peut être parfois délicate.
L’impartialité des magistrats existe, mais les incidents récents à Mayotte, par exemple, démontrent qu’il n’est pas inutile d’ancrer ce principe dans la loi. La commission a, de son côté, clarifié la définition de la faute disciplinaire et y a inclus les manquements au principe d’impartialité.
De ce fait, l’association de l’impartialité au droit syndical à l’article 10-1, relatif au droit syndical des magistrats, de l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature permettrait d’en préciser l’étendue exacte.
Je tiens à rappeler, par ailleurs, que la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) protège de manière très claire la liberté d’expression des magistrats syndiqués, dans les cadres législatifs établis.
L’avis de la commission est favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Monsieur le sénateur Bonnecarrère, vous soulevez à l’évidence un sujet d’une importance et d’une difficulté considérables.
L’exercice du droit syndical des magistrats et la liberté d’expression qui en découle doivent être conciliés avec le devoir de réserve, comme le rappelle un arrêt récent de la CEDH. Ce devoir de réserve, établi à l’article 10 du statut, s’impose à tous les magistrats, y compris aux représentants syndicaux.
Je partage votre avis sur le fait que l’exercice du droit syndical, s’il implique une certaine liberté d’expression, ne saurait porter atteinte à l’image d’impartialité de la justice, afin de maintenir la confiance du public dans le système judiciaire.
De la même manière, les modalités d’exercice de ce droit ne doivent pas compromettre l’exigence d’impartialité des magistrats, garantie tant par la Constitution que par l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
La frontière entre l’outrance, parfois critiquable, et la liberté d’expression syndicale est un sujet sensible qui mérite, à mon sens, une réflexion approfondie. C’est précisément pour cette raison que j’ai récemment saisi pour avis le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), avec lequel je travaille.
Je souhaite renforcer encore les liens déjà étroits entre le CSM et la Chancellerie. C’est dans cette perspective que j’ai soulevé la question de la liberté d’expression des magistrats sous ses diverses formes.
Il me semble donc prématuré de modifier le statut des magistrats à cet égard avant d’avoir reçu la réponse du CSM. Je ne souhaite en aucune manière enjamber son autorité alors que j’attends de lui un avis que je sais par avance sage et important.
Nous devons en outre veiller à respecter les normes constitutionnelles et européennes. La CEDH, je l’ai dit, a statué sur cette question le 6 juin dernier, en censurant une décision disciplinaire à l’encontre d’une magistrate pour ses déclarations au nom d’un syndicat de magistrats dans la presse. Pour autant, cet arrêt rappelle également le devoir de réserve. Il s’agit donc de réaffirmer la nécessité d’un juste équilibre.
L’ajout que vous proposez pose une question intéressante, mais quelque peu prématurée. En conséquence, je vous suggère de retirer votre amendement, en attendant l’avis du Conseil supérieur de la magistrature ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ainsi revient en discussion l’exercice du droit syndical des magistrats, voire, bien que je n’aie pas vu d’amendements en ce sens, son interdiction. (M. Philippe Bonnecarrère le nie.) Notre collègue Bonnecarrère souhaite que cette liberté syndicale s’exerce « dans le respect du principe d’impartialité qui s’impose aux membres du corps judiciaire ».
Il connaît, bien sûr, les termes de l’ordonnance de 1958 : « Le droit syndical est garanti aux magistrats qui peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats. […] Pour l’exercice de ce droit, les magistrats sont soumis aux dispositions législatives et réglementaires de droit commun applicables aux fonctionnaires. »
Il est évident, ou peut-être cela a-t-il échappé à certains, que le garde des sceaux a récemment saisi le Conseil supérieur de la magistrature d’une question assez large et plutôt surprenante (M. le garde des sceaux le conteste.), concernant la conception du devoir de réserve, allant jusqu’à inclure les propos des magistrats sur les réseaux sociaux, mais également, de manière plus inattendue, lors des audiences solennelles.
Lorsque l’on est garde des sceaux, ce qui ne m’est jamais arrivé et ne m’arrivera jamais, assister à une audience solennelle durant laquelle un procureur général ou un président de tribunal exprime son opinion sur la politique pénale ou la politique en matière de justice en vigueur peut être un moment peu plaisant. C’est bien de cela que vous avez saisi le CSM, monsieur le garde des sceaux.
Je me réjouis que vous jugiez cette question un peu prématurée, quelles que soient vos raisons, et je forme le vœu que notre collègue retire cet amendement.
Pour autant, je tiens à mettre en garde contre une éventuelle restriction de la liberté d’exercice syndical des magistrats ; on a beaucoup tenté de le faire, j’espère que ce n’est pas la voie que vous souhaitez emprunter.
Mme Éliane Assassi. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.
M. Thani Mohamed Soilihi. Je tiens sincèrement à remercier notre collègue Philippe Bonnecarrère d’avoir lancé cette discussion sur le respect du principe d’impartialité par les membres du corps judiciaire. Comme pour lui, il n’est pas question pour moi de remettre en cause le droit syndical des magistrats, que ce soit en principe ou en pratique.
Je peux comprendre les réserves émises par le garde des sceaux, qui est dans son rôle. Cependant, l’observation de certaines prises de position de magistrats au nom de leur syndicat, puis de décisions prises par la suite par ces mêmes magistrats, peut emporter des conséquences dévastatrices, tant leurs opinions apparaissent rétrospectivement comme des préjugements.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est du complotisme, cela !
M. Thani Mohamed Soilihi. Les décisions de justice sont censées être rendues au nom du peuple français ; lorsque des citoyens ne parviennent pas à en comprendre le sens ou la façon dont elles sont rendues, je vous assure que cela peut engendrer des effets dévastateurs, en particulier dans les territoires éloignés de la métropole.
Je demande donc à notre collègue de maintenir son amendement ; je le voterai pour asseoir ce débat, quel que soit le sort qui lui sera réservé par la suite.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je souhaite insister sur ce qu’a développé Marie-Pierre de La Gontrie. Naturellement, vous pourrez toujours trouver quelques exemples pour soutenir la thèse que vous venez d’avancer, messieurs Bonnecarrère et Mohamed Soilihi, mais on pourrait trouver de tels exemples dans de nombreuses professions et pour diverses fonctions.
La vraie question, telle qu’elle a été posée par Mme de La Gontrie, est de savoir si nous remettons en cause le droit des magistrats à se syndiquer.
Il me semble que la sagesse consisterait au moins à retirer l’amendement, comme l’a demandé le garde des sceaux, de sorte que nous anticipions – il y va de notre responsabilité – les conséquences de son adoption éventuelle. Nous ne sommes pas supposés réagir à un phénomène qui s’est produit il y a quinze jours, trois semaines ou un mois.
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Je souhaite abonder dans le sens de Mme de La Gontrie et de M. Benarroche, tout en tenant compte des propos de M. le garde des sceaux.
Attention : j’ai bien compris ce qui sous-tend cet amendement de Philippe Bonnecarrère, mais je crains que nous n’ouvrions là une brèche béante, susceptible de neutraliser, en quelque sorte, l’activité syndicale.
Aujourd’hui, les magistrats sont visés, mais qui le sera demain ? L’activité syndicale est un droit fondamental, respectons-le.
Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Si cette question est complexe, aucun sujet n’est tabou et nous devons examiner les choses avec calme et hauteur.
Je comprends bien, madame de La Gontrie, que vous pensez ne jamais devenir garde des sceaux. Méfiez-vous, j’ai dit cela, moi aussi !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pire : vous avez dit que vous ne le souhaitiez pas !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Peut-être le souhaitez-vous vous-même, je l’ignore. Méfiez-vous de ces postures, car on peut ensuite être pris au piège !
J’ai entre les mains le Recueil des obligations déontologiques des magistrats. On peut y lire : « Dans son expression publique, le magistrat fait preuve de mesure afin de ne pas compromettre l’image d’impartialité de la justice, indispensable à la confiance du public. » Tels sont les mots que j’ai repris dans ma réponse précédente.
Le premier point du chapitre VIII indique que « cette exigence s’impose quel que soit le moyen de communication utilisé », y compris, madame la sénatrice, les réseaux sociaux.
Le deuxième point est le suivant : « Toute manifestation d’hostilité au principe et à la forme du Gouvernement de la République est interdite aux magistrats, de même que toute démonstration de nature politique incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions. »
Puisque vous avez mentionné la lettre que j’ai adressée le 2 mai 2023 au CSM, il me semble important de vous en communiquer la teneur.
Dans le premier paragraphe, je rappelle que nous sommes en train de travailler sur la suite des États généraux ; j’évoque, dans le deuxième, un troisième grade et la rénovation des modes d’accès à la magistrature.
Ensuite, j’aborde le sujet qui nous intéresse à présent :
« En pleine concertation avec le Conseil, je souhaite continuer à approfondir la réflexion sur le statut de la magistrature, avec l’objectif de toujours mieux préserver l’image de la justice aux yeux de nos concitoyens.
« C’est pourquoi je sollicite l’avis du Conseil sur les deux points suivants.
« Ces dernières années, les réseaux sociaux sont devenus un vecteur important – si ce n’est le vecteur principal – d’information de nos concitoyens.
« Les chefs de juridiction et de cours, notamment les procureurs de la République, ont massivement investi ces plateformes afin de toucher les Français et de leur faire découvrir le quotidien des juridictions ou de communiquer sur les affaires en cours.
« De plus, de nombreux magistrats ont créé des comptes sur divers réseaux sociaux, anonymes ou non, et s’en servent pour commenter l’actualité judiciaire, juridique et politique, ou plus prosaïquement, pour partager des événements de leur vie privée.
« Cet usage des réseaux sociaux et l’importance croissante qu’ils ont prise dans le débat démocratique bousculent le traditionnel équilibre entre la liberté d’expression reconnue à chaque magistrat et l’obligation déontologique de réserve et de discrétion.
« De manière plus générale, les formes de plus en plus diverses que revêt l’expression publique, individuelle ou collective, de magistrats à l’occasion d’audiences solennelles ou encore par le biais de l’expression syndicale, peuvent parfois, pour l’opinion publique, interroger le respect des obligations de réserve et de neutralité, ainsi que des règles déontologiques, et donc nuire à l’image de la justice de manière générale.
« La conciliation entre les libertés individuelles et collectives des magistrats et le respect de leurs obligations déontologiques m’amènent également à solliciter votre avis sur la conformité avec le statut de l’exercice du droit de grève. […] »
Tels sont les termes dans lesquels j’ai saisi le Conseil supérieur de la magistrature. J’attends donc avec gourmandise son avis, car celui-ci m’est indispensable.
Mme la présidente. L’amendement n° 74, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 15
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
« 3° Le troisième :
« a) Aux personnes remplissant la condition prévue au 1° et justifiant de quatre années au moins d’activité professionnelle dans le domaine juridique, administratif, économique ou social, les qualifiant particulièrement pour exercer les fonctions judiciaires ;
« b) Aux docteurs en droit qui possèdent, outre les diplômes requis pour le doctorat, un autre diplôme d’études supérieures.
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement vise à créer un accès à la magistrature dédié aux docteurs en droit.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 76, présenté par MM. Benarroche, Dossus, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Amendement n° 74, alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« b) Aux titulaires du diplôme national de doctorat en droit. Ceux-ci sont dispensés des épreuves d’admissibilité.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Ce sous-amendement vise à favoriser une meilleure reconnaissance du diplôme national de doctorat et des compétences associées pour ce qui concerne l’accès des docteurs à la magistrature, dans le même esprit que l’article 78 de la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, qui prévoit plusieurs dispositions relatives à l’insertion professionnelle des docteurs, visant notamment l’amélioration de l’accès de ces derniers à la fonction publique.
La rédaction actuelle, se référant au « grade », me paraît être source de confusion entre le diplôme du doctorat lui-même, le « titre » – partagé par les titulaires de plusieurs diplômes – et le « grade » – également susceptible d’être partagé par les titulaires de plusieurs diplômes de statuts différents.
Cette confusion pourrait aboutir à une moindre valorisation du diplôme, autrement dit, au résultat inverse de celui qui est recherché par le Gouvernement au travers de l’amendement n° 74, que je soutiens.
Dans son rapport intitulé Rendre justice aux citoyens, publié en avril 2022, le comité des États généraux de la justice, piloté par Jean-Marc Sauvé, regrettait « l’absence d’un dispositif de recrutement adapté à la recherche de profils de haut niveau », ainsi que « la lenteur et l’incohérence du processus de recrutement latéral ». Il indiquait également que « ce type de recrutement pourrait être un moyen de favoriser l’intégration de profils très spécialisés, dotés de solides connaissances dans certaines branches du droit, pour compenser les déficits relevés en juridiction ».
La rédaction proposée par ce sous-amendement indique que ce sont bien les titulaires du diplôme national de doctorat qu’il s’agit de valoriser pour l’accès à la magistrature.
Elle prévoit en outre un parcours adapté à leur niveau de formation, en les dispensant des épreuves d’admissibilité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Si l’article 1er de ce projet de loi organique prévoit une modernisation des voies d’accès au concours de la magistrature, le cas des docteurs, notamment en droit, a fait l’objet d’un oubli.
Lors des travaux de la commission, nous avons cherché des solutions pour remédier à cet oubli. Par l’amendement n° 76, le Gouvernement propose une telle solution, qui est du reste complémentaire de celle que je présenterai ultérieurement au nom de la commission.
Le recrutement des magistrats s’effectue actuellement soit par la voie de l’auditorat, qui concerne des étudiants présentant le concours externe ou des fonctionnaires présentant le concours interne, avec une formation de 31 mois à la clé, soit par la voie du troisième concours.
Par cet amendement, auquel la commission est favorable, le Gouvernement souhaite permettre aux docteurs titulaires d’un autre diplôme d’études supérieures que leur doctorat de passer ce troisième concours.
Par le sous-amendement n° 76, M. Benarroche propose en outre de dispenser les docteurs en droit d’épreuves d’admissibilité à ce troisième concours.
La création d’une voie d’accès spécifique pour les docteurs en droit se heurtant à l’objectif de simplification recherché, l’avis est défavorable sur ce sous-amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. L’avis est défavorable, car je souhaite maintenir mon amendement dans la rédaction que je propose.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 76.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 7 est présenté par Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Sueur, Bourgi, Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 47 est présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 17
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le nombre des auditeurs recrutés au titre des 2° et 3° du présent article ne peut dépasser la moitié des places offertes aux concours prévus par le présent article pour le recrutement des auditeurs de justice de la même promotion. » ;
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 7.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cet amendement vise à garantir que la part de places offertes au titre du premier concours, dit « étudiant », représente au moins la moitié du total des places offertes pour le recrutement des auditeurs de justice.
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 47.
Mme Éliane Assassi. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Mes chères collègues, vous souhaitez que le nombre d’auditeurs recrutés au titre des deuxième et troisième concours ne puisse dépasser la moitié des places offertes au titre des trois concours permettant d’accéder à l’auditorat. En d’autres termes, vous souhaitez que le nombre de recrutements ouverts au titre du concours étudiant représente au moins la moitié des recrutements.
En premier lieu, la crainte qui sous-tend ces amendements identiques paraît disproportionnée. En effet, le ratio d’un tiers pour le recrutement au titre du troisième concours est issu de l’ancien ratio des intégrations sur titre : il se justifie par la suppression de cette voie d’accès, dont les candidats devraient naturellement se déverser vers le concours professionnel.
Le vivier de candidats n’ayant pas vocation à connaître une évolution massive, les ratios de recrutement entre les étudiants, fonctionnaires et professionnels devraient en réalité rester identiques.
En second lieu, il convient de ne pas rigidifier à l’excès la structure du recrutement.
Je suis au surplus favorable à une plus grande ouverture du corps judiciaire sur le monde professionnel.
Pour l’ensemble de ces raisons, l’avis est défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 et 47.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 53, présenté par M. Ouzoulias, Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Je souhaite revenir sur le cas des docteurs en droit.
Depuis 1958, une passerelle permettait à ces derniers de devenir auditeur de justice, et pour ceux qui avaient trois ans d’expérience professionnelle, juriste assistant. Cette passerelle était très importante, car elle donnait de la valeur au doctorat en droit tout en permettant aux docteurs d’accéder aux professions d’auditeur de justice et de juriste assistant.
La création de la troisième voie ne remplace pas cette passerelle, que vous supprimez, monsieur le garde des sceaux, et je crains qu’il n’en résulte une dévalorisation du doctorat en droit.
Lors de l’examen de la loi du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur, nous avions unanimement déploré, mes chers collègues, la faible attractivité du doctorat en France, qui se traduit notamment par la modeste représentation des docteurs dans l’administration et dans les services publics, au sein desquels ces derniers sont beaucoup plus nombreux en Allemagne.
Or je crains que la suppression de cette passerelle n’emporte une perte d’attractivité du doctorat en droit. C’est en tout cas ce que craignent les professeurs.
En tout état de cause, cette suppression est contradictoire avec la politique de revalorisation du diplôme de docteur que mène par ailleurs le Gouvernement, monsieur le garde des sceaux.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 6 rectifié est présenté par Mme Loisier, MM. Levi, Folliot et Le Nay, Mme Gatel, MM. Canévet, Louault et Détraigne, Mmes Guidez, Férat, Billon et Devésa et MM. P. Martin et Moga.
L’amendement n° 36 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 20
Rédiger ainsi cet alinéa :
7° L’article 18-2 est abrogé ;
L’amendement n° 6 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 36.
M. Guy Benarroche. Le présent amendement a pour objet de réintroduire la procédure prévue à l’article 18-1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 précitée, dite « procédure 18-1 », qui permet aux docteurs en droit d’accéder à une formation longue, de 31 mois, par le biais d’une nomination directe en qualité d’auditeur de justice.
Si cette réforme est adoptée sans modification, ces personnes devront présenter un concours, soit le concours professionnel à l’issue duquel seule une formation de courte durée leur sera dispensée, soit le troisième concours, qui est soumis à un quota.
Sans la voie d’accès permise par la procédure 18-1, la richesse des promotions sera donc potentiellement réduite.
En outre, les candidats qui le souhaitent ne pourront plus bénéficier d’une formation longue, puisque la seule formation qui leur sera proposée sera de courte durée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ces deux amendements tendent à restaurer la voie d’intégration directe à l’ancien second grade, notamment pour permettre aux docteurs d’en bénéficier.
La commission est favorable à l’unification des voies d’accès telle que proposée dans le texte. Comme cela a été évoqué, si celle-ci ne permet pas l’intégration directe, elle ouvre d’autres voies.
En outre, je présenterai dans un instant, au nom de la commission, tout comme M. Benarroche, un amendement visant à ouvrir aux docteurs la possibilité de passer le concours professionnel, dont les lauréats se voient dispenser une formation de dix-huit mois.
Étant défavorable à la réintégration directe, je suis défavorable à ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 59 rectifié bis n’est pas soutenu.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 44 est présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.
L’amendement n° 77 est présenté par Mmes Canayer et Vérien, au nom de la commission.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 34
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …°Docteurs en droit ayant exercé des fonctions d’enseignement ou de recherche dans un domaine juridique, définies par décret en Conseil d’État dans un établissement public d’enseignement supérieur, pendant cinq ans après l’obtention d’un diplôme sanctionnant une formation d’une durée au moins égale à cinq années d’études après le baccalauréat ou justifiant d’une qualification reconnue au moins équivalente dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;
La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 44.